mercredi 28 octobre 2020

Ere de je

Le je se porte bien. On n'en dira pas autant du nous. Si la planète se retrouve aujourd'hui dans un tel état, proche de l'asphyxie, c'est que la plupart des élus n'ont qu'une idée en tête: être réélu, donc ne pas choquer leur électorat avec des mesures qui pourraient le fâcher. Chaque élu est un candidat enfermé dans son propre intérêt. Mais c'est aussi parce que la majorité des terriens (dans les pays en plein développement en tout cas) est dans l'ici et maintenant, mes habitudes, mes envies de consommation, mon confort. Le réchauffement climatique n'aura pas raison de ma manière de vivre.

L'époque est aussi à l'enfermement dans une identité. Chacun a la sienne qu'il faut respecter. Chaque jour apporte son anecdote (1) d'indignation, de chasse aux sorcières, de harcèlement d'enseignants, d'artistes, de personnalités, connues ou non, qui ont l'outrecuidance de proposer d'avoir un regard plus collectif, de réfléchir au-delà de son identité. L'heure n'est plus à la prise de distance, au débat, à la discussion. Mais au point de vue individuel qui doit être respecté. Et cet enfermement exclut aussi tout humour. On respecte, donc on ne rit pas!

La pandémie de coronavirus révèle aussi l'individualisme: je fais ce que je veux, je veux pouvoir circuler sans masque, aller où je veux, quand je veux. Elle révèle l'incapacité de tant de citoyens à se mettre à la place de l'autre. A la place de ceux qu'on peut contaminer sans le savoir. A la place des experts, des soignants, des médecins qui crient au feu depuis des mois, qui ne savent plus comment lutter, qui sont sur les genoux. A la place des gouvernements accusés à la fois de s'en prendre au libertés individuelles et de ne pas protéger suffisamment leurs citoyens. Pouvoir se mettre à la place de l'autre est une preuve d'intelligence. Mais nous sommes dans une époque où tant de gens ne veulent être qu'à leur propre place. Et où les réseaux sociaux sont aussi des réseaux asociaux, voire antisociaux.

(1) https://www.marianne.net/societe/professeure-suspendue-pour-avoir-employe-le-mot-negre-la-nouvelle-querelle-canadienne

lundi 26 octobre 2020

Rira bien qui rira le dernier

Ainsi donc, dans de nombreux pays musulmans, au Koweït, au Qatar, en Arabie saoudite, en Jordanie, en Turquie, se multiplient les appels à boycotter les produits français pour protester contre la liberté qui existe en France de dessiner et publier des caricatures, notamment de leur Prophète (1). Parmi les produits visés, La Vache qui rit. Si elle s'appelait La Vache qui prie échapperait-elle au boycott? Kiri devrait-il se rebaptiser Kipri

Le rire a mauvaise presse en terre islamiste. Un ayatollah risque-t-il l'excommunication s'il est surpris en train de rire? Quelqu'un a-t-il déjà vu rire le sultan Erdogan? Dans les pays où l'islam règne en maître, risque-t-on la peine de mort si on s'esclaffe en public? A-t-on le droit de rire chez soi? Est-on élevé à ricaner plutôt qu'à rire? Parmi tous ces gens outrés, y a-t-il une seule personne qui ait vu une de ces caricatures dont ils se disent scandalisés?  Au procès des attentats de janvier 2015 - et donc des présumés complices des assassins de l'équipe de Charlie Hebdo - on a vu des accusés salafistes rire des caricatures. Agathe André, ancienne de Charlie, a créé l'association Dessinez Créez Liberté. Cette association d'éducation aux médias, au dessin de presse, à la caricature et à la liberté intervient dans les écoles, les prisons, les missions locales et divers organismes, pour donner des clés de compréhension du monde. "Quand nous allons dans les prisons, dit-elle, quand nous montrons les caricatures du Prophète, les détenus incarcérés - certains pour radicalisation - s'étonnent toujours et nous disent: Mais c'était juste ça, les caricatures? Oui, tout ça pour ça." Ainsi des gens s'indignent de ce qu'ils n'ont pas vu. Quand en 1988 l'ayatollah Khomeyni a lancé une fatwa contre Salman Rushdie, il n'avait évidemment jamais lu Les Versets sataniques. Il en avait juste entendu causer. L'ignorance mène au pire, la bêtise à la perte.

