mercredi 30 octobre 2019

"Jeanne au bûcher" au bûcher

Il y a deux ans, l'Eglise catholique française lançait une campagne d'appel aux dons, en s'appuyant notamment sur un slogan créé pendant la campagne présidentielle précédente (1): "Votez Jésus-Christ, le seul qui n'a jamais changé de programme". Est-ce positif de ne pas changer de programme quand on constate qu'en deux mille ans J.C. n'a jamais réussi à le faire appliquer? "Aime ton prochain comme toi-même", ça n'a jamais marché. Pire, nombre de ses fidèles ont appliqué l'exact contraire de cette injonction impossible à concrétiser. Ce furent l'Inquisition, les croisades, le massacre de la Saint-Barthéméy, quantité de guerres menées au nom de Dieu et autre horreurs du même genre. Les sorcières, les infidèles, les apostats, les hérétiques, toutes celles et tous ceux qui ne marchaient pas dans le droit fil de l'Eglise ont fini en prison ou directement au cimetière. Même Jeanne d'Arc fut exécutée par l'Eglise.
Aujourd'hui, l'Inquisition est toujours active. Une certaine Fédération Pro Europa Christiana veut faire interdire au Théâtre Royal de la Monnaie à Bruxelles les représentations de "Jeanne d'Arc au bûcher", opéra d'Arthur Honneger, sur un livret de Paul Claudel. Elle trouve "obscène" la mise en scène de Romeo Castelucci, créée en 2017 déjà. La Fédération s'offusque qu'au cours du spectacle le personnage de Jeanne d'Arc apparaisse nu, change de sexe au cours de la représentation, mais aussi qu'il porte des vêtements masculins. Cette dernière accusation en particulier est surprenante quand on se souvient que, comme le rappelle la Monnaie, "il s'agit là du même reproche que celui qui lui a été fait lors de son procès en 1431. Considéré comme un signe d'héréticité, le simple fait de s'habiller en homme lui a valu une condamnation au bûcher. Que ce reproche refasse surface près de six cents ans plus tard provoque la stupéfaction. Que Jeanne d'Arc ait choisi de se vêtir comme un homme et de se couper les cheveux est de surcroît un fait historique avéré." Le T.R.M. souligne que "la mise en scène (profondément spirituelle) de Castelucci souhaite aller au plus près de la quintessence et présenter Jeanne comme un personnage profondément humain et vulnérable".
Quelle Europe voudrait nous imposer la Fédération Pro Europa Christiana? Celle des bûchers?

(1) http://www.lalibre.be/actu/international/france-votez-jesus-christ-le-seul-qui-n-a-jamais-change-de-programme-5a0167dacd707514e89f0afe
(2) https://www.lalibre.be/culture/musique/la-monnaie-defend-l-oratorio-jeanne-d-arc-au-bucher-mis-en-scene-par-castellucci-5db6f95e9978e218e381bde1

lundi 28 octobre 2019

Le bureau des légendes obscures

Les premiers êtres humains ont vécu en même temps que les dinosaures. Et en parfaite entente avec eux. C'est ce qu'expliquent sans rire ces grands humoristes de créationnistes américains (1). Ils sont croyants. Entendez qu'ils croient en des théories ahurissantes, les mains sur les yeux et les oreilles, refusant d'entendre les explications scientifiques. Mais pas les mains sur la bouche. Ils parlent, ils prêchent, ils pérorent, ils manipulent.
Dans leur Musée de la Création dans le Kentucky, fréquenté par 300.000 visiteurs par an, ces évangélistes affirment, sans le moindre doute, que la Terre n'a que 6.000 ans d'existence et que toutes les formes de vie ont été créées en même temps par Dieu. Le diable s'appelle Charles. Charles Darwin. Il essaie de nous faire croire, cet infâme, que les espèces ont évolué.
Leurs délires s'expriment aussi dans une arche gigantesque, copie conforme de celle de Noé qui, évidemment, a vraiment existé. Car il faudrait être stupide ou possédé par Satan himself pour croire qu'elle n'est que légende. Ils datent le déluge de 2.348 avant J.C. et la construction des pyramides d'Egypte de 1.730 avant J.C., soit 1.000 ans plus tard que ce qu'estiment les archéologues.
Ils citent les noms des 1.400 espèces animales sauvées dans l'arche qui auraient permis de faire renaître le monde. Tant pis s'il n'y a parmi elles aucun insecte et tant pis si les scientifiques ont constaté l'existence de sept millions d'espèces animales sur la planète. Toutes les affirmations sont permises quand on croit. 

