mardi 27 octobre 2009

Les outils de communication tuent

Il est temps de faire la balance entre PIB et PEB, entre Produit Intérieur Brut et Produit Extérieur Brutal.

Un reportage GEO des journalistes Mesouda et Le Gléau, diffusé sur Arte le 24 octobre, nous emmène au Ghana, "notre" poubelle électronique. De très jeunes enfants, des ados, des jeunes et des moins jeunes y retraitent les écrans, les ordinateurs, les télévisions abandonnés par l'Occident. Des bateaux entiers y déversent chaque semaine des montagnes de poubelles, hypocritement baptisées dons caritatifs! Ce qui permet de contourner l'interdiction édictée par la Convention de Bâle. Ces dons ont officiellement pour objectif de réduire la facture numérique et de créer de l'emploi. Les traficants de déchets (et tous ceux qui les soutiennent en fermant les yeux sur le devenir de leur propres déchets... nous, par exemple) jouent les mécènes! En réalité, les fabricants de tous ces appareils considèrent que le recyclage leur coûte trop cher. Et n'est bon que pour les Africains.
Au Ghana, seuls 22% de ces déchets qui ne disent pas leur nom sont réparés, le reste, 78%, part en décharge pour y être retraité.
En fait de retraitement, les ghanéens brûlent les ordinateurs pour en récupérer le cuivre, le laiton, l'aluminium, le zinc. Qui leur sont payés trois à quatre fois moins chers qu'ils ne sont revendus ensuite. Cette incinération de dons caritatifs provoquent des fumées noires, extrêmement toxiques qui survolent ce quartier d'Accra sept jours sur sept, vingt-quatre heures sur vingt-quatre. L'air, l'eau, les sols sont pollués. De récents prélèvements de Greenpeace ont indiqué d'inquiétants taux de plomb, de mercure, de cadmium, de PVC... Les enfants et tous les "retraiteurs", outre qu'ils se blessent en cassant les écrans, souffrent de cancers, de troubles du système nerveux, de problèmes respiratoires. Les poissons meurent. Un journaliste ghanéen qualifie de "criminelle" cette attitude des pays du nord.
Le passage à la télé numérique et aux écrans plats annoncent des montagnes de nouveaux dons caritatifs au Ghana. La fracture numérique, tout le monde s'en tape, la fracture humaine est béante.

Et quand ce ne sont pas les hommes que nous tuons, ce sont les grands singes. Dans "C'est vert et ça marche!"*, le biologiste Jean-Marie Pelt explique qu'au Congo les quelque six cent gorilles de montagne restants sont menacés par l'exploitation forestière et minière, à cause des ressources du pays en tantale, métal nécessaire à la fabrication des téléphones portables. La forêt disparaît et avec elle les gorilles. Leurs cousins du Rwanda et d'Ouganda vivent les mêmes situations. Les mineurs, on s'en doute, sont mal payés et travaillent dans des conditions misérables et dangereuses.

Et si on appliquait - réellement - le coût vérité des déchets? A quoi ressemblerait notre sacro-saint Produit Intérieur de Brutes...?

* Fayard, 2007

lundi 26 octobre 2009

Penser à préparer sa retraite

Après 22 ans de pouvoir, Ben Ali a été réélu président de la république tunisienne pour un cinquième mandat, à l'âge de 73 ans. Mais le score a de quoi l'inquiéter. En poste depuis 1987, il avait été réélu en 1999 avec 99,4% des voix et en 2004 avec 94,4%. Aujourd'hui, il n'en engrange plus que 90%. Si la chute se poursuit à ce rythme, il tombera sous la barre des 50% en 2054. Bref, il est temps pour lui de penser à se recycler. Président de l'EPAD, peut-être? La place est libre. Actuellement.

