samedi 31 décembre 2011

En avant, y a pas d'avance

Quid novi sub sole en 2012? Quel mouvement nouveau va amener souffle et espoir dans un monde en manque ? On se dit que depuis quelque décennies on piétine. Dans le domaine artistique, plus aucun grand mouvement. Les impressionnistes, les expressionnistes, les dadaïstes, les futuristes, les symbolistes, les surréalistes, les hyper-réalistes (et on en passe) se sont succédé. Depuis, plus rien. Le mouvement s'est arrêté aux punks. Pour qui il n'y avait pas de futur. Mais peut-être a-t-on la mémoire courte ?
En politique, le dernier grand mouvement est celui de l'écologie, né au milieu des années '70, qui espère donner un futur à la planète et à ses habitants, du nord comme du sud, de l'est comme de l'ouest. Même s'il démontre un peu plus chaque jour sa pertinence, même s'il s'est imposé dans le programme de quasiment tous les partis politiques, il peine à forcer le changement, n'intervenant qu'à la marge du système. Aujourd'hui, le monde marche comme sifflent les agences de notation.
Domine aujourd'hui un mouvement qui n'a rien de neuf, un mouvement en marche arrière : celui du nationalisme. Chacun se réfugie sous sa tente. Le mur de Berlin est tombé il y a plus de vingt ans. On ne compte plus les murs, physiques ou symboliques, qui se dressent depuis. On nous annonce la fin de l'euro, celle de l'Europe. On brandit son identité comme un drapeau, comme une valeur. On est un imbécile même pas heureux qui est né quelque part.
La gauche a perdu le contact avec ce qu'il était convenu d'appeler "le peuple" qui préfère aujourd'hui voter pour les nationalistes ou l'extrême droite (qui se confondent souvent) qui rassurent avec leurs explications et leurs solutions simplistes et populistes.
La mode est à l'indignation face à l'hyper-capitalisme. C'est un début. Mais elle devrait être à l'invention. Celle d'un mouvement nouveau.

mardi 27 décembre 2011

Crétinisier

A quoi sert un bêtisier? A faire rire? On a du mal à le croire. On cherche en vain l'humour. Un bêtisier sert à bêtifier le téléspectateur et remplit parfaitement le rôle, le seul (ou presque) qui soit désormais attribué à la télé: crétiniser.
A quoi sert un JT? A informer? On a du mal à le croire. On cherche en vain l'info intéressante. Après une séquence sur les échanges de cadeaux de Noël par de grossiers personnages dans les commerces, François De Brigode nous propose une rétrospective des faits divers de l'année écoulée. Il a constamment un sourire en coin, visiblement heureux de nous rappeler ce que nous croyions avoir réussi à oublier. Avec Nora Kalefeeh qu'il accueille sur le plateau, les dialogues sont poussifs. Tout le monde s'ennuie, de part et d'autre de l'écran.
Allez, 2012, année sans télé. Ils nous ont convaincus.

lundi 26 décembre 2011

Un beau pays

Tu gagneras ton pain à la sueur de ton front. Le nouveau gouvernement belge est de tendance judéo-chrétienne. Il vient, en deux temps, trois mouvements, prenant les syndicats par surprise, de reculer de deux ans l'âge de la pension anticipée. On vit plus longtemps, on doit donc travailler plus longtemps. Tout se mérite. Et il faut en baver autant que possible.
Le député Philippe Moureaux, vice-président du Ps, estime que "ces réformes sont totalement injustes, totalement déséquilibrées... mais totalement indispensables!" (1). Voilà pourquoi il les a votées. Nous voici donc dans une situation où un parti socialiste trouve indispensable l'injustice. Mais Pappy Moureaux trouve aussi "sage" que "l'âge réel de départ à la retraite se rapproche de l'âge légal de la pension". Il reste d'ailleurs l'exemple de l'homme actif, fait-il remarquer: à 72 ans, il est toujours député-bourgmestre. Les petits jeunes ne sont pas encore près de prendre sa place. On voit par là que si chacun se droguait au pouvoir, les caisses de pension seraient plus pleines.
Les socialistes ne voient pas le travail du même oeil que les situationnistes. Raoul Vaneigem estime que "le travail a été ce que l'homme a trouvé de mieux pour ne rien faire de sa vie. (...) Il a privilégié l'espèce aux dépens de l'individu comme s'il fallait, pour perpétuer le genre humain, renoncer à la jouissance de soi et du monde et produire sa propre inhumanité" (2). La retraite, c'est du temps libre. Du temps pour mener sa vie comme on l'entend. Pour en profiter enfin, disent certains qui mènent un travail abrutissant, dépourvu de sens. Mais ce temps-là coûte trop cher à la société, estiment les socialibéraux, menés par le bout du nez par les agences de notation.
Et si l'argent était trouvé ailleurs? Par exemple, en baissant beaucoup plus encore que prévu les fameux intérêts notionnels et en contraignant les entreprises qui en bénéficient à créer des emplois? Par exemple, en taxant beaucoup plus les opérations boursières ou le précompte mobilier? Ou encore en augmentant la rente nucléaire? C'est que préconisent Ecolo et Groen (1).
En attendant, la Belgique reste un paradis fiscal: Bernard Tapie, ce grand philanthrope, y place ses billes. Une banque d'affaires lui a conseillé d'y placer une partie de ses avoirs. Il vient d'injecter plus de 215 million d'euros dans un holding belge, "évitant ainsi un impôt de 30% sur la plus-value, non taxée en Belgique" (3). Et pour faire voyager cet argent, Nanard n'a pas payé d'exit tax. Un gain de 70 millions d'euros. En outre, en Belgique, les holdings sont peu taxés, leurs dividendes sont exonérés à 95%. Et grâce aux intérêts notionnels, Tapie pourra encore réduire son assiette fiscale. En clair, écrit le Vif, " Tapie utiliserait la Belgique comme base de développement, sans y investir réellement. Comme peut le faire tout autre exilé fiscal de luxe, en somme".
Pendant que certains voient reculer l'âge de leur retraite, d'autres ne doivent même pas travailler. C'est leur argent qui le fait pour eux. Avec l'aide complaisante de l'Etat belge.

(1) LLB, 23 décembre 2011
(2) Raoul Vaneigem, "Nous qui désirons sans fin", Le Cherche-Midi éditeur, 1996
(3) Le Vif, 16 décembre 2011

mardi 20 décembre 2011

Y a plus de vieillesse

On ne se méfie jamais assez des vieux. Des vieux barbus en particulier. Les "infos des régions" de France 3, ce soir, nous apprennent qu'une ville (laquelle est-ce? dans le sud, mais où? on a la mémoire qui flanche) est à la recherche d'un Père Noël. C'est un appel urgent. Le précédent a eu une altercation avec un commerçant qui lui reprochait de se balader avec son fusil de chasse. Même en France, ça fait mauvais genre. Le Père Noël s'est fait licencier. Vous avez plus de soixante-cinq ans (pardon, soixante-sept désormais en France), êtes rondouillard, blanchi sous le harnais? Vous pouvez faire l'affaire. Si vous laissez votre artillerie à la maison. Allez, paix sur la terre aux hommes sans trop de mauvaise volonté.

lundi 19 décembre 2011

Gardez-moi de mes amis

Qui sont ses amis, qui sont ses ennemis? La NVA ne s'y retrouve plus, elle a beaucoup de mal à faire la différence. Bart De Wever, son président, estime que "c'est la NVA qui a fait baisser le score de l'extrême droite. (...) Le grand ennemi du Vlaams Belang, c'est moi et moi seul", a-t-il déclaré (1).
Dans le même temps, Ben Weyts, député NVA, se faisait allumer à la Chambre par Gerolf Annemans du V.B.: le député d'extrême droite asticote la NVA sur ses positions. Il affirme qu'elle fut, un temps, prête aux concessions avec les francophones, que le Gouvernement flamand (dont est membre la NVA) soutient le programme fédéral, que l'accord institutionnel de ce dernier correspond au projet du Gouvernement flamand. Chaque fois, Ben Weyts lui a rétorqué qu'il se trompait d'ennemi: "M. Annemans, lui a-t-il dit, regardez autour de vous: votre ennemi n'est pas à la tribune!" (2). Pierre Bouillon (du Soir) estime que Wouter Beke, patron du CDV, n'avait peut-être pas tort "quand il déclarait que la NVA ressemblait de moins en moins à la Volksunie (dont elle est l'héritière) et de plus en plus au Vlaams Belang".
Le journaliste indépendant Guido Fonteyn pense de même: il estime qu'il y a "une prise de conscience croissante en Flandre - entre autres dans les milieux syndicaux - que la NVA n'est pas seulement un parti communautaire, mais qu'elle se situe aussi à l'extrême droite sur les plans social, économique et même culturel. Le groupe autour de De Wever (...) attend seulement le jour de la proclamation de la république flamande indépendante. Afin de pouvoir y servir (...) les intérêts d'une élite de fortunés. Certainement pas les intérêts du peuple (flamand)..." (3). La NVA n'a donc pas seulement des amis ou de faux ennemis. Elle sait aussi se faire des ennemis qui ne sont pas forcément là où on (et elle) le pense.
Et voilà maintenant que De Wever se découvre de nouveaux amis: ce sont les supporters d'Etienne Tshisekedi en Belgique. Ils manifestent à Bruxelles pour contester la victoire de Joseph Kabila. Ils considèrent que les partis belges francophones ont soutenu et soutiennent encore l'actuel président. Ils se drapent dès lors, avec une logique pour le moins particulière, dans le drapeau flamand, annonçant que désormais ils voteront pour Bart De Wever. Voilà donc le boutefeu de la Belgique consacré sauveur de la démocratie congolaise. Après tout, si Dewinter s'exile en Namibie, pourquoi pas Bart au Congo? La terre africaine va-t-elle réconcilier les frères ennemis? On se le demande. On se demande aussi si les Africains ont mérité ça?

(1) "De Wever condamne le oui des souris", Le Soir, 14 décembre 2011
(2) "Quand le Belang, à trois reprises, se trompe d'ennemi", Le Soir, 14 décembre 2011
(3) Le Vif, 16 décembre 2011

vendredi 16 décembre 2011

Maximes pour grands hommes

Jamais contents. Ces écolos ne sont jamais contents. Rudy Demotte annonce-t-il "un don" de 15.000 euros pour remettre en état trois géants tournaisiens? Ils râlent. Marie-Christine Lefebvre, cheffe de groupe Ecolo au Conseil communal tournaisien, estime que le ministre-président wallon confond les rôles. "En annonçant qu'il apportera des subventions à Tournai, Rudy Demotte se place hors cadre d'une élection communale, dit-elle, où l'on doit débattre d'un projet pour le futur de Tournai" (1). Elle invite le candidat bourgmestre de Tournai à cesser sa distribution de cadeaux: "qu'il décroche sa hotte de Père Noël et la range au placard, du moins lors de manifestations publiques". Ce disant, elle "ose exprimer ce que des élus de la majorité PS-CDH murmurent", écrit Laurent Dupuis, qui rappelle les épisodes de Rudy le maillot jaune (2) et de Rudy présentant le plan communal cyclable de Tournai (3). On pourrait y ajouter l'épisode de Rudy le meunier de Thimougies (4). Rudy Demotte se rend compte combien il est difficile d'être compris quand on est si gentil. Et il découvre ainsi tout doucement la culture de la ville où il s'est auto-parachuté et quasi auto-proclamé bourgmestre. "Faites du bien à ein baudet, i vous quie au nez", dit-on à Tournai. On y dit aussi: "él' bourgémète i f'ra pus facilemint nettier vo rigole si i-est d'vo ruache" (5). On dit aussi que nul n'est prophète en son pays. Un humoriste prétendait que "nul névropathe en son pays" (6).

Pendant ce temps-là, les Montois peuvent être rassurés: leur bourgmestre en titre, même s'il sera "empêché" maintenant qu'il est premier ministre, continuera à rester bourgmestre: "le contact est quotidien avec le Collège", assure Juliette Pécry, porte-parole du Collège communal (1). Et Marc Barvay, bourgmestre faisant fonction, confirme que Elio Di Rupo "continuera de lancer ou maintenir les impulsions pour les grands dossiers. Elio n'abandonne pas Mons. Ce serait mal le connaître!". Qui en doutait? Pas ceux qui croient en la Providence et aux hommes providentiels. Uniquement ceux qui pensent que les cimetières sont peuplés de gens indispensables.