Le pire, c'est que les créationnistes diffusent leurs délires dans les écoles privées et qu'ils attaquent les écoles qui enseignent l'évolution des espèces. "Selon les modèles scientifiques, il aurait fallu 60 millions d'années pour saliniser les océans, explique à des enfants le directeur de la Woodward Christian Academy. Si la terre n'a que 6.000 ans, comment les océans peuvent-ils être aussi salés aujourd'hui? Ils n'ont pas eu le temps. Dans ce cas-là, on peut peut-être penser que, comme Dieu a créé les océans, il les a déjà créés avec quoi? Du sel!". A quoi bon la science quand un raisonnement simpliste suffit? 

Un tiers des Américains adhèrent aux théories créationnistes. Parmi eux, Mike Pence, vice-président des Etats-Unis, et Betsy DeVos, Ministre de l'Education. 
Résumons-nous: l'obscurantisme se porte bien et la bêtise a de beaux jours devant elle. 

(1) https://www.france.tv/france-2/journal-20h00/1087075-journal-20h00.html

samedi 26 octobre 2019

Comment s'appelle Calimero en Turquie?

A quoi reconnaît-on un dictateur? Notamment à son attitude vis-à-vis de la presse. Le critiquer, c'est lui manquer de respect. Dénoncer la guerre qu'il mène, c'est l'insulter. Les coupables savent mieux que quiconque jouer les victimes.
Pauvre Erdogan qui fait ce qu'il peut pour éviter que son pays soit soumis aux terroristes kurdes en les bombardant au cours de son opération joliment appelée "Source de paix" et qui se fait critiquer pour cela. Le voilà traité d' "éradicateur" par Le Point. C'est trop injuste. Il dépose plainte contre l'hebdomadaire français (1).  L'an dernier déjà, il avait exprimé sa fureur pour avoir été traité de dictateur par le même Point (2).
Il se sent, dit-il, atteint dans son honneur et sa dignité, lui qui se montre indigne de sa fonction de président de la République turque et a fait mettre en prison des milliers d'opposants et de journalistes qui ont pour seul tort de ne pas l'encenser.
En fait, traiter un homme comme lui de dictateur, c'est de lui donner, un peu plus, l'occasion de prouver qu'il l'est. Mais dans la novlangue qu'il aimerait que tout le monde pratique, éradicateur se dit pacificateur.

(1) https://www.lemonde.fr/international/article/2019/10/25/qualifie-d-eradicateur-le-president-turc-erdogan-porte-plainte-contre-le-point_6016888_3210.html
(2) (Re)lire sur ce blog "La presse, tête de turc",  30.5.2018.

dimanche 20 octobre 2019

Ne souriez pas, vous êtes filmés

On connaît mal l'humour turc. C'est quelque chose. Appeler sa guerre "Source de paix", c'est drôle. Pas au point de hurler de rire, mais enfin, il faut reconnaître qu'Erdogan est un vrai pince-sans-rire. Ce qui nous amène à cette question: les chefs, les vrais, les durs, les mecs sourient-ils? Combien de fois a-t-on vu sourire Poutine, Trump, Erdogan, Bolsonaro? Y a-t-il une photo où l'on voit Hitler sourire? Un chef, un vrai, ne doit pas se laisser aller à l'émotion et toujours montrer qu'il contrôle la situation. Et qu'elle est grave. Heureusement qu'il est là, doit-on se dire en voyant qu'il prend la situation très au sérieux. Le chef doit apparaître décidé, voire pugnace. Il doit s'exprimer par coups de menton et peut seulement, de loin en loin, laisser voir un rictus qui peut donner l'illusion d'un sourire.
Y a-t-il eu un jour dans le monde autant de tristes sires à la tête d'autant d'Etats? Nous voilà dans "un monde de dingues", comme l'écrivait récemment Jean-François Khan dans Le Soir. 
Donald Trump fait, plusieurs fois par jour, tout ce qu'il peut pour nous en convaincre, multipliant bêtises, provocations, agressions et contradictions. Bolsonaro hurle que l'Amazonie lui appartient et qu'il en fait ce qu'il veut. Il injurie le président Macron pour aussitôt lui demander de retirer ses insultes. Le taureau nationaliste Boris Johnson, rappelle Jean-François Khan, a autorisé la reprise de British Steel par un fonds de pension de l'armée turque. Hier, totalement schizophrène, il a envoyé deux lettres à la Commission européenne, qui disent le contraire l'une de l'autre. L'une est signée, l'autre pas. 
On voit par là qu'une profession d'avenir reste celle de psychiatre.

