mardi 31 octobre 2017

Noires écoles

A quoi sert l'école? Bien sûr à apprendre à lire et à écrire et à acquérir des connaissances scientifiques, mais aussi à apprendre à être critique, à cultiver le doute, à être autonome.
On est dès lors en droit se poser cette question: les écoles islamiques sont-elles des écoles? Le sont-elles encore les écoles, publiques ou privées, qui cèdent aux revendications islamiques, qui acceptent de ne pas enseigner (ou en tout cas de juste évoquer) la théorie de l'évolution, qui acceptent que filles et garçons soient séparés, que les filles soient cachées?
"Il faut être plus vigilant avec tout ce qui se fait en Europe, affirme la physicienne tunisienne Faouzia Farida Charfi (1), tous ces cours qui se donnent en parallèle de l'école en France, où l'on prétend enseigner l'islam. Je m'interroge. Quel islam est enseigné? Est-ce que ce sont des principes de solidarité, du vivre-ensemble? Ou bien attaque-t-on dans ces cours des théories scientifiques qui seraient contraires à la religion?". La physicienne s'effraie des islamistes "qui n'acceptent de savoir que le savoir islamique". Elle s'intéresse à la question de la science et de la religion depuis les années '70, depuis qu'elle a vu certains de ses étudiants refuser la théorie de la relativité restreinte: "ils n'acceptaient pas que la lumière puisse avoir une vitesse finie. La lumière ne pouvait être qu'infinie puisqu'elle relève de Dieu, c'est l'absolu." Aujourd'hui, elle voit des étudiants qui ne veulent "pas admettre d'autres vérités que la vérité de la Révélation", qui n'acceptent pas "qu'il puisse y avoir des  vérités scientifiques qui s'imposeraient indépendamment du fait religieux".

Dans les villes et les régions qu'il a dominées, le pseudo Etat islamique réduisait l'éducation des filles à l'école à l'étude du Coran et de la charia et à la couture et au tricot. Dans les livres scolaires du "Ministère de l'Education" de l'E.I., "les exercices d'anglais font tous référence au djihad et à la guerre. Les enfants apprennent apple comme gun, bazooka et mujahidin" et "le sens du mot woman se comprend par l'image d'une silhouette toute de noir vêtue" (2).
Mais il n'y a pas qu'à Raqqa ou à Mossoul que l'éducation s'est transformée en outil de régression et d'enfermement: "nos collégiennes se transforment en authentiques Belphégor", constate catastrophé un ancien principal de trois collèges des quartiers nord de Marseille. "Les garçons ainsi que les filles se mettent tous à pratiquer le ramadan et à réclamer de la nourriture halal. Sous peine d'être ostracisés, parfois battus par les plus violents du collège..." (3) Les responsables: des assocations d'aide aux devoirs, "financées par les collectivités locales dans le cadre du DSU (dotation de solidarité urbaine). Très proches parfois des imams les plus radicaux, notamment des salafistes, elles sont composées de jeunes gens qui, sous prétexte de charité, en profitent pour faire du prosélytisme exacerbé. C'est discret, assez sournois, mais terriblement efficace." Reste aux responsables des écoles concernées à tenter d'éviter le pire, à refuser le niqab à l'école, à déconstruire les propos haineux vis-à-vis des catholiques et des juifs, à respecter le programme des cours malgré les moqueries ou les insultes. Pas simple quand on constate que les "barbus" pratiquent l'infiltration: le même principal s'est ainsi rendu compte qu'un de ses meilleurs surveillants (un gars génial, sympa, cultivé, drôle) diffusait au sein du collège un livre, édité en Arabie saoudite et interdit en France, qui conseille de "lapider les femmes adultères et de couper les mains des voleurs". Le surveillant si sympa fréquentait la mosquée la plus radicale et la plus haineuse de Marseille.
Pauvreté sociale et pauvreté culturelle vont de pair. "C'est la misère qui fait le lit de l'islam radical", constate une prof de langue, musulmane peu pratiquante, qui pointe du doigts les imams manipulateurs qui prêchent la haine de la France. Moins les élèves seront instruits et critiques, plus ils seront sous la coupe des mosquées radicales. Quelle est donc cette éducation qui ne vise pas la lumière mais l'obscurité?

