mercredi 26 avril 2023

Fascisme soviétique

Un pays qui s’est refermé sur lui-même, dont la jeunesse est sacrifiée au service de l’Etat, une jeunesse à qui on apprend que « La guerre, c’est l’amour », voilà ce qu'est aujourd'hui la Russie. 
Deux journalistes franco-russes y ont tourné un reportage, diffusé récemment sur France 5 : "Un peuple qui marche au pas".
"Le rapport intime que nous entretenons avec le pays nous confère une sorte de devoir de franchise, affirme Ksenia Bolchakova (1). Cela nous permet, par exemple, de pouvoir comparer la Russie à un pays fasciste, ce que beaucoup de nos confrères français n'oseraient pas faire."
Mais que serait d'autre un pays qui met au pas l'institution scolaire, où les enseignants sont tenus d'expliquer à leurs jeunes élèves qu'ils ne doivent pas hésiter à mourir pour la patrie, où un mouvement de jeunesse nationaliste (qui revendique 1,240 million de membres) apprend aux enfants dès six ans à manier les armes ? Comment ne pas penser aux Jeunesses hitlériennes des années ’30 ?
"L’Etat contrôle tout, tu n’es qu’un rouage dans la machine, c’est ce qu'on te fait comprendre partout", affirme une enseignante, dénoncée par ses collègues pour avoir refusé de participer au lavage de cerveaux de ses élèves. L'école n'est plus qu'une fabrique de citoyens dociles. Des enfants et des parents se sont plaints de ses refus. La directrice de l'école, qui est aussi députée du parti de Poutine, a fait licencier l'enseignante rétive.

"Depuis un an, il y a un véritable durcissement du système et il n'y a plus aucun garde-fou, constate Veronika Dorman, l'autre journaliste. Ceux qui osaient s'opposer ont quitté le pays. L'éducation patriotique, le drapeau, l'hymne dans les écoles... tout cela date du début de la guerre. Les nouvelles lois, dont certaines sont rétroactives, les arrestations massives pour dénigrement de l'armée, fakenews ou antipatriotisme sont apparues et ont fini par faire taire les manifestations."
Il y a deux jours, le pays a enregistré sa première condamnation pour diffusion de « fausses informations » sur l’action de l’armée sur la base d’écoutes téléphoniques. Un capitaine de police a été condamné à sept ans de prison avoir évoqué les meurtres de civils en Ukraine, avoir sous-estimé les pertes militaires russes et avoir « nié le caractère nazi du régime ukrainien ». Il a été condamné sur base de la loi interdisant la « diffusion publique de fausses nouvelles sur l’action de l’armée ». Il n'a rien dit publiquement mais était sur écoute. "Le public" était donc l'agent qui l'espionnait... (2) "L’avocat du policier, écrit Le Monde, a dénoncé « une intrusion monstrueuse dans la vie privée des gens », et dit craindre que « n’importe quelle conversation dans la cuisine » puisse désormais tomber sous le coup de la loi. De fait, les tribunaux ont déjà examiné des dizaines d’affaires nées de dénonciations à la suite de conversations privées."

Le reportage "Un peuple qui marche au pas" donne la parole à la maman de Varia. Cette gamine de dix ans, au sourire lumineux, a été inquiétée pour un dessin montrant un Russe et un Ukrainien réclamant la paix. Depuis la mobilisation de la jeunesse en protestation contre l'empoisonnement de Navalny en 2018, "le Kremlin a pris peur, estime Ksenia Bolchakova. Il a instauré une stratégie pour reprendre en main les jeunes générations. La machine répressive s'est emballée." Et les personnes considérées comme "non patriotiques" sont dénoncées par leurs collègues, leurs supérieurs, leurs voisins.  
L'immense majorité des Russes se sont résolus à trouver un sens à cette guerre "pour que leurs enfants ne soient pas morts pour rien". La propagande est partout, un vrai rouleau compresseur. "Les Russes sont matraqués non-stop par un discours patriotique et le récit du régime", constate Veronika Dorman.

