dimanche 29 décembre 2019

Restons stupides (et arriérés)

On n'arrête décidément pas le progrès. Voilà la 5G qui s'amène. C'est qu'elle nous sera bien utile pour visionner n'importe où sur la planète tant de vidéos qui nous sont indispensables et pour connecter nos maisons, nos voitures, nos frigos, nos brosses à dents, nos autoroutes et jusqu'aux couches de nos bébés. Bref, grâce à la cinquième génération, nous allons enfin devenir intelligents. Il était temps.
Tous les objets de la vie quotidienne seront équipés de puces électroniques et d'antennes qui les connecteront ainsi, sans fil, à Internet.
"Ce que la plupart des gens ignorent, écrivait il y a deux ans un regroupement de scientifiques (1), c'est que cette nouvelle réalité entraînera aussi un changement environnemental sans précédent à l'échelle planétaire. Il est impossible d'imaginer la densité prévue des émetteurs de radiofréquence. Outre les millions de stations de base terrestres 5G qui seront installées et les 20.000 nouveaux satellites qui seront lancés dans l'espace, 200 milliards d'objets émetteurs, selon nos estimations, feront partie de l'internet des objets d'ici 2020, et un billion d'objets quelques années plus tard."
Des chiffres qui pourraient nous faire perdre la tête (rappelons qu'un billion est un million de millions), mais cette connection permanente et universelle nous évitera de tomber en panne de dentifrice et de couches culottes. Eviter le manque est à ce prix.
"Si les plans de l'industrie des télécommunications pour la 5G se concrétisent, disent encore les scientifiques, pas un être humain, pas un oiseau, pas un insecte et pas un brin d'herbe sur terre, quel que soit le lieu de la planète où il se trouve, ne pourra se soustraire à une exposition, 24 heures sur 24 et 365 jours par an, à des niveaux de rayonnement de radiofréquence qui sont des dizaines voire des centaines de fois supérieurs à ceux que l'on connaît aujourd'hui. Toutes les issues de secours seront barrées. Ces plans pour la 5G risquent d'avoir des effets graves et irréversibles sur les êtres humains et de causer des dommages permanents à tous les écosystèmes terrestres."
A commencer par l'écosystème humain: infertilité, déficiences cognitives, lésions de l'ADN, cancers, troubles neurologiques, stress oxydant, obésité et diabète sont quelques-uns des effets secondaires que pourrait générer la 5G. Mais mieux vaut être intelligent et malade que bête et en bonne santé.
Le convoi de soixante satellites lancés dans l'espace par Elon Musk et photographiés la nuit de Noël  notamment au-dessus des Pays-Bas n'est qu'un train miniature à côté des milliers de satellites que la 5G enverra dans l'espace pour nous rendre plus malins.
La Terre et ses mers débordent de nos déchets. L'espace a l'immense avantage de n'avoir aucune limite. Comme la prétention et la bêtise humaines.

(1) https://static1.squarespace.com/static/5b8dbc1b7c9327d89d9428a4/t/5dbf713cc7aa2f31f1f0dcc0/1572827456350/Appel_international_demandant_l%27arrêt_du_déploiement_de_la_5G_+sur_Terre_et_dans_l%27espace.pdf

A lire: Fabrice Nicolino, "La 5G en plein dans la tronche", Charlie Hebdo, 11.12.2019.

lundi 23 décembre 2019

Ubu éructe

Le Donald vocifère. Il élargit son répertoire d'insultes. On essaie de se débarrasser de lui alors qu'il a été élu et qu'il est le meilleur président qu'aient connu les Etats-Unis. Il n'en doute pas: c'est parce qu'il dérange et fait peur, alors les méchants se liguent contre lui.
Qu'il fasse peur et dérange, qui peut le nier? Les Républicains eux-mêmes étaient catastrophés au lendemain de son élection. Ils savaient qu'ils avaient là affaire à un président aussi néophyte en politique qu'incontrôlable, aussi capricieux que suffisant, aussi inculte qu'affairiste.
Aujourd'hui, malgré les lourdes charges qui pèsent contre lui - avoir négocié un soutien militaire à l'Ukraine contre une enquête sur le fils d'un de ses adversaires politiques - malgré les bourdes et quantité d'erreurs stratégiques qu'il a accumulées, malgré son incapacité à écouter et surtout à comprendre les experts, son parti a décidé de le soutenir. Malgré tout. Malgré tout ce fatras. Malgré toute cette bêtise. Malgré cet irrespect de règles fondamentales. Les Républicains ne peuvent imaginer lâcher un homme qui leur fait pourtant honte.
Le Donald est le troisième président dans l'histoire des Etats-Unis à être envoyé devant le Sénat par la Chambre des représentants dans le cadre d'une procédure d'empeachment. Il a été reconnu coupable par la Chambre des représentants d'abus de pouvoir et d'entrave au bon fonctionnement du Congrès. Pour ses partisans, peu importe ce qu'il a pu faire: ils refusent tout débat et toute réflexion. "Ils ont décidé d'absoudre le Président avant même de le juger, au seul motif qu'il est accusé par les Démocrates", écrit Philippe Paquet (1). Et tant pis s'ils s'asseyent ainsi lourdement sur leur mission constitutionnelle. "Le chef de la majorité républicaine au Sénat, Mitch McConnell, a donné toute la mesure de cette démission en déclarant qu'il n'entendait absolument pas être impartial dans la conduite du procès de Donald Trump." 

Les Démocrates savent que leur procédure d'impeachment n'a quasiment aucune chance d'aboutir, elle sera repoussée par le Sénat dominé par les Républicains. Mais avaient-ils le choix? Soit ils fermaient les yeux, soit ils entamaient une action qu'ils sav(ai)ent perdue. "La première option était sans doute la plus confortable, écrit Le Monde (2). Elle permettait de faire l'économie d'une bataille perdue d'avance et de s'épargner l'animosité d'un président qui ne tolère aucun contre-pouvoir. Ce choix du cynisme qui règne en maître à la Maison Blanche revenait à valider le théorème de la Ve Avenue, celui avancé par Donald Trump lui-même, selon lequel il pourrait tirer sur des passants arpentant la célèbre artère new-yorkaise sans perdre un seul électeur".
Restait la seconde option, celle qu'ils ont choisie: "sanctionner à la Chambre des représentants un comportement proscrit par la Constitution et (...) rester ainsi fidèle au serment prêté par tout élu de respecter et de protéger la pierre angulaire de la démocratie américaine".

Les Républicains le laissent entendre clairement: tant pis si l'homme de toutes les outrances est  considéré comme incontrôlable et imprévisible,  tant pis s'il a lâché ses alliés kurdes sans crier gare, abandonné le Moyen-Orient à la Russie de Poutine, quitté l'Accord de Paris. Ce qui compte, c'est de garder le pouvoir. Et tant pis s'il faut pour cela se mettre la tête dans le sable. Tant pis s'il est alors difficile de garder la tête haute.

(1) "La démission des élus républicains", La Libre Belgique, 20.12.2019.
(2)
https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/12/19/juger-trump-ou-le-refus-du-cynisme_6023473_3232.html

vendredi 20 décembre 2019

Sortons nos boules Quies

Il semble qu'à Tournai ce samedi la RTBF, dans le cadre de son opération si gentille et si caritative Viva for life, ait programmé un chanteur qui se fait appeler Black M. On se rappellera utilement que ce garçon a des textes inécoutables et insupportables. En deux mots: à vomir.
(Re) lire sur ce blog: "J'irai danser sur vos tombes", 16.5.2016 - http://moeursethumeurs.blogspot.com/2016/05/jirai-danser-sur-vos-tombes.htm

mercredi 18 décembre 2019

La mendiante

Il y a longtemps qu'il n'en avait plus été question ici. On n'en entendait plus parler. Mais elle était tapie dans l'ombre. La fille à papa Le Pen fait à nouveau parler d'elle. Elle vient mendier auprès des adhérents du RN-FN. Elle laisse entendre que son parti est exsangue parce que l'Etat lui réclame onze millions d'euros (1). La somme réclamée par l'avocat de l'Etat est bien celle-là, mais la présidente du parti d'extrême droite oublie de dire que le jugement ne sera rendu qu'en avril prochain et que le procureur général n'a requis, lui, que 500.000 euros d'amende contre son parti  pour avoir surfacturé des kits de campagne à ses candidats. L'appel est alarmant et dénonce une "volonté de tuer" son cher parti.
Il faut reconnaître que la Le Pen est la reine du culot: elle, ses vieux copains et son parti se sont visiblement fait beaucoup d'argent sur le dos des candidats et la voilà qui tend la main à ses militants, leur demandant 75 ou 100 € pour l'aider à financer la campagne des municipales.
L'héritière est une pauvre petite fille riche qui sait qu'elle peut tout dire, que ses soutiens sont des gogos qui la suivront jusqu'au bout du mensonge qu'elle a dans son ADN. Elle a un modèle qui la rassure: Donald Trump n'a jamais été aussi populaire. Aujourd'hui mis en accusation pour irrespect des règles de base de la fonction présidentielle et menacé d'une très hypothétique et assez improbable destitution, il n'a jamais autant plu à ses troupes.
De la difficulté de s'attaquer aux populistes...

(1) https://www.lexpress.fr/actualite/politique/le-drole-d-appel-aux-dons-de-marine-le-pen-a-ses-militants_2111369.html

dimanche 15 décembre 2019

La grande forme d'Anastasie

"Les cons, ça ose tout. C'est même à ça qu'on les reconnaît", faisait dire Michel Audiard au personnage incarné par Lino Ventura dans "Les Tontons flingueurs". Hier, une cinquantaine de cons a tout osé à Toulouse. A osé s'en prendre de manière très agressive à une crèche vivante, aux personnes, des enfants notamment, qui y figuraient. Ils se sont présentés, en hurlant, comme "anti-capitalistes" et en criant "stop aux fachos" (1). Les cons, ça ne sait pas que ça peut être soi-même facho. Apparemment, être anti-capitaliste, c'est aussi, pour eux en tout cas, être anti-intelligence, anti-respect, anti-tolérance, anti-nuance. Devant les menaces des fachos qui sont anti (ou l'inverse, on s'y perd), les récitals de chœurs ont été annulés et la ferme solidaire, qui fait de la réinsertion socio-professionnelle, est repartie avec ses moutons qu'elle avait prêtés pour l'occasion. En quoi cette crèche était-elle capitaliste et fasciste? On ne le sait. Mais les cons, ça n'a pas à donner d'explications.