"Rire est le plus court chemin d'un homme à un autre", disait Wolinski. Mais les islamistes pensent qu'une balle va plus vite. Non seulement, ils se trompent, mais en plus ils n'ont pas compris qu'elle ne crée pas le même lien. Wolinski, comme Cabu, Charb, Honoré, Moustapha Ourrad, Tignous, Eva Cayat, Bernard Maris et tous les autres, est mort sous les balles de jeunes crétins incapables d'humour. Au-delà de la mort, ces dessinateurs continuent à nous faire rire. Les sombres islamistes qui les ont tués sont passés à côté du rire et de leur vie. Ils sont morts. Juste morts. Et certainement pas de rire.

A écouter, regarder ou lire: Sophia Aram à ce sujet ce matin:                         https://www.franceinter.fr/emissions/le-billet-de-sophia-aram/le-billet-de-sophia-aram-26-octobre-2020

(1) https://www.lemonde.fr/international/article/2020/10/24/apres-les-propos-de-macron-sur-les-caricatures-de-mahomet-plusieurs-pays-du-moyen-orient-appellent-au-boycott-des-produits-francais_6057268_3210.html 

https://www.lalibre.be/international/europe/turquie-erdogan-appelle-au-boycott-des-produits-francais-5f96bc6b7b50a66bd812f24f

Post-scriptum: voir le dessin de Kroll dans Le Soir: https://plus.lesoir.be/334077/article/2020-10-27/le-kroll-du-jour-sur-lappel-au-boycott-des-produits-francais


vendredi 23 octobre 2020

Monsanto condamné

 Deux bonnes nouvelles sur le front des pesticides. Ne boudons pas notre plaisir en ces temps si gris.

Paul François, cet agriculteur charentais (1) qui avait été gravement intoxiqué en 2004 par l'herbicide Lasso, avait, trois ans plus tard, attaqué en justice Monsanto pour “défaut d’information sur l’étiquette et non-respect du devoir de vigilance”. En 2012, il obtenait gain de cause devant le tribunal de grande instance et en 2015 devant la cour d’appel de Lyon. Mais la Cour de cassation avait cassé l’arrêt rendu par la cour d’appel et renvoyé l’affaire devant la cour d’appel de Lyon, autrement composée, qui a à nouveau retenu la responsabilité de Monsanto en 2019. Il y a deux jours, cette décision a été confirmée par la Cour de cassation. La responsabilité de Monsanto est donc définitivement reconnue dans cette affaire. Et cela, c'est vraiment une bonne nouvelle. Pour Paul François comme pour tous les agriculteurs victimes de ces produits miraculeux. Pour François Lafforgue, l'avocat de Paul François, « c’est une décision exemplaire qui fera date ; ça ouvre la voie à d’autres victimes des pesticides, en France, qui pourront rechercher la responsabilité des firmes à l’origine de leur intoxication ». Reste maintenant au tribunal judiciaire de Lyon à fixer les indemnités auxquelles aura droit l'agriculteur.

En Indre, un arrêté préfectoral vient de durcir les conditions de traitement aux pesticides de synthèse aux abords des cours d'eau (2). Plus question d'en épandre à moins de cinq mètres de « tous les plans d’eau permanents ou intermittents reliés ou non au réseau hydrographique figurant sur les cartes 1/25.000 de l’Institut géographique national, […] à l’exception des plans d’eau asséchés ou des erreurs manifestes de la carte ». Ce qu’on appelle les zones de non-traitement (ZNT). Une belle victoire pour Indre Nature et la Fédération de pêche. Les agriculteurs dits conventionnnels grognent. La FDSEA annonce qu'elle va « sûrement » formuler un recours contre cet arrêté. « Ils peuvent toujours essayer, affirme Jacques Lucbert, président d'Indre Nature, mais je pense que c’est un combat d’arrière-garde. Face au problème planétaire de la réduction de la biodiversité et des problèmes de qualité d’eau, continuer à se battre pour l’utilisation de pesticides est perdu d’avance. Leur disparition à long terme est inéluctable. » Pour la santé des agriculteurs eux-mêmes, leur abandon serait salutaire. 