La bête humaine

Match annulé hier soir entre l'OM et le PSG. Pas complètement en fait, puisque les supporters l'ont joué. A leur manière. Assez particulière et pour le moins violente. En se tapant sur la gueule. Et sur tout le reste. Au JT de la RTBF, un "supporter" explique qu'on les prend pour des cons, lui et ses si sympathiques camarades, en annonçant sept heures avant le match que celui-ci n'aura pas lieu, pour cause d'épidémie de grippe. Il était trop tard, ils étaient déjà en route. Faute de match de foot, ils auraient pu en profiter pour visiter Marseille. Ce qui doit être plus passionnant que de regarder un match de foot, il me semble. Non? Ben, non, ils ont préféré se rentrer dans le lard. Avec une sauvagerie telle qu'on se dit qu'on préférerait tomber nez à nez avec un pitbull qu'avec un supporter de foot. Au JT de FR2, un autre "supporter", courageusement masqué, explique que "ça fait partie du folklore du foot". Bientôt reconnu par l'UNESCO comme patrimoine matériel de l'inhumanité...? Le journaliste de FR2 explique que ces "fights" entre groupes sont de plus en plus courantes, que ceux qui les pratiquent sont des ouvriers, des cadres, des pères de famille... et que ces bastons ont des règles. Comme celle de ne pas frapper un homme à terre. A voir les images, on se dit que ces règles devraient être écrites. Et qu'il manque peut-être un arbitre. Une info encore, ces fights touchent même les clubs amateurs. Amateurs de quoi?
Ah oui, je veux pas cafter, mais je n'y ai vu que des hommes, pas de femmes. Je les ai reconnus, même déguisés en chiens.

C'est ainsi que les hommes vivent. Mais où sont donc leurs baisers qui sont censés me suivre?

P.S.: Pierre Desproges écrivait: "Je vous hais, footballeurs. Quelle brute glacée, quel monstre décérébré de quel ordre noir oserait rire sur des cadavres comme nous le vîmes en vérité, certain soir du Heysel où vos idoles, calamiteux goalistes extatiques, ont exulté de joie folle au milieu de quarante morts piétinés, tout ça parce que la baballe était dans les bois?"
("Desproges en petits morceaux" - les meilleures citations - Points)

jeudi 22 octobre 2009

Un cd pour ne pas déraper

La CIAO - qui lutte depuis plusieurs années contre le projet de "Centre de Glisse" à Maubray - a édité tout récemment un cd, reprenant une chanson ou un texte de chacun des artistes et groupes qui ont participé à son Festival Antidérapant de mai 2008.
Des groupes connus, d'autres qui le seront bientôt, des pros, des amateurs.
Des contes, de l'humour, de la chanson française, du ska, du folk, du rock, de la pop...

Appel d’air: « Face à la mer »,
Jean-Pierre Dusoulier: « Le vieux saule »,
Les Encuicuineuses: « Tout en glissant »,
Viviane Vancoppenolle: « Conte sur l’argent »,
Daniel Barbez: « La chanson solaire »,
Les Misters des Voix Picardes: « L’été princier »,
Bruno Coppens: « La Reine et moi »,
Skarbone 14 (acoustique): « Jus noir »,
Ze Midnight Casseroll’s: Il est trop tard »,
Guillaume Ledent: « Experts »,
Major Deluxe: « My last dream »,
Kermes: « Kerry’s Polka »,
Alka Celtes Airs: « Mc Guérine suite »,
Abuzska: « Bubulle le poisson rouge »
Cova 10: « La politique du fric ».

Deux avantages à vous procurer ce cd:
- découvrir des artistes qui ont des choses à dire et qui savent les dire avec grâce, énergie et/ou humour;
- soutenir l'action de la CIAO.

Le cd est en vente au prix de 13 € dans différents points de vente régionaux :

à Tournai:
Librairie « Decallonne » 18 Grand Place
Librairie « Chantelivre » 27 rue de la Wallonie
"Vins par-ci Vins par-là", 4c rue des Soeurs de la Charité
à Hollain:
Librairie « Apostrophe » 18 rue de Jollain
à Péruwelz:
Librairie « La Belle Jardinière » 43 rue Astrid
à Basècles
Librairie « Point Virgule » 133 rue Grande
à Flines lez Mortagne
Pharmacie Smigielski 3 rue Marceau Tison
chez Jean Claude Brunebarbe 32 rue de Callenelle

ou, pour un envoi en Belgique ou en France,
par virement bancaire : 15,50 € à verser sur le compte 068-2468670-47
(depuis la France :code IBAN : BE22 0682 4686 7047 code BIC : GKCCBEBB )
En mentionnant en communication le nom et l’adresse complète de livraison.