(1) "Johnson, Bolsonaro, Trump... : un monde de dingues", Le Soir, 2.9.2019.

vendredi 18 octobre 2019

Foot sectaire

Le sport n'a jamais rien eu à voir avec la politique. Laissons-le à l'écart de ce mælstrom malodorant.
Voilà ce qu'on entend dire si souvent. Il est vrai que le sport est si pur, si préservé de sordides questions d'argent ou de pouvoir.
Et si les footballeurs de l'équipe nationale turque ont fait par deux fois - lors de matchs face à la Bulgarie et face à la France - le salut militaire, ce n'est pas pour des raisons politiques, mais juste selon l'entraîneur turc, "pour soutenir nos soldats" (1). Et tout le monde sait que le soutien à des militaires faisant la guerre à un peuple voisin n'a rien de politique. C'est juste un petit clin d'œil sympa.
Même explication en Belgique où, cette fois, ce sont des enfants qui ont effectué - spontanément, on n'en doute pas une seconde - le salut militaire (2). Ils jouent dans un club de Beringen qui a pour nom Turkse FC, un club on ne peut plus turc en terre limbourgeoise. Un dirigeant du club a justifié ce salut en expliquant que les enfants avaient juste voulu "saluer les martyrs et leurs familles" et qu'il ne faut y voir aucun lien avec l'intervention militaire turque en Syrie. Et d'ailleurs, à entendre le président de l'organisation Union of International Démocrats (proche du parti d'Erdogan), c'est à peine si le club était au courant de ce conflit. Une photo des enfants footballeurs a été diffusée, avec cette légende: "nous voulons offrir notre âme pour l'existence d'une nation turque". Où on comprend que ces jeunes joueurs ont donc une âme et que le nation turque n'existe toujours pas.
On voit par là combien une équipe de foot peut s'apparenter à une secte et être un espace d'endoctrinement et de propagande nauséabond.

(1) https://www.liberation.fr/sports/2019/10/15/foot-les-turcs-saluent-bien-les-bleus_1757683
https://www.lalibre.be/sports/football/en-pleine-polemique-les-joueurs-turcs-refont-leur-salut-face-a-la-france-photos-5da4e6469978e218e3373c7a
(2)  https://www.lalibre.be/belgique/politique-belge/le-salut-militaire-des-jeunes-footballeurs-d-un-club-turc-de-beringen-enerve-le-ministre-weyts-5da5edb5f20d5a264d069d40