Dans le même temps, d'autres cons, supporters de foot ceux-ci, s'en prenaient virulemment à la Ministre des Sports Roxana Maracineanu, venue assister tranquillement, et à titre privé, à un match de troisième division (2). Le milieu du foot n'a jamais été le plus raffiné qui soit. Mais l'extrême aggressivité et la vulgarité adressées à la Ministre indiquent combien on a là affaire à des cons sans limites. Ils lui ont hurlé: "Prends ta voiture et va-t-en!", "T'as rien à faire là" et de pires trivialités encore. La Ministre a été forcée de fuir sous les jets de bière tandis que les cons scandaient "Tout le monde déteste la ministre". C'est un signe qui ne trompe pas sur leur identité: les cons, ça pense que tout le monde pense comme eux. 

Les cons, ça ose déchirer des livres et interdire une conférence. Il y a un mois, c'est François Hollande et une librairie indépendante qui en ont fait les frais (3). Les cons étaient cette fois étudiants, quelques centaines, venus interdire à l'ancien président de la République de s'exprimer à la faculté de droit de Lille. Ils réagissaient au suicide récent d'un étudiant de Lyon qui témoignait ainsi de sa précarité. "Hollande assassin!", hurlaient-ils. On ne sait quel rôle ils lui attribuent dans ce drame, mais ils ont détruit tous ses livres. L'Inquisition et les nazis en faisaient autant. Les cons, ça ne connaît pas l'Histoire.

Les cons aujourd'hui, ça empêche toutes celles et tous ceux qui ne pensent pas comme eux de s'exprimer. Les cons, ça empêche (c'était en octobre) la philosophe Sylviane Agacinski de prendre la parole - à l'université de Bordeaux cette fois - parce qu'elle n'a pas les mêmes positions qu'eux sur la PMA et la GPA (4). Les cons, ça empêche aussi des représentations de pièces de théâtre. Par exemple celle des "Suppliantes" d'Eschyle à la Sorbonne (c'était en avril), parce qu'ils y voient ce qu'ils ont envie d'y voir sans comprendre le message (5). Les cons, ça n'aime pas réfléchir.

Toujours à la Sorbonne (c'était en novembre), les cons, ça fait annuler un séminaire sur la déradicalisation auquel participait la Grande Mosquée de Paris, sous prétexte qu'il favorisait l'islamophobie (6). Les cons, c'est incapable de comprendre que l'islamophobie est favorisée par la radicalisation.

"Ce néofascisme où l'on fait l'autodafé des livres vient, non de l'extrême droite, mais de l'extrême gauche et elle a pour théâtre, ce n'est pas tout à fait un hasard, le lieu même où naquirent la disputatio médiévale comme l'esprit critique et l'anti-racisme: l'université. C'est pour l'esprit un scandale qui n'a pas de précédent depuis la Seconde Guerre mondiale, à l'exception de Mai 68. La confusion de la science et du militantisme politique n'est pas seulement un crime contre les droits de l'homme, c'est un recul de la civilisation." C'est Jacques Julliard qui s'exprime ici (7).
Il fait référence à la moraline de Nietzsche, "cette substance toxique" qui consiste à se servir de la morale pour abattre l'adversaire. "La moraline est fille du populisme, c'est-à-dire du refus des règles de la démocratie formelle, et des règles de la pensée tout court."
C'est au nom d'un prétendu progressisme que s'expriment ainsi certains de ces fanatiques. "Ce progressisme-là résonne comme un bruit de bottes", constate Gérard Biard (6). 

On a le droit de ne pas croire en quelque dieu que ce soit, de considérer que la Bible et les Evangiles, le Coran ou la Torah ne sont que de belles ou moins belles histoires. On a le droit de blasphémer comme d'être scandalisé par les critiques de la religion. On a le droit de ne pas être d'accord avec les positions ou les projets du gouvernement ou de telle ou telle personnalité. On a le droit et même le devoir de défendre les plus défavorisés, de s'opposer au racisme, à l'homophobie et au sexisme. Mais tout cela n'autorise pas à hurler, à censurer, à pratiquer la terreur intellectuelle, à tout oser, à exprimer une telle connerie agressive. On a surtout le devoir d'être (plus) intelligent. Mais on prend alors le risque d'être moins con. Autant le savoir.

(1) https://www.ladepeche.fr/2019/12/14/toulouse-la-creche-vivante-interrompue-par-les-manifestants,8604828.php
(2) https://www.huffingtonpost.fr/entry/roxana-maracineanu-noel-le-graet-supporters_fr_5df4e940e4b03aed50eee947?utm_hp_ref=fr-homepage
(3) https://www.marianne.net/societe/livres-francois-hollande-universite-lille-2-librairie-meura
(4) https://www.liberation.fr/checknews/2019/10/27/pma-pourquoi-la-conference-de-sylviane-agacinski-a-t-elle-ete-annulee-a-l-universite-de-bordeaux_1759987
(5) https://www.lepoint.fr/culture/eschyle-censure-a-la-sorbonne-27-03-2019-2304080_3.php
(6) Gérard Biard, "Le progressisme en rangers", Charlie Hebdo, 27.11.2019.
(6) https://www.lefigaro.fr/vox/societe/jacques-julliard-contre-la-guerre-civile-20191201
A lire aussi: "Cette haine qui monte", Serge Raffy:
https://www.nouvelobs.com/chroniques/20191113.OBS21033/france-ecoute-cette-haine-qui-monte.html

jeudi 12 décembre 2019

Ces mollahs malades

Les barbus iraniens détestent les femmes. En ont-ils si peur?
En août dernier, Saba Kordafshari, 20 ans, a été condamnée à une peine de vingt-quatre ans de prison et à la privation de ses droits civiques. Son crime: avoir participé à une manifestation contre le voile à Téhéran. Elle est ainsi condamnée pour "incitation à la corruption et à la prostitution" (quinze ans), pour "rassemblement en vue de commettre des crimes contre la sécurité nationale" (sept ans et demi) et pour "propagande antirégime" (un an et demi). Avant d'être arrêtée, elle avait diffusé, comme beaucoup d'autres femmes, des photos d'elle dans cette manifestation. 
D'autres femmes ont été condamnées pour avoir distribué, dans une rame de métro exclusivement réservée aux femmes, des roses blanches aux passagères à l'occasion de la Journée internationale des femmes. L'une d'elles, l'actrice Yasaman Aryani, a été condamnée pour cet acte à seize ans de prison (1). 
La sévérité des sentences pour des faits qui, dans tout pays démocratique et un peu sensé, ne sont que normaux, voire sympathiques, a surpris les femmes. "Sauf celles, écrit le site d'information Raseef22 (2), qui savaient que l'ultraconservateur Ebrahim Raïssi, surnommé l'Homme des exécutions, avait été nommé à la tête de l'institution (le Tribunal révolutionnaire islamique). Vingt-quatre ans de prison, cela paraît une vie entière, mais cela ne représente pas grand-chose pour celui qui, en 1988, a fait exécuter des milliers de personnes sans le moindre procès". 

On craint le pire, à nouveau, en Iran. Alors que la colère gronde dans les rues face au coût de la vie et à la corruption du régime, divers témoignages indiquent que la répression vise en priorité les femmes accusées par des religieux de "faire leur intéressante". Aujourd'hui, on atteint le sommet de l'ignominie avec cet appel d'un mollah à tuer les protestataires "de la manière la plus douloureuse possible en les pendant en public" ou encore "de leur couper les mains et les pieds pour les relâcher infirmes afin qu'ils servent d'exemples à d'autres, ou alors en les expulsant du pays" (3).
Au nom de quel dieu fou s'exprime ce personnage monstrueux?

On rêve de voir toutes les femmes musulmanes de la planète ôter leur voile, ne serait-ce qu'une journée, pour afficher leur solidarité avec leurs sœurs iraniennes. Là-bas, en Iran, ne pas porter le voile, ne peut être "un choix personnel". Le voile est une arme politique de répression des femmes.

(1) Une pétition d'Amnesty International pour la défendre:
https://www.amnesty.fr/liberte-d-expression/petitions/liberation-immediate-pour-yasaman-aryani
(2)  "Pour un moment de liberté", Raseef22 (Beyrouth), 29.8.2019, in Le Courrier international, 4.12.2019.
(3) https://www.lalibre.be/international/asie/leur-couper-les-mains-et-les-pieds-l-appel-de-l-iran-au-sujet-des-manifestants-5df0c603d8ad58130dd0d602

samedi 7 décembre 2019

Le vide populiste

Que restera-t-il dans cinq ans, dans dix ans, de tous ces mouvements populistes qui ont (ou ont eu) le vent en poupe en ce début de XXIe siècle?

Dans onze mois, on connaîtra le nom du nouveau président des Etats-Unis. Déjà!?, se dit-on, alors qu'on se demande quand l'actuel va enfin commencer à prendre sa fonction à bras-le-corps, à avancer des idées nouvelles, à lancer des projets. Jusqu'à présent, il n'a fait que détruire les avancées précédentes, retirer son pays d'accords internationaux, jouer les caïds, invectiver la terre entière et favoriser ses propres intérêts, sans (vouloir) comprendre grand-chose à la politique.