Plus d'infos sur le projet sur www.c-i-a-o.eu

mardi 20 octobre 2009

Francorflop

Dans l'éditorial du Vif du 9 octobre, Christine Laurent estime que la loi de sortie du nucléaire a été "bricolée" en fin de législature, en 2003, "pour permettre à Ecolo de retrouver une nouvelle virginité après sa gestion calamiteuse des dossiers de Francorchamps et de la SNCB". La rédactrice en chef du Vif réécrit-elle l'histoire? Je n'ai pas gardé le souvenir d'une gestion calamiteuse de la SNCB qui a alors enfin connu un refinancement attendu depuis longtemps et où Isabelle Durant et son équipe ont tenté (non sans de fortes résistances internes, il est vrai) de voir clair dans les financements et les budgets et de retrouver le sens des priorités.
Quant au dossier Francorchamps, c'est plutôt d'autres partis et une certaine presse populiste qu'il faudrait accuser de "gestion calamiteuse". Personnellement, j'ai été fier - et je le reste - d'avoir alors été mandataire d'un parti qui est resté cohérent dans ses positions. Qui n'a pas fait un paillasson de son corps pour qu'un nazillon y essuie ses bottes. Qui n'a pas usé du slogan "du pain et des jeux".
Que reste-t-il six ans plus tard du grand prix de Francorchamps, le moteur économique de la Wallonie? Des dettes...
L'intercommunale qui gère le circuit affiche un résultat final pour 2008 en perte de près de 800.000 € (pour ceux qui ne seraient pas encore habitués, cette somme représenterait quelque 32 millions de francs belges), soit 100.000 de plus qu'en 2007. Et le subside régional d'exploitation s'est élevé, en 2008, à 3,366 millions d'euros... Le déficit de l'édition 2009 du grand prix de Formule 1 s'éleverait à environ 5 millions d'euros.
De quel côté est donc la gestion calamiteuse de ce dossier...? *

En page Opinion de la Libre Belgique du 12 octobre, Baudouin Cartuyvels, riverain et journaliste, se demande "qui aura le courage?". Le courage de regarder en face la réalité. Celle d'un circuit et d'un grand prix en déficit. Celle d'activités extrêmement bruyantes (110 dB quand la norme maximale de bruit en Région wallonne est de 55) qui concourrent à l'augmentation du réchauffement climatique (jusqu'à 24.000 tonnes de CO2 rien que pour le GP).
"Francorchamps, aujourd'hui, conclut-il, est au regard de la crise et du réchauffement climatique, une incédence économique, environnementale et sonore."
A quand le Francorchant du cygne? Il y a des signes qui ne trompent pas... Les chiffres d'une région en déficit qui doit se définir des priorités autres que populistes. Mais... qui en aura le courage?

* d'après LLB du 05.09.09 et du 06.10.09

jeudi 15 octobre 2009

Nucléaire? Non merci !!!

Le nucléaire, l'énergie propre. C'est ce qu'essaient de nous faire croire le Gouvernement fédéral belge, le secteur et ses thuriféraires.
La réalité est tout autre. Le documentaire de Laure Noualhat, "Déchets, le cauchemar du nucléaire", diffusé sur Arte ce mardi, en témoigne.

Les déchets sont les grands absents du débat (?) actuel sur l'absolue nécessité de prolonger la durée de vie des centrales sans-quoi-ce-sera-la-fin-du-monde (en-tout-cas-le-nôtre).
Les déchets nucléaires ont une durée de vie de quelques secondes à plusieurs millions d'années.
Plus de 100.000 (cent mille) tonnes de déchets radiocatifs ont été répandus au fond des océans. Les déversements en mer à partir de bateaux sont maintenant interdits? Qu'à cela ne tienne! Ils s'effectuent à présent à partir de conduites kilométriques qui quittent les centrales de Normandie. 400 m3 de déchets radiocatifs sont ainsi déversés chaque jour dans la Manche.
Les rejets normands sont aussi aériens. Et nous n'y échappons pas. Il se diffusent dans l'ensemble de l'Europe. Des chercheurs en ont trouvé des traces, par exemple, sur les toits de l'université de Gand.
"Avec les rejets de La Hague, nous sommes dans les conditions de l'accident permanent", déclare un militant de Greenpeace. Un chercheur de la CRIIRAD explique qu'autour de La Hague, la pollution radioactive est particulièrement importante et inquiétante: les concentrations de krypton s'accumulent et augmentent constamment dans l'atmosphère.