lundi 14 octobre 2019

La religion de paix aime la guerre

Que les religions soient vectrices de paix est la plus grande blague que l'humanité (une large partie d'entre elle en tout cas) se soit jamais racontée. Qui peut aujourd'hui affirmer sans rire - ou sans pleurer - que l'islam est une religion de paix?
Au Yemen, les deux grandes puissances islamiques, l'Arabie saoudite côté sunnite et l'Iran côté chiite, se font la guerre. Et c'est la population civile yéménite qui en paie le prix. Lourdement.
Les pays où l'Islam est religion d'Etat peuvent très rarement être considérés comme des démocraties. Au contraire. L'opposition y est inexistante ou en prison. Les femmes sont voilées et à la maison.
Et voilà qu'Erdogan, ce grand croyant qui s'est un jour présenté comme "l'imam d'Istanbul", vient de lancer une guerre contre les Kurdes syriens. Même si ceux-ci furent en première ligne dans le combat contre le monstre fascisto-islamiste en Syrie. Même si nous leur devons une reconnaissance éternelle pour le rôle qu'ils ont joué face à Daech. L'armée turque et les milices qu'elles a lâchées ont entamé les massacres, même contre des convois de civils (1).
Et nous, nous restons là, mutiques ou presque, abandonnant les Kurdes à la terreur (2). Par lâcheté et parce que nos irresponsables dirigeants européens ont passé un pacte avec ce terroriste d'Erdogan pour qu'il retienne trois millions de réfugiés à l'intérieur de ses frontières. Frontières qu'il menace maintenant d'ouvrir côté U.E. si celle-ci avait l'outrecuidance de prendre des sanctions contre lui pour son agression de la population kurde.
Les pays de l'Union européenne, à l'exception du Royaume-Uni (vivement le Brexit!), ont heureusement décidé de ne plus vendre d'armes à la Turquie (3). Mais c'est un peu tard.
C'est toute relation qu'il faut cesser, tout de suite, avec la Turquie. Absolument toute. Politique, économique, sociale, culturelle, touristique, sportive. Il faut exclure la Turquie de l'OTAN. Dire enfin clairement que la Turquie, cette Turquie-là, ne fera jamais partie de l'Union européenne. Annuler le match de foot, prévu ce soir, entre la France et la Turquie. Il faut mettre la Turquie au ban de la société civilisée. Elle s'y est mise elle-même.

Trump le dingue l'y a bien aidée. Je retire mes troupes de Syrie. Puis, non, je les y laisse. Puis, je les retire quand même parce qu'elles risquent d'être prises entre les deux feux, turc et kurde, que j'ai moi-même allumés (4).
Voilà les Kurdes forcés d'appeler à l'aide Assad, l'odieux boucher de Damas, et ses troupes.
Grâce au chaos provoqué par ce duo monstrueux que jouent Erdogan et Trump, des proches de djihadistes se sont enfuis par centaines (5). La guerre en Syrie est relancée, tout autant que la lutte du bien (forcément du côté de la religion) contre le mal (forcément du côté des laïcs). Les religions aiment le sang. Et la terreur.

(1) https://www.lalibre.be/international/asie/neuf-civils-kurdes-dont-une-femme-politique-executes-par-une-milice-turque-5da23b66f20d5a2781766617 et France Inter, Journal de 9h, 14.10.2019.
(5) https://www.lalibre.be/international/asie/syrie-des-familles-de-membres-de-l-ei-se-sont-echappees-d-un-camp-5da2e296d8ad5841fc7a9261

jeudi 10 octobre 2019

Avant qu'il ne soit trop tard

Les agriculteurs dits "traditionnels" ou conventionnels" (comme si c'était la tradition ou une convention communément admise qui les poussait à utiliser la chimie pour faire pousser leurs plantes) en ont assez de ce qu'on appelle aujourd'hui "l'agribashing". Assez d'être critiqués et malmenés de toute part.
Personne ne niera qu'il s'agit là d'une profession parmi les plus difficiles qui soient. Mais personne ne contestera non plus que l'agro-industrie s'est embarquée - et a embarqué les siens - dans une voie aujourd'hui intenable. Elle a fait le choix d'une agriculture de plus en plus folle, qui coûte cher à la terre (avec ou sans majuscule).