(1) LLB, 13 décembre 2011
(2) voir le billet "L'arrivée du tour", 31 octobre 2011
(3) voir le billet "Des villes à vivre", 10 décembre 2011
(4) voir le billet "Monsieur Bricolage", 1er septembre 2011
(5) le bourgmestre fera plus facilement nettoyer votre rigole s'il habite votre ruelle (extrait des "Maximes èd' Pépère Hinri" de Paul Mahieu (Hors-Cadre, Scribande).
(6) si je me souviens bien, c'était un dessinateur du magazine Pilote (Matin, quel journal!).

jeudi 15 décembre 2011

Solidarité avec le Canada

Le Sommet de Durban a accouché d'une promesse d'accord. La négociation sur le climat se poursuivra et, oui, oui, bien sûr, il y aura un bon accord. Un jour. "On continue, depuis Copenhague, à sauver le processus de négociation, mais on ne sauve toujours pas le climat", déplore le député européen Yannick Jadot (1). Il constate le "conservatisme absolu de certains secteurs industriels - des grands de l'énergie fossile, de la chimie, de la sidérurgie - qui aujourd'hui refusent l'évolution et paralysent le système, une partie de l'économie et des gouvernements qui ont malheureusement plus tendance à les écouter qu'à écouter tous les secteurs créateurs d'emplois dans cette nouvelle économie".
En attendant, sous ces températures automnales, on peut skier dans les rues de Bruxelles. La neige y est artificielle, faut-il le préciser. La féérie de Noël n'a pas de prix. A Mouscron et ailleurs sans doute, la patinoire en plein air a été rebaptisée pataugeoire. On patauge en effet dans les contradictions, le ridicule et les pratiques désuètes.
Le Gouvernement canadien a décidé de quitter le Protocole de Kyoto. Il n'arrivera pas à tenir ses engagements, dit-il. Donc il préfère se retirer. Aidons-le à rester dans le Protocole. N'allons plus au Canada. Autant d'avions, de voitures, de chauffage en moins. Et donc d'économies de CO2. Yes, we can(ada)!

(1) LLB, 13 décembre 2011

mardi 13 décembre 2011

Comment dit-on lamentable en néerlandais?

Big Brother is hearing you. Ca se passe à Grimbergen. Si on y boit la bière locale (de fameuse réputation) en disant "santé" (en français dans le texte), on risque gros. C'est que désormais, dans cette commune de la périphérie bruxelloise, située en Région flamande, on ne pourra parler et écrire publiquement que le néerlandais. Les citoyens seront invités à signaler au point de contact pour plaintes linguistiques les entorses à cette règle. Ont-ils entendu parler français ou une autre langue? Ils sont priés de le faire savoir. Ont-ils vu une inscription en français? Hop! Une dénonciation. Toute publicité multilingue sera interdite. La délation, elle, sera encouragée.
Décidément, on le dit et le répète, la bêtise est à la mode. Et le ridicule n'a jamais tué personne.
Cette mesure est illégale, affirme Dirk Vanoverbeke (1): "l'article 30 de la Constitution consacre le principe du libre choix dans les relations autres qu'administratives et judiciaires". Et de rappeler que les relations commerciales sont d'ordre privé.
Le Syndicat neutre pour indépendants se permet de signaler, s'il le fallait (et apparemment il le faut), que le multilinguisme est un atout pour les commerçants et que ceux-ci vivent de leurs clients (2). On veut bien prendre les paris: ce protectionnisme linguistique risque de se retourner contre les commerces de Grimbergen. Quel non néerlandophone aurait encore envie de faire ses courses dans une commune où il risque d'être dénoncé pour son absence de connaissance du néerlandais ou de faire dénoncer, à son corps défendant, le commerçant qui a eu la gentillesse de lui parler dans sa langue?
Mais peut-être les acheteurs flamands y remplaceront-ils les allophones ? Dirk Vanoverbeke constate que "la seule personne qui s'est opposée à cette mesure, c'est un député Groen bruxellois. Et il s'est fait traiter par l'ensemble des parlementaires flamands de francophone de service. Donc, ça montre bien qu'en Flandre cette mesure est considérée comme normale".
Pendant ce temps-là, à la Chambre, Jan Jambon de la NVA fait très sérieusement la chasse aux erreurs de prononciation en néerlandais d'Elio Di Rupo. Et Jean-Marie Dedecker (qu'on avait oublié) reproche au premier ministre de citer Jacques Brel. Un chanteur à laisser aux oubliettes, lui qui eut le culot, dans une de ses chansons, de refuser "d'aboyer le flamand". Christian Laporte rappelle à JMDD (3) que la cible de Brel était les flamingants. Et pas les Flamands, et moins encore les Flamandes qu'il appréciait beaucoup.
Lamentable se dit jammerlijk.

(1) Le Soir, 9 décembre 2011
(2) LLB, 10 décembre 2011
(3) LLB, 12 décembre 2011
(Re)lire aussi sur ce blog "J'ai acheté des plantes à Mooieoog", 27.09.2007

Post-scriptum: Tout comme il ne faut pas confondre musulmans et islamistes, il ne faut pas confondre flamands et flamingants. Ce n'est pas parce qu'on a du respect pour les uns qu'on ne peut pas pourfendre les autres. Au contraire. Les distinctions sont utiles. On est bien au-delà de la nuance.
Pour Jean-Marie Dedecker, rappel de la chanson de Jacques Brel qui brocarde les flamingants.

Les Flamingants, chanson comique !

Messieurs les Flamingants
J'ai deux mots à vous rire
Il y a trop longtemps
Que vous me faites frire
À vous souffler dans le cul
Pour devenir autobus
Vous voilà acrobates
Mais vraiment rien de plus

Nazis durant les guerres
Et catholiques entre elles
Vous oscillez sans cesse
Du fusil au missel
Vos regards sont lointains
Votre humour est exsangue
Bien qu'y aient des rues à Gand
Qui pissent dans les deux langues
Tu vois quand j'pense à vous
J'aime que rien ne se perde
Messieurs les Flamingants
Je vous emmerde

Vous salissez la Flandre
Mais la Flandre vous juge.
Voyez la mer du nord
Elle s'est enfuie de Bruges.
Cessez de me gonfler
Mes vieilles roubignoles
Avec votre art flamand-italo-espagnol.
Vous êtes tellement tellement
Beaucoup trop lourds
Que quand les soirs d'orage
Des chinois cultivés
Me demandent d'où je suis,
Je réponds fatigué
Et les larmes aux dents :
"Ik ben van Luxembourg".
Et si aux jeunes femmes,
On ose un chant flamand,
Elle s'envolent en rêvant
Aux oiseaux roses et blancs

Et je vous interdis
D'espérer que jamais à Londres
Sous la pluie on puisse
Vous croire anglais
Et je vous interdis
À New-York ou Milan
D'éructer Messeigneurs
Autrement qu'en flamand
Vous n'aurez pas l'air cons
Vraiment pas cons du tout
Et moi je m'interdis
De dire que je m'en fous
Et je vous interdis
D'obliger nos enfants
Qui ne vous ont rien fait
À aboyer flamand
Et si mes frères se taisent
Et bien tant pis pour elles.
Je chante persiste et signe :
Je m'appelle Jacques Brel ....

lundi 12 décembre 2011

Tous frères?

On s'est déjà posé la question. On sait qu'on se la posera encore. L'islamisme, cette utilisation réactionnaire, conservatrice et souvent violente de l'islam, est-il compatible avec la démocratie? On pense connaître la réponse.
Jean-François Khan affirme que "demain, l'Internationale des Frères musulmans, ce socle de tous les islamismes politiques, dominera l'ensemble du monde arabe" (1). Il rappelle qu'ils ont remporté 40 % des suffrages en Tunisie, que leur section marocaine est devenu le premier parti du pays, qu'en Egypte, Frères musulmans et Salafistes dépassent les 60% des voix. Et d'autres pays suivront, pense-t-il: "en Palestine, le prochain scrutin, s'il a lieu, se soldera par un triomphe du Hamas, dont on oublie qu'il n'est, lui aussi, qu'une branche locale des Frères musulmans, et la Jordanie, si les élections y étaient vraiment libres, n'échapperait pas au phénomène". Il en ira de même en Libye. Et aussi en Syrie où "ce sont les islamistes sunnites les plus radicaux, aile immodérée cette fois des Frères musulmans, qui ont pris la tête de l'insurrection".

On peut espérer, comme Jean-François Khan, que l'islamisme connaisse la même évolution que celle qu'a vécue la religion catholique jusqu'à l'avènement de la démocratie chrétienne. Mais, à quel coût, en attendant, pour les citoyens - et surtout citoyennes - de tous ces pays?
Certains nous disent que l'islamisme modéré ne doit pas nous inquiéter, précisément parce qu'il est, ou en tous cas se déclare, modéré (2). En voici la preuve: "Les laïques veulent répandre le vice parmi ceux qui ont la foi. (...) Ils veulent que la perversion sexuelle se proclame publiquement. (...) Que celui qui porte en lui de telles immondices se cache, car s'il nous montre sa face, nous lui appliquerons les châtiments de Dieu." C'est Abdelilah Benkirane qui s'exprime ainsi modérément (3). Abdelilah Benkirane, leader du parti marocain Justice et Développement et futur premier ministre. C'est lui aussi qui pense que la monarchie parlementaire, réclamée par les jeunes Marocains, est "totalement inadaptée au royaume". Autre islamiste modéré: Rached Ghannouchi, le leader d'Ennahda, premier parti tunisien. Il est d'extrême droite, estime Mohamed Sifaoui (4), "parce qu'il est d'abord de ceux qui rêvent de purifier une société. Il ne cesse par exemple de répéter que les Tunisiens sont musulmans. Tous? (...) Oser affirmer d'autorité qu'un peuple est musulman, c'est déjà mauvais signe". Sifaoui rappelle aussi que le même Ghannouchi affirmait, il y a quelques années, "que le monde allait être gouverné par l'islam". Le même pense que la loi de Dieu doit supplanter celle des hommes. Le même veut interdire le mariage avec "les dévergondées, les athées et en général les ennemis de l'islam". Le même Ghannouchi, nous dit encore Sifaoui, "expliquait, en 1991 déjà, qu'il fallait combattre l'athéisme".

Voilà donc les produits du Printemps arabe. Il n'est pas de rose sans épine, paraît-il. Mais y a-t-il des roses?
Jean-François Khan (1) pointe la responsabilité considérable des Occidentaux qui, après la colonisation, ont "diabolisé le nationalisme arabo-musulman (...), pour ensuite tenter de contrer le progressisme marxisant en soutenant un peu partout les réactions intégristes et fondamentalistes, comme le fit Ariel Sharon lui-même en jouant, dans un premier temps, le Hamas contre le Fatah". Et de regretter que ces démocraties occidentales, tout en soutenant des tyrannies corrompues, n'aient pas fait de la résolution du conflit israëlo-palestinien une priorité.
La devise des pays gagnés par le Printemps arabe et dirigés par les Frères musulmans risque d'être "Liberté - Egalité - Fraternité". Mais sans la liberté et l'égalité.

(1) Le Soir, 9 décembre 2011
(2) lire sur ce blog "Modérons-nous" (3 novembre) et "Encore un modèle qui s'effondre" (8 novembre)
(3) citations extraites de "L'islamisme nouveau est arrivé", Zineb El Rhazoui, in Charlie Hebdo, 30 novembre 2011
(4) "Ennahda, l'extrême droite modérée", Mohamed Sifaoui, in Charlie Hebdo, 16 novembre 2011

samedi 10 décembre 2011

Des villes à vivre

Cette ville, on la qualifiera de moyenne, du moins en Belgique où elle est située. En France, elle serait petite. On la traverse à pied en 20 à 25 minutes. Elle vit au début des années 2010 comme elle vivait dans les années '80. Deux, trois artères sont piétonnières, mais les voitures y ont toujours, partout, droit de cité. Des centres commerciaux y ont poussé à ses portes, attirant le chaland qui peut s'y garer gratuitement et aussi longtemps qu'il le veut, à deux pas de boutiques sans charme ni originalité.
En ville, sitôt que les autorités locales entendent supprimer deux ou trois places de parking, les boucliers se lèvent. Ceux des fonctionnaires, des enseignants, des étudiants, des commerçants surtout et de leurs clients. Le client entend rester le roi, surtout s'il est automobiliste et même s'il préfère aller voir ailleurs. Les chantiers se multiplient, sans apparente concertation. Les commerces ferment. La Commune, voici quelques années, a organisé une navette qui circulait en centre ville les jours de marché. Elle ressemblait à un fourgon cellulaire orné de publicités. Elle resta vide. La ville se veut touristique. Elle a des ressources historiques, patrimoniales, culturelles, mais elles sont laissées au second rang. Le premier est occupé par la bagnole. Ainsi vit Tournai.
A Gand, l'une des grandes villes de Belgique, l'approche est tout autre. La ville a été réaménagée, la circulation repensée. Le piéton y a la priorité. Après lui vient le cycliste. Puis, les transports en commun. Et enfin, seulement, la voiture, avec un avantage aux véhicules partagés. Les aménagements urbains favorisent les usagers faibles, diminuent les vitesses et découragent l'utilisation de la voiture en centre-ville. Les parkings sont prévus pour dix mille vélos. Des places VIP sont offertes aux spectateurs qui se rendent à bicyclette au théâtre ou au concert. (1) Les piétons sont rois et légions en ville. D'autres villes vivent de la même manière: Freiburg im Breisgau, Berlin, Amsterdam et tant d'autres.
L'auto-proclamé maillot jaune tournaisien vient de présenter le Plan Communal Cycliste de la ville dont il est déjà maïeur avant même les élections. La Région investira deux millions d'euros, la Ville 600.000, pour favoriser l'utilisation du vélo. C'est un début, mais on se dit qu'il manque encore et toujours une vision, de l'audace, un peu de courage politique, pour que la ville de Tournai (re)devienne agréable à vivre. Des parkings de dissuasion, des navettes visibles et efficaces, des vélos en location, un réaménagement complet de la ville... L'Union européenne imposera une diminution de moitié des véhicules à moteur thermique en ville en 2030. Elle les interdira en 2050. Il suffirait juste d'oser être de son temps.