(1) (Re)lire sur ce blog "Nouveau coup de David à Goliath", 12.4.2019                                                    (2) https://www.lanouvellerepublique.fr/indre/indre-un-arrete-limite-l-utilisation-des-pesticides-pres-des-cours-d-eau?queryId%5Bquery1%5D=57cd2206459a452f008b4594&queryId%5Bquery2%5D=57c95b34479a452f008b459d&page=1&pageId=57da5ce5459a4552008b469a 

 

mardi 20 octobre 2020

Marre!

J'en ai marre de tous ceux qui par indigence ou paresse intellectuelle, par calcul politique, par clientélisme refusent de faire la différence entre islam et islamisme. Ceux qui cirent les bottes des barbus et affirment, hypocritement, qu'il faut accepter et comprendre. Accepter et comprendre quoi? Qu'alors que nous avons réussi, après des siècles de combat, à mettre la religion chrétienne à sa place, à savoir dans les maisons et les églises, il faudrait laisser l'islam s'immiscer dans les écoles, dans les journaux, dans les assiettes, dans les piscines, dans les façons de s'habiller, dans les principes d'égalité? J'en ai marre d'entendre crier au blasphème au moindre dessin moqueur, marre de ces sinistres sires qui s'opposent au rire. Marre de l'islamo-gauchisme qui soutient le fanatisme, des Mélenchon, des Plenel, des Ramadan, de tous ces Tartuffe qui rêvent de citoyens autonomes mais soutiennent la colonisation des esprits et des corps par la religion. Marre de les voir cracher sur Charlie Hebdo, de les entendre dire que, bien sûr, on peut rire de tout, mais qu'il faut respecter les croyances des musulmans qu'ils considèrent ainsi comme des enfants qu'il faut protéger. Marre de ceux qui cherchent à nous culpabiliser et transforment les coupables en victimes et inversement, marre de tous ces judéo-chrétiens qui se fouettent en disant que c'est de notre faute, à nous Occidentaux et qui ne veulent pas voir que la radicalisation islamiste progresse partout dans le monde. Marre d'entendre dire que ces crimes islamistes trouvent leur origine dans notre attitude de blancs supérieurs, comme si ces crimes ne frappaient pas, avant tout, des victimes innocentes en terre musulmane plus encore qu'en Occident. J'en ai marre des écolos qui par bienveillance se comportent en paternalistes et affichent, sans s'en rendre compte (j'espère), leur mépris pour tous ceux et toutes celles, surtout celles, qui vivent dans des régimes théocratiques qui pourchassent, lapident, violentent, emprisonnent, exécutent celles et ceux qui ne vivent pas selon leurs règles. J'en ai marre d'entendre traiter d'islamophobes ceux qui critiquent l'islam, marre de constater que toutes ces braves âmes qui s'offusquent font le lit de l'extrême droite. J'en ai marre de voir celle-ci élargir son sourire carnassier à chaque crime commis au nom du Prophète. J'en ai assez de la victimisation qui enfonce chacun dans sa condition, évite de penser et d'agir intelligemment et excuse la violence. J'en ai assez de voir ces réseaux sociaux  transformés en canaux de haine, de bêtise  et d'abjection. J'en ai marre de cette obscurité qui nous envahit. De la lumière!

Mais peu importe la sourate / Ce qui doit être dit est dit                                                                                                                  Hubert-Félix Thiéfaine, "Les Filles du sud"

A écouter, les propos fâchés et fatigués à la fois de Richard Malka, l'avocat de Charlie Hebdo:   https://www.huffingtonpost.fr/entry/samuel-paty-hommage-proces-charlie-hebdo_fr_5f8d529dc5b67da85d1fd9f2

P.S.:  "En plus de l’horreur, je ressens de la colère, contre nous-mêmes, les cibles de l’islamisme, qui après tant d’horreur et d’humiliation, ne sommes pas fichus de nous entendre pour nous débarrasser une fois pour toutes de ce fléau planétaire et amener les élites religieuses musulmanes à sortir de l’ambiguïté et à se mobiliser pour couper la route à l’islamisme en expurgeant de leurs Saintes Écritures, ce qui lui sert de justification et de quitus. En démantelant cette machine infernale de l’islamisation qui, avec son réseau tentaculaire de mosquées, d’écoles, d’associations et de sites internet, quadrille le pays, embrigade, convertit, radicalise, communautarise, avec parfois le soutien intéressé des autorités politiques à tous les niveaux.", Boualem Sansal dans Marianne.                                                      https://www.marianne.net/societe/laicite-et-religions/boualem-sansal-demanteler-la-machine-infernale-de-lislamisation?utm_source=nl_quotidienne&utm_medium=email&utm_campaign=20201020&xtor=EPR-1&_ope=eyJndWlkIjoiMWRhMjc0MDM2MDEzNTMyNzJkNjYxMmIyOWM2M2NiMDAifQ%3D%3D