En Italie, le Mouvement 5 Etoiles, qui avait balayé la vieille classe politique, "a été un raz-de-marée qui, depuis 2013, a investi tout le paysage politique italien, mais sans rien construire", estime le journaliste de L'Espresso Marco Damilano. "Et lorsque le niveau des forces antisystème a baissé, l'eau s'est retirée, ne laissant rien dans son sillage: aucun culture politique, pas de classe dirigeante, pas la moindre réalisation au bilan de son gouvernement" (1).
Matteo Salvini, le fier-à-bras, après avoir fait tomber le gouvernement dont il était le numéro due, a échoué à devenir l'uno. Depuis, il tente de séduire tous azimuts. Il voudrait que la Liga, son parti, rejoigne le Parti populaire européen, qui regroupe les partis démocrates-chrétiens. Il prend ses distances avec l'extrême droite, plaçant la sécurité et la lutte contre l'immigration aux derniers rangs de ses priorités, pour parler plutôt impôts, économie et emploi. Ce qui l'empêche pas de venir soutenir l'extrême droite flamande, le Vlaams Belok (2). En Emilie-Romagne, il essaie de se faire passer pour un communiste. "C'est le plus transformiste des hommes politiques italiens, estime Marco Damilano. Il est passé du séparatisme au souverainisme, et, désormais, il lui est très facile de s'ériger en héritier du centrisme modéré et d'une certaine anthropologie conservatrice qui trouve aussi un écho auprès de l'électorat post-communiste des régions rouges. Finalement, Salvini, s'il réussit, aura créé le parti de la nation, une créature politique inédite et inquiétante: le transformisme autoritaire" (1).

Boris Johnson, le roi de l'esbrouffe, refuse les interviews à une semaine des élections britanniques. Et pourtant, l'homme est un inlassable péroreur, qui s'exprime tant et plus, souvent à tort et à travers. Il avait promis qu'avec lui, c'était sûr et certain, le Brexit serait une réalité le 31 octobre dernier. Sa carrière, écrivait il y a six mois le Foreign Policy, "n'est fondamentalement rien de plus qu'une escroquerie: une interminable quête de popularité de la part d'un homme qui n'a cessé de démontrer son incapacité à l'utiliser de quelque façon utile". Stephen Paduano constate l'indéniable sens du spectacle de BoJo, mais estime que sa popularité est "inversement proportionnelle à ses réussites professionnelles. Car après vingt ans aux affaires, le bilan de Johnson est particulièrement maigre". Député, il a toujours été peu assidu au parlement. Le journaliste salue cependant des avancées quand il fut maire de Londres. Mais "durant ses deux années à la tête du Minsitère des Affaires étrangères, de 2016 à 2018, il n'a guère fait que semer la pagaille, dans le pays avec ses complots contre la Première ministre et à l'étranger avec ses bourdes incessantes". Aujourd'hui, Boris Johnson est en tête des sondages en Grande-Bretagne.

Au bout du compte, le dindon de ces mauvaises farces, c'est ce bon peuple au nom duquel ces partis qui ne veulent parfois pas l'être et ces (ir)responsables parlent (trop) fort et font semblant d'agir. Mais comment peut-on être si naïf et croire ainsi aux haineux et aux dégagistes sans nuances?

Le non-verbal, on le sait, en dit souvent plus que le verbal. Retrouvez les populistes à leur attitude sur cette photo de l'AFP, prise au sommet de l'Otan. La position "manspreading" (jambes écartées) de Trump, Johnson, Erdogan et l'un ou l'autre encore donnent d'eux une image d'ado qui veut avoir l'air d'un mec, un vrai. Et qui a juste l'air grossier.



(1) "La métamorphose de Salvini", L'Espresso, 1.11.2019, in Le Courrier international, 14.11.2019.
(2) Contraction de Belang (nom actuel) et de Blok (ancien nom)
https://www.lalibre.be/belgique/politique-belge/des-militants-s-opposent-a-un-meeting-de-haine-organise-par-le-vlaams-belang-avec-pour-invite-salvini-5de572b8f20d5a0c46f34e79
(3) Stephen Paduano, "Boris Johnson ne fait plus rire", Foreign Policy  (Washington), 31.5.2019, in Le Courrier international, 13.6.2019.

jeudi 5 décembre 2019

Sonner la retraite

Je ne connais pas dans le détail la réforme des retraites proposée par le gouvernement français (il est vrai que le projet reste assez flou) et de toute manière je ne suis pas concerné (puisqu'ayant effectué toute ma carrière professionnelle en Belgique). Et je ne voudrais pas apparaître ici comme le râleur qui râle contre les râleurs (bien que je puisse assumer). Mais bon... au point où on en est, en France, qui ne râle pas n'existe pas. Donc, je m'exprime.
Une bonne partie de la France est en grève aujourd'hui, et peut-être pour un moment, contre la réforme des retraites (et non "contre les retraites" comme le titrait le HuffingtonPost: "Suivez la journée de mobilisation contre les retraites", publié ce jour à 12h30 et à 13h30 encore).

Le gouvernement semble avoir largement consulté sur cette question (1), sans doute pas assez, mais on peut aisément comprendre, à entendre les manifestants fâchés, que peu de gens ont fait entendre leur voix dans le cadre de l'appel à opinions, mais qu'ils sont beaucoup plus nombreux à s'exprimer aujourd'hui dans la rue pour dire leur opposition. A quoi? A un changement d'un sytème d'une complexité extrême? Le gouvernement voudrait un système plus équitable. Que chaque euro épargné rapporte la même chose à chacun. Ce qui est loin, très loin, d'être le cas actuellement.
Le système par points m'apparaît - mais peut-être suis-je naïf - plus équitable, plus honnête. Certains défendent le système dont ils bénéficient actuellement qui veut que leur pension de retraite vaille x % de leur dernier salaire. Ce qui favorise ceux qui ont eu de la chance ou qui ont eu une carrière qu'on appelle plane.
Ceux qui, comme moi, ont changé d'employeur très souvent sont retombés au niveau le plus bas chaque fois qu'ils ont retrouvé un emploi. Et se retrouvent ainsi avec une retraite peu éleveée. Or, c'est ce qu'on nous annonce: les salariés d'aujourd'hui et plus encore de demain doivent s'attendre à changer très fréquemment d'employeur. Quelqu'un qui perd son emploi à cinquante ans, par exemple, et a la chance de retrouver un emploi n'a aucune ancienneté quand il est réengagé (s'il a cette chance-là). Et donc, si sa retraite est calculée sur son dernier salaire, elle sera peu élevée. Injuste donc par rapport à quelqu'un qui n'a pas travailé plus ou moins, mais qui a toujours été employé par la même entreprise.
Des agriculteurs se disent favorables à la réforme prévue par le gouvernement: ils verront leur retraite augmenter. Mais qui s'en préoccupe?

L'économiste Thomas Guénolé, (qui se présente comme "intellectuel altermondialiste et engagé à gauche", proche de la France dite insoumise) qualifie les grévistes d'aujourd'hui de "héros" (2). On a les héros comme peut. Et les populistes aussi. Allez savoir pourquoi, je n'arrive plus à prendre au sérieux les intellectuels altermondialistes enragés à gauche. 

On rêve de voir les citoyens se mobiliser autant pour le climat que pour leur retraite. Mais sans doute ne faut-il pas rêver. L'homme prend beaucoup de plaisir à se reproduire, mais se soucie plus de sa retraite que de sa descendance.

A lire:
https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2019/12/03/le-vrai-du-faux-des-regimes-speciaux-de-retraite_6021530_4355770.html

(1) https://www.reforme-retraite.gouv.fr/participez/la-participation-citoyenne-2019/article/methode-et-calendrier


mercredi 4 décembre 2019

Nous si lourds

Hier, des représentants de six départements de la Région Centre - Val de Loire se sont concertés pour réinstaurer une limitation à 90 km/h (plutôt que 80) sur divers tronçons routiers (1).
Des entreprises du BTP bloquaient ces derniers jours des raffineries pour protester contre la suppression des avantages fiscaux dont ils bénéficiaient sur le carburant utilisé pour leurs engins.
Il y a quelques jours, c'étaient les chauffeurs routiers qui manifestaient à la frontière belge contre la hausse du carburant.
Les producteurs français de champagne et de roquefort s'inquiètent de voir les Etats-Unis augmenter les taxes sur les exportations françaises. Ils veulent continuer à faire voyager au-delà des mers leurs productions. Il en va de leur survie, affirment-ils.

Au même moment s'est ouverte à Madrid la COP 25. Mais qui s'y intéresse? Le principal souci de chacun semble être de pouvoir continuer à produire, exporter et consommer comme avant. Ne changeons rien. Les premières journées de gel qui suivent un automne pluvieux nous font joyeusement oublier les épisodes caniculaires et la longue période de sécheresse. Qui vont cependant se reproduire à un rythme accéléré.
Les études sur les conséquences du dérèglement climatique et de l'effondrement de la biodiversité se succèdent, chacune plus alarmiste que les précédentes. Un article de juin 2018 de la revue Nature Geoscience envisage la possibilité d'une élévation de six mètres du niveau des océans à la fin du siècle. La situation dramatique que vivent les habitants du Var aujourd'hui n'est rien encore par rapport à ce qui se passera dans les années à venir. 375 millions d'habitants à travers la planète verraient leur maison irrémédiablement disparaître sous les eaux. A la même période, la hausse des températures pourrait être de 5°C. La planète serait en état de sécheresse permanente. Invivable donc.
Le processus est enclenché et sera, chaque jour, un peu plus difficile à maîtriser. Aux Etats-Unis, en 2045, plus de 300.000 logements auront sombré dans la mer. D'ici 2100, près de 1.000 milliards de biens immobiliers y auront disparu sous eau (2).
On n'entend plus guère les paons climatosceptiques qui péroraient il y a quelques années encore. L'évolution du climat les a ridiculisés. Mais nous sommes nombreux à nous comporter en climatosceptiques silencieux: nous donnons priorité à notre confort, préférant ignorer les études scientifiques et feignant de croire qu'on trouvera une solution. Par contre, nous nous mobilisons rapidement dès que notre mode de vie semble remis, ne serait-ce que très légèrement, en question.
"La décarbonisation de nos économies ne sera pas une tâche facile, mais elle est nécessaire, écrit Rachel Riederer (2). Ce sera dur, mais pas aussi dur que la série de désastres qui s'abattront sur nous si nous ne faisons rien. (...) Il ne s'agit alors pas de renoncer à une Terre habitable, mais à un siècle de règne de l'automobile et de déforestation sauvage, à des années de consommation illimitée de viande et de voyages bon marché, et enfin à une croissance économique massive comme fondement de notre système. (...) Choisir l'inaction, c'est renoncer à la raison".