Heureusement, il existe des écoles en pays musulmans qui se donnent pour objectif de combattre l'obscurantisme religieux. Ainsi dans le plus grand d'entre eux, l'Indonésie. Là, des écoles enseignent l'égalité des genres en s'appuyant sur le Coran. D'après la directrice de l'école Diniyyah Puteri, créée il y a près de cent ans, "la parité entre les hommes et les femmes, aussi bien dans le domaine spirituel que dans la vie publique, est consignée dans le verset 97 de la sourate An-Nahl" (4). Une autre de ces écoles interdit à ses élèves de se marier à un âge précoce. "Chaque musulman et musulmane a le devoir d'étudier le plus longtemps possible", estime son directeur. L'éducation dans ces établissements enseigne aussi à ses élèves "à ne pas différencier les gens en fonction de leur ethnie, de leur religion ou de leur sexe." Une directrice explique que son école "invite ses élèves à étudier des courants de pensée différents de celui auquel ils adhèrent. De cette manière, ils peuvent approcher d'autres interprétations et apprendre à ne pas clamer que la leur est la seule valide."

Pendant ce temps, en Turquie, "les enseignants peuvent être incarcérés sans raison", tandis que le nombre d'élèves des écoles de formation d'imams et d'enseignement religieux explose: on en comptait 63.000 en 2000, ils sont plus d'un million aujourd'hui (5). 
Pendant ce temps, en France, en Belgique, en Grande-Bretagne et dans bien d'autres pays occidentaux, de bonnes âmes plaident pour que l'enseignement dans nos pays prenne en compte les spécificités de l'islam. Ce qui reviendrait à dire que les étudiants et étudiantes de culture musulmane ne soient pas formés à certaines sciences et que les filles ne soient formées qu'à quelques très rares professions. 
Pendant ce temps, une famille comme la famille Merah vit repliée sur elle-même, ne suivant que la loi coranique plutôt que celle de la République que certains de ses membres veulent "mettre à genoux". Un enfermement qui a fabriqué les assassins que l'on sait.
Tout le monde, ou presque, s'accorde à le dire: on ne sortira de l'islamisme et de sa violence que grâce à l'éducation. 
On voit par là qu'il y a urgence à soutenir l'école dans sa mission de base: rendre intelligent. Et  à chasser les professeurs d'obscurité et de haine.

(1) "Faouzia Farida Charfi", propos recueillis par Nicolas Delessale, Télérama, 4 octobre 2017.
(2) "Mossoul - Les femmes outragées, martyrisées, mais enfin libérées", Laurène Daycard, Causette, juin 2017.
(3) "Dieu rackette dans les cours d'école", Claude Ardid et Nadège Hubert, Charlie Hebdo, 13 septembre 2017.
(4) "Indonésie. Pour des femmes éduquées", Prihandoko, Andri el Faruqi, Nofika Dian Nugroho, Ivansyah et Eko Widianto, Tempo (Djakarta), 26.6.2017, in le Courrier international, 5.10.2017.
(5) "La Turquie est devenue un pays paranoïaque", Elif Shafak, The New York Times Syndicate, in le Courrier international, 12.10.2017.