P.S.2:  Et aussi ce texte d'Amine El Khatmi, que je partage entièrement:     https://www.marianne.net/agora/tribunes-libres/pour-une-republique-de-combat




dimanche 18 octobre 2020

Samuel Paty

Une fois de plus, une fois encore, Mahomet se dit que oui, vraiment, c'est dur, très dur, d'être aimé par des cons. Surtout quand ces cons sont aussi d'immondes crapules, de sombres barbares, d'infâmes salauds.


On ne retiendra pas le nom de l'infect terroriste qui a décapité vendredi un professeur d'histoire-géographie d'un collège de Conflans-Sainte-Honorine dans les Yvelines. Mais on se souviendra de cet enseignant. Il faut que vive son nom. Il s'appelait Samuel Paty et était, selon ses élèves, sympa, bienveillant, à l'écoute. Il donnait, disent-ils, envie d'apprendre, savait animer ses cours. Depuis des années, il travaillait notamment sur la liberté d'expression et tentait de faire vivre trois valeurs auxquelles il croyait passionnément: la liberté, l'égalité, la fraternité. Il jouait son rôle d'éveilleur, aidait ses élèves à comprendre le monde, à l'analyser, à devenir plus critiques, plus intelligents. Il les formait à devenir des citoyens. Et le voilà, pour ces raisons-là, sauvagement massacré par un jeune homme qui ne le connaissait pas, déformé par les propos outranciers et mensongers du père d'une élève et d'un pseudo imam islamiste, connu pour ses positions agressives, qui lui reprochaient d'avoir analysé en classe des caricatures de Mahomet. 
On se le demande, à quoi sert l'école pour eux? A fermer plutôt qu'à ouvrir? A obscurcir les esprits plutôt qu'à les éclairer? A asservir plutôt qu'à rendre libre et autonome? Jusqu'où les laisserons-nous aller dans ces agressions des valeurs de la République? Combien de crimes encore les laisserons-nous commettre? 

Comme l'écrit le Printemps républicain, "Aujourd’hui, nous en avons assez. Assez de pleurer nos morts. Assez qu’on s’en prenne aux premières lignes de la République. Assez de cette pieuvre islamiste qui prospère, qui plastronne, qui menace. Assez de voir nos amis, nos collègues, insultés, menacés, obligés de vivre sous protection policière depuis des années, dans l’indifférence quasi-générale. Assez que les courageuses et les courageux, les Jean-Pierre Obin, les Zineb El Rhazoui, les Mohamed Sifaoui, les Caroline Fourest et tant d’autres, soient attaqués sans cesse, et si peu défendus.                                      Assez, par-dessus tout, du « pas d’amalgame », des « on peut être Charlie ou ne pas être Charlie ». Assez de ces quelques messieurs trop tranquilles qui, depuis les ministères ou sur les estrades, « observent » qu’il n’y a pas de problème avec la laïcité. Assez de l’hypocrisie et de la confusion intellectuelle qui règne dans ces organisations de gauche incapables de prendre la défense de Mila. Assez de voir les opportunistes du coexistentialisme qui rôdent comme des vautours autour de l’argent public et qui favorisent l’entrisme des Frères musulmans au nom du dialogue inter-confessionnel.                                                                      Assez, par-dessus-tout, du pas-de-vague et des demi-mesures, des petites compromissions et des grandes lâchetés. Ne vous y trompez pas : les islamistes ne pleurent pas, ils rigolent. Ils ont réussi leur coup : ils sèment la terreur sans même se salir les mains. Dénoncer publiquement leur a suffi : l’objectif est atteint, l’effroi est général et la peur règne. Et leurs idiots utiles se jettent déjà à leurs pieds pour dénoncer « l’islamophobie » et faire de la politique politicienne."                                                                                    Le Printemps républicain appelle à "reprendre la main. Changer de braquet, enfin ! L’heure n’est plus à décrire l’islamisme, à le critiquer, à le dénoncer : il faut le démanteler. Le détruire. Le liquider. Mettre hors-la-loi les organisations qui se revendiquent ou s’inspirent de l’islam radical, celui des salafistes et des Frères musulmans en particulier. Il faut dissoudre ces associations, saisir leurs avoirs et traduire en justice leurs responsables. On ne s’en sortira pas autrement. Cela doit prendre effet immédiatement."
Il y a urgence, une urgence extrême, à "revoir entièrement les dispositifs publics de formation et d’accompagnement à la citoyenneté et aux valeurs de la République" et à "casser les ghettos où l’islamisme, mais aussi la violence gratuite, les trafics, la misère morale et matérielle prospèrent." 
Alors, le nom de Samuel Paty continuera à nous aider à vivre.