On peut évidemment rejoindre les agriculteurs dans leurs critiques des traités internationaux qui font voyager à travers la planète céréales, légumes, viandes et produits laitiers. C'est localement qu'il faut acheter et consommer, en particulier les aliments. Ce qui implique la fin des importations. Et donc aussi des exportations. Ça fonctionne dans les deux sens.
Ce n'est cependant pas pour leur opposition aux importations qu'ils sont aujourd'hui critiqués. Mais surtout pour leur usage des pesticides qui empoisonnent la vie. La leur en premier lieu, celle des riverains aussi, de la terre, des insectes, des oiseaux, des rongeurs, de l'eau, de l'air. Les pesticides sont par définition des poisons. Dont on peut se passer. L'agriculture biologique le démontre.
Mais les agriculteurs dits traditionnels sont prisonniers de plusieurs décennies de conditionnement. Ils sont dans "la servitude volontaire", malgré les appels et les mises en garde qui se multiplient depuis si longtemps. Les pesticides leur facilitent la vie, ils réduisent leur travail et sont par-fai-te-ment-in-o-ffen-sifs, leur ont toujours juré les vendeurs de chimie, appuyés par le principal syndicat agricole français, la FNSEA. De pères en fils se refilaient les mêmes méthodes, les mêmes marques, la même fuite en avant. Jusqu'à ce que de plus en plus de professionnels du sol en deviennent malades ou, pis, en meurent.
Mais ceux-là, la FNSEA ne les connaît pas. Ou plus.
Christiane Lambert, présidente du syndicat agricole, déplore l'agribashing. Elle demande "que les gens se respectent" (1). Entendez par là qu'on cesse de critiquer les agriculteurs pour leur usage des pesticides et qu'on ne les empêche pas de travailler en épandant des pesticides là où ils le veulent.
"Je comprends les craintes quand elles sont fondées", dit-elle. Mais elle s'étonne qu'on ait trouvé des traces de glyphosate dans l'urine d'opposants alors qu'aucune analyse n'en a relevé chez des agriculteurs, pas plus chez elle. Elle ignore sciemment - et ce faisant les méprise - tous les agriculteurs qui souffrent de graves problèmes de santé dus à un contact avec ces poisons que sont les pesticides (2). "Il y a eu beaucoup d'exagérations sur le sujet", selon elle, même si elle affirme comprendre l'inquiétude. "Il y a eu une polémisation avec la distance de 150 mètres. Mais aucune donnée scientifique ne dit que c'est la bonne distance." De nombreuses analyses scientifiques mettent pourtant en garde sur les graves dangers que font courir les pesticides. Ceux-ci sont d'ailleurs interdits les uns après les autres. Et aussitôt remplacés par de nouveaux dont on n'a pas encore pu démontrer la nocivité.
"Depuis 2015, dit encore Christiane Lambert, nous mettons en œuvre des mesures pour protéger les publics sensibles. La solution n'est pas dans des distances, mais dans des équipements, des horaires et des dispositions adaptés." On peut donc lire entre les lignes que les pesticides constituent, pour elle aussi, un problème. Même si elle n'est pas prête à une vraie remise en question de ces pratiques.

L'industrie chimique, elle, s'adapte, contrainte et forcée. Et si elle se voit obligée d'abandonner certains produits jugés toxiques, elle n'a aucun scrupule à continuer à les vendre jusqu'au bout. En témoigne la publicité ci-dessous qui, "avant qu'il ne soit trop tard", invite les agriculteurs à se fournir en époxiconazole, un fongicide très bientôt interdit, parce que soupçonné par l'ANSES (l'Agence  nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation), d'être un perturbateur endocrinien" pour l'être humain et les organismes non-cibles", de présenter "un niveau de danger préoccupant pour l'Homme et l'environnement", d'être "susceptible de nuire à la fertilité" et "susceptible de provoquer le cancer".
Récemment, on entendait des agriculteurs affirmer que les pesticides sont des médicaments pour les plantes. On conviendra que mieux vaut éviter les médicaments qui provoquent le cancer.

Les agriculteurs le savent: pour mettre fin à l'agribashing, il faudra en passer par l'agrichanging.

(1) https://www.franceinter.fr/emissions/on-n-arrete-pas-l-eco, émission du 5.10.2019.
(2) voir www.phyto-victimes.fr

CONSEIL D'EXPERT 


Arthur : expert
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Arthur, Expert phyto 

Phytosanitaire Fongicide : Anticipez vos achats avant qu'il ne soit trop tard !
" Cette année de nombreuses molécules vont être retirées du marché et il faudra être prévoyant pour concevoir son programme phytosanitaire. L'époxiconazole est l'une d'elle. Elle sera retirée de la distribution le 30/11/2019, mais un délai de grâce permettra de l'utiliser jusqu'au 30/07/2020.
Il parait donc important d'anticiper ses achats au plus tôt sur des produits composés de cette molécule : " 