Les déchets radiocatifs sont polluants, on le sait (même si les défenseurs du secteur les oublient systématiquement dans leur argumentation de défense de cette énergie si propre). Ils sont aussi explosifs. Une cuve de déchets a explosé en Russie en 1957, en un lieu toujours inaccessible aujourd'hui. Le plus grave accident nucléaire avant Tchernobyl. Dont personne n'a parlé. Ni le KGB, ni la CIA pourtant informée. Ne lésons pas un secteur en pleine expansion!
La rivière russe Techa (1) est contaminée depuis cinquante ans. Un chercheur de la CRIIRAD y effectue des prélèvements et constate des taux d'irradiation comparables à ceux de Tchernobyl. Les pêcheurs du coin, aujourd'hui encore, y taquinent le goujon...

Les déchets ultimes contiennent 99% d'éléments radioactifs et vont rester dangereux pendant des centaines de milliers d'années. Ceux de Pierrelatte dans le sud de la France sont envoyés à Tomsk en Sibérie, pour y être retraités. Un voyage de 8000 km. Les journalistes ne parviennent pas à obtenir des interviews, ni à savoir ce que deviennent les déchets qui doivent être enrichis. Top secret! Via des images de satellites, ils constatent que les conteneurs d'hexafluorure d'uranium sont entreposés par champs entiers, à ciel ouvert, sans protection. Pour combien de temps? 80%, voire plus, de l'uranium appauvri stocké sur le site de Tomsk sont abandonnés par la France. Qui affirme que la totalité de ses déchets est recyclé.

Un expert américain explique les risques liés au stockage en piscine: en cas de manque d'eau, l'uranium s'enflamme. Voilà qui est rassurant.
Corinne Lepage, ex-ministre française de l'environnement, estime que "le nucléaire n'est pas une filière durable" et dénonce l'aveuglement de ses défenseurs: "le nucléaire va nous sauver, c'est quasiment religieux pour certains", déclare-t-elle. Elle fustige un système opaque, très coûteux, qui n'a toujours pas de solution à son problème de déchets.
Un ingénieur des mines estime que "le nucléaire doit résoudre trois problèmes: la sécurité, la démocratie, les déchets".
Mais qu'on se rassure: la solution est en vue. D'après des chercheurs nucléaires français, elle devrait apparaître sous forme embryonnaire en 2050... Le conditionnel reste de rigueur. Comme il l'est depuis soixante ans.
En attendant, les déchets dangereux le restent pour 200.000 ans, soit 6.000 générations à mettre à l'abri de nos choix actuels. L'astrophysicien Hubert Reeves estime que le grand problème du nucléaire, "c'est qu'il hypothèque l'avenir".

Les trois quarts des Français ne croient pas ce que raconte l'industrie nucléaire. Si les chiffres sont semblables en Belgique, c'est que le Gouvernement fédéral appartient au quatrième quart. Pas de chance!

Aujourd'hui, la presse nous apprend que "GDF Suez et le gouvernement belge sont toujours en désaccord sur une contribution de 750 millions d’euros que la Belgique réclame au secteur de l’électricité en échange de sa « rente nucléaire » pour 2008 et 2009" (1).
Et que " au cours du démantèlement de l’unité de Cadarache destinée à la production du combustible MOX, le Commissariat à l’énergie atomique (CEA) a constaté que les dépôts de plutonium restant dans l’atelier étaient bien supérieurs aux quantités estimées: il y en aurait 39 kg au lieu des 8 kg évalués!" (2)

C'est sûr: le choix du nucléaire, c'est celui de la sécurité. Des actionnaires d'Electrabel et de Suez.

Une chose encore: s'opposer au nucléaire, c'est idéologique. Ben oui...

(1) voir http://www.laradioactivite.com/fr/site/pages/rivieretecha.htm
(2) www.lesoir.be, 15.10.09
(3)http://tempsreel.nouvelobs.com/actualites/sciences/20091015.OBS4771/le_plutonium_perdu_de_cadarache.html

mardi 13 octobre 2009

A voir et entendre, c'est clair(e)!

J'ai déjà dit ici* tout le bien que je pense de Claire Diterzi. Son dernier album, Tableau de chasse, est superbe, à bien des égards: les textes, les chansons, les arrangements et même le livret fait de collages autour d'oeuvres de Fragonard, Camille Claudel, Rodin, Turner, Toulouse-Lautrec...
Elle signe elle-même les textes, les musiques, les arrangements, elle assure elle-même les voix, les guitares et autres instruments, l'enregistrement et le mixage. Et puis le livret aussi, tant qu'à faire.
Sur scène, elle se produit avec un groupe presque exclusivement féminin. Les choristes accordent leurs voix à la sienne, avec des accents slaves parfois et de très belles envolées souvent. Un univers qui lui appartient, une approche très personnelle de la chanson et du texte.
La plus belle découverte en chanson, depuis Camille.
Claire Diterzi se produit à la Maison de la Culture de Tournai ce jeudi 21 octobre à 20h. Il reste des places...