Post-scriptum: Les réactions de colère, de tristesse et d'indignation sont nombreuses et indispensables. Et la Marseillaise résonne à l'unisson comme un rappel des valeurs de la République. Mais - il en fut plus qu'une fois question ici - qu'on change enfin les paroles de cet hymne guerrier! "Qu'un sang impur abreuve nos sillons"? L'infâme assassin de Samuel Paty a dû se dire la même chose en sortant son couteau.

P.S. 2: A lire, ce texte de Yannick Haenel qui chaque jour partage, sur le site de Charlie Hebdo, ses réflexions sur le procès des tueries de janvier 2015:

https://charliehebdo.fr/2020/10/proces-attentats/trente-quatrieme-jour-lhorreur-et-la-pensee/?utm_source=sendinblue&utm_campaign=NOTIFICATION_PROCES_JOUR_34__ABOWEB&utm_medium=email

P.S.3: Et à écouter: Sophia Aram ce matin sur France Inter. Cinglante et très pertinente.                                A réécouter sur la page d’accueil de France Inter, dans le bas à gauche, rubrique Humour (mais ça n’en est pas) à 01.55.30.                                                                                                https://www.franceinter.fr/emissions/le-billet-de-sophia-aram/le-billet-de-sophia-aram-19-octobre-2020

P.S.4: https://www.liberation.fr/france/2020/10/18/monsieur-paty-il-etait-trop-drole-on-voulait-tous-l-avoir_1802719

P.S.5: un ami me fait remarquer que, comme tant d'autres, je comprends mal la phrase "qu'un sang impur abreuve nos sillons": "Le sang "impur" qui abreuve nos sillons, c'est le nôtre, celui du peuple, par opposition au "sang bleu" des aristocrates qui ont trahi. On se bat contre l'ennemi de la révolution, et on offre notre propre sang impur. Ce vers exalte l'esprit de sacrifice et souligne la grandeur du peuple." 






mardi 6 octobre 2020

Le Débat est clos

La revue Le Débat n'aura jamais quarante-un ans. L'historien Pierre Nora, qui en est le fondateur, vient de décider de mettre fin à cette revue générale d'idées, sous-titrée "Histoire, politique, société". L'heure n'est hélas plus au débat, constate-t-il, inquiet (1). "La revue a commencé dans les années 1980, un moment historique très précis, celui où s'épuisait l'idée révolutionnaire, moment où les intellectuels se ralliaient à la démocratie: ils comprenaient qu'on vivrait toujours avec des gens avec lesquels on n'est pas d'accord, et que le but n'était pas de les anéantir, mais de discuter avec eux. On entrait dans le débat." Et Nora de constater, amer, que cette période est terminée. Le changement, c'est "la montée des radicalités, pour lesquelles et avec lesquelles le débat est absolument impossible. Ce sont des gens qui ne veulent pas débattre, ils sont enfermés dans leur identité. Ma crainte, c'est que la cancel culture, qui est à mon avis une néantisation de la culture, n'arrive massivement en France." Pierre Nora parle à propos de cette culture du flingage de "guerre civile intellectuelle". Voilà plusieurs années que sont nombreux ceux qui, incapables de débattre, se sentent insultés par ceux qui ne sont pas d'accord avec eux. Mais ces derniers temps, ce sentiment d'être insulté se traduit en chasse à l'homme ou à la femme qu'il s'agit de faire disparaître des réseaux prétendument sociaux, de boycotter ou de faire licencier. Le terrorisme intellectuel est à la mode.