lundi 7 octobre 2019

Le charme fou des perdrix

C'est un OVNI dans le ciel cinématographique, mêlant amour, absurde, tendresse, poésie, mélancolie et géodrilologie (l'étude des vers de terre). Rien de moins. Et beaucoup plus.
"Perdrix", c'est le titre du film et le nom d'un jeune capitaine de gendarmerie, celui de son père mort dix ans auparavant à qui la famille continue à rendre hommage chaque soir avant de dîner sous sa photo. 
Dans ce coin perdu des Vosges, la brigade de gendarmerie mène une vie tranquille, qui permet à chacun de ses membres de se consacrer à ses activités favorites: l'un étudie des chansons de Manset, un autre pratique des jeux vidéos, un troisième réfléchit, le capitaine lit le poète allemand Novalis.
Seul souci pour les gendarmes: la présence dans la région d'une bande de naturistes révolutionnaires qui dépouillent les gens de tout ce qui leur paraît superflu. Juliette en est victime, elle qui de passage dans le coin se fait voler sa voiture et tout ce qu'elle comporte. C'est-à-dire toute sa vie, puisqu'elle se balade au hasard  à travers la France, sans port d'attache. Et même sans attache du tout. Ce n'est pas son genre. Avec sa voiture, c'est sa vie qu'elle a écrite dans des dizaines de cahiers qui disparaît. Entre le capitaine ancré là par la vie et celle qui fuit la sienne commence alors un ballet d'attraction-répulsion.
Le film présente aussi une belle galerie de personnages: la mère Perdrix qui joue à Radio Confidences (et confidentielle) dans son garage, le frère Perdrix passionné de vers de terre, la nièce Perdrix qui veut quitter cette maison aux papiers peints étouffants.

"Perdrix" est un film qui prend son temps. Le temps d'installer un plan, de se regarder, d'essayer de se comprendre, de poser des silences. Le temps aussi de nous faire entrer dans de sublimes paysages des Vosges.
Erwan Le Duc, le réalisateur, a de belles références : les Monthy Python, Wes Anderson, Aki Kaurismaki. Le mélange des influences et des genres donne un film au charme fou qu'on a peine à quitter.
Avec Swann Arlaud, Maud Wyler, Fanny Ardant, Nicolas Maury, Patience Muchenbach.

https://www.telerama.fr/cinema/erwan-le-duc,-realisateur-de-perdrix-mon-film-nest-pas-forcement-aimable,n6344256.php

dimanche 6 octobre 2019

Immigration: un autre regard

Juste avant que l'Assemblée nationale ne commence à débattre de l'immigration, le magazine de France Inter "On n'arrête pas l'éco" s'est saisi de la question ce samedi (1)  et, ce faisant, a remis les pendules à l'heure pour réfuter la thèse de l'invasion de la France par les immigrés. Alexandra Bensaïd recevait Christian Chavagneux, économiste et journaliste au magazine Alternatives Economiques, et Emmanuel Lechypre, économiste et journaliste notamment à l'Expansion.

De qui parle-t-on quand on parle d'immigrés? De personnes nées à l'étranger et qui vivent en France, même si elles ont reçu la nationalité française. Des sondages indiquent que les Français pensent que les immigrés seraient 27 millions, alors qu'ils ne sont que 6,5 millions, dont 2,5 millions ont la nationalité  française. Ils représentent ainsi 9,7% de la population française. Un chiffre en augmentation ces derniers temps, due essentiellement aux étudiants qui, dans leur grande majorité, rentrent ensuite dans leur pays. Ces 6,5 millions sont constitués d'un tiers d'Européens, de 30% de Nord-Africains, de 17% d'Africains subsahariens, le reste étant essentiellement constitué d'Asiatiques (dont une majorité de Chinois).
La France accueille proportionnellement moins d'immigrés que la plupart des autres pays européens.
Trois fois moins que l'Allemagne, deux fois moins que la moyenne de l'OCDE. Les personnes qui quittent leur pays ne sont pas, loin s'en faut, majoritairement attirés par la France. L'Allemagne est de loin plus atttractive.

Les immigrés ont un niveau d'éducation supérieur à la moyenne de la population française. Ils sont essentiellement concentrés dans les grands centres urbains. Ils vont là où il y a du travail. Et ne sont donc pas concurrents par rapport aux Français qui cherchent du travail.
Les immigrés non qualifiés ne constituent que moins d'1% de la population française.
Sur 6,5 millions d'immigrés, on estime qu'il y a au maximum 400.000 sans papier.