Depuis longtemps, en Russie, les élections ne sont plus qu'une parodie de démocratie. A chacune d'entre elles, une jeune femme opiniâtre constate des fraudes dans les bureaux vote, souvent au vu et au su de tous. Des électeurs votent dans différents bureaux ou reçoivent plusieurs bulletins, mais ces fraudes électorales ne choquent plus, la majorité de la population s'y est résignée. Chacun a compris où était son intérêt. Les fonctionnaires sont menacés d’être privés de primes si les députés du parti poutinien n'étaient pas réélus. Certains risquent leur place, ou leur liberté tout simplement. Donc, mieux vaut faire le dos rond. Comment s'étonner que les deux journalistes n'aient réussi à convaincre que quelques rares personnes de témoigner de l'état de leur pays ? Difficile d'entrevoir une lueur d'espoir. "Le plus terrifiant est que, quoi qu'il advienne, cette espèce d'URSS 2.0 survivra à Poutine. Il n'est pas seul et ses fidèles prendront le relais. La machine répressive ne s'arrêtera pas pour autant."

Robert Badinter, co-auteur de "Vladimir Poutine, l'accusation" (3), veut y croire. Aucun dignitaire nazi n'imaginait en 1942 le procès de Nuremberg. Lui, à 95 ans, rêve d'entendre un jour "Accusé Poutine, levez-vous !".

(1) "Le poison de la propagande", Télérama, 12.4.2023
(2)  https://www.lemonde.fr/international/article/2023/04/24/russie-sept-ans-de-prison-pour-avoir-nie-le-caractere-nazi-du-regime-ukrainien-au-telephone_6170850_3210.html
(3) Fayard.
https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-7h50/l-invite-de-7h50-du-mercredi-26-avril-2023-4272642

dimanche 23 avril 2023

De drôles de paroissiens

Nouveau face-à-face hier à Bélâbre entre pro- et anti-CADA. Les opposants entendaient organiser "la plus grande manifestation" contre le projet d'ouverture d'un centre d'accueil pour réfugiés dans leur village. Ils étaient 120 selon la presse. Difficile d'en juger quand on est dans le camp adverse avec la vue barrée par un alignement de combis de gendarmerie qui ferme la rue.
On ne voyait d'eux que leurs panneaux affichant des slogans stupides et agressifs qui ciblaient essentiellement l'association Viltaïs qui gèrera le centre d'accueil pour réfugiés. "Viltaïs = trafic d'êtres humains", "Vitaïs Profits Invasion délinquance", "Viltaïs officine néo-colonialiste". Un autre traitait l'association d'esclavagiste. Faut-il en rire ou en pleurer ? On a du mal à comprendre en quoi héberger dans des conditions dignes des gens qui survivent dans la rue s'apparente à de l'esclavagisme ou du néo-colonialisme, mais les grincheux ont une logique et une compréhension du monde qui leur sont propres.
"Pourquoi le chaos à Bélâbre ?", demande un autre de leurs panneaux. De quel chaos parlent-ils, sinon de celui qu'ils génèrent dans leurs têtes ?
Parmi les opposants, de fervents catholiques dont on ne cesse de se demander ce qu'ils ont compris - ou non - de la doctrine chrétienne. "Tu aimeras ton prochain comme toi-même" leur a enjoint leur Jésus. Ils le détestent, ce prochain. Faut-il croire qu'ils se haïssent eux-mêmes ? Jésus est né dans une étable parce que ses parents, migrants, se sont vus claquer la porte au nez par de braves gens qui les ont rejetés. « J’étais un étranger, et vous m’avez accueilli », a dit Jésus (Mt 25,35). « Dans la Bible, l’accueil de l’étranger est une exigence éthique qui vérifie notre conversion à la fraternité humaine », rappelait en 2018 Georges Pontier, président de la Conférence des évêques de France (1). 

"Fraternité, solidarité", "Bélâbre, terre d'accueil" répondions-nous à ces apeurés aux têtes chaotiques. Nous étions quelque 150 à soutenir le projet, coincés dans la rue Emile Zola d'où la gendarmerie nous interdisait de bouger. Comme le relevait un ami, nous étions là pour soutenir un projet de l'Etat, interdits par des agents de ce même Etat de tout déplacement pour que les opposants au projet puissent se rendre à la mairie déposer leur pétition. Cherchez l'erreur.