Pierre Nora déplore s'être trouvé si souvent, trop souvent, face à des gens qui "nous nient et ricanent". Il évoque un article de Mediapart : "ils commencent avec quelques précautions verbales en disant que la fin d'une revue est toujours triste, mais ils sont très contents que Le Débat s'arrête. Ils cachent à peine leur joie, ils la cachent habilement, et disent finalement que si nous disparaissons, c'est que nous n'avons rien compris, que nous l'avons bien cherché. Il faut répondre à ça". L'historien et éditeur en appelle au combat des Lumières: "il s'agit de travailler contre cette carapace identitaire qui est en train de gangrener l'esprit public. Les identitaires excluent, ils chassent littéralement ceux qu'ils considèrent comme l'expression du vieux monde". 

Un (vrai) débat est censé enrichir ceux qui y participent. On y apprend des faits qu'on ignorait, on y entend des arguments et des points de vue auxquels on n'avait pas pensé, on y affine ses réflexions. On peut en sortir plus nuancé, plus intelligent, plus riche. Encore faut-il en avoir envie, oser prendre le risque de douter, de sortir de ses certitudes. Il plus facile de crier ses vérités, d'aboyer, d'attaquer. 

(1) "Pierre Nora, "Les carapaces identitaires sont en train de gangrener l'esprit public", propos recueillis par Yann Diener, Charlie Hebdo, 16.9.2020.


dimanche 4 octobre 2020

Enfin!

On l'attendait depuis longtemps sur ce sujet. Le président Macron s'est enfin exprimé sur ce qu'il nomme séparatisme et que d'autres appellent communautarisme: la volonté de certains, et des islamistes en premier lieu, de vivre à l'écart de la République, de ses valeurs et de ses règles, pour vivre selon les leurs et les imposer insidieusement à la société. Il a clairement ciblé "le séparatisme islamique", parlant d’un "projet conscient, théorisé, politico-religieux, qui se concrétise par des écarts répétés avec les valeurs de la République", tout en faisant la part des choses avec les millions de musulmans qui vivent dans la République "comme citoyens pleins et entiers". Il en a profité, écrit Le Monde (1), pour dénoncer "l’autre séparatisme, celui que les élus de la République ont, selon lui, collectivement contribué à nourrir en acceptant que la misère et les difficultés soient concentrées sur certains territoires". Il a ainsi admis "que renforcer l’arsenal répressif ne servira à rien si une vigoureuse action pour l’égalité des chances n’est pas menée".

Il entend, écrit encore Le Monde, "réaffirmer le rôle fondamental de l’école dans l’apprentissage des valeurs de la République et pour cela rendre obligatoire dès trois ans l’instruction à l’école ; renforcer le contrôle de l’Etat sur le fonctionnement et le financement des associations cultuelles et pour cela accepter de retoucher à la marge la loi de 1905 ; faire respecter le principe de neutralité dans les services publics et pour cela l’étendre aux transports publics ; tenter de faire émerger un islam de France et pour cela responsabiliser le Conseil français du culte musulman, même si cela s’est révélé jusqu’à présent très difficile". Voilà longtemps qu'on attendait que soient prises de telles mesures. aptes à faire respecter la laïcité et à remettre à sa place une religion qui tout doucement entend régenter la vie sociale et empêcher le vivre-ensemble.

Il est, bien sûr, des bonnes âmes, à gauche, qui s'offusquent. C'est aux musulmans que s'en prend le président, feignent-ils de croire, refusant d'écouter ce que dit Macron et de faire une différence entre islam et islamisme, continuant peut-être (comme ce fut le cas d'une rédactrice en chef adjointe de Mediapart) à penser que l'islamisme n'est, somme toute, pas si grave. Comme si les milliers de victimes qu'ont déjà fait à travers le monde, et en particulier parmi les musulmans, les attentats terroristes commis au nom d'Allah ou de son prophète n'étaient que légers incidents. C'est là que se logent le mépris et le racisme. 