samedi 28 octobre 2017

La boue et le gourou

La bêtise et la haine se portent bien. Il n'y a pas lieu de s'inquiéter pour elles.
On en a un exemple encore avec les réactions aux accusations de viol à l'encontre du prédicateur Tariq Ramadan, lié aux Frères musulmans. On peut évidemment respecter la présomption d'innocence - même si on peut avoir de sérieux doutes sur celle-ci (1) - mais on ne peut pour autant accepter le torrent de haine et de bêtise qui se déverse contre la première femme qui l'accuse (2). La présumée victime devient coupable. D'intérêt personnel, de cupidité, de prostitution. Et surtout de blasphème. Pour ses aficionados, il est criminel de s'attaquer à Saint-Tariq, cet agent trouble de l'islam, vu comme une idole par certains musulmans qui tentent de se présenter comme modernistes et par les islamo-gauchistes. Frère Tariq est tellemment sympa qu'il prône le port du voile, justifie les châtiments corporels, la polygamie et l'interdiction des mariages mixtes et condamne l'homosexualité (3). Il est tellement moderne qu'il a osé plaider  pour un moratoire sur la lapidation. Bref, un chouette gars qui ne peut être soupçonné de s'attaquer sexuellement à des femmes. Même si celles et ceux qui le connaissent bien ne sont guère surpris (4).
Mais pour ses supporteurs, Frère Tariq ne peut être qu'innocent comme l'enfant qui vient de naître et est victime d'un complot, derrière lequel il faut, évidemment - quelle finesse d'analyse! - voir la main de sionistes ou de juifs. Et Harvey Weinstein, de quel complot est-il victime alors?
Résumons-nous: on ne se méfie jamais assez des saints hommes et de leurs disciples. Ils préféreront toujours le crime au blasphème, le prédateur à la femme violée.

(1) Lire les billets de Caroline Fourest: https://www.marianne.net/debattons/editos/la-double-vie-de-tariq-ramadan et "L'Affaire Ramadan", 28.10.2017: https://carolinefourest.wordpress.com, ainsi que son livre "Frère Tariq - discours, stratégie et méthode de Tariq Ramadan", Grasset, 2004.
(2) http://www.lemonde.fr/societe/article/2017/10/28/plainte-contre-tariq-ramadan-l-antisemitisme-se-dechaine-envers-henda-ayari_5207247_3224.html
http://www.liberation.fr/france/2017/10/28/affaire-tariq-ramadan-entre-revelations-et-silences-embarrasses_1606454
(3) (Re)lire sur ce blog "Ces textes glaçants", 8 avril 2016, et "Noirs prêches", 23 novembre 2015.
(4) https://www.marianne.net/societe/accusation-de-viol-contre-tariq-ramadan-derriere-henda-ayari-d-autres-victimes

Post-scriptum: à réécouter sur le site de France Inter le billet de Sophia Aram, ce lundi 30 à 8h55.
https://www.franceinter.fr/programmes/2017-10-30

samedi 21 octobre 2017

Les hommes vampires

Le mutisme encore. Le silence. Dans la société bavarde qui est la nôtre, où chacun ne cesse de s'exprimer sur tout et sur rien urbi et orbi, il est pourtant des sujets que l'on tait (voir aussi le billet précédent).
Que tant de femmes n'aient pas osé parler, on peut le comprendre, à cause d'un sentiment de honte, par peur de perdre leur emploi ou de ne pas décrocher le poste espéré, parce qu'il est si difficile en matière de harcèlement et de viol d'apporter les preuves de ce qu'on avance par rapport à des faits qui se passent quasi toujours en tête-à-tête, parce que tant de policiers un peu partout dans le monde se montrent goguenards face à une plaignante. Mais pourquoi tant de témoins, femmes ou hommes, ont-ils laissé faire? Comme l'écrit Gérard Biard (1), "les affaires de harcèlement sexuel et de viol, c'est généralement le contraire des affaires de terrorisme. Là, personne ne semble étonné". Parce que tout le monde savait ou s'en doutait ou avait relevé des attitudes, des propos, des actes au moins troubles, équivoques, glauques, malsains. "Et tout le monde la fermait. Par peur, par habitude, par complicité passive, par je-m'en-foutisme, par respect des traditions ou des conventions."
Aujourd'hui, à partir du cas du producteur Harvey Weinstein, les tabous tombent, des femmes, nombreuses, osent enfin parler, dénoncer leurs harceleurs, pire, leurs violeurs. Et on en trouve dans tous les milieux: culture, entreprises, sports, politique, religions, familles. On s'y est tellement habitué que les Américains, pourtant si pudibonds, ont même élu comme président un harceleur sexuel en toute connaissance de cause.
Quelle société y échappe? Ça se passe à Hollywood, ça se passe à Washington, en Belgique, en France, en Allemagne, en Iran (2), au Maroc, en Egypte. Ça se passe partout, quelles que soient les cultures. L'homme harceleur est sûr de son droit, le confondant souvent avec son pouvoir, de père, de patron ou d'employeur potentiel, de prédicateur, de ministre, de vedette.
Quelles que soient les cultures ou les religions, la femme ne s'appartient pas, elle est objet pour l'homme. Objet qu'on met à genoux, qu'on couche, qu'on cache, qu'on voile, qu'on dévoile au gré de ses humeurs et de ses pulsions de mâle. Qu'on jette ensuite avec mépris.