(1) lire "Le modèle gantois, transposable au BW?", in Espace-Vie, décembre 2011

jeudi 8 décembre 2011

Aller simple

Si Elio Di Rupo devient premier ministre, je m'exile en Namibie. Voilà en substance ce qu'a écrit le leader de l'extrême droite flamande Filip Dewinter il y a un an et demi. L'ex-président du Vlaams Blok est-il homme de parole? On n'en doute pas une seconde. C'est un homme, un vrai. On se permet de lui signaler que l'apartheid n'est plus le régime namibien et que des Noirs (oui, des hommes à la peau noire) gouvernent désormais le pays. Quoi qu'il en soit, on lui souhaite un bon voyage. Qu'il ne sente pas obligé de nous envoyer des cartes postales.

Conchoncetés

Les cons ont une grande qualité: ils sont toujours prompts à démontrer qu'ils le sont. Traitez-les comme tels, ils vous donneront très vite raison. L'humoriste Sophia Aram en fait l'amère expérience. En janvier 2011, après une chronique virulente à l'adresse de Jean-Marie Le Pen qui lui faisait face, elle reçoit une première salve de propos insultants et obscènes. En mars, au lendemain des élections cantonales qui ont traduit une poussée du Front national, elle en dénonçait les thèses simplistes et disait sur France Inter: "Je veux bien admettre qu'ils (les électeurs du FN) ont des raisons valables d'être en colère. (...) Mais entre quelqu'un qui penserait que tous ses malheurs sont dus à la présence d'étrangers en France et un gros con, j'ai du mal à faire la différence" (1). Depuis, elle est sous protection policière. Les affiches de ses spectacles sont régulièrement arrachées. Pendant une de ses représentations, près d'Annecy, le compteur électrique a été saboté, plongeant la salle dans le noir. C'est que les gros cons entendent bien lui donner raison, multipliant insultes et menaces de mort. Sur ce grand défouloir pour gros cons qu'est Internet, un courageux anonyme lui souhaite un cancer, un autre dénonce "la juive Sophia Aram qui se veut se faire passer pour une fille d'immigré". Elle a sûrement le grand tort d'être une femme, d'être fille d'immigré, d'être athée, de dénoncer le racisme et l'antisémitisme, de ne pas avoir sa langue dans sa poche. Ce qui est inacceptable aux yeux de certains. Résumons-nous: le gros con aime faire savoir qu'il l'est.

(1) "Sa verve les met en rage", Valérie Lehoux, Télérama, 7 décembre 2011
Lire aussi son interview sur www.telerama.fr et éviter les commentaires, anonymes comme il se doit, aussi affligeants que navrants, aussi stupides que lamentables.
On peut écouter Sophia Aram sur France les lundis et mercredis à 8h55.

lundi 5 décembre 2011

Etre une petite fille

Le niveau général d'éducation n'a jamais été aussi élevé. Cependant, la bêtise reste à la mode. Elle se manifeste de diverses manières. Notamment à travers le racisme et l'antisémitisme. L'hebdomadaire Le Vif (1) publie un dossier sur ce dernier. Des jeunes filles bruxelloises et anversoises témoignent des violences dont elles sont ou ont été l'objet parce qu'elles sont juives. La violence physique est exceptionnelle, mais les injures semblent devenir coutumières. Les Juifs sont porteurs de tous les péchés... d'Israël. Pour certains esprits étroits, Juifs = Israëliens = Sionistes = anti-Palestiniens. Ces raccourcis sont évidemment stupides. Ils témoignent d'un manque de connaissances. Et de réflexions. On ne réfléchit pas, on ne pense pas. Ou plutôt, on pense bas. Les réponses simples à des question complexes rassurent. Les coupables facilement désignés permettent l'expression d'une bêtise haineuse.
Si les origines de quelqu'un indiquent aussitôt ses opinions politiques, on suppose que les Allemands seraient alors tous des nazis, les musulmans des islamistes, tous les hommes seraient des va-t-en-guerre.
Qu'importe que quelqu'un soit juif, arabe, homosexuel, gitan, végétarien, noir ou handicapé ? Ces caractéristiques ne le déterminent pas. Ne l'enferment pas dans un tiroir. Franchement, on s'en fout que telle personne soit juive ou arabe ou homosexuelle, on ne se pose même pas la question. Ce qu'on peut attendre des autres, c'est qu'ils usent d'intelligence, de discernement, qu'ils prennent positivement leur place dans la société dans laquelle ils vivent. Les identités sont meurtrières, écrit Amin Maalouf, si elles sont restrictives, alors que "l'humanité entière n'est faite que de cas particuliers, la vie est créatrice de différences, et s'il y a "reproduction", ce n'est jamais à l'identique. Chaque personne, sans exception aucune, est dotée d'une identité composite; il lui suffirait de se poser quelques questions pour débusquer des fractures oubliées, des ramifications insoupçonnées, et pour se découvrir complexe, unique, irremplaçable" (2).
Jean-Paul Sartre disait que c'est l'antisémite qui fait le Juif. Frantz Fanon écrivait: "Je suis un nègre - mais naturellement, je ne le sais pas, puisque je le suis". Indiquant par là que c'est le regard des autres qui nous enferme dans une étiquette, que c'est le regard du Blanc qui voit le Noir (3).
On aimerait que chacun ouvre son regard, que chacun soit une petite fille qui "aime bien réfléchir" (4).

(1) Le Vif, 2 décembre 2011
(2) Amin Maalouf, "Les Identités meurtrières" (1998)
(3) lire Juliette Cerf: "Fanon, l'indépendance dans la chair", in Télérama, 30 novembre 2011
(3) voir le billet "Envolée" du 30 janvier 2011. Voir aussi "Portrait de la bêtise humaine", 27 janvier 2011.

dimanche 4 décembre 2011

Ornières

Les affaires sont les affaires. Elles ne s'arrêtent jamais. Voilà qu'Alain Mathot, député-bourgmestre de Seraing, est inculpé pour corruption et blanchiment d'argent. Stéphane Moreau, nouveau bourgmestre d'Ans, en lieu et place de Michel Daerden, a fait l'objet de perquisitions, à son bureau de l'hôtel de ville et au siège de l'intercommunale Tecteo qu'il dirige. Philippe Van Cauwenberghe, lui, conseiller communal de Charleroi, est renvoyé en correctionnelle pour faux et usages de faux (1).
La justice rendra, un jour, son verdict et condamnera ou innocentera ces hommes dans ces trois affaires qui n'ont pas de lien entre elles. Sauf qu'elles concernent des mandataires du Ps. Ce parti n'a décidément pas de chance, c'est encore sur lui que ça tombe. A l'heure où son président devient premier ministre - un événement dans l'histoire de la Belgique - voilà qu'il est rattrapé par les affaires.
"Il y a, dans les structures pyramidales du PS, estime Pascal Lorent, journaliste du Soir (2), quelque chose qui favorise, presque culturellement, l'émergence d'hommes forts. Il y a, par ailleurs, dans le fonctionnement du pouvoir, quelque chose qui fait que les hommes ont tendance à vouloir concentrer le pouvoir et à ne pas trop le partager. Là où les affaires ont tendance à éclater, c'est là où tout le monde se cache derrière l'homme fort et où personne n'ose le contredire."
On parle d'un collège plutôt que d'une seule personne pour remplacer Elio Di Rupo à la tête du Ps. Ils ne seront jamais trop nombreux pour (tenter d') en modifier la culture interne.

(1) LLB, 1er décembre 2011
(2) Le Soir, 2 décmbre 2011

vendredi 2 décembre 2011

Non sens

La Belgique sort enfin du tunnel. Peut-être faudrait-il dire d'un tunnel. Le gouvernement fédéral est enfin presque formé. L'accord est dégagé. Mais ce gouvernement gouvernera-t-il vraiment? On se pose la question. L'Europe, les marchés, les agences de notation l'ont contraint à nous proposer un régime minceur, un programme de gouvernement sans vision autre que celle de faire des économies, de serrer la vis. Qui a encore un projet pour nos sociétés? Dans le Soir (1), Yvon Toussaint relève cette impression, que nous sommes nombreux à partager, "que tout se détraque. Qu'on a égaré les codes et les modes d'emploi. Que plus personne, nulle part, n'a de vision structurante de nos sociétés. Que les marchés sont non seulement irrationnels mais pervertis. Que les tentatives d'explication se traduisent par une technicité décourageante. Et, en tout état de cause, que ce qui reste à espérer ce sont des pauses, pour respirer un peu et des attelles pour empêcher la dislocation du système. Rien de plus, hélas".
La manifestation syndicale d'aujourd'hui, à Bruxelles, fut un succès de foule. Mais n'indique rien d'autre qu'une crispation - logique et compréhensible - sur des acquis à défendre. Elle n'indique pas d'autre voie. Les discours syndicaux entendus ce matin sur Matin Première étaient juste flous et vaguement inquiets. L'époque est au vague et au ballotage.
"Nous en sommes là, écrit Gérard Biard (2): paumés au beau milieu d'un système qui s'est emballé et dont la peur est devenue le moteur - on n'agit plus que par crainte du marché. Et plus personne, pas plus ceux qui ont mis en place ce système que ceux qui en sont les acteurs, ne maîtrise quoi que ce soit. Ni les banques, prises à leur propre jeu de dupes, ni les spéculateurs, qui pédalent comme des hamsters dans une roue de la fortune virtuelle, ni les Bourses, qui paniquent en cascade, ni bien sûr les politiques, victimes d'un système absurde qu'ils ont voulu, qui les détruit, mais qu'ils s'obstinent à considérer comme le meilleur possible. Personne n'a pris le pouvoir, pour la bonne raison que plus personne ne le détient."
Yvon Toussaint cite cette phrase d'Yves Montand: " je continue d'espérer, je ne crois plus".

(1) "Ces crises qui nous décervellent", le Soir, 2 décembre 2011
(2) "Les hamsters qui nous gouvernent", Charlie Hebdo, 30 novembre 2011

mercredi 30 novembre 2011

Pathologies partagées

Il passe en trombe devant l'école, frôlant des étudiants qui ont le malheur de converser sur la voirie, à deux pas (pas plus) du minuscule trottoir. L'un d'eux lui fait signe de se calmer. Il fait marche arrière, sort comme un furieux de sa voiture et empoigne un des étudiants. Il en a assez de ces bougnoules, dit-il, sans que personne ne comprenne de qui il parle ni pourquoi il se met dans un tel état, qui apparaît second. Ou pire. Sa femme n'est pas en reste. Se montre aussi menaçante. D'ailleurs, elle a déjà agressé précédemment à coups de parapluie une étudiante qui avait le toupet de rire dans la rue et en plus de ne pas avoir la peau claire. Ce qui lui est insupportable. L'étudiante a dû se faire soigner à l'hôpital.
Le lendemain, il revient à l'école, s'en prend à la secrétaire. Un de ces jours, assure-t-il, il jouera aux quilles avec ces étudiants qui ont le culot de stationner sur la rue. Et tous ces bougnoules, ces Arabes, ces Français feraient bien de rester chez eux, plutôt que de profiter de l'argent des Belges.
Le policier qui enregistre la plainte pour menace et racisme se montre compréhensif. A son égard: si les étudiants gênent le passage, il y a de quoi s'énerver, estime-t-il.
On voit par là que la haine et la connerie ordinaires ont de beaux jours devant eux.

lundi 28 novembre 2011

Livre ou verre

L'image est devenue récurrente. On pourrait la croire d'Epinal, ne serait l'époque. Elle n'en est pas moins idiote. Voulez-vous montrer à la télévision que telle personne interviewée, sociologue, politologue, psychologue ou quelque métier en logue, a écrit un livre? Montrez-la lisant son propre livre. Ce qui n'a évidemment aucun sens. Ce qui sent la mise en scène sans idée. Les auteurs de livres passent-ils leur temps à lire leurs propres livres? On leur conseillerait d'en lire d'autres. Pour s'ouvrir l'esprit, par exemple. On voit par là que certains réalisateurs et/ou journalistes devraient ouvrir le leur.