On entend maintenant des parents se plaindre, s'indigner de ne plus pouvoir instruire leurs enfants eux-mêmes et  de devoir les envoyer à l'école. On s'en prend aux libertés individuelles, protestait une mère sur France Inter. Il faut pouvoir respecter le rythme des enfants, disait-elle (sans qu'on sache si ses enfants sont demandeurs des rythmes familiaux et de l'absence d'école). La liberté individuelle, le droit de chacun de faire exactement ce qu'il lui plaît, de dire ce qu'il lui passe par la tête prennent aujourd'hui le pas sur l'intérêt collectif. Il en va de même avec le port du voile. Chacune a le droit de le porter ou non, estiment les bonnes âmes. Refusant de voir que dans les pays musulmans les femmes n'ont pas ce droit, uniquement l'obligation de le porter sous peine de bastonnade, de prison ou de mort. On pense aussi aux anti-masque qui hurlent que l'obligation de son port est une atteinte à leur liberté individuelle, oubliant sciemment que se joue là la protection collective. Le "chacun fait ce qui lui plaît" a un côté ultra-libéral dont l'extrême gauche serait bien avisée de prendre la mesure.

(1) https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/10/03/separatisme-une-reponse-pour-le-long-terme_6054627_3232.html

https://www.marianne.net/politique/macron/critiques-acerbes-a-gauche-scepticisme-gene-a-droite-enthousiasme-prudent-chez-les-laiques-les-reactions-au-discours-de-macron-sur-le-separatisme

jeudi 1 octobre 2020

Massacre à la tronçonneuse

Ils voulaient sauver une forêt corrézienne de plus de huit hectares, écœurés de voir tant de coupes rases un peu partout. Leur association Faîte et Racines avait récolté plus de 53.000 euros pour l'acheter. Le compromis de vente avait été signé. C'était sans compter avec la gendarmerie et les Renseignements territoriaux qui ont convaincu le vendeur, ancien maire du village de Saint-Paul, près de Tulle, que la forêt en question allait être transformée en ZAD, que derrière cette association se cachaient les zadistes de Notre-Dame-des-Landes qui allaient débarquer en nombre et construire dans cette forêt un village de tipis, de yourtes et de cabanes et mettre en danger la région. C'était du pipeau, mais l'ancien maire s'est laissé berner par ces pandores si sûrs de leurs analyses volontairement catastrophistes.                                            Résultat: la forêt a été vendue à un agriculteur voisin. Qui s'est empressé de la raser pour transformer les terres ainsi gagnées en pâtures. La catastrophe a eu lieu, sans que l'administration s'en émeuve. Que fait la police?  (1)                                                                                                                                                        On voit par là que les gendarmes ont peur de la nature et qu'il faut se méfier comme de la peste des agriculteurs hors-sol qui manient mieux la tronçonneuse que la faux, incapables de comprendre l'utilité d'une forêt. Mais finalement les gendarmes ont raison: les forêts sont vraiment des zones à défendre.

En 1872, George Sand lançait un appel à la protection de la nature pour sauver la forêt de Fontainebleau. Dès 1830, le progrès  imposait des coupes rases, des routes à travers la forêt et un assainissement des marais. En 1853, 624 hectares de la forêt de Fontainebleau étaient classés hors exploitation et huit ans plus tard étaient instituées des zones "à destination artistique". Mais l'annonce d'autres destructions de la forêt fait réagir George Sand qui signe alors un des premiers appels à la protection de la nature. "Gardons nos forêts, écrit-elle, respectons nos grands arbres" et "protestons" pour protéger la terre "dévastée et mutilée" par l'activité industrielle. "Supprimez les arbres qui, par leur ombre, rendent au sol la fraîcheur bue par leurs racines, vous détruisez une harmonie nécessaire." Elle revendique aussi "le droit à la beauté et à la poésie de nos forêts." (2) George, reviens! Ils sont toujours aussi fous!

(1) https://www.bastamag.net/foret-coupe-rase-action-de-preservation-ecologie-services-de-renseignement-gendarmerie?fbclid=IwAR0ZWzM0BhdZZMhxhsVg6z0IOqlUYvk-CijfHGwhtN6Cx3x2JLecMp3B0XE

(2) George Sand, "Impressions et souvenirs", 1873, cité dans "George Sand, l'appel de la forêt", Alizée Vincent, Causette, octobre 2020.