On se le demande: comment et pourquoi dans une société aussi avancée que la société française les femmes mariées perdent-elles leur nom de naissance pour adopter, pour accepter d'adopter, de se laisser imposer celui de leur mari? S'appartenir, plutôt qu'appartenir à l'homme, commence par conserver son nom. Exister par soi-même face aux crocodiles (3).

Vierge aux abois
Va et viens
Défais-moi donc ce lit à baldaquin
Qu'en deux temps trois mouvements
L'on badine

Sonnez l'hallali
Sonnez ma mise à mort 
Sonnez l'hallali
Sonnez ma mort 
Claire Diterzi, "Tableau de chasse"

(1) "Silence, on viole", Charlie Hebdo, 18 octobre 2017.
(2) A lire: le (faux) roman, glaçant, de Chadortt Djavann "Les putes voilées n'iront jamais au paradis", Le Livre de poche 34637.
(3) (Re)lire sur ce blog "Des larmes de crocodile", 26 novembre 2014.
Post-scriptum: à lire, cette chronique de Vincent Engel:
http://www.lesoir.be/120343/article/2017-10-21/affaire-weinstein-la-loi-des-porcs-garder-les-yeux-grands-fermes
Post-scriptum bis: ce billet de Caroline Fourest,"Ni porc, ni dinde", 24 octobre 2017: https://carolinefourest.wordpress.com
Post-scriptum bis, excellent billet de Nicolas Bedos sur la chasse au croustillant ouverte par l'affaire Weinstein: http://www.huffingtonpost.fr/nicolas-bedos/un-seul-nom-me-suffira-quand-la-liberation-de-la-parole-vire-a-la-guerre-des-sexes_a_23262930/?utm_hp_ref=fr-homepage

vendredi 20 octobre 2017

Cet assourdissant silence

Trois cents morts dans un attentat à Mogadiscio, la capitale somalienne. Un attentat - ignoble comme tous les autres - attribué aux islamistes shebab, liés à al-Qaida. Qui s'en émeut? Qui s'en soucie? Où sommes-nous? Que sommes-nous? Pourquoi ne sommes-nous pas "Mogadiscio", comme nous avons été "Charlie", "Paris", "Bruxelles" ou "Londres" (1)?
Et où sont les bonnes âmes d'une certaine gauche, pour qui les victimes occidentales de l'islamisme ne font que payer le sang que devraient payer leurs gouvernements? Que disent-ils, ces braves gens toujours prêts à s'attendrir sur les auteurs d'attentats qui visent aveuglément des anonymes de ce satané Occident? Ils trouvent mille excuses à ces névrosés d'islamistes, mais où sont-ils aujourd'hui ces gens pétris de ce sentiment judéo-chrétien de culpabilité qui affirment haut et fort qu'il y a une explication à cette dérive et que nous en sommes la cause, que nous avons bien cherché, nous peuples de colons racistes, dominateurs et excluants, la violence que nous prenons en pleine figure? Quelles explications ont-ils quand ce sont des Somaliens, des Philippins, des Maliens, des Syriens, des Afghans, des Irakiens, des chiites, des sunnites, des maronites, des agnostiques, des animistes, des athées qui se font assassiner par ceux qui tuent au nom de leur dieu? De quoi sont donc coupables ces victimes-là? Ces morts sont-elles normales ? Les pseudo analyses de ces bonnes âmes capables de justifier l'injustiable - et le pire, c'est qu'elles ne semblent même pas s'en rendre compte - témoignent d'une vision égocentrique, européano-centrée. Une vision de colons.
Nous sommes tous coupables de mutisme, de quasi indifférence à ce qui se passe loin de nous, mais les islamo-gauchistes sont coupables de bien pire: de complicité avec l'infâme.