Le livre électronique va tenter son entrée en force sous le sapin de Noël cette année, nous dit-on (1). Certains lecteurs font de la résistance, ils préfèrent le papier. On les rejoint. Lire un livre sur écran, c'est comme boire du vin dans un gobelet en plastique. Où est le plaisir? Sauf si c'est une piquette. D'ailleurs, l'auteur interviewé était justement Marc Lévy. Il disait que l'important, c'est de lire. Oui, mais avec plaisir, lui répète-t--on, et pour découvrir des saveurs sans précédent (comme dit Jean-Claude Pirotte).

(1) JT de France 2, 28 novembre 2011

dimanche 27 novembre 2011

Propos de comptoir

"On ne peut pas retourner à l'époque de la bougie." C'est là l'argument choc qu'a trouvé le président Sarkozy pour défendre le secteur nucléaire, légèrement menacé par la gauche. C'est réjouissant: on se dit que Jean-Marie Happart aurait pu être président de la république française, lui qui maniait le même type d'arguments au cours du débat sur la sortie du nucléaire au Sénat belge en 2002. Hors le nucléaire, il n'y aurait donc que la bougie. Peut-on se permettre de suggérer au président français qu'il devrait s'informer quelque peu? Le soleil, le vent, l'eau, la biomasse permettent aujourd'hui de produire de l'énergie, via des techniques performantes et de plus en plus fines. Si le nucléaire devait être démantelé, "c'est l'indépendance énergétique de notre pays qui est menacée", a déclaré un député UMP (1). On ignorait que la France produisait de l'uranium et qu'elle ne pouvait disposer de vent, ni de soleil, ni d'eau, ni de biomasse. Le président Sarkozy affirme aussi que personne en France ne réclame la fin du nucléaire. On ne connaît pas l'avis de l'opinion publique française sur la question, mais un récent sondage (2) fait apparaître que 66% des Belges "se déclarent favorables à la fermeture des trois plus anciens réacteurs nucléaires du pays en 2015". On doute que les Français soient plus aveugles et confiants que les Belges. Argument ultime du président français: la fin du nucléaire signifierait la disparition de 400.000 emplois. Peut-on, une fois encore, suggérer au président (mais on sait qu'il est très occupé et n'a pas que cela à faire) de s'informer? Le développement des énergies vertes en Allemagne a généré 700.000 emplois nouveaux. Mais la vraie question, c'est "y aura-t-il de la neige pour Noël?" (1). Il n'y en a pas pour l'instant dans la station la plus élevée d'Europe, celle de Val Thorens. Sinon une maigre neige produite par des canons artificiels. On comprend par là que le nucléaire est indispensable. Veut-on mettre fin à la pratique du ski? Hein, c'est ça qu'on veut? Résumons-nous: la neige est artificielle, la bêtise est culturelle. Quant à la nature, elle fera ce qu'elle pourra. 

P.S.: nucléaire et bougie ne sont pas opposés, on peut avoir les deux en même temps. Les Japonais peuvent en témoigner. Voir "Nucléaire? Décidément, non merci!", billet du 19 juin 2011.
(1) JT France 2, 26 novembre 2011
(2) sondage commandé par Greenpeace, voir LLB, 26 novembre 2011

vendredi 25 novembre 2011

Schizophrénie

Régulièrement, les bourgmestres de ce qu'il faut (1) maintenant appeler la Wallonie picarde se réunissent. Sous la présidence de celui d'entre eux qui n'est plus bourgmestre (2), à savoir Rudy Demotte, petit père de cette même Wapi chérie (3). Ce fut encore le cas ce samedi 19 novembre. Ces maïeurs ont décidé d'envoyer au Gouvernement wallon une note dans laquelle ils contestent le rôle qu'ils doivent jouer en matière foncière dans le cadre de la définition des noyaux d'habitat telle qu'adoptée en septembre par le Gouvernement wallon (4). Rudy Demotte est d'accord avec eux, il les soutient. Il va donc, en tant que ministre-président de la Région wallonne, recevoir la lettre qu'il s'écrira à lui-même. Dans laquelle il pourra lire qu'il n'est pas d'accord avec ce qu'il a décidé. S'il la lit en réunion de gouvernement, sera-t-il d'accord avec la position de celui-ci ou avec celle de ses presque collègues bourgmestres de la Wapi chérie? On voit par là que le cumul des mandats conduit à des déchirements. Mais aussi que les contradictions n'ont jamais tué personne. On veut bien prendre les paris.

(1) sous peine de se faire rappeler à l'ordre, par courrier, par Rudy De Eerste lui-même.
(2) même s'il joue, avec l'aide de la presse d'ailleurs, à celui qui l'est à nouveau: exemple parmi d'autres, suite aux violences nocturnes à Tournai, Nord Eclair s'empresse d'interroger sur cette question Rudy Demotte, qui n'est - que l'on sache - ni bourgmestre de Tournai, ni membre du Conseil communal, ni commissaire de poice, ni Ministre de l'Intérieur.
(3) désormais, c'est l'appellation choisie et retenue ici-même pour désigner cette région que la terre entière nous envie.
(4) LLB, 21 novembre 2011

jeudi 24 novembre 2011

Le maître des marionnettes

Mais qui donc gouverne le monde? On se le demande. Il y a quelques années encore, on pensait bien que c'était l'OMC. Elle voulait tout déréguler, tout confier au privé. Aujourd'hui, on n'entend plus parler d'elle. Elle s'est démultipliée, déguisée en agences de notation. Elles s'amusent. Elles menacent de diminuer la note d'un pays. Un jour celui-ci, l'autre celui-là. Les dirigeants de ces pays sont comme des écoliers face à l'instituteur qui les menace de redoublement. Ils se mettent à trembler. Certains se font renverser et remplacer par des experts. Des spécialistes financiers, non élus, qui n'ont pas de compte à rendre à la démocratie.
Les agences de notation et les marchés mènent la danse. Même si personne ne sait qui sont les marchés. Les libéraux, eux-mêmes, ne peuvent répondre à la question. Ces agences et ces marchés jouent le même rôle que celui que joue le FMI vis-à-vis de tant de pays du sud: ils les contraignent à des mesures fortes et forcées, à des diminutions des dépenses publiques. Les gouvernements promettent que l'économie hypercapitaliste tournera mieux. Ils veulent mettre toutes les classes sociales à contribution, mais pas trop celles qui ont beaucoup d'argent et dominent cette même économie. Les marchés ne sont pas fous. Ce sont juste des vampires, ils ont besoin de sang frais, de sacrifices. Même humains. "Nous sommes dominés par un socle de croyances et de crédulités conduisant à penser que, face à ces nouveaux dieux courroucés que sont les marchés financiers, nous n'avons d'autres choix que les rassurer avec des sacrifices! Et des sacrifices humains. Chaque annonce d'un plan d'austérité implique plus de chômage, moins d'infirmières, moins d'éducation", constate Patrick Viveret, philosophe et conseiller honoraire à la Cour des Comptes en France (1). La cotation en bourse des entreprises fonctionne de la même manière: elle remonte à la moindre annonce d'un plan social. Par lequel il faut entendre plan antisocial. Les budgets des Etats explosent et la droite (et souvent ce qui reste de gauche molle) ne voit comme solution que sabrage dans les dépenses publiques. Les entreprises et les gros revenus sont des vaches sacrées. Qui ont de sacrés moyens. Voilà qu'on apprend que les lobbyistes américains liés aux banques ont débloqué un budget de huit cent cinquante mille dollars (850.000) pour s'attaquer au mouvement Occupy Wall Street (2). Donnant ainsi raison à ce mouvement et à tous ceux qui pensent qu'il faut prendre l'argent là où il est. On voit par là que les motifs d'indignation s'accumulent.

(1) Mediapart, 14 novembre 2011
(2) LLB, 21 novembre 2011

mardi 22 novembre 2011

Qui aime bien le vin est de bonne nature *

Qui souffre d'allergie boira un verre de Médoc. Quatre, s'il souffre de dépression nerveuse.
Qui veut célébrer le vin ira voir le blog cousin: http://duorond. blogspot.com

* Olivier Basselin (XVe siècle)

lundi 21 novembre 2011

Dégraissage


Vers midi, il y avait des milliers de personnes pour le marché aux puces organisé ce dimanche brumeux de novembre dans ce village du Pas de Calais. Et des dizaines de milliers d'objets à vendre.
Dans l'après-midi, chacun était rentré se mettre au chaud. Traînaient, ici ou là, quelques pièces abandonnées. Parmi celles-ci, dans le caniveau, une carte de Grèce, vieille, déchirée, miteuse. Au verso, une carte de l'Italie.
On nous dit que ces deux pays vont mal. On en a trouvé la preuve à Bouvigny-Boyeffles.


lundi 14 novembre 2011

Intelligence humaine

Le JT de la RTBF (1) nous fait connaître une école pas comme les autres. L'IMCE d'Erquelinnes forme des jeunes aux métiers de la construction et de l'environnement. La majorité d'entre eux, si pas tous, sont en décrochage scolaire. Certains n'ont même jamais accroché à l'école, ont été expulsés de plusieurs établissements. D'autres sont passés par des IPPJ. Au total, 220 élèves qui n'ont pas trouvé leur place dans l'enseignement qu'on dit ordinaire et qu'on a classés dans les tiroirs "caractériels", "indisciplinés, "démotivés" ou "à problèmes".
On se souvient de ces amis enseignants qui nous disaient constater au quotidien combien le système scolaire n'est pas conçu pour les élèves, mais pour les profs. Ici, à Erquelinnes, l'offre scolaire est souple, elle part des besoins du jeune. "Nous adaptons notre structure à la progression du jeune", explique Christophe Quittelier, directeur de l'école (2).
Ces élèves difficiles n'avaient pas la possibilité d'intégrer une formation en alternance. Ici, ils l'ont enfin. L'école ne travaille pas seulement sur les connaissances et les compétences techniques, mais aussi - et parfois surtout - sur les compétences sociales de base, les règles de vie. Elle travaille aussi sur le projet personnel du jeune, sur la reconstruction de sa parole. "Le système scolaire promeut l'apprentissage du silence, estime Christophe Quittelier. Ici, nous avons développé des sas d'écoute qui permettent aux jeunes de réapprendre à parler." (2) Pour le directeur, le but principal de l'école est de permettre aux jeunes de répondre aux questions essentielles: qui suis-je? que veux-je faire de ma vie?
"Je ne suis plus violent comme je l'étais avant, maintenant j'ai changé", dit avec un regard convaincu un futur maçon. (1) Même s'il n'est que de 50% dans les sections horticulture et bois, le taux d'intégration professionnelle est de 80% en construction et en soudure.
On voit par là qu'on peut croire en l'homme et en son intelligence. C'est juste une question de voie. Et de confiance.

(1) 13 novembre 2011, 19h30
(2) Le Soir, 2 juin 2010

Bêtise humaine

La rubrique "Inventaires" de l'émission d'Arte Karambolage nous montre des images de scènes de la vie quotidienne, tournées les unes en France, les autres en Allemagne. Elles font apparaître les différences entre les deux pays. Ou leur absence. Dans l'émission d'hier, il n'y a aucune différence entre cantonniers français et cantonniers allemands. Tous soufflent des feuilles mortes avec un engin vrombissant. D'habitude, les images se passent de commentaire. Cette fois, la journaliste n'a pu s'en empêcher: "que raconte cette séquence?", demande-t-elle. "Que l'automne est devenu la saison la plus bruyante et la plus polluante, dit-elle. Et que la bêtise humaine est universelle." On ne pourrait lui donner tort.
Ces derniers temps nous apparaissent quelques signes de cette bêtise. C'est assez rare que pour être signalé.
Il y eut les incendiaires de Charlie Hebdo qui, agissant de la sorte, donnent raison à ceux qui pensent qu'il faut combattre fermement les ennemis de la liberté d'expression et de la démocratie.
Il y a, plus près de nous, à Liège, des jeunes qui manifestent pour protester contre la mort d'un jeune voleur abattu par le bijoutier qu'il agressait. Si on peut partager leur tristesse, on a du mal à comprendre que leur colère se retourne contre les habitants de ce quartier populaire dont ils vandalisent les voitures.
Il y a, plus près encore, ces autres jeunes qui, apprenant que les cafés tournaisiens devront désormais fermer leurs portes plus tôt, suite à des bagarres générales et violentes, dégradent le centre ville. Donnant ainsi raison aux autorités locales.
La bêtise est très humaine. On pourrait presque croire qu'elle est le propre de l'homme. Heureusement, il manifeste, ici et là, quand il en a l'opportunité, des signes d'intelligence.