Nous sommes prompts à dénoncer la soumission des élus politiques aux lobbies économiques. Mais, bouffis de contradictions comme nous le sommes, nous soutenons ardemment ces derniers en nous opposant à toute mesure qui entend réduire la circulation routière et ses vitesses.
Aux Pays-Bas, face à la colère des agriculteurs obligés de réduire leurs émissions d'azote, le gouvernement a décidé de faire participer aussi les automobilistes aux efforts de lutte contre les émissions de CO2. Dès 2020, la vitesse sur autoroute en journée sera limitée à 100 km/h plutôt que 130 (3). On n'ose imaginer les réactions de colère noire (ou jaune) que susciterait une telle mesure en Belgique, en France ou en Allemagne.

(1) France 3 Centre - Val de Loire, Journal, 3.12.2019, 19h.
(2) Rachel Riederer, "La fin du monde approche... Et c'est une bonne nouvelle", Le Courrier international, .11.2019.
(3) https://www.lefigaro.fr/flash-eco/les-pays-bas-abaissent-la-vitesse-maximale-a-100-km/h-sur-autoroute-20191113

lundi 2 décembre 2019

Moments de dévoilement

Parlons, une fois encore, de ce fichu voile. Pour répondre à cette gauche qui se veut bien-pensante en se rangeant aux côtés des islamistes pour défendre leur drapeau. C'est le choix des femmes de le porter, disent-ils, il faut le respecter, c'est une décision personnelle.

Chez nous, en France, en Belgique et dans d'autres pays européens, une bonne partie de la gauche, qui ne sait plus où trouver des voix, est prête à tout pour en gagner. Y compris à se déjuger en manifestant contre une prétendue islamophobie en compagnie de salafistes. Et en défendant le voile au nom du choix personnel de chacune. En 2010, Jean-Luc Mélenchon affirmait que les femmes voilées se stigmatisaient toutes seules et il récusait le terme d'islamophobie. En 2018 encore, il estimait que la religion devient de plus en plus ostentatoire dans nos sociétés. Mais le MélenChe d'aujourd'hui n'a pas hésité à participer, il y a quelques semaines, à une manif où la foule scandait Allah Akbar et huait les noms de Mohamed Sifaoui ou de Zineb El Rhazoui parce qu'ils ont l'outrecuidance de dénoncer l'islamisme, ce pourquoi ils vivent, l'un et l'autre, sous protection policière.
Il y a bientôt cinq ans, Mélenchon, à l'enterrement de son ami Charb, lâchement assassiné au nom du Prophète, dénonçait son exécution par "les fanatiques religieux, crétins sanglants qui vocifèrent de tous temps". Aujourd'hui, MélenChe s'est dévoilé: il n'est qu'un traitre qui marche sur le cadavre de celui qui fut son ami, un vulgaire politicien en quête de voix, communautaires en l'occurrence. Comme le dénonce Nathalie Bianco dans une lettre vibrante (1). Lui et tous ceux qui essaient (notamment de manière très paternaliste, comme le fait Edwy Plenel) de protéger contre ses dérives violentes l'Islam de France et de l'absoudre de son manque d'auto-critique ouvrent un boulevard à l'extrême droite, trop contente de les voir flirter avec les islamistes et de pouvoir se présenter ainsi comme le seul rempart contre cette violence indéniable.

"Le voile, un choix personnel. Vraiment?", interroge Dalal Al-Bizri (2) qui rappelle qu'il n'y a pas si longtemps "les cheveux au vent (...) avaient été un symbole de la liberté nationale" en Iran. Et qu'aujourd'hui, là et ailleurs, de plus en plus de femmes paient cher, très cher, leur refus de porter le voile. La journaliste rappelle aussi que Daech tuait toute femme ne portant pas de niqab noir. "Vous comprendrez, dit-elle, que le port du voile ne relève en rien d'une décision personnelle."
Dans le contexte actuel qui voit le voile imposé aux femmes par la pression religieuse et familiale, "le fait de l'ôter ne relève pas seulement d'un choix personnel, mais aussi d'une démarche qui est tout ce qu'il y a de plus politique. Ceux qui prennent de grands airs pour dire que le voile relève uniquement du choix personnel de chacune, ceux-là nous empêchent de comprendre cette nouvelle période. Ils nous empêchent de voir que, à l'époque des accessions à l'indépendance, le monde arabe portait un regard bien différent sur le voile".

La jeune journaliste Zineb El Rhazoui se souvient qu'au Maroc, où elle vivait alors, elle a assité à ce moment de basculement où, alors que le voile était très peu porté, elle l'a vu se répandre, comme en Algérie. "Le voilement des femmes est l'indice premier qui nous renseigne sur le taux de pénétration de l'idélogie islamiste dans une société. C'est le marqueur visuel d'une adhésion ou pas à cette idéologie. C'est à ça qu'il sert dans les pays où l'islamisme progresse. Quel choc pour moi de voir que ce débat se pose aujourd'hui en France et qu'il est accueilli avec beaucoup d'inculture, de mauvaise foi..." (3)

Le voile, un choix personnel pour les Iraniennes? Face à la contestation qui s'exprime dans les rues  ces dernières semaines, les barbus au pouvoir en Iran ont décidé de cibler les femmes, renforçant l'application des règles sur l'obligation de porter le voile (4). Les effectifs de la brigade des mœurs ont été renforcés, les chauffeurs de taxi ne peuvent embarquer des femmes non habillées selon la norme et les citoyens tout comme la compagnie de métro de Téhéran sont invités à signaler les femmes dont la tenue n'est pas conforme à la volonté des ayatollahs. Les femmes incorrectes sont punies d'amendes, de coups de fouet ou d'emprisonnement. Rien qu'à Téhéran, ces derniers temps, 300.000  femmes ont été convoquées à la police. Même les dénonciations de maltraitance de femmes sont interdites. Le président du tribunal révolutionnaire (sic) de Téhéran menace de dix ans de prison celles et ceux qui postent sur les réseaux sociaux des photos de femmes maltraitées. Reste que les femmes iraniennes résistent et que le gouvernement iranien n'est toujours pas parvenu, en quarante ans, à imposer ses règles sur le port du hidjab. C'est, pour nombre d'entre elles, un choix personnel de ne pas porter ce vêtement qui doit les rendre honteuses d'être femmes.

L'Egyptienne Mennah Bareh, en décidant de s'en passer, a vécu "un des plus beaux moments" de sa vie. (5)  "Je n'avais vraiment jamais ressenti un tel bonheur. Je me sentais vraiment en phase avec mon apparence physique, j'avais retrouvé confiance en moi, je pouvais à nouveau porter les vêtements que je voulais, me coiffer selon mes envies du jour". Elle fustige ceux qui contrôlent la manière dont les femmes s'habillent: "ceux qui expliquent que l'apparence n'a pas d'importance et que la seule chose qui compte est la personnalité, ceux-là vous mentent. (...) Eux-mêmes ne cessent de se préoccuper de la manière dont une femme doit se présenter devant autrui, puisque ce sont eux qui lui imposent un fichu sur la tête". Le voile, lui rétorque-t-on, protège les femmes des regards des hommes. "Le voile n'y change rien, constate-t-elle, et, surtout, ce n'est pas mon problème si un homme perd ses moyens à la vue d'une chevelure. Qu'il aille se faire soigner et régler ses frustrations, loin de moi."

(1) https://www.marianne.net/debattons/tribunes/lettre-ouverte-melenchon-dimanche-le-souvenir-de-ton-ami-charb-t-t-il-glace-le
https://www.marianne.net/debattons/editos/marche-contre-islamophobie-melenchon-trahit-charb
(2) Dalal Al-Bizri, "Monde musulman. Le voile, un choix personnel. Vraiment?", Al-Araby Al-Jadid (Londres), 10.10.2019, in Le Courrier international, 14.11.2019.
(3) https://www.lefigaro.fr/vox/societe/elisabeth-badinter-zineb-el-rhazoui-les-insoumises-20191129
(4) "En Iran, elles résistent malgré la répression", Radio Farda (Prague), 31.7.2019,  in Le Courrier international, 14.11.2019.
(5) Mennah Bareh, "Un des plus beaux moments de ma vie", Raseef22 (Beyrouth), 16.9.2019,  in Le Courrier international, 14.11.2019.