(1) http://www.huffingtonpost.fr/marc-knobel/pourquoi-personne-n-est-mogadiscio_a_23245661/?utm_hp_ref=fr-terrorisme

vendredi 13 octobre 2017

Question(s) catalane(s)

Pourquoi une importante partie des Catalans (40% au moins, peut-être plus de 50%) veulent-ils que leur région devienne indépendante de l'Espagne? C'est une question qui reste, pour moi, sans réponse. La région jouit déjà d'une autonomie politique importante par rapport à l'Etat. Alors, pourquoi le quitter? Pourquoi ajouter de nouvelles frontières au sein d'un monde qui n'en connaît que trop? Comme l'écrit Riss, "l'indépendance, mais par rapport à quoi? L'indépendance, elle est légitime quand on veut s'affranchir de la tyrannie ou de l'oppression. De quel destin tragique les Catalans veulent-ils donc se libérer aujourd'hui?" (1) Et l'indépendance pour faire quoi? Pour construire un nouveau pays écologique, solidaire, ouvert aux autres? On ne l'entend pas. Et si c'était le cas, on ne comprendrait pas pourquoi ce projet politique n'a pas déjà été mis en œuvre dans le cadre de l'autonomie. Et pourrait-il l'être demain quand on voit quel rassemblement hétéroclite s'est formé autour de la revendication indépendantiste?
Un journal relevait récemment (2) que dans les quartiers populaires de Barcelone on voit peu de drapeaux catalans, comme si la revendication indépendantiste était un luxe de gens aisés. Les plus pauvres ne voient sans doute pas d'intérêt à se séparer du reste de l'Espagne. "L'indépendance permet de ne pas parler d'autres problèmes, comme celui du chômage", affirme l'économiste Carlos Mandianes, président du Centre galicien de Barcelone (3).
La valse-hésitation de Puigdemont déclarant l'indépendance pour aussitôt annoncer sa suspension me fait penser au Brexit. Ici comme là, j'ai le sentiment qu'il s'agit de rompre dans l'urgence sans avoir pris en compte les conséquences de la rupture, l'impression qu'il s'agit d'abord de se faire plaisir sans vouloir réfléchir aux suites. Et ces suites seront peut-être telles que les imagine Riss: une fois la fête finie, "tout le monde rentrera chez soi se caler devant sa télé pour voir La Roue de la fortune et le Barça en quart de finale de la Coupe de la Ligue". Tout ça pour ça? Et sinon, pour quoi?

(1) "La connerie ou la mort!" Charlie Hebdo, 11.10.2017.
(2) Revue de presse de France Inter, il y a quelques jours.
(3) Beatriz Pérez, "Catalans, mais aussi espagnols", La Voz de Galicia, 8.6.2017, in Le Courrier international, 28.9.2017.

mardi 10 octobre 2017

Des nouvelles de la France profonde

On comprend enfin pourquoi la France rurale vote pour le Front national: elle est envahie.
A La Châtre dans l'Indre, le garde champêtre court de tous côtés pour lutter contre les envahisseurs qui ne se laissent plus intimider par ses méthodes. Il a beau intervenir "le matin de bonne heure, et le soir, à la nuit", les milliers d'étourneaux qui nichent dans les arbres du Collège George-Sand ne se laissent plus impressionner par les bruits qu'il utilise pour les déloger: "ils se délocalisent sur un arbre situé trois mètres plus loin pour revenir dès le calme retrouvé". Le garde champêtre doit ensuite se précipiter au cimetière pour déloger les pigeons qui y "ont élu résidence". Il y a peu, c'était les ragondins qui en avaient fait leur terrain de jeu (1).
On voit par là que pour être garde champêtre il faut avoir des ailes.