Une idée simpliste et assez répandue veut que quantité d'immigrés viennent en France pour bénéficier des largesses de la Sécurité sociale. Les économistes rappellent que le parcours administratif pour les immigrés est très long et très compliqué, bien plus que pour les Français. Il faut cinq ans de séjour régulier en France pour pouvoir toucher le RSA, le revenu de solidarité active. Il en faut dix pour avoir droit au minimum vieillesse. L'Aide médicale d'Etat - qui a suscité ces derniers temps bien des délires - est réservée aux immigrés en situation irrégulière et a été mise en place pour éviter les contaminations. Elle ne s'obtient que sur dossier et pour un an seulement et le bénéficiaire n'est remboursé qu'au tarif de la Sécurité sociale.

La contribution des immigrés à la protection sociale en France est positive: un arrêt de l'immigration coûterait deux points de P.I.B. à l'horizon des cinquante prochaines années, soit 40 milliards de moins par an pour la sécu. En 2100, ce serait le double. Parce que les immigrés cotisent comme tout le monde et souvent rentrent dans leur pays à la retraite, sans la toucher alors qu'ils ont cotisé.
Toutes les études indiquent qu'ils ne tirent pas les salaires vers le bas, ne prennent pas les postes des immigrés arrivés avant eux, et dépensent quasiment l'intégralité de ce qu'ils gagnent. L'effet est donc positif sur la consommation et la croissance. L'immigration est ainsi un apport pour l'économie française.

L'immigration économique stagne à un niveau faible. En 2017, elle représentait 1% des nouveaux entrants. On est donc loin des grandes vagues de recrutement des Trente glorieuses. Les immigrés sont principalement engagés dans les professions en déclin et les professions en demande: saisonniers, secteurs du bâtiment, de la santé, etc.
Le démographe Hervé Le Bras rappelle que l'économie a toujours eu besoin des immigrés, essentiellement pour des postes non remplis par des Français parce qu'ils impliquent des taches plus risquées ou plus difficiles. Les patrons et entrepreneurs, pourtant souvent de droite, ont toujours été favorables à l'ouverture des frontières. 

L'immigration ne représente pas un problème macroéconomique, le marché du travail étant extensible, mais un problème d'intégration et d'inclusion. La peur de l'immigré se constate principalement dans des régions où il y a peu ou pas d'immigrés.
C'est sur ces aspects-là, intégration, inclusion et pédagogie que devrait se pencher le débat parlementaire si'il veut avoir du sens.

(1) https://www.franceinter.fr/emissions/on-n-arrete-pas-l-eco, émission du 5.10.2019.

jeudi 3 octobre 2019

Pesticides à domicile

Ainsi donc (1), le Gouvernement français nous interroge: faut-il interdire l'épandage de pesticides à 5 mètres ou 10 mètres des habitations? 
En Mayenne, une habitante témoigne (2). Plusieurs de ses animaux domestiques sont morts, les uns après les autres. En 2013, sa fille, alors très jeune, est tombée malade, souffrant de douleurs violentes qui l'empêchaient d'aller à l'école. Les médecins ont diagnostiqué une polyarthrite infantile. Sa mère a, ensuite, développé une tumeur qui s'est développée à une vitesse très rapide et fut suivie d'une deuxième tumeur. Selon les médecins, elles pourraient avoir été provoquées par un problème environnemental. 
Or des pesticides sont régulièrement épandus sur des céréales à 8 mètres de l'habitation familiale et lors de fortes pluies les terres des champs sont lessivées et finissent leur course dans la cour de la maison. A partir d'analyses, on a retrouvé 15 pesticides différents dans les cheveux de la mère et de sa fille.
Le maire, agriculteur retraité, s'en lave les mains. L'agricultrice responsable des épandages refuse tout interview et commentaire. La firme qui a les effectués affirme avoir respecté la loi.
On voit par là qu'il y a urgence à changer la loi. Radicalement.

(1) (Re)lire sur ce blog "Les pesticides à la porte", 10.9.2019.
(2) France 3, Journal, 2.10.2019, 19h30.

Sur le même thème, sur ce blog:
"Soutenir Daniel Cueff", 18.8.2019;
"Le cynisme a un nom", 22.7.2019;
"Histoires romantiques", 13.6. 2019;
"Nouveau coup de David à Goliath", 12.4.2019;
"Du caractère citoyen du coquelicot", 10.11.2018;
"Un ministre analphabète", 24.10.2018;
"La peste soit des pesticides", 7.10.2018;
"Nous voulons des coquelicots", 15.9.2018.