* "Tableau de (grande) classe" - décembre 2008

jeudi 8 octobre 2009

Un culot de magnétude 10 sur l'échelle de becquerel

Paul Magnette, le ministre du plaisir durable, a un culot incommensurable. Les trois ministres régionaux de l'énergie, flamande, bruxelloise et wallon, viennent aujourd'hui de lui adresser une carte blanche dans le Soir dénonçant sa décision de prolonger de dix ans la vie des plus anciennes centrales nucléaires. Il leur répond, au JT de la RTBF ce soir, qu'il n'y a, aux niveaux régionaux, pas de plan crédible de diminution des consommations énergétiques ni d'investissement dans les énergies renouvelables. Pouvons-nous calmement (ou presque) rappeler au ministre de l'investissement rentable, ses déclarations concernant le projet de centre de glisse? Répondant à la Chambre au député Jean-Luc Crucke qui s'inquiétait de "retrouver Courchevel à Antoing" et qui déplorait les impacts et les gaspillages énergétiques de ce "méga-projet", il répondait ceci: "il y a dans l'idée même de ce type d'infrastructure quelque chose de choquant. La reproduction d'un climat de type tropical ou de microclimats contraires à notre propre climat et le bilan énergétique et carbone de ce type de projet présentent des éléments choquants. Néanmoins, je me pose la question de principe: devons-nous, dans notre effort de développement durable aller jusqu'à une forme de jansénisme en interdisant ou refusant tout ce qui serait contraire? De même, lorsqu'on mange et qu'on essaie d'avoir une alimentation équilibrée, cela ne peut empêcher certains jours de se taper "un bon vieux satcho andalouse". Le principe de plaisir doit, à certains moments, pouvoir autoriser certaines formes sans oublier les retombées économiques."
Est-ce le principe de plaisir qui amène aujourd'hui le ministre à défendre le nucléaire?
Il semble évident que les retombées économiques ne lui échappent pas. Et que ce néo-élu du Ps a rapidement intégré la culture de son parti.

Notes

Le titre est inspiré par le Professeur Ponchau: www.prof-ponchau.ecolo.be

A voir ce mardi 13 octobre à 20h45 sur Arte, "Déchets, le cauchemar du nucléaire"


mardi 6 octobre 2009

Question de vocabulaire

La presse nous parle de catastrophes "naturelles" à Sumatra, en Inde, en Chine. Sommes-nous certains qu'elles sont bien naturelles? Que l'homme n'en est en rien responsable? Risque d'apparaître, lentement, mais sûrement, hélas, le concept de catastrophe culturelle... Nos modes de consommation en seraient - en sont la cause.
"Vous avez bien sujet d'accuser la nature", disait La Fontaine.