vendredi 11 novembre 2011

Pour un dialoog

Une circonscription fédérale, qui permettrait aux électeurs de l'ensemble du pays de voter pour des candidats de l'autre côté de la frontière linguistique, voilà une idée qui semble tomber sous le sens. Mais qui n'a pas l'heur de plaire à certains partis qui négocient la réforme de l'Etat et l'ont rejetée. Les candidats de cette circonscription seraient obligés de s'adresser aussi aux électeurs de l'autre communauté. De sortir des clichés, de la surenchère. Actuellement, chacun parle aux siens, ne doit convaincre qu'eux, quitte à grossir le trait sur ceux d'en face, quitte à user de simplisme, de slogans, d'analyses sommaires.
Un couple mixte, formé d'un Flamand et d'une Wallonne, a pris l'initiative de lancer une pétition en faveur de cette circonscription fédérale. On la trouve sur le site www.be4democracy.be
On peut la signer, pour que ce qui semble tomber sous le sens en prenne. Et que ce pays cesse de se regarder de part et d'autre d'un rideau de fiers.

jeudi 10 novembre 2011

Chiffonnade de prophète

Vu hier soir à Ter Zake: un journaliste de la VRT se promène dans un quartier de Paris où vit une forte proportion d'habitants d'origine maghrébine. Il achète le numéro de Charlie de cette semaine, mais aussi celui de la semaine dernière: Charia Hebdo. Il se promène avec ce numéro sous le bras sans provoquer aucune réaction. Pour en susciter, le voilà obligé d'interpeller les passants en leur demandant leur avis sur le dessin de couverture. Un homme le découvre, il trouve que "ils ne devraient pas". Un autre, plus jeune, s'empare du journal, le chiffonne, le jette et s'en va en disant que "c'est pas bien". On nous disait qu'on n'a pas le droit de dessiner le prophète, mais apparemment, on a le droit de le chiffonner. On comprend par là que les règles sont complexes.
Ceci dit, Charlie Hebdo est donc, fort heureusement, sorti hier, comme chaque mercredi. "Même pas mal", dit Charb dans son édito. Dans lequel il a une pensée "pour les musulmans, qui sont les premières victimes de cet incendie. Il faut s'attendre à ce que cette agression soit instrumentalisée par l'extrême droite pour jeter le discrédit sur tous les musulmans". Il évoque la possibilité que l'attaque vienne des fachos, mais constate que le site internet de C.H. est piraté depuis l'étranger au nom de l'islam, que les menaces de mort viennent de l'étranger au nom de l'islam. "Les candidats assassins font de l'islam un paillasson sur lequel les fachos adorent s'essuyer les pieds", dit-il.
Les messages de soutien à Charlie sont légion, venus de tous les coins de France, mais aussi de Tunisie, du Maroc. Ils sont indignés, révoltés, vivants, souvent drôles. Zineb El Rhazoui s'est baladé sur les sites internet islamistes qui appellent au châtiment, suprême ou inférieur, contre Charlie et ses auteurs. Un véritable festival de la bêtise. On se rend alors compte que les intégristes et ceux qui les défendent ont beaucoup d'humour, différent de celui de Charlie certes, et qui leur échappe un peu, mais on rit beaucoup. Par exemple de ce site qui précise que "Charlie aurait honteusement menti en prétendant que Mahomet aurait accepté d'être rédacteur en chef de son édition spéciale Charia". On voit par là que ce site tient ses informations de très haut.
Charlie Hedo est bien vivant et fait du bien. Achetons-le. Abonnons-nous.

mardi 8 novembre 2011

Encore un modèle qui s'effondre

On nous dit que le modèle d'Ennahda, le parti islamiste tunisien, serait l'AKP, le parti du premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan. Qu'il s'agirait là d'un islamisme modéré.
Pas plus que d'autres (voir "Modérons-nous", en date du 3 novembre), Martine Gozlan, reporter à Marianne, ne croit en cette modération: "je ne crois absolument pas à l'islamisme modéré, explique-t-elle dans une interview publiée dans "L'Avenir" (1), parce que l'islamisme en soi est déjà un excès puisqu'il se rend coupable d'un hold-up sur une religion. Ici, c'est le hold-up de la religion par le politique."
Martine Gozlan a analysé le pseudo modèle turc dans un livre: "L'imposture turque" (2). Elle explique avoir voulu dénoncer une triple imposture: démocratique, laïque et géopolitique. "Le premier ministre Erdogan a réussi à mettre les médias sous coupe réglée. Plus de soixante journalistes sont emprisonnés, sans compter les arrestations d'intellectuels", affirme-t-elle, précisant que "ses fils, son gendre, ont acquis la plupart des grands groupes de presse turcs". Elle estime que l'obscurantisme gagne la Turquie, où de plus en plus de femmes sont voilées ou incitées à se voiler, où des galeries d'art sont attaquées, où les théories antidarwinistes ont de plus en plus de succès. Selon elle, "il est clair que, d'amendement en amendement (de la constitution), la Turquie se dirige vers une réappropriation de l'espace constitutionnel par les lois divines".
En Tunisie, les islamistes se veulent rassurants: ils sont - eux aussi - modérés. N'empêche que "les guerriers de l'inquisition" (comme les appelle Zineb El Rhazoui dans Charlie Hebdo) (3) ont attaqué directement le directeur de la chaîne de télé qui avait eu l'audace de programmer "Persepolis" de Marjane Satrapi. Jusqu'à menacer de violer sa femme de ménage. Ce qui indique l'attention que les islamistes portent aux femmes, en particulier celles qui sont au bas de l'échelle sociale. Le mouvement Aatakni (Lâche-moi, en arabe tunisien) leur a répondu en manifestant en masse, pour réclamer le droit d'expression, de pensée, de croyance. Dans certaines villes, ces manifestants ont été agressés violemment par des contre-manifestants islamistes (3).
"A Tunis, les culturels restent au front", titre LLB (4). "Impossible de rencontrer un culturel qui se dise pro-Ennahda", écrit Guy Duplat. "Nous avons survécu à Ben Ali, déclare Zeyneb Farhat qui co-dirige El Teatro à Tunis, nous allons nous défendre si cela devenait nécessaire. Sans écouter les pays étrangers qui disaient du bien de Ben Ali et qui, maintenant, nous disent que nos islamistes sont raisonnables. Nous serons là."
On voit par là que la démocratie est un combat qui n'est jamais gagné et que celui de l'intelligence doit être primordial.

(1) 5 novembre 2011
(2) Grasset, 2011
(3) Charlie Hebdo, 26 octobre 2011
(4) LLB, 2 novembre 2011

lundi 7 novembre 2011

Le monde comme il va

Les informations régionales de France3 Nord - Pas de Calais (1) nous apprennent qu'un jeune prisonnier, détenu à Maubeuge, a été violemment frappé par certains de ses co-détenus. Il est dans le coma. On nous dit qu'il s'agit là d'un garçon très gentil et naïf. On se demande ce qu'il a pu faire de grave qui l'a condamné à quatre ans de prison. On apprend qu'il l'a été pour "détention et usage de cannabis". On se demande ce qui se passe dans la tête de juges qui envoient en prison pour de tels délits. On se demande si la justice a toute sa tête.

Toujours plus. Les productions de CO2 au niveau mondial ne cessent d'augmenter: + 6% de 2009 à 2010, pour arriver à un total de 9 milliards de tonnes. Les dix milliards sont à notre portée. Plus qu'un petit effort!

C'est la crise. Partout, on racle les fonds de tiroir, nous dit-on. Il faut faire des sacrifices. Une idée (pas très neuve, les fidèles lecteurs de ce blog le savent): supprimer toute dotation publique au Grand prix de Francorchamps. Le député wallon écologiste Bernard Wesphael a sorti sa calculette: depuis 2006, les pouvoirs publics wallons ont déboursé la coquette somme de 106 millions d'euros en investissements, exigés par les autorités de la Formule 1, et en épongements de dettes. C'est qu'il s'agit de sauver la fierté de la Wallonie, le plus beau circuit du monde. Pas encore de chiffres officiels pour cette année, mais le déficit du GP 2011 devrait tourner autour des cinq millions d'euros. Qui paie? La Wallonie, entendez par là l'institution Wallonie, enfin la Région wallonne (2). Donc nous. Mais ça vaut la peine: "un boulanger fait sur ces trois jours-là, un chiffre d'affaires énorme", a déclaré noss miniss de l'Economie walleonne, Jean-Claude Marcourt (3). Cinq millions pour faire connaître les pistolets et les couques de Wallonie, tout en faisant tourner en rond des bolides polluants qui n'intéressent pas grand monde, c'est pas de l'argent jeté par les fenêtres, c'est de la promo. Il n'y a que les mauvaises langues pour ne pas le comprendre.

(1) JT FR3, 5 novembre 2011
(2) Les changements de nom d'organismes, très à la mode sous l'ère Demotte (voir "Wallons, nous?", billet du 13 octobre dernier), ont visiblement été décidés à l'emporte-pièce. Une fois de plus. Dans un article intitulé "Ne pas brouiller l'image", Michel Delwiche explique (dans le Vif du 4 novembre) que "Rudy Demotte est si peu sûr d'être compris qu'il se sent obligé de parler de l'institution Wallonie. De la Région wallonne donc".
(3) Le Vif, 28 octobre 2011

samedi 5 novembre 2011

Intolérances

La mode est à l'intolérance, semble-t-il. L'humour de Charlie Hebdo échappe complètement à certains esprits fermés et insensibles à la dérision. Mais ces esprits peu sain(t)s savent aussi frapper durement, en détruisant les locaux du journal. On soupçonne fortement des islamistes d'être derrière cet attentat. Le site Internet de Charlie a été piraté, la page d'accueil remplacée par une photo de la Mecque indiquant qu'il n'y a pas d'autre dieu qu'Allah.
Ne leur en déplaise, il y en a d'autres. L'un d'eux s'appelle Dieu précisément. C'est ce que l'on entend dire. Et certains de ceux qui défendent celui-là sont tout aussi opposés à la critique, à la liberté d'expression, à la réflexion. Le spectacle " On the Concept of the Face, Regarding the Son of God, volume 2", du metteur en scène italien Romeo Castelucci, a été attaqué par des intégristes chrétiens lors de ses représentations au Théâtre de la Ville à Paris ces dernières semaines. Coups de sifflet, envahissement de la scène, jet d'oeufs, d'huile et de boules puantes sur le public, menaces vis-à-vis du personnel, tout est bon pour tenter d'empêcher les représentations du spectacle. Il a été joué à Anvers, à Avignon, partout en Europe sans susciter de controverse. Au contraire. Il faut dire qu'on a affaire là, selon Guy Duplat (1) à "un mélange de beauté plastique extraordinaire, de trivial et de sacré". Les autorités civiles et religieuses ont dénoncé ces actes de violence, le Théâtre de la Ville a lancé une pétition (2). On pourra voir " On the Concept of the Face" dans le cadre du Next Festival à la Rose des Vents à Villeneuve d'Ascq les 29 et 30 novembre.
Romeo Castelucci dit qu'il veut "ouvrir une blessure pour que les questions puissent entrer profondément en nous. L'art repose sur cette condition de poser des problèmes, sinon il est purement décoratif. La religion a perdu sa capacité de poser des questions et l'art a pris sa place. Je crois que ces extrémistes sont jaloux de cette spiritualité profonde qui s'est réfugiée dans l'art" (3).
La religion a-t-elle posé, pose-t-elle des questions? Elle impose des réponses. Et ses fidèles préfèrent l'obscurantisme à la réflexion et à la critique.
On se permet de rappeler aux intégristes de tous crins qu'il ne sont pas obligés d'acheter et encore moins de lire Charlie Hebdo, d'aller voir "On the concept of the Face", de regarder "Persepolis" ou tout autre film ou spectacle qui ne cadre avec leurs visions dogmatiques. On se permet de leur faire remarquer que personne ne les empêche de vénérer leur dieu. Au singulier comme au pluriel d'ailleurs. On leur laisse le choix. Mais pas celui de jouer aux terroristes.

(1) LLB, 31 octobre 2011
(2) pétition sur le site du Théâtre de la Ville: www.theatredelaville-paris.com/
(3) dans Le Monde, cité par G. Duplat

vendredi 4 novembre 2011

Quittez Facebook, rejoignez Charlie Hebdo

En lisant Le Monde (1), on découvre que le compte Facebook de Charlie Hebdo est bloqué. Motif invoqué: Charlie n'est pas une vraie personne. Tous les comptes Facebook de groupes (associations diverses, partis politiques, entreprises, etc.) vont-ils être bloqués désormais? En tous cas, ceux dont les publications présentent "des contenus graphiques, sexuellement explicites ou avec des corps trop dénudés". On voit par là que Facebook additionne à la peur l'hypocrisie.
En attendant, faute de pouvoir gérer ses pages Facebook, le compte de Charlie Hebdo est inondé de menaces islamistes et, nous dit le Monde, croule sous les milliers de messages, en français ou en arabe, "parfois très hostiles". "L'attentat (contre Charlie) démontre l'attachement des musulmans à leur foi", affirme un djihadiste sur un forum. A quelle foi? Il montre surtout la bêtise humaine, l'intolérance et l'utilisation d'une religion à des fins violentes. Mais qui sont donc ces dieux qui rendent fous furieux? On se le demande.