Voilà des nouvelles de la France profonde. Mais comment appelle-t-on l'autre France? La France légère, la France de surface, la France superficielle?

(1) La Nouvelle République - Indre, 26 septembre 2016.

dimanche 8 octobre 2017

De l'importance de la maîtrise des règles de base de la communication

Je déteste être pris pour un con par un analphabète.
Voilà un message que j'ai reçu récemment. Et auquel je ne suis pas assez bête (quoi que l'on croie) pour répondre.

Client (e) ORANGE 

Un de vos correspondants à laisser 2 messages vocaux depuis le 0608531982.
Pour les lire veuillez copier lien et l’insérer dans une autre page :  
(suit une adresse activée)

Merci de votre confiance .

Le service Internet

vendredi 6 octobre 2017

Les faiseurs de bruit

Comment exister politiquement? La France dite insoumise ne cesse d'accuser le président et le gouvernement de toutes les turpitudes, parfois de manière argumentée, parfois par principe. Parce que quand on est dans l'opposition, on s'oppose. Il y a quelques jours, le parti de l'ex-député européen Jean-Luc Mélenchon a trouvé mieux: les Insoumis ont déposé un amendement qui visait à remplacer, à l'Assemblée nationale, le drapeau européen, arboré à côté de celui de la France, par celui de l'ONU (1). 
Déjà, en entrant à l'Assemblée nationale en juin dernier, ce grand faux naïf de Mélenchon s'était étonné d'y voir le drapeau européen: "Franchement, on est obligé de supporter ça? C'est la République française ici, pas la vierge Marie, je ne comprends pas." Mélenchon s'était fait élire au Parlement européen en 2014 et abandonnait son siège à mi-mandat, exprimant ainsi le peu d'importance et de respect qu'il accordait tant à ses électeurs qu'à l'institution européenne.
Pourquoi supprimer le drapeau européen? Parce que, se justifiait sur France Inter un élu de la F.I., l'Union européenne ne fait pas consensus.
Donc, plutôt l'ONU que l'UE. Depuis quand l'ONU fait-elle consensus, très contestée pour son incapacité à prendre à bras le corps les innombrables conflits que connaît la planète? Très contestée pour les trafics d'influence qu'elle connaît, pour sa corruption, ses gapillages (2). Contestée aussi pour son inertie, particulièrement à cause de son Conseil de Sécurité dont les membres ont un droit de veto qui leur permet de protèger les pays copains.
Et la France depuis quand fait-elle consensus en son sein? On ne voudrait pas souffler sur les braises (surtout à l'heure où l'exemple catalan pourrait en inspirer d'autres), mais rappelons que ce sont des indépendantistes qui dirigent la Corse.
On peut (et on doit) critiquer l'Union européenne, mais la vomir en oubliant d'où elle vient, en niant ses apports, son utilité, en refusant de voir la catastrophe que serait sa disparition (3), s'appelle du populisme.
Le Front national a chaudement soutenu la proposition des Insoumis. Il n'en attendait pas tant.
Cette France-là n'est pas aussi insoumise qu'elle le dit: elle est très dépendante de l'unité de bruit médiatique. Et ce bruit-là tourne à la pollution.

(1) http://www.lemonde.fr/politique/article/2017/10/04/la-france-insoumise-souhaite-supprimer-le-drapeau-europeen-a-l-assemblee-nationale_5196015_823448.html
(2) lire "L'ONU, mise à nu", Marianne, 29 septembre 2017.
(3) (re)lire sur ce blog:
- "Lettre à Elvire et à mes amis français", 7 avril 2017;
- "Vive l'Europe (quand même)!", 15 mars 2017.