Les opposants - qui regardent trop la télé, certaines télés - restent coincés dans leurs fantasmes et leur vision simpliste du monde, encouragés en cela par le chef de l'Etat et son ministre de l'Intérieur : étranger = danger, immigration = insécurité et violence. "Une étude vient pourtant démontrer qu’il n’en est rien, écrit Le Monde (2). Rendue publique mercredi 19 avril par le Centre d’études prospectives et d’informations internationales (CEPII), rattaché aux services de la première ministre, elle assure que « les immigrés ne sont pas à l’origine d’une augmentation des taux d’infraction dans les pays d’accueil ». Pour étayer leur propos, les auteurs, les économistes Arnaud Philippe et Jérôme Valette, dressent un état des lieux des travaux de la recherche sur le sujet, dans plusieurs pays. Et constatent qu’« aucune étude ne trouve d’effet de l’immigration sur la délinquance »." Mais ceux qui n'aiment pas les autres rejèteront l'étude, comme ils balaient tout argument objectif qu'on peut leur opposer : pour eux, tout ce qui ne sert pas leurs analyses simplistes et ne nourrit pas leur peur n'est que mensonge et propagande.

(1) https://www.lavie.fr/idees/debats/accueil-de-letranger-que-dit-vraiment-la-biblenbsp-8598.php
(2) https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/04/21/immigration-les-etrangers-pas-plus-delinquants-que-les-autres-selon-une-etude_6170487_3224.html

mardi 18 avril 2023

Ça va aller

Argumentaire à propos du projet de CADA de Bélâbre pour calmer les peurs, rassurer les méfiants et aider à lutter contre les fausses informations et les rumeurs

CADA - Définition

Les Centres d'Accueil de Demandeurs d'Asile (CADA) fournissent un refuge aux personnes qui ont demandé l'asile en France. Pendant la durée de l'examen de leur demande de statut de réfugié, les demandeurs d'asile peuvent bénéficier d'un logement, d'un accompagnement administratif pour aider à la procédure de demande d'asile, d'un soutien social qui inclut l'accès aux soins médicaux, la scolarisation des enfants et une aide financière pour les besoins alimentaires. Les CADA sont généralement gérés par des organisations caritatives ou des entreprises privées.
L'accueil des demandeurs d'asile en France est conforme à la Convention de Genève de 1951, qui définit les obligations internationales en matière de protection des réfugiés. En vertu de cette convention, l'État français finance les Centres d'Accueil de Demandeurs d'Asile pour fournir un refuge et un soutien aux personnes en situation de vulnérabilité.
(https://annuaire.action-sociale.org/etablissements/readaptation-sociale/centre-accueil-demandeurs-asile--c-a-d-a---443.html)

Allocation

En quoi consiste l'allocation pour demandeur d'asile (Ada) ?
En tant que demandeur d'asile, vous n'êtes pas autorisé à travailler avant un délai de 6 mois. Si vous êtes majeur, une allocation pour demandeur d'asile (Ada) peut vous être versée. L'allocation vous sera versée si vous remplissez les conditions. Son montant dépend notamment de votre situation familiale. L'Ada est composée d'un montant forfaitaire journalier, dont le niveau varie en fonction du nombre de personnes composant le foyer.
Un montant supplémentaire peut vous être versé si vous avez accepté l'offre de prise en charge, avez manifesté un besoin d'hébergement et n'avez pas bénéficié gratuitement d'un hébergement (ou logement).

Montant journalier (selon la taille de la famille)
1 personne :     6,80 €
2 personnes : 10,20 €
3 personnes : 13,60 €
4 personnes : 17,00 €
5 personnes : 20,40 €
Etc.
Si aucune place d'hébergement ne vous a été proposée, le montant supplémentaire est de 7,40 €.(https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F33314)

Le projet de Bélâbre

Qui sera accueilli ? 38 personnes pourront être accueillies au CADA de Bélâbre, principalement des familles et des femmes avec leurs enfants.
Les premiers demandeurs d’asile sont attendus pour 2024, le temps de finir le montage du dossier et l’aménagement des locaux.
« En attendant, l’association a cherché d’autres options pour commencer l’accueil « car les soixante places de cada ont été octroyées dès 2023 par l’État. Il fallait donc trouver une solution temporaire. Il se trouve que la résidence retraite La Roche Bellusson, de Mérigny, avait un bâtiment inoccupé où vont être logés les premiers arrivants d’ici un mois », indique le maire de Bélâbre. À Argenton, où le climat est plus apaisé, les demandeurs d’asile pourront être accueillis « d’ici avril à début mai », dans un ancien hôtel proche de la gare, en cours d’aménagement.
Leur provenance géographique n’est pas encore connue. « Leur arrivée est conditionnée à la conjoncture internationale : on nous parle d’Afghans, de Géorgiens, de personnes venues d’Afrique. Peut-être accueillerons-nous aussi des Turcs et des Syriens suite au récent tremblement de terre », détaille Laurent Laroche.
Ils resteront « entre six et huit mois à Bélâbre, suivant l’évolution de l’instruction de leur dossier » et seront encadrés par quatre professionnels (deux intervenants sociaux et deux animateurs) qui partageront leur temps entre les sites de Bélâbre et d’Argenton. »
(https://www.lanouvellerepublique.fr/indre/commune/argenton-sur-creuse/cada-de-belabre-les-details-du-projet-et-son-calendrier-desormais-connus)