En attendant, on peut retrouver Charlie à nouveau en kiosque, puisque le numéro attaqué a été réimprimé, et sur le blog qu'il vient de créer: http://charliehebdo.wordpress.com/
Voilà quand même une bonne nouvelle.

(1) http://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2011/11/04/
charlie-hebdo-ouvre-un-blog_1598776_3236.html#ens_id=1597236&xtor=RSS-3208

jeudi 3 novembre 2011

Modérons-nous

Le parti tunisien Ennahda (1) se présente comme islamiste modéré, ce qui est censé rassurer. Peut-être sont-ce des islamistes modérés qui ont balancé des cocktails molotov dans les bureaux de Charlie Hebdo. Allez savoir. L'écrivain algérien Boualem Sansal, qui a été plus d'une fois censuré, ne croit pas à cette modération. "L'islamisme modéré relève de la stratégie, dit-il (2). Les islamistes se repositionnent comme les partis d'extrême droite qui, à un moment donné, jouent la carte de la modération pour élargir leur base sociale et atteindre le pouvoir. Lorsque surviendront les difficultés, l'islamiste modéré ne pactisera pas avec le démocrate au détriment de l'islamiste radical. Il ira vers l'islamiste radical. C'est sa famille naturelle."
Selon lui, "l'islam qui est enseigné depuis une cinquantaine d'années par les institutions, par les écoles coraniques, est un islam radical. Cet enseignement porte en lui les germes de l'islamisme. Il ne peut pas produire des hommes de paix et de tolérance. (...) Il faut, estime-t-il, que dans les pays musulmans, on commence à enseigner un autre islam. On ne peut pas être optimiste."
Le juriste et islamologue belge Baudouin Dupret estime que, même si la charia est devenue, comme d'autres pays musulmans, la source principale de la législation égyptienne, "elle s'applique avec une certaine souplesse, bien loin de l'image d'épouvantail que s'en fait l'Occident. Mais plus le temps passe, dit-il, plus l'influence du conservatisme islamique se fait sentir". Il constate qu'au Maroc, à l'occasion de la réforme récente de la Constitution, les islamo-conservateurs, qui représentent près de 50% des électeurs, "ont rappelé que le Maroc était un Etat islamique et que cette identité marocaine était menacée par la liberté de conscience" (3).
Ils sont nombreux, et trop peu entendus, les intellectuels qui en appellent à une lecture moderne du Coran. Dans "L'Islam face à la mort de Dieu" (4), Abdennour Bidar tente de réactualiser la pensée de Mohammed Iqbal. "Sa pensée représente pour l'islam une chance de dépaysement, de décentrement majeur. Elle lui offre la possibilité de recommencer à faire à l'époque moderne ce qu'il savait si bien faire avant de s'enfermer dans son autisme religieux: s'enrichir d'apports extérieurs comme il le fit avec Al-Farabi au Xe siècle à Bagdad et Alep, ou Averroès l'Andalou au XIIe siècle, qui surent féconder la lecture du Coran avec celle de Platon et d'Aristote. Iqbal déplore que, depuis plusieurs siècles, l'islam se soit totalement replié sur lui-même." Et Abdennour Bidar, à son tour, de regretter que plus personne dans le monde musulman ne lise Iqabl: "la décadence intellectuelle et spirituelle du monde musulman vers le dogmatisme et l'obscurantisme de masse semble tellement avancée qu'elle paraît interdire tout espoir sérieux de régénération." Il parle ainsi d'un "islam de cimetière".

(1) Sur les élections tunisiennes et Ennahda lire les commentaires de Caroline Fourest sur
http://carolinefourest.wordpress.com/
(2) Le Vif, 23 septembre 2011
(3) Le Vif, 9 septembre 2011
(4) François Bourin Editeur, 2010

mercredi 2 novembre 2011

Renvoi de censeurs

L'avantage des censeurs, c'est qu'ils sont très bêtes. Non seulement, en censurant, ils donnent eux-mêmes raison à ceux qui les critiquent, mais en plus, voulant empêcher qu'un livre soit lu, qu'un film soit vu, il ne font que le mettre en lumière. L'incendie criminel de la rédaction de Charlie Hebdo la nuit dernière a déjà augmenté les ventes de son numéro d'aujourd'hui, intitulé, si on a bien compris, Charia Hebdo. On passe la frontière franco-belge ce matin pour acheter, un peu plus tôt qu'en Belgique, ce numéro. Il est déjà introuvable. Dans la petite maison de la presse de ce village du Nord, les cinq numéros étaient déjà vendus tôt ce matin.
Au Journal parlé de France Inter, les condamnations de cet acte criminel sont nombreuses. Tout le monde, à gauche comme à droite, défend la liberté d'expression. Le Conseil français du Culte musulman et le Recteur de la Grande moquée de Paris condamnent eux aussi l'attentat.
Il se trouvera sans doute quelques esprits faiblement éclairés à l'extrême gauche pour dénoncer l'islamophobie de Charlie Hebdo. Les vrais islamophobes sont les intégristes islamistes qui instrumentalisent l'islam à leurs fins politiques violentes.
Le philosophe Malek Chebel parlait d' "acte de guerre, une sorte de terrorisme". Avec ce genre d'action, disait-il, "on s'empêche de penser. Même de vivre" (1).

Récemment, ce sont les Salafistes tunisiens qui ont attiré notre attention sur le dessin animé Persepolis de Marjane Satrapi. On se dépêche de le visionner. Et on comprend vite, en le voyant, pourquoi il les a fâchés. Ce ne sont pas, contrairement à ce qu'ils affirment, les très brèves et plutôt sympathiques apparitions d'Allah qui les ont choqués. Mais le propos même de ce film autobiographique, témoignage du vécu d'une petite fille, puis d'une jeune fille dans l'Iran des ayatollahs. Dans ce régime théocratique, l'Etat est omniprésent et contrôle tout. Il adore les interdictions: la musique, l'alcool, les baskets, les cheveux, les formes féminines, tout est interdit. Les femmes ne peuvent pas courir. Et le non respect de ces interdictions entraîne aussitôt des risques d'arrestation, et même de mort. On voit par là que ce type de régime se fonde sur l'intolérance, l'imbécilité, la terreur, le machisme, la violence, le mensonge. On en oublie sûrement. Sous ce type de régime, on ne vit pas.
Persepolis est un film superbe, effrayant et plein d'humour, aux dessins et aux plans remarquables. Le personnage de la grand-mère est savoureux, vraie rebelle, qui défend l'intégrité, même face à l'intégrisme. Le film commence à la chute du régime du shah, remplacé par celui de Khomeyni. Un des personnages pense que "ça ne pourra jamais être pire que sous le shah". Et découvre ensuite que tout est toujours possible. On comprend pourquoi les Salafistes l'apprécient peu.

(1) JP France Inter, 2 novembre 2011, 13h

mardi 1 novembre 2011

A question idiote...

"La Belgique dans le noir en 2015?". C'est un des titres du JT de la RTBF ce 31 octobre, allusion à la confirmation de la sortie du nucléaire. Aussi intelligent que la question que posait un certain Jean-Marie Happart au Sénat à l'occasion du débat sur la sortie du nucléaire en 2003: "et quoi, demandait-il, faute de nucléaire, s'il n'y a pas de vent aujourd'hui, il n'y aura pas d'électricité et personne ne m'entendra?". Personne ne se plaindra plus de la disparition de ce JT que de l'absence désormais de l'Happart bis des travées parlementaires. Surtout si ce JT continue à être présenté par un François De Brigode de plus en plus bredouillant. On espérait qu'il fût en vacances cette semaine. Elles lui feraient le plus grand bien. A nous aussi.

La Chine et le chrysanthème ont la cote, nous apprend le même JT. Tous deux se vendent bien, si on peut se permettre de résumer et rassembler deux sujets. Et ont le chic pour enterrer les autres, tout en restant bien vivants. La Chine est l'un des derniers pays communistes, le plus puissant d'entre eux. C'est aussi aujourd'hui le pays le plus capitaliste. Aucun autre pays au monde ne dipose d'autant de réserves. Ce sont ses exportations, bien plus importantes que ses importations, qui lui ont permis d'engranger un tel pactole. Et ainsi de racheter la dette d'autres Etats. Une partie de celle de l'Europe par exemple. La Chine revendique aujourd'hui "le statut d'économie de marché" et réclame sa place à l'OMC. Un comble pour ce pays communiste. Une exigence logique pour ce pays capitaliste. "En Chine, tout s'arrange avec l'argent", dit le journaliste du JT de France2 en conclusion de son sujet sur la reconnaissance du harcèlement au travail. On voit par là que le capitalisme a une capacité d'adaptation au moins égale à celle du communisme, même s'il est le dindon de sa mauvaise farce qui sent de plus en plus le suri.

lundi 31 octobre 2011

L'arrivée du Tour

Liège va accueillir le départ du Tour de France 2012. Tournai une arrivée. Pour la modique somme de 90.000 euros (1). Une année électorale vaut bien une grand messe. Le peuple a besoin, en ces temps difficiles et incertains, de se réjouir. Et rien de telle qu'une grande fête de l'industrie pharmaceutique pour le distraire.
Pour l'occasion, le déjà bourgmestre de Tournai a coiffé une belle casquette de coureur et revêtu le maillot jaune et rouge de la Fédération Wallonie-Bruxelles (plus Wallonie que Bruxelles d'ailleurs). Une Fédération sponsorisée (à moins que ce ne soit son ministre-président ou le futur bourgmestre qui le soit, on a du mal à s'y retrouver) par Kia, le Crédit agricole et le Lotto. La politique, le sport, le show et l'argent se mélangent. C'est sans doute ce qui s'appelle faire consensus.

(1) Y.B., "Une vitrine sportive onéreuse", LLB, 4 août 2011

dimanche 30 octobre 2011

Vieille nouvelle

La Belgique va sortir du nucléaire. Voilà ce que nous annonce la presse depuis deux jours. Le Gouvernement en formation l'a confirmé. Du coup, la presse interroge spécialistes et lobbyistes: est-ce tenable? N'allons-nous pas nous retrouver à court d'énergie? Nos factures énergétiques ne vont-elles pas augmenter? On s'inquiète.
Peut-on rappeler à la presse que la décision a été prise par la Chambre et le Sénat en 2003? Si l'on compte bien, cela fait huit ans. Il est vrai que le temps passe vite. Pas pour les gouvernements qui se sont succédé depuis et qui n'ont pas fait grand chose, jusque récemment, pour remplacer le nucléaire et diminuer les consommations. Au JT de la RTBF ce soir, la porte-parole d'Electrabel nous fait part de son impression: "il y a une grande confusion dans ce dossier". Ce qui est exact, surtout depuis qu'une société nommée Electrabel fait des pieds et des mains pour que l'annonce de cette sortie du nucléaire ne reste que des mots. Et que le doute et la confusion planent. On a même vu son ancien patron, l'alors sénateur Philippe Bodson, venir siéger au Sénat en 2003 - ce qui était totalement exceptionnel - pour dire tout le mal qu'il pensait de cette décision. C'est dire si celle-ci devait être évitée. Et voilà que ce week-end tombe - brutalement - cette annonce: la Belgique va sortir du nucléaire. Incroyable! Heureusement que la presse est là.

Post-scriptum: la décision est confirmée, mais l'équipe des négociateurs a reporté de six mois sa décision quant à la date de fermeture des premières centrales. Courage, les amis, un jour il faudra décider. Avant qu'il ne soit trop tard.

samedi 29 octobre 2011

Jeux de vilains

Certains confondent victoire et écrasement. Il faut pas seulement gagner, il faut aussi massacrer l'adversaire. Et en plus, il est interdit de perdre quoi que ce soit.
Récemment, le Vif consacrait un article à l'augmentation des violences et des incivilités sur le bord des terrains de sport, de foot en particulier (1). De plus en plus de parents et d'entraîneurs confondent compétition et bataille. Des parents contestent l'arbitre, insultent l'entraîneur ou les joueurs adverses et parfois leurs propres enfants. Parfois, la violence est physique: gifle, coup de poing, voire de couteau. Visiblement, même très jeunes, les joueurs apprennent à commettre "de vilaines fautes". Ces excès surviennent surtout quand l'équipe supportée perd. Mais même quand elle gagne. "A l'exemple de cet entraîneur qui, (...) en préminimes B, a hurlé frénétiquement sur ses petits joueurs parce qu'ils venaient d'encaisser leur seul but du match, alors que son équipe menait largement l'adversaire (11-0)", écrit Sorya Ghali dans le Vif.
"Malheureusement, même chez les plus petits, confirme Jamal Ikazban, échevin des Sports à Molenbeek et président de l'école des jeunes du FC Brussels, des entraîneurs sont totalement focalisés sur le résultat, cherchant à satisfaire leur ego en remportant des victoires et qui ne voient dans les enfants que des adultes miniatures." Ce qui, on en conviendra, revient presque à dire que les sportifs adultes sont des brutes.
Il n'y a pas que dans le foot qu'on assiste à de telles dérives. Dans d'autres sports aussi. Mais également dans des compétitions intellectuelles. A l'heure où l'on annonce le retour sur les antennes de la RTBF de quelques émissions de Génies en herbe (2), je me souviens avoir dû calmer des profs à l'issue d'un match: ils engueulaient leurs candidats qui venaient de gagner par une trop courte victoire. "Vous ne voyez pas dans quel état ils nous ont mis?", m'a dit l'un d'entre eux, en nage, le noeud de cravate sur le sternum. Un autre jour, ce furent des professeurs de l'équipe vainqueur qui ont ramené à la gare les candidats de l'équipe vaincue, abandonnés par leurs enseignants furieux de la défaite.
Parlez-nous encore de la noblesse du sport et de la compétition qui aide à se dépasser.