lundi 5 octobre 2009

L'esturgeon est aussi antisémite que le végétarien est stupide

Benoît Lutgen, Ministre de l'Agriculture, défend la viande. C'est son rôle, je suppose. Dans LLB du 3 octobre, il qualifie de "stupidité" l'hypothèse qu'un gouvernement affirme qu'il ne faut plus manger de viande. Mais il "respecte les végétariens et leur choix de vie", tout en rappelant que l'homme est omnivore (1) et que "supprimer la viande dans les restaurants de collectivité n'est en rien une solution pour l'environnement". "Bien au contraire", ajoute-t-il bravement. Xavier Ducarme, le journaliste, lui demande d'expliquer et le voilà qui se lance dans une démonstration qui défend les produits de chez nous. Sans expliquer en rien le "contraire". On reste sur... sa faim, ne sachant pas en quoi le végétarisme serait une erreur pour l'environnement.
Et pourtant... N'en déplaise au ministre, le végétarisme a plein d'avantages.
En termes personnels tout d'abord: aucun médecin ne plaidera pour soutenir un régime riche en charcuteries et en viande en sauce.
En termes collectifs ensuite. Et à bien des égards.
La lutte contre le réchauffement climatique, qu'on le veuille ou non, passe - si pas par le végétarisme - en tout cas par une diminution très sensible de la consommation de viande.
L'élevage est responsable de 15% des gaz à effet de serre au niveau mondial, à cause du méthane produit naturellement par les troupeaux. Et, avec une diminution drastique du bétail, la déforestation connaîtrait un coup d'arrêt: les besoins en surfaces herbagées et en surfaces agricoles nécessaires à la nourriture du bétail diminueraient elles aussi considérablement.
Mais les avantages du végétarisme ne s'arrêteraient pas là et on en revient ici à l'école. Celle-ci est actuellement soumise aux coups de boutoir des religions qui entendent y imposer leurs règles. Notamment dans les cantines. Si celles-ci devenaient végétariennes, une bonne partie du problème serait réglé. Plus de problème de viande de porc, ni d'abattage selon les normes kasher ou halal ou je ne sais quoi. Je suppose qu'il n'y a pas trente-six méthodes pour abattre une carotte ou des céréales. Plus de problème d'esturgeon non plus (2)! Fiametta Venner et Caroline Fourest, dans Charlie Hebdo du 30 septembre, nous apprennent que "l'esturgeon est un poisson antisémite". Voilà pourquoi le caviar est interdit par les intégristes juifs. Explication par le rabbin Elyakim Simsovic sur le site cheela.org: "la femelle perd toutes ses écailles au moment de la ponte, et ses oeufs sont donc à ce moment-là des oeufs non de poisson mais de reptile selon la définition de la Thora. Il s'ensuit que le caviar n'est pas cachère." Comme le soulignent les deux journalistes, "on retiendra la leçon: tout ce qui n'est pas cachère est antisémite..."
On comprendra de tout cela que les légumes sont sympathiques et que quand on est ministre on ne doit jamais perdre une occasion de se taire.

(1) rappelons au ministre que qui peut le plus peut le moins.
(2) je suis bien conscient que l'éventualité de servir du caviar dans les restaurants scolaires est assez faible.

Du droit de critique

Récemment, chez des amis communs, je fis la connaissance d'un commensal et compagnon de chasse de celui que l'on connaît sous le nom de Prince de L. La discussion, on s'en doute, glissa rapidement sur le projet de centre de sports et loisirs du seigneur. Et s'emporta quelque peu. Mon interlocuteur, déplorant mon opposition, estimait que, puisque j'étais critique et si malin, je n'avais qu'à développer moi-même un projet qui serait conforme à mes voeux. Cet appel, je l'entends régulièrement: si ça ne vous ne plaît pas, faites le vous-mêmes!
Comme si les réalisateurs de cinéma n'appréciant pas les critiques négatives de leur oeuvre réclamaient que les critiques deviennent metteurs en scène à leur place. Comme si, parce que vous vous plaignez de la qualité du travail de votre plombier, de votre boulanger ou de votre dentiste, celui-ci vous mettait au défi de faire son travail. Si demain mes étudiants devaient se plaindre de la qualité ou du contenu de mes cours, vais-je leur suggérer de les donner à ma place? Je pense, j'espère que je me remettrais en question.
La critique est un droit, voire un devoir. Des règles existent, des exigences de qualité se font jour, des nécessités se sont imposées. A chacun, selon son secteur, de les respecter. Sans fuir ses responsabilités. Traiter les critiques de donneurs de leçons, c'est s'éviter de faire son devoir.

samedi 3 octobre 2009

La neutralité du nucléaire

Argument suprême des défenseurs du nucléaire: la décision prise, en 2003, de sortir progressivement du nucléaire était idéologique. Ce qui sous-entend, selon eux, que leur position ne l'est pas. Elle ne serait que rationnelle. (1)
Bien sûr que la sortie du nucléaire est idéologique. Tout comme l'est l'entrée ou le retour
dans la filère nucléaire.
C'est idéologiquement que les écologistes (au sens large) se soucient des générations qui les suivent et de ceux qui vivent à l'autre bout de la planète. C'est pour des raisons idéologiques que d'autres n'ont de vue que courte et à rentabilité immédiate.