vendredi 29 novembre 2019

Coincés dans ce foutu vieux temps

Qu'y avait-il de bon dans ce vieux temps que tant de gens regrettent?
La mortalité infantile? Le nombre de morts sur les routes? La faim dans le monde? La misère? Le nombre de crimes? Le nazisme, le fascisme et le stalinisme? L'inconscience de la pollution? 
C'était le temps où on produisait, on consommait et on polluait dans la joie et l'insouciance. C'est dans le bon vieux temps qu'on a préparé ce que nous vivons aujourd'hui, qu'on a brûlé tant et plus de pétrole, de gaz et de charbon, qu'on a fabriqué tous ces gaz à effet de serre qui menacent maintenant l'humanité.
Bien sûr, les temps actuels ne sont guère réjouissants, avec précisément la pollution qui atteint des niveaux inouïs et le dérèglement climatique, avec l'érection de murs, avec l'arrivée au pouvoir de fous furieux et haineux. Ce sont ceux-là mêmes qui essaient de nous faire croire que leurs murs, le rejet des étrangers, l'entre-soi nous ramèneront à ce bon vieux temps qui n'a jamais été aussi positif qu'on a envie de le croire. Qui n'est donc qu'un vieux temps qu'il est illusoire - et qu'il serait sans doute suicidaire - de vouloir retrouver. Puisqu'on ne revient jamais en arrière, il faut bien aller de l'avant. Et être inventifs. Plus que jamais.
"La fin du monde approche... Et c'est une bonne nouvelle", titrait la semaine dernière Le Courrier international. La Terre devient invivable et il va bien falloir que nous changions de mode de vie si nous voulons survivre.
"Alors que le doute et le déni autour du dérèglement climatique ont reculé, écrit Rachel Riederer, ils ont été remplacés par des sentiments - tout aussi paralysants - comme la panique, l'angoisse et la résignation." (1)
Mais la peur est utile, estime le journaliste américain David Wallace-Wells (2). C'est le principe de la destruction mutuelle assurée qui a encouragé les dirigeants mondiaux à mettre fin à la guerre froide. Et la peur du cancer, rappelle-t-il, incite bien des fumeurs à cesser de fumer.
"Nous devons accepter que notre de vie n'est plus viable, affirme la psychologue Renee Lertzman, et que nous devons maintenant nous montrer à la hauteur du problème. Ce qui fonctionne vraiment bien, c'est quand les gens se sentent invités et encouragés à participer à quelque chose de constructif, tout en ayant conscience de la gravité de la situation."
Un de ses collègues estime que le seul remède à l'angoisse climatique est l'engagement. Et une autre que ce qui est bon pour le climat - sous forme de participation à un effort collectif - est également bon pour le mental.
Résumons-nous: laissons le prétendu bon vieux temps là où il est: dans le passé et dépêchons-nous de construire les temps nouveaux. Il y a urgence. Mais bon... il faut bien constater qu'une majorité de gens (on n'oserait dire citoyens) continuent à vivre comme dans leur insouciant vieux temps. Même si nombreux sont les appels à consommer moins et de manière plus responsable, on peut craindre qu'en cette journée de grande fête du commerce le friday soit effectivement assez black pour la planète. Le vieux temps dure longtemps.

(1) "La fin du monde approche... Et c'est une bonne nouvelle", Le Courrier international, .11.2019.
(2) auteur de "The Doomed Earth Catalog" - "La Terre inhabitable".

mardi 26 novembre 2019

Distribution de cadeaux

Qui interdira tous ces cadeaux que des organisations humanitaires nous offrent alors que nous n'avons rien demandé? Qui mettra fin à ces pratiques scandaleuses qui voient des organismes gaspiller une part non négligeable de leur budget non pas à leur objet premier mais à des démarchages pour le moins pernicieux?
En quelques jours, l'Unicef, Action Enfance, Médecins sans frontières, l'Institut Curie, Handicap International et d'autres encore nous ont offert cartes de vœux, carnets de notes, stylos, cartes du monde, post-it, étiquettes personnalisées, etc. Attendant, bien entendu, un retour financier de notre part. 
Si je donne de l'argent à une association, c'est pour qu'elle mène des actions directes sur le terrain qui est le sien, certainement pas pour payer des gadgets et des courriers.

vendredi 22 novembre 2019

Donnez-nous un sauveur

On l'a écrit déjà: en France, le président de la République est responsable de tout. Surtout de ce qui ne va pas. Si un bureau de poste ferme, c'est de sa faute. Si les trains arrivent en retard, c'est de sa faute. S'il y a trop d'échecs scolaires, c'est de sa faute. Si une entreprise ferme, c'est encore et toujours de sa faute.
La principale revendication des Gilets jaunes semble être la démission du président Macron. Il est reponsable de leurs divers malaises, aussi disparates soient-ils.
En 2017, le candidat Macron avait promis aux travailleurs de l'entreprise américaine Whirlpool à Amiens, alors en grande difficulté, que celle-ci trouverait un repreneur. Il y en eut un, largement aidé par l'Etat qui apporta 2,5 millions d'euros, mais son projet vira rapidement à l'échec. Il devait sauver 186 emplois. Mais seuls 44 travailleurs sont encore actifs sur le site, employés par une autre entreprise qui a repris une partie de l'ancienne. Le projet de production de chargeurs de batterie et d'armoires équipées de condensateurs destinés à produire de l'énergie propre s'est cassé la figure, "faute de débouchés commerciaux", nous dit Le Monde. Peut-être le projet manquait-il de sérieux et de réflexion, peut-être le repreneur a-t-il profité abusivement de cette reprise, mais pour les travailleurs, les syndicats et François Ruffin, le vrai fautif, c'est le président Macron (1).
Il y a huit jours, une forte tempête de neige s'abattait sur la Drôme. Le poids de la neige tombée en abondance sur les arbres qui ont encore leurs feuilles et sur les lignes électriques a fait tomber de nombreux pylones et cassé un peu partout câbles et branches. Résultat: des milliers de foyers privés d'électricité. Ce matin encore, ils étaient un millier. Hier soir, au JT de France 3, une maire appelait l'Etat, donc son président, à agir. Le problème - bien réel - concerne Enedis, chargé de la gestion du réseau électrique et qui a multiplié les équipes sur le terrain. Mais c'est, une fois encore, du président qu'on attend la solution.
Curieux pays au fonctionnement pyramidal si peu remis en question. Il y a quelques années, le journaliste de France Inter Thomas Legrand écrivait un ouvrage intitulé "Arrêtons d'élire des présidents". Il semble être le seul à le souhaiter. C'est tellement pratique d'avoir un bouc émissaire dont on attend qu'il soit un sauveur en toutes circonstances. Un ancien maire m'expliquait qu'il est impossible d'envisager de supprimer, voire de modifier la fonction présidentielle telle qu'elle est conçue en France: les Français ont le sentiment que l'élection présidentielle est le summum de l'exercice de la démocratie. En fait, ils adorent élire leur roi et le guillotiner le lendemain.

(1) https://www.lemonde.fr/economie/article/2019/11/22/bouscule-lors-de-son-retour-sur-le-site-de-whirlpool-macron-assure-avoir-dit-la-verite_6020126_3234.html
https://www.huffingtonpost.fr/entry/a-whirlpool-a-quoi-setait-vraiment-engage-macron-devant-les-salaries_fr_5dd693bde4b0e29d727ff4ac?utm_hp_ref=fr-homepage

jeudi 21 novembre 2019

Les recettes de Gargamel

Vous souffrez d'un sentiment d'oppression? Vous vous sentez mis de côté? Prenez du Murus berlinensis, un médicament homéopathique des laboratoires Hélios. Ses pilules sont "aspergées avec une solution de mur de Berlin". Rassurez-vous : s'il n'y a aujourd'hui presque plus de morceaux du mur de Berlin, on pourra en prélever en Israël, aux Etats-Unis ou en Hongrie. Un jour sans doute.
Vous voulez vous prémunir des effets nuisibles d'un traitement par radiothérapie ? Prenez du Rayon X 9CH des laboratoires Boiron. Ses pilules sont faites d'une "solution diluée de rayons X". Oui, même si les profanes que nous sommes l'ignoraient, les rayons X sont diluables.  
Vous souffrez de rhumatismes ? Une solution : le Luesinum, "préparé à partir de prélèvements sur des chancres syphilitiques". Il suffit de savoir ce que contiennent ces gélules pour n'avoir plus mal nulle part. 
Et si vous craignez la grippe, prenez bien sûr de l'Oscillococcinum, fabriqué à partir d'une "macération de cœur et de foie de canards de Barbarie". 
C'est Antonio Fischetti, journaliste scientifique à Charlie Hebdo, qui fait part de ses découvertes (1) suite à la lecture du livre "Connaissez-vous l'homéopathie ? Idéologie, médias, sciences", de Thomas C. Durand (2), docteur en biologie. 
Durand explique que l'Oscillococcinum est en fait "issu de la deux centième eau de rinçage du récipient où ont macéré quarante jours durant un foie et un cœur de canard".
On a poussé des cris d'orfraie quand le gouvernement français a annoncé que les médicaments homéopathiques ne seraient plus remboursés, parce que leur efficacité n'a jamais été démontrée scientifiquement. Il faut bien constater que l'homéopathie est une étrange science, pour le moins occulte. 
Mais après tout, chacun est libre d'y croire ou pas. Et croire fait parfois du bien, paraît-il. On est libre de croire que Dieu existe, qu'il est à l'origine de tout. Même de l'homéopathie.

(1) "Homéopathie et pensées magiques - Les petits dessous des granules", Charlie Hebdo, 13.11.2019.
(2) Editions matériologiques.

jeudi 7 novembre 2019

Et à la fin c'est l'islamisme qui gagne

Je voudrais remercier ici R.T. Erdogan. Sans la plainte qu'il a récemment déposée contre l'hebomadaire Le Point, (1) jamais je n'aurais lu ce magazine de droite. Or, j'y découvre que Kamel Daoud y écrit. Et bien. Kamel Daoud, journaliste algérien, connaît mieux que d'autres le danger islamiste. Il a été l'objet de la part d'un imam excité d'une fatwa pour apostasie. Mais aussi de la part de bonnes âmes européeennes de France pour avoir vu l'islamisme derrière les agressions dont ont été victimes de nombreuses femmes lors du réveillon de nouvel-an 2016 à Cologne (2).