(1) Foot: les parents, mauvais perdants (14 octobre 2011)
(2) http://www.lalibre.be/culture/mediastele/article/696483/
retour-de-genies-en-herbe-sur-la-rtbf.html

vendredi 28 octobre 2011

Abonnés à Cumul+

Etre bourgmestre, parlementaire ou ministre? Le choix est difficile. On ne voudrait pas être à la place de ces malheureux qui doivent choisir. D'ailleurs, certains n'y arrivent pas. Toutes ces fonctions sont passionnantes. Nombreux sont les candidats, d'ailleurs déjà en fonction, qui se refusent à ce choix. Ainsi Paul Magnette vient de se faire plébisciter comme tête de liste du Ps à Charleroi aux élections communales d'octobre 2012. Mais, nous dit LLB (1), il "a laissé planer l'ambiguïté quant à son avenir politique et au choix qu'il ferait, entre le poste de bourgmestre de Charleroi en cas de victoire socialiste (2), ou les fonctions de ministre qu'il continuerait à exercer". J'irai là où je serai le plus utile, a-t-il déclaré. Ce que visiblement il est incapable de savoir aujourd'hui. Il faut croire qu'il sera le plus utile partout. C'est pourquoi c'est là qu'il est candidat: partout. Mais que ses électeurs se rassurent (s'il le fallait): il ne les trompera pas. Une déclaration qu'on a un peu de mal à comprendre. On n'est pas électeur potentiel du camarade Magnette, mais comment pourrait-il ne pas tromper ses électeurs, si, candidat à la fonction maïorale, il ne devait en définitive pas l'exercer? A Tournai, Rudy Demotte est dans la même position. Mais lui ne choisira de toute façon pas: il a déjà placé dans l'ombre un homme de paille qui oriente les décisions du Collège communal. Il ne trompera pas l'électeur et sera partout, au(x) gouvernement(x) et à l'exécutif communal tournaisien. Mais après tout, quand on est le maillot jaune de la Wallonie (qui gagne) (3), pourquoi devrait-on choisir? Laissons ces choix triviaux aux porteurs d'eau.

D'autres sautent en parachute sur une commune. Si la voie vers le poste de bourgmestre de leur commune leur est bouchée, ils s'installent dans une autre. On a ainsi vu tout récemment l'inoxydable Michel Daerden pré-annoncer son accession au maïorat de Saint-Nicolas, commune voisine de la sienne, où ses propres co-religionnaires l'ont exclu à jamais de l'exécutif. Ces candidats coucous posent - aussi - des questions relatives au respect de la démocratie. Et de l'éthique. "Les personnes ordinaires, oserait-on dire normales, celles qui n'appartiennent pas à la nomenclature politique, ne se présentent pas aux élections dans une ville ou un village où elles viennent d'emménager, et encore moins s'il s'agit d'une domiciliation formelle ou temporaire", écrit Paul Vaute dans LLB (4). Dans certains partis, et pour de nombreux électeurs visiblement, il semble normal qu'un parachuté, peu au fait des réalités locales, déboule en tête de liste, comme pour prendre - de force - une ville. Et Paul Vaute de rappeler les cas de Frédéric Daerden (fils de Michel) passant d'Ans à Herstal, d'Alain Mathot (fils de Guy) de Flémalle à Seraing, de Christophe Collignon (fils de Robert) d'Amay à Huy (où il est aussitôt bombardé président du CPAS). Rudy maillot jaune Demotte (qui au moins n'est pas fils de - ou alors d'Eddy peut-être?) était trop à l'étroit dans sa petite commune de Flobecq, ce qui l'a obligé à sauter sur Tournai.

Mais que le bon peuple wallon se rassure: l'éthique politique est de plus en plus respectée.

(1) 24 octobre 2011
(2) qui peut avoir des doutes, malgré les casseroles du Ps dans cette ville transformée en quincaillerie?
(3) voir http://rudydemotte.info/b/?p=2347
(4) Parachutes rosés, LLB, 22 octobre 2011

jeudi 27 octobre 2011

Le lendemain, le canard était toujours vivant

On peut essayer de clore le bec d'un canard. Mais c'est dangereux. On risque d'en être confit. C'est ce qui arrive à la maire de Puteaux, commune de la région parisienne, Joëlle Ceccaldi-Raynaud. La semaine dernière, elle a fait acheter par des membres de son équipe tous les exemplaires du Canard enchaîné en vente dans sa commune (1). Pas pour distribuer autour d'elle les six cents exemplaires ainsi récoltés. Pour les faire disparaître. C'est que l'hebo affirmait qu'elle est l'objet de soupçons de commissions occultes dans le cadre de l'attribution d'un marché par le syndicat intercommunal de chauffage urbain de la Défense. "Elle aurait fait transiter d'importantes sommes par un compte ouvert au Luxembourg", affirme Marianne (2). C'est son père qui l'accuse. Elle lui a succédé à la tête de la ville et est en conflit ouvert avec lui. En éliminant tous les exemplaires du Canard, elle espérait lui tordre le cou. Les kiosquiers n'ont pas osé se réapprovisionner, par peur de représailles de la part de la mairie. On voit par là qu'il y a une ambiance particulière à Puteaux.
A l'heure des réseaux sociaux, peut-on enterrer une information?, s'interroge-t-on. On n'a jamais autant parlé du Canard à Puteaux et sur la Toile. Une bonne idée a été lancée: "offrez un canard à un habitant de Puteaux" (3). Les Français étaient invités à acheter le Canard concerné, à le lire, puis à l'envoyer, au hasard via l'annuaire téléphonique, à un habitant de Puteaux.
D'autres parmi ces habitants ont fait des photocopies de l'article redouté et les distribuent, déguisés en canards, dans les rues. On voit aussi par là qu'il devient hélas très difficile, par les temps qui courent, de s'opposer à une information qui en fait tout autant.
Dernière précision: Joëlle Ceccaldi-Raynaud est aussi députée UMP, proche du président Sarkozy. Le Canard la présente même dans son article comme "protégée de Sarko". Ce garçon choisit décidément bien mal ses amis. La malchance est décidément de son côté.

(1) JP RTBF, la Première, 26 octobre 2011
(2) 22 octobre 2011
(3) http://www.rue89.com/2011/10/20/
offrez-un-canard-enchaine-aux-habitants-de-puteaux-225753

mercredi 26 octobre 2011

Bonheurs musicaux

Le nouvel album de Camille, Ilo Veyou (à prononcer d'une seule traite), c'est du bonheur à l'état doux. Un album dont la voix est le centre. Le plaisir qu'elle éprouve à chanter est contagieux. C'est joyeux, c'est drôle, c'est touchant, c'est créatif. Dans Télérama, Valérie Lehoux écrit que "si on écoute son nouveau disque, si on l'écoute en boucle, ce n'est pas pour ses performances techniques. C'est pour la profonde sensualité de sa voix, l'évidence partageuse de ses mélodies, la justesse dépouillée de ses émotions. Tout ce qui fait les grandes chansons" (1).

Le 10 novembre prochain, Ballaké Sissoko et Vincent Segal présenteront leur Chamber Music à la Maison de la Culture de Tournai. Leur album est d'une beauté confondante. L'association de deux instruments classiques, la kora de l'un et le violoncelle de l'autre, donne une musique de recueillement et d'élévation, un album d'une force et d'une puissance paisibles. Schubert s'est aujourd'hui réincarné dans ce beau duo.

(1) 12 octobre 2011

mardi 25 octobre 2011

Inquiétudes

Les Islamistes tunisiens sont modérés. C'est ce qu'on nous dit et ce qu'on appelle une antinomie. Qui dit islamisme dit instrumentalisation intégriste de l'Islam. L'intégrisme peut-il être modéré? Il est, tout simplement. Dans son simplisme et son absence de nuance, son application brute d'une doctrine et de ses règles. "L'islamisme, même à dose microscopique, détruit un pays", affirme l'écrivain algérien Boualem Sansal (1) qui sait de quoi il parle. On attend de voir, mais on a un peu de mal à croire qu'un islamisme modéré soit possible. Certains islamistes tunisiens, plusieurs centaines de Salafistes, ont manifesté récemment (2) contre la diffusion par la chaîne de télévision Nesma du dessin animé de Marjane Satrapi, Persepolis. Ils ont entraîné derrière eux quelques centaines de personnes. Ils veulent l'application de la charia, se déclarent opposés aux élections et à la démocratie. Le seul pouvoir qu'ils reconnaissent est celui de Dieu. Le leur, bien sûr. Enfin, Le, puisqu'il ne peut y en avoir d'autres. Mais Dieu étant un être immatériel, qui va exercer le pouvoir? Eh bien eux, bien sûr, auto-proclamés.
Les démocrates tunisiens sont inquiets. "Les récents évènements sanglants d’affrontements interconfessionnels en Egypte (24 morts) qui coïncident avec les « émeutes inquisitoires » en Tunisie, viennent rappeler que cela ne tient qu’à peu de choses que les révolutions arabes ne dérapent en moyenâgeuses guerres de religions", écrit Seif Soudani dans un billet qu'il faut lire (3).
Le parti islamiste Ennahada, avant même la proclamation du résultat des élections, se proclame grand vainqueur avec quelque 40% des voix. Ses dirigeants promettent de garantir "la liberté de croyance et de pensée", de préserver "les acquis de la femme", y compris sa liberté "contre toute imposition d'un style vestimentaire" et son "droit au travail" (4). Mais entre rassurantes déclarations et sombre réalité, il y a un gouffre: des femmes non voilées sont invectivées dans la rue, certaines menacées de mort, des cinémas, des universités sont envahies.
En Libye, le Conseil de transition vient d'annoncer que la charia serait appliquée, que - notamment - la polygamie serait à nouveau autorisée. Le printemps arabe donne froid dans le dos. On pense à l'Iran de 1979. Les oiseaux chantent, mais ce sont des rapaces. On espère entendre le rouge-gorge et le pic-vert.

(1) le Vif, 23 septembre 2011
(2) JT RTBF, 15 octobre 2011
(3) www.prochoix.org/cgi/blog/index.php/
2011/10/11/2338-qui-est-derriere-les-
dernieres-violences-en-tunisie
(mardi 11 octobre 2011)
(4) L'Avenir, 22 octobre 2011

lundi 24 octobre 2011

De l'utilité de la burqa

Seuls les imbéciles ne changent pas d'avis, paraît-il. J'ai longtemps critiqué la burqa, ce vêtement anti-communication. J'ai revu mon jugement. La burqa serait contraire aux règles de sécurité publique, nous dit-on. Alors que c'est le contraire: elle joue un rôle utile en la matière. En voici la preuve.




Encore un peu de wapi

La Wallonie picarde est mise à toutes les sauces. C'est le cas de le dire. Voici qu'apparaît à présent le concours du "Wapi Chef". En y participant, on peut gagner "le tablier du concours Wapi chef" (1). Voilà qui donne envie. Mais on reste surpris: on croyait naïvement qu'en Wapi il n'y avait qu'un chef. Voilà qu'on les met en compétition. Tout arrive. Rudy Demotte serait donc prêt à mettre son titre en jeu. Va-t-il l'emporter grâce à sa recette de salade tournaisienne (son secret: un peu de tout)? Le suspense est entier.
Ceci dit, la Wapi n'a décidément plus de limite. Le centre hospitalier est wapi, le tourisme est wapi, la culture est wapi, le jazz est wapi, la Chambre de Commerce et d'Industrie est wapi, l'invest est wapi. Même l'Association mondiale des Détectives professionnels est WAPI (World Association of Professional Investingators). C'est dire si tout est Wapi. La sauce devient indigeste. Après le concours du Wapi Chef, devraient suivre bientôt le concours du Wapi larbin, celui de la Wapi soubrette, le concours de la plus belle carpette de Wapi. Les candidats se bousculent.