mercredi 4 octobre 2017

Le cauchemar américain

Cinquante-neuf morts à Las Vegas, tués par un homme armé comme un régiment entier. Plus de onze mille personnes tuées par des armes à feu aux Etats-Unis depuis le début de cette année. 273 fusillades de masse, soit quasiment une par jour depuis le début de 2017. Et Trump et la Maison blanche d'affirmer qu'il est prématuré de s'interroger sur une modification de la loi sur la possesssion individuelle d'armes. Y a-t-il position plus imbécile, plus hypocrite, plus répugnante? A partir de combien de morts l'homme qui joue à être président jugera-t-il que le moment est venu de s'interroger sur la vente libre d'armes individuelles, y compris des armes de guerre, dans son pays? Aux Etats-Unis, on dénombre plus d'armes à feu (265 millions) que d'habitants. 3% des Américains en possèdent la moitié (1). Mais Trump et les siens, qui comptent parmi leurs fervents supporteurs la NRA, puissant lobby des armes, ne voient que "folie" dans le massacre de Las Vegas, sans se poser la question de savoir s'il est normal de laisser des fous furieux acheter un arsenal entier. Et si ce n'est pas précisément cette possession d'armes qui rend fou. C'est le destin, laisse entendre Ubu Trump, qui voit, comme le fait remarquer un journaliste, tous ces actes répugnants comme des catastrophes naturelles contre lesquelles seules les prières pourraient agir. Alors qu'il adresse des reproches aux habitants de Porto-Rico victimes d'un ouragan.
Deux jours avant ce carnage, le New York Times titrait: "477 jours. 521 tueries de masse. Zéro action du Congrès." (2) Ce qui manque à ce président, c'est visiblement du courage, de la volonté et de l'intelligence.
" Le cauchemar que connaît aujourd’hui l’Amérique - et c’est vraiment un cauchemar -, affirmait il y a peu Philip Roth, l'un des plus grands écrivains américains (le plus grand, selon Harlan Coben), vient de ce que l’homme qui a été élu président des Etats-Unis souffre de narcissisme aigu ; c’est un menteur compulsif, un ignorant, un fanfaron, un être abject animé d’un esprit de revanche et déjà quelque peu sénile. Et en disant cela, je minimise ses travers. Jour après jour, sa conduite, son manque d’expérience et l’ineptie des propos qu’il tient publiquement nous indignent. Il n’y a aucune limite aux dangers dans lesquels la folie de cet homme risque d’entraîner le pays et le monde tout entier." (3)

A quoi reconnaît-on un imbécile? Notamment à son incapacité à imaginer que ses propos et/ou ses actes peuvent avoir l'effet exactement contraire à celui qu'il recherche. Récemment, des joueurs de football américain ont pris l'habitude de mettre un genou à terre pendant l'hymne national pour protester contre les violences envers les noirs. Le président twitteur, avec la délicatesse qu'on lui connaît, a aussitôt appelé la fédération de football à "virer ces fils de pute". Il s'est ainsi mis à dos toute la fédération de ce sport "traditionnellement blanc et à coloration républicaine" (4). 
Récemment, un général américain, directeur d'une académie militaire, a sèchement et fermement condamné le racisme constaté parmi ses troupes (5), un rappel nécessaire en ces temps où le président semble faire de la division une valeur. 
Quand donc enfin les représentants républicains (si ce terme signifie quelque chose) auront-ils plus de courage que lui et, pour le bien de leur pays et du monde, feront-ils tomber cet accident de l'Histoire?

(3) http://next.liberation.fr/livres/2017/09/15/entretien-avec-philip-roth-j-aurais-aussi-bien-pu-etre-un-sein-de-la-taille-d-un-homme_1596692
(4) http://www.lemonde.fr/sport/article/2017/09/26/comment-donald-trump-a-retourne-la-nfl-et-le-monde-du-football-americain-contre-lui_5191787_3242.html
(5) http://www.huffingtonpost.fr/2017/09/29/le-discours-coup-de-poing-du-general-americain-jay-silveria-apres-un-acte-raciste-deleves-officiers_a_23227886/?utm_hp_ref=fr-homepage