% de la population

38 personnes s’ajoutant aux 934 habitants actuels mèneront la commune de Bélâbre à un total de 972 habitants. »
Les 38 personnes accueillies représenteront ainsi 3,9% de la population locale.
La population étrangère vivant en France s'élève à 5,2 millions de personnes, soit 7,7 % de la population totale.
(https://www.insee.fr/fr/statistiques/3633212)

Gestion

Le CADA sera géré par l’association Viltaïs. Basée à Moulins (Allier), cette association gère déjà six cada, quatre hébergements d’urgence pour demandeurs d’asile et trois structures d’accueil de mineurs non accompagnés dispersées sur quatre régions. Dans l’Indre, elle travaille ainsi à l’ouverture d’un 7e cada de soixante places réparties à Bélâbre (38 personnes) et Argenton-sur-Creuse (22 personnes). (https://www.lanouvellerepublique.fr/indre/commune/argenton-sur-creuse/cada-de-belabre-les-details-du-projet-et-son-calendrier-desormais-connus)

Bâtiment
La promesse de vente du bâtiment (ancienne usine, à droite de l’église de Bélâbre) a été signée fin mars 2023. L’association Viltaïs a jusqu’au 15 mai pour déposer sa demande de permis de construire. Trois mois s’écouleront alors, qui serviront à étudier les différents recours. Puis, à partir du 15 août, l’association pourra commencer les appels d’offres, qui dureront jusqu’à début octobre. Les travaux commenceront véritablement courant 2024.
(Explications du maire de Bélâbre en séance du Conseil municipal du 3.4.2023 -https://www.lanouvellerepublique.fr/indre/cada-de-belabre-les-opposants-au-projet-reclament-une-consultation-citoyenne queryId%5Bquery1%5D=57cd2206459a452f008b4594&queryId%5Bquery2%5D=57c95b34479a452f008b459d&page=19&pageId=57da5ce5459a4552008b469a)

Expériences proches

* A Buzançais (au nord de Bélâbre)

« Ouvert en 2016, le Cada de Buzançais accueille 102 demandeurs d’asile dont 56 enfants. L’exemple d’une structure bien intégrée dans la vie locale, au moment où l’annonce d’un projet similaire à Belâbre réveille certaines peurs.
Oubliées les peurs du début. Comme ces dernières semaines à Bélâbre, l’annonce en 2015 de la création d’un centre d’accueil de demandeurs d’asile à Buzançais (Cada) avait suscité de vives réactions de méfiance et d’opposition. Sept ans après son ouverture, en septembre 2016, le climat est désormais apaisé dans la petite commune de 4.500 habitants.
Le lieu n’est pas devenu le « ghetto » tant redouté. Les réfugiés y vivent en attente de l’examen de leur dossier de demande d’asile, profitent de ce temps suspendu pour panser les plaies psychologiques et parfois physiques des guerres et persécutions qu’ils ont fuies. »
« L’intégralité des réfugiés n’est pas francophone mais tous manifestent l’envie d’apprendre la langue et de s’intégrer. « Le premier conseil que je leur donne quand ils arrivent est de s’ouvrir sur l’extérieur. Parfois, se retrouver dans un petit village leur fait peur. (…) Mais au final, ils trouvent leur place et passent un bon séjour », poursuit le directeur qui voit régulièrement des « liens d’amitié et d’entraide se créer avec le voisinage ». « Le tableau peut paraître un peu idyllique. Mais c’est la réalité que nous vivons ici. »
(« Demandeurs d'asile à Buzançais : « Mais au final ils trouvent leur place » - Nouvelle république (NR) - extraits - publié le 12/03/2023)