Il y a quelques semaines, un élu d'extrême droite a voulu faire sortir de l'assemblée une femme voilée qui accompagnait des enfants venus assister aux débats du Conseil régional de Bourgogne - Franche-Comté.
"Je suis en colère et fasciné", écrit Kamel Daoud (3): voilà que l'on découvre que ce pays est ennemi de ses musulmans parce qu'un élu halluciné a agressé verbalement une voilée? L'avenir en France se décide donc entre deux extrêmes?"
Plus récemment, un fou furieux a agressé et gravement blessé deux musulmans à côté de la mosquée de Bayonne. Il n'est pas plus loup solitaire que les islamistes, même isolés, qui agressent et tuent les mécréants. Il y a Zemmour, il y a la famille Le Pen et son parti, il y a tous ces gens qui se jettent sur le moindre délit commis par quelqu'un à la peau basanée pour fustiger les musulmans.  L'agresseur de Bayonne a été candidat du Front National. Peut-on être vraiment surpris de voir des excités transformer en actes odieux les imprécations et les idées agressives qui se diffusent aujourd'hui librement? Même en direct à la télé.

De là à affirmer que la France est devenue islamophobe, il y a plus qu'un pas. Que beaucoup ont franchi allègrement.
Il a été (trop) souvent question ici de cette notion floue qu'est l'islamophobie, terme que se plaisent à clamer les barbus qui ne supportent pas d'être contredits. Elle dénonce à la fois le racisme et la critique d'une religion. Aujourd'hui, pour les victimes que se complaisent à être tant de musulmans, soutenus par de bonnes âmes blanches d'une bonne partie d'une gauche qui a perdu la tête, critiquer la religion islamique et ses signes s'apparente à du racisme. Or, comme d'autres pays européens, mais moins que des pays de culture musulmane, la France compte hélas de très, de trop nombreuses morts causées par la folie islamiste. Ces morts n'ont jamais suscité de manifestations de haine et de violence contre les musulmans. Ce qui n'empêche pas nombre d'entre eux de se voir comme des victimes de l'islamophobie.
"Cette folie de la victimisation fascine, écrit Kamel Daoud. Elle remplace à chaque occasion douloureuse, le travail à faire sur soi, l'obligation de lutter contre l'islamisme montant. Ainsi, je vois rarement les miens se mobiliser autant pour penser l'islam dans la France que pour les jongleries d'indignés sur les réseaux, les clowneries au nom de la communauté, qu'on oppose à la moindre réforme, même maladroite. On se retrouve à ne rien faire face à l'islamisme et à s'emporter, en rangs serrés, contre l'islamophobie."
Le journaliste dit "comprendre la mobilisation contre l'exclusion et les tribunaux identitaires, mais je ne peux pas, dit-il, parce que je suis du même bord, ne pas grimacer, sceptique, face à cette soudaine armée qui hurle à l'islamophobie en gommant ses causes. Et si on avait ce même courage pour dénoncer les rentes du halal? Et si on faisait autant face aux clergés autoproclamés? Résistance face aux djihadistes et aux communautarismes faciles?"

Aujourd'hui, en France, la laïcité est, plus que jamais, pointée du doigt. Notamment par les organisateurs d'une manifestation contre l'islamophobie prévue dimanche. Ils n'hésitent pas à traiter de "liberticides" les lois de 1905 sur la laïcité et de 2004 sur l'interdiction des signes religieux ostentatoires à l'école. La plupart des leaders de gauche ont appelé à rejoindre cette manifestation, avant que certains d'entre eux se rendent compte, heureusement assez tôt, qu'ils mettaient les pieds dans un terrain fangeux et nauséabond (4). "La laïcité, c'est la religion de la liberté", affirme Kamel Daoud qui préfére "une laïcité maladroite à une laïcité détruite".
"Forcer ce pays à se justifier sans cesse sur cette loi finira par précipiter sa reddition face au mal. Et, ce jour là, ceux qui jouent aux victimes de la laïcité vivront, pour de vrai, la pendaison aux poteaux des nouvelles croyances." 

(1) sur ce blog: "Comment s'appelle Calimero en Turquie?", 26.10.2019.
(2) sur ce blog: "La nuit des prédateurs", 6.1.2016.
(3) Kamel Daoud, "Une photo, un millaird de mots", Le Point, 24.10.2019.
(4) https://www.huffingtonpost.fr/entry/islamophobie_fr_5dc2d5d2e4b08b735d63451a?utm_hp_ref=fr-homepage

mercredi 6 novembre 2019

Yaqua et Yaquapa

On connaissait les Yaqua. Ceux pour qui tout est simple, la politique, l'économie, le social. Y a qu'à faire comme ils pensent, comme ils savent. Parce que eux ont compris et ceux qu'ils ne (les) comprennent pas sont vraiment de sombres crétins.
Voilà qu'on découvre les Yaquapa. En tout cas, une Yaquapa. Julie Graziani est ce qu'on appelle une chroniqueuse. Entendez par là qu'elle pérore là où lui demande de le faire. Le boulot de ces personnes est de parler sur des plateaux de télé de tout et de rien. Et surtout de dire n'importe quoi. Graziani excelle dans ce genre d'exercice. C'est elle déjà qui, dans l'émission 28 minutes d'Arte (mais que faisait-elle donc là?), s'était interrogée sur la nécessité de protéger toutes les espèces animales. Elle estimait qu'il ne fallait garder que celles qui sont utiles (1).
Dernièrement, c'est depuis le plateau de LCI qu'elle nous a fait profiter de la finesse de ses analyses. Parlant d'une mère divorcée avec deux enfants, qui survit difficilement avec le SMIC, l'aigle de la télévision a laissé entendre que cette femme, dont elle ne sait absolument rien, se retrouve peut-être sans emploi parce qu'elle n'a pas "bien travaillé à l'école". Sans doute aussi, dit-elle, n'aurait-elle pas dû divorcer, n'aurait-elle pas dû ajouter des difficultés à d'autres. Bref, elle ne doit s'en prendre qu'à elle-même de sa situation. Elle n'avait qu'à pas. Elle doit arrêter de se plaindre, dit cette disciple de Zemmour.
Quand on atteint ce niveau d'extrême bêtise, il faut arrêter de parler. Mais que deviendra alors Julie Graziani? Personne ne lui a appris à formuler une réflexion intelligente. A-t-elle bien travaillé à l'école? Qui lui dira qu'elle doit cesser d'ajouter des stupidités au mépris? 
On voit par là qu'il vaut mieux couper sa télé. Il s'en déverse trop de fiel et une odeur d'égout.

Post-scriptum du 7 novembre: face au tollé suscité par les propos de Julie Graziani, elle a été virée par "L'Incorrect". Elle pensait qu'écrire pour ce magazine très très à droite permettait toutes les incorrections. Raté!
https://www.lalibre.be/culture/medias-tele/si-on-est-au-smic-il-ne-faut-peut-etre-pas-divorcer-julie-graziani-licenciee-apres-ses-propos-juges-scandaleux-5dc46471d8ad58130d8ba4f8 

(1) sur ce blog, "Espèce de...", 12.5.2019
(2)  https://www.lalibre.be/international/europe/si-on-est-au-smic-il-faut-peut-etre-pas-divorcer-une-chroniqueuse-francaise-choque-la-toile-en-voulant-defendre-emmanuel-macron-5dc18025d8ad58388747e7aa

dimanche 3 novembre 2019

Les maçons aveugles

On a les héros qu'on peut. Ou qu'on veut. Celui de Théo Francken, ex-secrétaire d'Etat à l'asile et aux migrations et un des leaders de la nationaliste NVA, s'appelle Donald Trump.
"Il est du côté de l'homme modeste, du peuple", dit sans rire Francken (1) en parlant du milliardaire arrogant et prétentieux. Il apprécie que le Donald ait respecté ses promesses. A commencer par la construction d'un mur à la frontière mexicaine qui est sans conteste la marque de la proximité du président américain avec l'homme modeste mexicain, panaméen ou guatémaltèque. Y a-t-il projet plus positif et  plus enthousiasmant qu'un mur? On peut aisément penser que Francken rêve d'en construire un entre la Wallonie et la Flandre, pour empêcher les réfugiés d'entrer et en même temps pour marquer la différence entre sa Flandre prospère et cette Wallonie pouilleuse. Que fera-t-il quand le niveau de la mer du Nord sera tel que l'eau envahira une partie non négligeable de la Flandre? Se retrouvera-t-il le dos à son mur? Ce qui devrait être la priorité absolue pour la Flandre, la lutte contre le dérèglement climatique, ne semble pas être un souci pour lui. Il s'aligne sur son modèle américain: tout est sous contrôle, ne paniquons pas, la roue climatique tourne. Les prévisions devraient pourtant l'empêcher de dormir. D'après Climate Central, organisation de scientifiques, en 2050, c'est-à-dire demain, une partie importante de la Flandre risque de se retrouver sous eau (2). La mer pourrait non seulement inonder toute la bande côtière, mais même atteindre Gand, Malines, Termonde. De quoi rêve Théo Francken? D'être l'empereur d'une flaque d'eau?