(1) L'Avenir, 22 octobre 2011

samedi 22 octobre 2011

Signes de vie

Rentrant d'un concert à Bruxelles, on est surpris de constater qu'on est le 22 octobre et que le monde, à première vue, est toujours entier. La fin du monde n'a donc pas eu lieu, contrairement à ce qu'affirmait un prédicateur américain. On ne sait plus à qui faire confiance.
Sur Arte, on "tombe" sur "Berceuses" (1), un "documentaire", c'est tout ce que nous annonce le programme télé qui ne se soucie pas des programmes nocturnes.
Johann Feindt et Tamara Trampe interrogent des Berlinois, de là ou d'ailleurs, sur leur enfance. Vécue ou volée. Celle d'un musicien né de parents sourds, celle d'un Tchétchène, éternel déraciné, prêt à repartir sans valise, celle d'un homme né en prison, celle d'une femme qui apprend aux autres à respirer et à chanter, celle de tant d'autres croisés au hasard. L'enfance d'une petite fille d'aujourd'hui qui trouve ridicules ces adultes - et sa mère en particulier - qui ne savent pas faire la différence entre ce qui se dit et ne se dit pas, qui aimerait tant que ce garçon de son âge comprenne combien elle l'aime, sans avoir à le lui dire.
Après tous ces partages d' émotions, allez savoir pourquoi, on est encore plus content que la fin du monde ait été reportée à une date ultérieure.

(1) à revoir sur
http://videos.arte.tv/fr/videos/berceuses-4205862.html

jeudi 20 octobre 2011

Une dernière pour la route

La Belgique est le pays le plus pollué d'Europe. Si l'on excepte Chypre. C'est une étude néerlandaise récente qui l'affirme. La taille du pays et sa densité de population expliquent les concentrations, notamment de gaz toxiques. N'empêche. On y constate trois plus de cancers du poumon qu'en Suède. La qualité des sols pose problème. Celle des eaux de surface aussi. On y produit trop peu d'énergie renouvelable. Mais tout ira mieux demain: la relégation des Verts du nord et du sud dans l'opposition va tout arranger. Eux ne sont pas pollués par les querelles intestines. Tout ira mieux demain: il y aura moins de trains et le présentateur du JT continuera à nous annoncer de "bonnes nouvelles": comme, par exemple, la diminution du prix de l'essence ou l'augmentation du nombre d'immatriculation de véhicules neufs. Mais après tout qu'importe? Demain, 21 octobre, c'est la fin du monde. C'est un pasteur américain qui nous l'annonce. Allez, je me remets à fumer.

mercredi 19 octobre 2011

La philosophie de l'autruche

Pascal Bruckner n'a sûrement pas regardé "Love Meat Tender" ce lundi, documentaire de Manu Coeman et Yvan Becq diffusé par la RTBF. Le réalisateur et le vétérinaire doivent être pour le philosophe français de fieffés écologistes. Derrière le terme écologistes, il classe en vrac les écologistes politiques, environnementalistes, scientifiques, militants, les verts, les naturalistes, les décroissants, peut-être les indignés, sans doute même les randonneurs et les cyclistes (s'ils ne sont pas professionnels).
Ces "Lugubres", comme ils les appellent finement dans "Le Fanatisme de l'Apocalypse", détestent l'homme et le progrès et n'ont qu'un objectif: "nous démoraliser pour nous mettre au pas" (1). Et un autre encore: "mettre le voile noir du deuil sur toutes les joies humaines". Parmi les joies humaines que veut glorifier Bruckner, on ne serait pas étonné de trouver celle de manger de la viande à grandes dents et tous les repas.
Dans Love Meat Tender, apparaissent clairement les conséquences désastreuses de cette production excessive de viande dans laquelle s'est lancée l'agriculture (quasi) mondiale depuis l'après-guerre: obésité chez l'homme, "nitratisation" des nappes d'eau, prolifération d'algues vertes en Bretagne, déforestation de l'Amazonie, réchauffement climatique (2), gaspillage d'eau (3) ... Et on en passe.
André Pochon, agriculteur français retraité, n'est pas un philosophe de l'intelligentsia parisienne. Il s'exprime pourtant avec beaucoup de philosophie dans le documentaire, nous interroge, avec simplicité et intelligence, sur le sens de nos vies et de celles des animaux. Il a toujours refusé d'entrer dans le système insensé du profit à tout prix.
Il y a quarante ans, 80% du budget familial étaient consacrés à l'alimentation. On n'en est plus qu'à 15 à 20% aujourd'hui. On mange pour pas cher, et donc n'importe quoi. Pierre Rabhi affirme que "l'animal n'est plus une créature vivante, mais une usine à protéines". L'animal n'est plus qu'un moyen de se faire un maximum d'argent, sans égard ni pour lui-même, soumis à des conditions d'existence inhumaines, ni pour les conséquences de ce type de production. On ne peut plus parler d'éleveurs, mais de fabricants.
Pascal Bruckner ne devrait pas être troublé par ce documentaire dans lequel un des intervenants déclare que "on en sait plus en matière d'écologie qu'il y a cent ans". Visiblement pas Pascal Bruckner qui est un philosophe qui ne sait pas et ne doute pas. "La dislocation des grands écosytèmes, les crises de l'eau, de la biodiversité, de sols, des océans, le dérèglement climatique, il s'en tape. Il n'est pas au courant. Après tout, note-t-il tout en finesse, le climat de la Riviera en Bretagne, des vignes au bord de la Tamise, des palmiers en Suède, qui s'en plaindrait?" (4).
Bruckner n'est pas un philosophe, il produit des livres, comme d'autres produisent du cochon, "préférant s'employer, au fil des pages, à revendiquer pour l'homme, et surtout pour lui-même, rien de moins au fond qu'un droit d'insoucieuse jouissance - avec un égoïsme presque infantile, aussi confondant qu'irresponsable, qui aime à se faire passer pour de l'hédonisme mais ne trompe personne", écrit Nathalie Crom dans Télérama (5).
Il y a heureusement de vrais philosophes, qui ne sont souvent pas ceux que l'on croit, tel André Pochon qui en appelle à une attitude responsable des consommacteurs.

(1) citations extraites de "Pascal (Bruckner), un grand philosophe est né", article de Fabrice Nicolino, dans Charlie Hebdo, 12 octobre 2011
(2) le nourrissage du bétail, notamment européen, avec du maïs et du soja (produits sur des terres gagnées sur la forêt amazonienne) augmente les gaz à effet de serre produits par ce même bétail. L'élevage représente aujourd'hui 18% des gaz à effet de serre, plus que la voiture.
(3) la viande représente 45% de l'eau consommée dans le monde.
(4) Fabrice Nicolino, Charlie Hebdo, 12 octobre 2011
(5) 19 octobre 2011

lundi 17 octobre 2011

Le plus vieux métier du monde

Julien Lepers présente depuis plus de vingt ans l'émission "Questions pour un champion". Il n' a jamais gagné la cagnotte. Voilà le pauvre présentateur obligé de faire de la pub pour arrondir ses fins de mois. Il vante un produit dentaire, le public est assez âgé. La pub est diffusée juste avant son émission. On est content de ne pas avoir de dentier. On l'aurait avalé de surprise. On voit par là que le service public va mal: ses animateurs sont obligés de faire le trottoir. Envoyez vos dons à France3, quelque part à Paris.

dimanche 16 octobre 2011

Elise et nous: du théâtre pour apprendre à voter

Parce qu'on n'est jamais si bien servi que par soi-même, à un an des élections communales, petit coup de pub pour notre spectacle-animation "Elise et nous - faux candidats, vrais discours".
Avis aux enseignants et animateurs...


Le débat politique est animé par moments. Jean-Pierre Michelet se fâche, il répond avec des chiffres aux analyses, trop simplistes à son goût, d’Elise Marron. Pendant ce temps, Alain Courageau reste souriant.
Ils sont trois à s’affronter dans ce débat électoral où ils représentent leur parti : l’Union pour le Changement Démocrate, le Bloc National et le Mouvement Fédérateur. Ils parlent de l’insécurité, de la création d’emploi, du chômage, de la multiculturalité, de la mondialisation. Ils ont cinquante minutes pour convaincre.
Au terme du débat, les spectateurs - car il s’agit bien d’un spectacle - sont invités à voter pour l’un d’eux. Ensuite, à partir des résultats de l’élection, ils échangent sur leurs critères de choix et de rejet. Ils décodent les discours, argumentent sur le danger des slogans simplistes de l’extrême droite, relèvent les attitudes démagogiques, analysent les discours creux que font passer les sourires et les gestes d’ouverture, soulignent l’ennui que suscite un candidat qui manque de charisme et d’ouverture.

Le spectacle-animation « Elise et Nous – faux candidats, vrais discours », proposé par la Compagnie du Tocsin, la Confédération parascolaire Hainaut et le CIEP, a été joué plus de cinquante fois, dans de nombreuses écoles de la Communauté française, auprès d’étudiants de 5 et 6e secondaires et du supérieur, ainsi que dans le milieu de l’éducation permanente.
A chaque représentation, les spectateurs ont été réactifs : applaudissements, rires, huées, réactions de désaccord, questions parfois, voire invectives ont régulièrement fusé. Les spectateurs ont fait leur choix d’électeurs.
La candidate du Bloc National n’a parfois obtenu aucune voix, mais a parfois aussi atteint un score de 20% . Le débat consiste alors à désamorcer ce vote « d’émotion » et les contre arguments de démontage d’un discours d’exclusion viennent le plus souvent des autres spectateurs eux-mêmes.
Il est arrivé que les comédiens doivent s’interrompre tant les cris étaient nombreux à l’adresse d’Elise Marron ! Les spectateurs concernés ont ensuite reconnu avoir oublié qu’il s’agissait de théâtre…
Les deux autres candidats se partagent le succès. Ce séducteur d’Alain Courageau l’a parfois très largement emporté (jusqu’à 75% des voix). Mais régulièrement, Jean-Pierre Michelet, a passé le cap des 50% malgré son manque de charisme.
Lors de l’analyse des motivations des choix et des rejets apparaissent alors des critères intéressants : « il connaît ses dossiers », « elle est fière d’être Belge », « il nous mène en bateau », « il ne nous promet pas la lune », « il vient vers nous », « il nous fait rêver et on en a bien besoin », « il parle flamand », « elle a vécu la même chose que nous »…

Lors d’un débat, est apparu tout l’intérêt de désigner des assesseurs qui dépouillent les bulletins de vote avec l’animatrice. Un groupe de jeunes prétendait que les résultats avaient été faussés, puisqu’ils étaient dix à avoir voté pour Elise Marron, alors que celle-ci n’avait obtenu que neuf voix. L’animatrice se tourna vers les assesseurs, choisis au hasard parmi les élèves, qui témoignèrent que les résultats des votes étaient bel et bien corrects. Ce fut aussi l’occasion de rappeler que le vote est secret et qu’il peut y avoir une différence entre le choix déclaré et le choix effectué. De rappeler également ce qu’est un vote nul.

De nombreux enseignants ont apprécié le spectacle-animation :
- « Un bon spectacle pour rendre la politique accessible à nos élèves et susciter le débat et la réflexion. Le fait de voter est original et intéressant. »
- « C’était vivant. Il y avait de l’humour. C’était compréhensible à leur niveau. »
- « Excellente prise de conscience sur la façon dont se présentent nos hommes et femmes politiques, ainsi que sur les principaux programmes. Mise en scène très vivante, tellement proche du vécu. »
- « Des élèves étaient très réticents à l’idée d’assister à un débat politique ; ils ne voulaient même pas venir. Mais la pièce leur a beaucoup plu. »
(avis recueillis après des représentations à la Maison culturelle d’Ath en février-mars 2010).

Bref, « Elise et Nous » semble bien atteindre ses objectifs. La mise en situation est bien réelle, elle amène les spectateurs à devoir prendre position, à décoder et à argumenter. Elle prépare les étudiants à un vote réfléchi.

« Du théâtre pour voter malin » (Le Ligueur, 04.02.09)

« Appelés à développer différents sujets, la multiculturalité, l’économie, la mondialisation ou encore le temps de travail, ils évitent les pièges de la caricature. Ni le texte ni la mise en scène ne force le trait des politiciens impliqués. » (Le Courrier de l’Escaut, 22.01.09)

« L’originalité est que le public participe activement, en votant pour son candidat favori. »
« Une manière concrète d’offrir aux jeunes spectateurs la possibilité de décoder le discours politique. » (No Télé, 06.06.09 et 21.01.09)

Voir deux sujets sur « Elise et Nous » sur le site de No Télé :

Informations et réservations :
Confédération parascolaire Hainaut : 068 33 26 65 – cpht@skynet.be