Interview du maire de Buzançais, Régis Blanchet

- «  (…) une chance d’accueillir les demandeurs d’asile dans votre commune ?
- « Économiquement, non. Mais leur présence permet une ouverture d’esprit. Des liens se créent avec la population, je connais des habitants qui reçoivent chez eux des demandeurs d’asile. Des associations de support ont aussi été créées. Avant le Covid, un repas était organisé chaque année avec des plats étrangers préparés par les habitants du Cada. Mais il faut savoir que 80 à 90 % sont déboutés de leur demande d’asile et ne restent pas. »
- « Le projet de Cada à Bélâbre suscite des craintes similaires à celles que vous avez connues : avez-vous échangé avec le maire, Laurent Laroche ? »
- « Il m’a contacté avant de prendre sa décision car il s’inquiétait de la manière dont ça pouvait se passer. Je l’ai rassuré et lui ai conseillé de mettre en place un comité de pilotage. Ici, à Buzançais, je n’ai plus jamais entendu personne se plaindre du Cada. »
(« Demandeurs d’asile à Buzançais : « Il n’y a jamais eu le moindre problème », assure le maire » - (extraits- NR, publié le 14/03/2023)

Témoignage d’une Tchadienne accueillie à Buzançais avec son fils :

« Ali se sent bien. Il va à l’école. Il s’est adapté et comprend de mieux en mieux le français. Il commence même à dire quelques mots. »  « On est bien logés. On a de quoi manger. Les gens sont gentils et accueillants. Et surtout, je nous sens enfin en sécurité. »
(« Elle a fui le Tchad avec son fils : « Ici, je me sens enfin en sécurité » - NR - extraits - publié le 12/03/2023)

Réfugiés d’Algérie, Boualem Rahmane et sa famille ont passé deux ans au Cada de Buzançais. Désormais titulaires d’une carte de séjour, ils ont choisi de s’installer dans ce village qui « leur a ouvert les portes » et où ils ont tissé des liens d’amitié. »
« Je ne voulais pas être une charge pour les autres. J’ai bien essayé de trouver un travail, après avoir demandé l’autorisation à la préfecture, mais ma situation n’était pas simple pour les employeurs, je le comprends. Alors je me suis investi dans les associations : aux Restos du coeur, à l’épicerie sociale. C’est important de donner quand on reçoit. » Pleinement engagé dans ses actions bénévoles, « j’en oubliais presque que je n’avais pas de statut ici. 
« Quand le couple se voit enfin accorder « la protection subsidiaire », qui lui ouvre le droit à une carte de séjour, il décide tout naturellement de demeurer à Buzançais. « Pourquoi aller dans une ville où on ne connaissait personne alors qu’ici, on se sent bien, on s’est fait des amis. » 
« Il a aujourd’hui un contrat d’opérateur-production dans une entreprise de menuiserie de Châteauroux. Son épouse, elle, travaille depuis peu comme « dame de cantine ».
« Son rêve ultime serait de décrocher la nationalité française. « Dès que possible, je la demande. Ce serait une fierté et un hommage à mon grand-père qui l’a eue pour avoir combattu en Indochine et pendant la deuxième Guerre mondiale. »
(https://www.lanouvellerepublique.fr/indre/ancien-demandeur-d-asile-au-cada-il-a-fait-de-buzancais-sa-ville-de-coeur - extraits)

L’US Argy

«  A l’été 2022, l’association sportive de ce petit village de l’Indre s’apprêtait à mettre la clé sous la porte. Jusqu’à ce qu’un « miracle » survienne : une quinzaine d’exilés sont venus y signer une licence. Sept nationalités composent aujourd’hui l’équipe. » «  Huit mois plus tard, la chronique d’une mort annoncée s’est transformée en hymne à la fraternité. »
« La majorité des nouveaux licenciés ont fréquenté, ou fréquentent encore, le centre d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA) de Buzançais (…). Titulaires du statut de réfugié ou de demandeur d’asile, ils ont été rejoints par d’anciens mineurs isolés étrangers et par des parents d’enfants sous protection internationale. Agés de 19 à 33 ans, ils ont fui des contextes politiques instables, des situations familiales tendues ou simplement la misère. Quasiment tous travaillent ou sont en formation dans les métiers de l’artisanat : maçonnerie, couverture, boulangerie, métallerie... L’exil est le point commun de ces « footeux » du dimanche, coachés par un Kanak. »
(https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/03/30/l-us-argy-un-club-de-football-amateur-sauve-par-des-migrants_6167515_3225.html - extraits)
(Vidéo à voir : https://www.lalibre.be/sports/football/2023/04/18/un-match-de-football-interrompu-suite-a-une-invasion-de-moustiques-sur-le-terrain-video-S7BUU7TWWBDADIRVJVF2CDEEPE/ )