(1) https://www.lalibre.be/belgique/politique-belge/theo-francken-ne-tarit-pas-d-eloges-au-sujet-de-donald-trump-5dbea15ad8ad5838874291c7
(2) https://www.lalibre.be/planete/environnement/une-partie-de-la-belgique-inondee-d-ici-2050-5db96d00f20d5a264d36f90d?cx_testId=1&cx_testVariant=cx_1&cx_artPos=0#cxrecs_s
https://choices.climatecentral.org/#6/46.225/2.186?compare=temperatures&carbon-end-yr=2100&scenario-a=warming-4&scenario-b=warming-2

mercredi 30 octobre 2019

"Jeanne au bûcher" au bûcher

Il y a deux ans, l'Eglise catholique française lançait une campagne d'appel aux dons, en s'appuyant notamment sur un slogan créé pendant la campagne présidentielle précédente (1): "Votez Jésus-Christ, le seul qui n'a jamais changé de programme". Est-ce positif de ne pas changer de programme quand on constate qu'en deux mille ans J.C. n'a jamais réussi à le faire appliquer? "Aime ton prochain comme toi-même", ça n'a jamais marché. Pire, nombre de ses fidèles ont appliqué l'exact contraire de cette injonction impossible à concrétiser. Ce furent l'Inquisition, les croisades, le massacre de la Saint-Barthéméy, quantité de guerres menées au nom de Dieu et autre horreurs du même genre. Les sorcières, les infidèles, les apostats, les hérétiques, toutes celles et tous ceux qui ne marchaient pas dans le droit fil de l'Eglise ont fini en prison ou directement au cimetière. Même Jeanne d'Arc fut exécutée par l'Eglise.
Aujourd'hui, l'Inquisition est toujours active. Une certaine Fédération Pro Europa Christiana veut faire interdire au Théâtre Royal de la Monnaie à Bruxelles les représentations de "Jeanne d'Arc au bûcher", opéra d'Arthur Honneger, sur un livret de Paul Claudel. Elle trouve "obscène" la mise en scène de Romeo Castelucci, créée en 2017 déjà. La Fédération s'offusque qu'au cours du spectacle le personnage de Jeanne d'Arc apparaisse nu, change de sexe au cours de la représentation, mais aussi qu'il porte des vêtements masculins. Cette dernière accusation en particulier est surprenante quand on se souvient que, comme le rappelle la Monnaie, "il s'agit là du même reproche que celui qui lui a été fait lors de son procès en 1431. Considéré comme un signe d'héréticité, le simple fait de s'habiller en homme lui a valu une condamnation au bûcher. Que ce reproche refasse surface près de six cents ans plus tard provoque la stupéfaction. Que Jeanne d'Arc ait choisi de se vêtir comme un homme et de se couper les cheveux est de surcroît un fait historique avéré." Le T.R.M. souligne que "la mise en scène (profondément spirituelle) de Castelucci souhaite aller au plus près de la quintessence et présenter Jeanne comme un personnage profondément humain et vulnérable".
Quelle Europe voudrait nous imposer la Fédération Pro Europa Christiana? Celle des bûchers?

(1) http://www.lalibre.be/actu/international/france-votez-jesus-christ-le-seul-qui-n-a-jamais-change-de-programme-5a0167dacd707514e89f0afe
(2) https://www.lalibre.be/culture/musique/la-monnaie-defend-l-oratorio-jeanne-d-arc-au-bucher-mis-en-scene-par-castellucci-5db6f95e9978e218e381bde1

lundi 28 octobre 2019

Le bureau des légendes obscures

Les premiers êtres humains ont vécu en même temps que les dinosaures. Et en parfaite entente avec eux. C'est ce qu'expliquent sans rire ces grands humoristes de créationnistes américains (1). Ils sont croyants. Entendez qu'ils croient en des théories ahurissantes, les mains sur les yeux et les oreilles, refusant d'entendre les explications scientifiques. Mais pas les mains sur la bouche. Ils parlent, ils prêchent, ils pérorent, ils manipulent.
Dans leur Musée de la Création dans le Kentucky, fréquenté par 300.000 visiteurs par an, ces évangélistes affirment, sans le moindre doute, que la Terre n'a que 6.000 ans d'existence et que toutes les formes de vie ont été créées en même temps par Dieu. Le diable s'appelle Charles. Charles Darwin. Il essaie de nous faire croire, cet infâme, que les espèces ont évolué.
Leurs délires s'expriment aussi dans une arche gigantesque, copie conforme de celle de Noé qui, évidemment, a vraiment existé. Car il faudrait être stupide ou possédé par Satan himself pour croire qu'elle n'est que légende. Ils datent le déluge de 2.348 avant J.C. et la construction des pyramides d'Egypte de 1.730 avant J.C., soit 1.000 ans plus tard que ce qu'estiment les archéologues.
Ils citent les noms des 1.400 espèces animales sauvées dans l'arche qui auraient permis de faire renaître le monde. Tant pis s'il n'y a parmi elles aucun insecte et tant pis si les scientifiques ont constaté l'existence de sept millions d'espèces animales sur la planète. Toutes les affirmations sont permises quand on croit. 

Le pire, c'est que les créationnistes diffusent leurs délires dans les écoles privées et qu'ils attaquent les écoles qui enseignent l'évolution des espèces. "Selon les modèles scientifiques, il aurait fallu 60 millions d'années pour saliniser les océans, explique à des enfants le directeur de la Woodward Christian Academy. Si la terre n'a que 6.000 ans, comment les océans peuvent-ils être aussi salés aujourd'hui? Ils n'ont pas eu le temps. Dans ce cas-là, on peut peut-être penser que, comme Dieu a créé les océans, il les a déjà créés avec quoi? Du sel!". A quoi bon la science quand un raisonnement simpliste suffit? 

Un tiers des Américains adhèrent aux théories créationnistes. Parmi eux, Mike Pence, vice-président des Etats-Unis, et Betsy DeVos, Ministre de l'Education. 
Résumons-nous: l'obscurantisme se porte bien et la bêtise a de beaux jours devant elle. 

(1) https://www.france.tv/france-2/journal-20h00/1087075-journal-20h00.html

samedi 26 octobre 2019

Comment s'appelle Calimero en Turquie?

A quoi reconnaît-on un dictateur? Notamment à son attitude vis-à-vis de la presse. Le critiquer, c'est lui manquer de respect. Dénoncer la guerre qu'il mène, c'est l'insulter. Les coupables savent mieux que quiconque jouer les victimes.
Pauvre Erdogan qui fait ce qu'il peut pour éviter que son pays soit soumis aux terroristes kurdes en les bombardant au cours de son opération joliment appelée "Source de paix" et qui se fait critiquer pour cela. Le voilà traité d' "éradicateur" par Le Point. C'est trop injuste. Il dépose plainte contre l'hebdomadaire français (1).  L'an dernier déjà, il avait exprimé sa fureur pour avoir été traité de dictateur par le même Point (2).
Il se sent, dit-il, atteint dans son honneur et sa dignité, lui qui se montre indigne de sa fonction de président de la République turque et a fait mettre en prison des milliers d'opposants et de journalistes qui ont pour seul tort de ne pas l'encenser.
En fait, traiter un homme comme lui de dictateur, c'est de lui donner, un peu plus, l'occasion de prouver qu'il l'est. Mais dans la novlangue qu'il aimerait que tout le monde pratique, éradicateur se dit pacificateur.

(1) https://www.lemonde.fr/international/article/2019/10/25/qualifie-d-eradicateur-le-president-turc-erdogan-porte-plainte-contre-le-point_6016888_3210.html
(2) (Re)lire sur ce blog "La presse, tête de turc",  30.5.2018.

dimanche 20 octobre 2019

Ne souriez pas, vous êtes filmés

On connaît mal l'humour turc. C'est quelque chose. Appeler sa guerre "Source de paix", c'est drôle. Pas au point de hurler de rire, mais enfin, il faut reconnaître qu'Erdogan est un vrai pince-sans-rire. Ce qui nous amène à cette question: les chefs, les vrais, les durs, les mecs sourient-ils? Combien de fois a-t-on vu sourire Poutine, Trump, Erdogan, Bolsonaro? Y a-t-il une photo où l'on voit Hitler sourire? Un chef, un vrai, ne doit pas se laisser aller à l'émotion et toujours montrer qu'il contrôle la situation. Et qu'elle est grave. Heureusement qu'il est là, doit-on se dire en voyant qu'il prend la situation très au sérieux. Le chef doit apparaître décidé, voire pugnace. Il doit s'exprimer par coups de menton et peut seulement, de loin en loin, laisser voir un rictus qui peut donner l'illusion d'un sourire.
Y a-t-il eu un jour dans le monde autant de tristes sires à la tête d'autant d'Etats? Nous voilà dans "un monde de dingues", comme l'écrivait récemment Jean-François Khan dans Le Soir. 
Donald Trump fait, plusieurs fois par jour, tout ce qu'il peut pour nous en convaincre, multipliant bêtises, provocations, agressions et contradictions. Bolsonaro hurle que l'Amazonie lui appartient et qu'il en fait ce qu'il veut. Il injurie le président Macron pour aussitôt lui demander de retirer ses insultes. Le taureau nationaliste Boris Johnson, rappelle Jean-François Khan, a autorisé la reprise de British Steel par un fonds de pension de l'armée turque. Hier, totalement schizophrène, il a envoyé deux lettres à la Commission européenne, qui disent le contraire l'une de l'autre. L'une est signée, l'autre pas. 
On voit par là qu'une profession d'avenir reste celle de psychiatre.

(1) "Johnson, Bolsonaro, Trump... : un monde de dingues", Le Soir, 2.9.2019.

vendredi 18 octobre 2019

Foot sectaire

Le sport n'a jamais rien eu à voir avec la politique. Laissons-le à l'écart de ce mælstrom malodorant.
Voilà ce qu'on entend dire si souvent. Il est vrai que le sport est si pur, si préservé de sordides questions d'argent ou de pouvoir.
Et si les footballeurs de l'équipe nationale turque ont fait par deux fois - lors de matchs face à la Bulgarie et face à la France - le salut militaire, ce n'est pas pour des raisons politiques, mais juste selon l'entraîneur turc, "pour soutenir nos soldats" (1). Et tout le monde sait que le soutien à des militaires faisant la guerre à un peuple voisin n'a rien de politique. C'est juste un petit clin d'œil sympa.
Même explication en Belgique où, cette fois, ce sont des enfants qui ont effectué - spontanément, on n'en doute pas une seconde - le salut militaire (2). Ils jouent dans un club de Beringen qui a pour nom Turkse FC, un club on ne peut plus turc en terre limbourgeoise. Un dirigeant du club a justifié ce salut en expliquant que les enfants avaient juste voulu "saluer les martyrs et leurs familles" et qu'il ne faut y voir aucun lien avec l'intervention militaire turque en Syrie. Et d'ailleurs, à entendre le président de l'organisation Union of International Démocrats (proche du parti d'Erdogan), c'est à peine si le club était au courant de ce conflit. Une photo des enfants footballeurs a été diffusée, avec cette légende: "nous voulons offrir notre âme pour l'existence d'une nation turque". Où on comprend que ces jeunes joueurs ont donc une âme et que le nation turque n'existe toujours pas.
On voit par là combien une équipe de foot peut s'apparenter à une secte et être un espace d'endoctrinement et de propagande nauséabond.