L'énergie nucléaire est l'énergie type de la logique capitaliste. Les moyens sont centralisés aux mains de quelques-uns et imposés à tous à un coût très élevé. L'investissement est pour une partie public et les bénéfices privés.
C'est l'énergie de la société de consommation. J'ai eu l'occasion de soutenir au Sénat la loi de sortie du nucléaire et de relever, à cette occasion, que différentes études ont fait apparaître que plus un pays recourt à l'énergie nucléaire (la Belgique en est à 55% d'électricité produite à partir du nucléaire), plus il vit dans une culture du gaspillage. Les spécialistes estiment à 30% les possibilités d'économies d'énergie. Sans mal et sans perte de confort. Mais au prix d'une réelle volonté politique. Qui semble bien absente aujourd'hui. Certains ont estimé que Doel1 pourrait être fermé aujourd'hui, simplement si chaque Belge cessait de laisser constamment ses appareils électriques en veille. Les défenseurs du nucléaire (le Ministre du nucléaire durable en première ligne) estiment que sans celui-ci la Belgique ne pourra produire assez d'électricité en 2015. Avec le Gouvernement actuel, c'est la course au toujours plus. La société de consommation a toujours de beaux jours devant elle et les gaspillages restent à la mode. Nos autorités décalées soutiennent l'utilisation de la voiture, les grands centres commerciaux hors ville, les pistes de ski sur neige artificielle... Donc, forcément, les besoins ne vont cesser de s'accroître. Et donc, le nucléaire reste indispensable. CQFD.

Les déchets, visiblement, ne sont pas un problème: dans LLB de ce jour, Christian Legrain, secrétaire général du Centre d'études nucléaires, explique que les déchets "de basse radioactivité sont stockés en surface dans des bâtiments recouverts de terre à Dessel pour une durée d'environ 300 ans. Quant aux déchets radioactifs, aucune décision n'est encore prise. Il sont stockés temporairement pour refroidir, car ils ont quand même une température de 100°. Donc, d'ici une cinquantaine d'années, on ne stockera rien de manière définitive. Après, on va sans doute enterrer les déchets dans des couches stables dans le sol. (...) On cherche à réduire la radio-toxicité des déchets et leur volume. On envisage des installations où les dechets hautement radioactifs perdraient de leur teneur toxique par le phénomène de transmutation."
Bref, ces gens-là sont rationnels, ils "cherchent", ils "envisagent", ils "vont sans doute", ils n'ont pas pris de décision, ils utilisent le conditionnel. Et ça fait soixante ans que ça dure.
Et Legrain de s'en prendre aux opposants au nucléaire: "ils ont surtout une peur irrationnelle et irraisonnée depuis Tchernobyl. (...) Le risque est présent partout", conclut-il.
Voilà des propos d'un homme raisonnable: un panneau solaire qui tombe d'un toit ou une centrale nucléaire qui explose, ça fait autant de dégâts!

Au-delà du choix énergétique lui-même, cette attaque contre l'idéologie écologiste est symptomatique de cette société où non seulement disparaît toute idéologie, mais où, bien plus, celles qui s'xpriment encore sont forcément suspectes et suspectées de visées obscures. Au bout du compte, ne reste qu'une idéologie qui ne doit plus dire son nom, celle de l'argent et du bénéfice rapide.

(1) comme si la raison n'était jamais idéologique... On parle bien, par exemple, de "la raison capitaliste", non?

vendredi 2 octobre 2009

Un nom à ne pas oublier

Pas plus que celui d'Anna Politkovskaïa dont elle était proche. C'est celui de Natalia Estemirova, militante russe des droits de l'homme et directrice de l'antenne de l'ONG russe Mémorial. Elle a été assassinée le 15 juillet de cette année. Elle avait le grand tort de dénoncer les exactions des forces de sécurité en Tchétchénie. Celles-ci lui ont donné raison.
Il est des noms, même d'inconnus, qu'on voudrait ne jamais (sa)voir oubliés. Je serais très fier d'habiter le long du boulevard Natalia Estemirova ou de la rue Anna Politkovskaïa. Ou de la chaussée Chico Mendes. Ou qu'existe un prix ou une fondation Steve Biko ou Patrice Lumumba. Il faut que ces noms vivent. Puisque ceux de leurs assassins n'existeront jamais.

jeudi 1 octobre 2009

Petit cours de langue de bois

Remarquable déclaration de Pierre Wacquier, bourgmestre de Brunehaut dans le Courrier de l'Escaut de ce 1er octobre. A propos du dossier du projet de "centre de glisse" de Maubray, il déclare: "Je suis content de l'avis favorable de la CRAT surtout parce qu'il est conditionné par plusieurs remarques. L'une d'elles touche notamment au point sensible de la mobilité. Brunehaut a toujours considéré que le sud du canal ne devait pas être la porte d'entrée de toutes les activités... On ne peut pas faire fi, conclut le bourgmestre, de l'avis négatif de toutes les autres instances. Y compris celui du Parc naturel des plaines de l'Escaut qui, à mon sens, devrait peser dans l'évolution du dossier, notamment en ce qui concerne la gestion du tourisme dans notre région. »
Quand on sait que l'avis du parc naturel est totalement négatif, on a bien du mal de comprendre pourquoi le bourgmestre se réjouit de l'avis favorable de la CRAT. Quelqu'un parle-t-il le Wacquier? Un traducteur, s'il vous plaît!

