lundi 28 août 2023

Des nouvelles de la France profonde

Dans le cadre de ce festival de cinéma en plein air et itinérant, dans le centre de la France, chaque soir les spectateurs ont l'occasion, avant la projection, de manger et de boire un verre grâce à des producteurs locaux, au restaurateur du coin, à un foodtruck et/ou à une association.
Ce soir-là, dans ce village-là, c'est l'association de balltrap qui s'était proposée pour tenir le bar, en profiter pour se faire connaître et se faire quelques sous. Mais deux semaines avant l'évènement, le président de l'association s'est inquiété : quel était donc ce foodtruck aux côtés duquel il allait servir à boire ? Quand il a appris que le foodtruck proposait exclusivement des plats végétariens, il a protesté : "Mes bénévoles m'ont dit qu'ils ne viendraient pas s'il n'y a pas de viande". Eclat de rire de l'organisateur qui croit à une plaisanterie. Mais l'homme est très sérieux, il ne peut envisager le moindre repas sans viande. D'ailleurs, il est éleveur et dit défendre sa profession. Quand on lui rétorque que la jeune femme qui propose des plats végétariens défend la sienne et que tous les spécialistes de la santé nous invitent à diminuer nos consommations de viande, il reste sourd. Il est hors de question qu'il vienne. Il refuse même de saisir la perche qui lui est tendue : faire un barbecue pour proposer de la viande à qui, comme lui, en a un besoin irrépressible. Ce sera le foodtruck ou lui. L'association de balltrappeurs (ces chasseurs qui doivent garder la main l'été) n'a donc pas servi à boire aux quelque deux cent cinquante spectateurs présents ce soir-là, qui ont pu apprécier la finesse de la cuisine végétarienne. Elle fut remplacée au pied levé par une autre association à l'esprit plus ouvert.
Si on suivait le raisonnement du viandard, un garagiste pourrait s'opposer au nom de la défense de sa profession à l'organisation d'une randonnée à vélo dans sa commune, un viticulteur à l'ouverture d'un bar sans alcool, des automobilistes à un piétonnier, un commerce de vêtements à un camping naturiste.

L'homme de Néandertal, chasseur carnivore, a, un moment, menacé de dérouler un calicot sur le site de la projection et de convoquer la presse. Qu'aurait-il dit ? Je n'aime pas les légumes ? Vive la viande ? Non au grand remplacement végétarien ? On aurait tant aimé le savoir. On aurait ri encore. 



1 commentaire:

Bernard De Backer a dit…

Cher Michel,de manière plus large et en dépassant l'incident évoqué ici, tous ceux qui suivent "les affaires climatiques", et tout ce qui va avec, savent que l'on va droit dans le mur. Même le secrétaire général de l'ONU. Se pose dès lors la question du déni qui semble même rebondir selon Le Monde. Je pense qu'il y a en a de plusieurs sortes : 1) Celui "de chez nous" en Europe qui peut venir du "bas" comme du "haut" de l'échelle sociale, voire même de certains classes moyennes "conscientes" mais qui vont en vacances à Bali en mangeant bio. J'en connais. 2) Et puis, ne jamais l'oublier, il y a ce fameux "Sud global" (dont fait partie la Russie et pas le Japon ou Singapour - ce qui mondre bien que cette dénomination géographique est impropre), qui a mille bonnes ou mauvaises raisons d'être ignorant ou sceptique, même s'il en est victime. Croisons les doigts pour que les élections de 2024 ne propulsent pas les USA dans "le Sud global". Autre chose : content du retour du blog !