(1) https://www.liberation.fr/sports/2019/10/15/foot-les-turcs-saluent-bien-les-bleus_1757683
https://www.lalibre.be/sports/football/en-pleine-polemique-les-joueurs-turcs-refont-leur-salut-face-a-la-france-photos-5da4e6469978e218e3373c7a
(2)  https://www.lalibre.be/belgique/politique-belge/le-salut-militaire-des-jeunes-footballeurs-d-un-club-turc-de-beringen-enerve-le-ministre-weyts-5da5edb5f20d5a264d069d40

lundi 14 octobre 2019

La religion de paix aime la guerre

Que les religions soient vectrices de paix est la plus grande blague que l'humanité (une large partie d'entre elle en tout cas) se soit jamais racontée. Qui peut aujourd'hui affirmer sans rire - ou sans pleurer - que l'islam est une religion de paix?
Au Yemen, les deux grandes puissances islamiques, l'Arabie saoudite côté sunnite et l'Iran côté chiite, se font la guerre. Et c'est la population civile yéménite qui en paie le prix. Lourdement.
Les pays où l'Islam est religion d'Etat peuvent très rarement être considérés comme des démocraties. Au contraire. L'opposition y est inexistante ou en prison. Les femmes sont voilées et à la maison.
Et voilà qu'Erdogan, ce grand croyant qui s'est un jour présenté comme "l'imam d'Istanbul", vient de lancer une guerre contre les Kurdes syriens. Même si ceux-ci furent en première ligne dans le combat contre le monstre fascisto-islamiste en Syrie. Même si nous leur devons une reconnaissance éternelle pour le rôle qu'ils ont joué face à Daech. L'armée turque et les milices qu'elles a lâchées ont entamé les massacres, même contre des convois de civils (1).
Et nous, nous restons là, mutiques ou presque, abandonnant les Kurdes à la terreur (2). Par lâcheté et parce que nos irresponsables dirigeants européens ont passé un pacte avec ce terroriste d'Erdogan pour qu'il retienne trois millions de réfugiés à l'intérieur de ses frontières. Frontières qu'il menace maintenant d'ouvrir côté U.E. si celle-ci avait l'outrecuidance de prendre des sanctions contre lui pour son agression de la population kurde.
Les pays de l'Union européenne, à l'exception du Royaume-Uni (vivement le Brexit!), ont heureusement décidé de ne plus vendre d'armes à la Turquie (3). Mais c'est un peu tard.
C'est toute relation qu'il faut cesser, tout de suite, avec la Turquie. Absolument toute. Politique, économique, sociale, culturelle, touristique, sportive. Il faut exclure la Turquie de l'OTAN. Dire enfin clairement que la Turquie, cette Turquie-là, ne fera jamais partie de l'Union européenne. Annuler le match de foot, prévu ce soir, entre la France et la Turquie. Il faut mettre la Turquie au ban de la société civilisée. Elle s'y est mise elle-même.

Trump le dingue l'y a bien aidée. Je retire mes troupes de Syrie. Puis, non, je les y laisse. Puis, je les retire quand même parce qu'elles risquent d'être prises entre les deux feux, turc et kurde, que j'ai moi-même allumés (4).
Voilà les Kurdes forcés d'appeler à l'aide Assad, l'odieux boucher de Damas, et ses troupes.
Grâce au chaos provoqué par ce duo monstrueux que jouent Erdogan et Trump, des proches de djihadistes se sont enfuis par centaines (5). La guerre en Syrie est relancée, tout autant que la lutte du bien (forcément du côté de la religion) contre le mal (forcément du côté des laïcs). Les religions aiment le sang. Et la terreur.

(1) https://www.lalibre.be/international/asie/neuf-civils-kurdes-dont-une-femme-politique-executes-par-une-milice-turque-5da23b66f20d5a2781766617 et France Inter, Journal de 9h, 14.10.2019.
(5) https://www.lalibre.be/international/asie/syrie-des-familles-de-membres-de-l-ei-se-sont-echappees-d-un-camp-5da2e296d8ad5841fc7a9261

jeudi 10 octobre 2019

Avant qu'il ne soit trop tard

Les agriculteurs dits "traditionnels" ou conventionnels" (comme si c'était la tradition ou une convention communément admise qui les poussait à utiliser la chimie pour faire pousser leurs plantes) en ont assez de ce qu'on appelle aujourd'hui "l'agribashing". Assez d'être critiqués et malmenés de toute part.
Personne ne niera qu'il s'agit là d'une profession parmi les plus difficiles qui soient. Mais personne ne contestera non plus que l'agro-industrie s'est embarquée - et a embarqué les siens - dans une voie aujourd'hui intenable. Elle a fait le choix d'une agriculture de plus en plus folle, qui coûte cher à la terre (avec ou sans majuscule).

On peut évidemment rejoindre les agriculteurs dans leurs critiques des traités internationaux qui font voyager à travers la planète céréales, légumes, viandes et produits laitiers. C'est localement qu'il faut acheter et consommer, en particulier les aliments. Ce qui implique la fin des importations. Et donc aussi des exportations. Ça fonctionne dans les deux sens.
Ce n'est cependant pas pour leur opposition aux importations qu'ils sont aujourd'hui critiqués. Mais surtout pour leur usage des pesticides qui empoisonnent la vie. La leur en premier lieu, celle des riverains aussi, de la terre, des insectes, des oiseaux, des rongeurs, de l'eau, de l'air. Les pesticides sont par définition des poisons. Dont on peut se passer. L'agriculture biologique le démontre.
Mais les agriculteurs dits traditionnels sont prisonniers de plusieurs décennies de conditionnement. Ils sont dans "la servitude volontaire", malgré les appels et les mises en garde qui se multiplient depuis si longtemps. Les pesticides leur facilitent la vie, ils réduisent leur travail et sont par-fai-te-ment-in-o-ffen-sifs, leur ont toujours juré les vendeurs de chimie, appuyés par le principal syndicat agricole français, la FNSEA. De pères en fils se refilaient les mêmes méthodes, les mêmes marques, la même fuite en avant. Jusqu'à ce que de plus en plus de professionnels du sol en deviennent malades ou, pis, en meurent.
Mais ceux-là, la FNSEA ne les connaît pas. Ou plus.
Christiane Lambert, présidente du syndicat agricole, déplore l'agribashing. Elle demande "que les gens se respectent" (1). Entendez par là qu'on cesse de critiquer les agriculteurs pour leur usage des pesticides et qu'on ne les empêche pas de travailler en épandant des pesticides là où ils le veulent.
"Je comprends les craintes quand elles sont fondées", dit-elle. Mais elle s'étonne qu'on ait trouvé des traces de glyphosate dans l'urine d'opposants alors qu'aucune analyse n'en a relevé chez des agriculteurs, pas plus chez elle. Elle ignore sciemment - et ce faisant les méprise - tous les agriculteurs qui souffrent de graves problèmes de santé dus à un contact avec ces poisons que sont les pesticides (2). "Il y a eu beaucoup d'exagérations sur le sujet", selon elle, même si elle affirme comprendre l'inquiétude. "Il y a eu une polémisation avec la distance de 150 mètres. Mais aucune donnée scientifique ne dit que c'est la bonne distance." De nombreuses analyses scientifiques mettent pourtant en garde sur les graves dangers que font courir les pesticides. Ceux-ci sont d'ailleurs interdits les uns après les autres. Et aussitôt remplacés par de nouveaux dont on n'a pas encore pu démontrer la nocivité.
"Depuis 2015, dit encore Christiane Lambert, nous mettons en œuvre des mesures pour protéger les publics sensibles. La solution n'est pas dans des distances, mais dans des équipements, des horaires et des dispositions adaptés." On peut donc lire entre les lignes que les pesticides constituent, pour elle aussi, un problème. Même si elle n'est pas prête à une vraie remise en question de ces pratiques.

L'industrie chimique, elle, s'adapte, contrainte et forcée. Et si elle se voit obligée d'abandonner certains produits jugés toxiques, elle n'a aucun scrupule à continuer à les vendre jusqu'au bout. En témoigne la publicité ci-dessous qui, "avant qu'il ne soit trop tard", invite les agriculteurs à se fournir en époxiconazole, un fongicide très bientôt interdit, parce que soupçonné par l'ANSES (l'Agence  nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation), d'être un perturbateur endocrinien" pour l'être humain et les organismes non-cibles", de présenter "un niveau de danger préoccupant pour l'Homme et l'environnement", d'être "susceptible de nuire à la fertilité" et "susceptible de provoquer le cancer".
Récemment, on entendait des agriculteurs affirmer que les pesticides sont des médicaments pour les plantes. On conviendra que mieux vaut éviter les médicaments qui provoquent le cancer.

Les agriculteurs le savent: pour mettre fin à l'agribashing, il faudra en passer par l'agrichanging.

(1) https://www.franceinter.fr/emissions/on-n-arrete-pas-l-eco, émission du 5.10.2019.
(2) voir www.phyto-victimes.fr

CONSEIL D'EXPERT 


Arthur : expert
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Arthur, Expert phyto 

Phytosanitaire Fongicide : Anticipez vos achats avant qu'il ne soit trop tard !
" Cette année de nombreuses molécules vont être retirées du marché et il faudra être prévoyant pour concevoir son programme phytosanitaire. L'époxiconazole est l'une d'elle. Elle sera retirée de la distribution le 30/11/2019, mais un délai de grâce permettra de l'utiliser jusqu'au 30/07/2020.
Il parait donc important d'anticiper ses achats au plus tôt sur des produits composés de cette molécule : "