Nucléaire: vous en voulez encore?

Visiblement, le lobbying, ça marche. Paul Magnette, Ministre du "Développement durable" y est sensible. Il va proposer de prolonger de dix ans la sortie du nucléaire.
Le Forum nucléaire a lancé, voilà deux semaines, sa deuxième campagne de pub. Sous couvert de sonder le pour et le contre, il s'agit évidemment de convaincre que cette source énergétique est idéale pour lutter contre le réchauffement climatique. Et peut-être aussi pour lutter contre la grippe H1N1?
L'industrie nucléaire, c'est un sacré paquet de pognon: l'amortissement accéléré, sur vingt ans au lieu de quarante, du parc des centrales nucléaires belges (5800 MW) aurait rapporté un gain net de 3,9 milliards d'euros à Electrabel fin 2008. Si la durée de vie des centrales est prolongée de dix ans, le bénéfice net du retour sur investissement est évalué à 12 milliards d'euros. Une estimation de la Creg (Commission de régulation de l'électricité et du gaz). Rappelons que la loi de sortie du nucléaire prévoit une extinction de trois réacteurs en 2015: Doel 1 et 2 et Tihange 1. En cas de prolongation de dix ans, gain annuel: plus d'un milliard et demi d'euros. Et bingo, en cascade, pour les recettes de l'Etat, a dû se dire notre Ministre du Développement du budget.
Et tant pis si, dans sa grande entreprise de séduction, le lobby nucléaire ment: les déchets? Oh! une paille! En fait, juste un dé à coudre par habitant et par an. Pensez donc, autant dire rien! (ce qui en fait, quand on connaît les dangers du nucléaire, est déjà énorme). Et, affirme le Forum, au terme de l'exploitation des centrales, le volume de déchets à haute activité représentera, dans notre pays, l'équivalent d'une balle de tennis par habitant. La réalité est bien différente: Gilles Toussaint (de la Libre Belgique) a calculé qu'en divisant par le nombre de Belges les volumes de déchets annoncés on n'arrive pas aux 137 cm3 standards par habitant, mais à une fourchette de 200 à 450 cm3. Le journaliste a contacté la porte-parole du Forum nucléaire. Elle reconnaît l' "erreur", mais estime qu'en termes de com' une balle de tennis passe mieux qu'une boule de pétanque... Elle estime quand même qu'on sera sans doute au-delà.

Paul Magnette, visiblement, n'a pas lu ces chiffres. Ou alors, en a lu d'autres qui sont prioritaires: ceux du budget fédéral qui a des besoins importants.
Il n'a pas vu non plus "Le cauchemar du nucléaire", diffusé il y a deux semaines sur la Une. Laure Noualhat, spécialiste des questions environnementales à Libé, y révèle des chiffres effrayants: en France, on est à 10% de retraitement, alors qu'Areva annonce 96% de recyclable. "En réalité, dit-elle, j'ai fait le bilan des matières réelles pour l'année 2007 et j'arrive à 1,14% des déchets nucléaires français qui ont effectivement été réutilisés. (...) Dans les processus qui nous conduisent à retraiter ou recycler potentiellement ces déchets, on en laisse une bonne partie en Russie en pensant que ce sera économiquement intéressant de les utiliser plus tard, quand l'uranium naturel sera plus cher. Pendant ce temps, ils ne sont pas classés comme déchets, mais comme une matière radioactive". Et le tour est joué. Tout est une question de mots.
Les déchets nucléaires les plus radioactifs, à longue durée de vie, seront inoffensifs dans des centaines de milliers d'années. D'ici là, "après nous, les mouches". Si l'espèce vit encore.
Un dernier chiffre à l'attention de notre ministre des déchets durables: il vient de l'Agence internationale de l'énergie atomique (pas vraiment un club de talibans écolos): le coût du démantèlement des installations radioactives en fin de vie dans le monde s'élève à un minimum de mille milliards de dollars.

(à partir d'articles de LLB des 15, 16, 19 et 25.09.09)