« L’association Solidarité Val de l’Indre-Brenne est née fin 2016, après la création du centre d’accueil pour demandeurs d’asile, à Buzançais. Ses membres interviennent auprès d’un public source de joies et, parfois, de peines. » « Nous nous doutions qu’il y aurait besoin de cours de français, se souvient Florence Naturel, enseignante titulaire d’un master français langue étrangère. Au départ, nous étions six ou sept. » Aujourd’hui, ils sont environ vingt-cinq au sein de l’équipe pour donner, trois fois par semaine, des cours à plus d’une vingtaine d’adultes du Cada, et proposer de l’aide aux devoirs à une trentaine d’enfants. »     « Ils ont un vrai désir d’apprendre notre langue, de découvrir notre culture. »
(« À Buzançais, des bénévoles apprennent le français aux demandeurs d’asile : « Une aventure humaine » (extraits) - NR - publié le 15/03/2023)

* A Sommières-du-Clain, en Vienne (à 80 kilomètres à l’ouest de Bélâbre).

En 2005, la commune disposait d’une dizaine de logements vides et les a confiés à la Croix-Rouge pour y accueillir des demandeurs d’asile.« Il a fallu une bonne année pour que l’idée soit acceptée, reconnaît Christelle Largeau, travailleuse sociale présente dès l’ouverture du site. Des villageois étaient suspicieux, d’autres clairement opposés. » Douze mois pour faire taire les « ils viennent prendre nos toits, voler notre travail ». « Des dizaines de familles exilées se sont depuis succédé. Avec elles a disparu la méfiance. Les étrangers sont devenus une « chance » pour la cité aux 766 habitants. Sans eux et la dizaine d’écoliers apportés en moyenne par le CADA, l’école communale ne serait sans doute qu’un vieux souvenir. « Ces gens font aussi tourner un peu les boutiques », ajoute René Morisset (le maire). » « L’écueil de la langue affecte bien moins les enfants, scolarisés dès leur emménagement. Six mois sont nécessaires pour être parfaitement à l’aise à l’oral, un jour suffit pour rire à la récréation. « Ils s’habituent à tout et à l’autre plus rapidement que les adultes », confirme le directeur de l’école, Julien Fontaine, qui voit en eux « des allophones, pas des étrangers ». « Pas de vrai « scandale ». Depuis sa résidence pour personnes âgées, Cécile Sèvre souffle à l’évocation des préjugés qui, ailleurs, freinent l’installation de nouveaux CADA. Elle se creuse la tête à la recherche d’un « scandale ». Le maire, René Morisset, évoque une poignée de « chapardages ». « Dans ces gens-là, c’est comme chez nous : il y a des bons et des mauvais. »
« Le président de l’Olympique club Sommières-Saint-Romain (OCSSR) pioche au CADA quelques footballeurs. »
(https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/04/07/accueil-des-refugies-de-la-reussite-de-sommieres-du-clain-a-la-polemique-de-belabre-quinze-ans-plus-tard-deux-visions-de-l-integration_6168668_3224.html - extraits)

* A Argenton-sur-Creuse

L’association Accueil du cœur 36, créée au plus fort de la guerre en Syrie a accueilli deux familles syriennes en juin 2017 puis une autre en février 2022 qui ont obtenu le statut de réfugié, dont les enfants sont aujourd'hui soit à l'école primaire soit au collège ou au LP soit à l'université. Deux d'entre elles sont maintenant autonomes et la dernière le devient progressivement. (…) En février 2022 nous avons également accueilli une famille ukrainienne (…).
Nous nous sommes également beaucoup investi.e.s auprès des résidents de l'HUDA (ex-CAO) qui a ouvert à Argenton en 2016 et auxquels nous proposons des ateliers de français 4 jours par semaine pour occuper leurs journées (car ils n'ont pas le droit de travailler pendant toute la durée de l'instruction de leur demande d'asile qui peut prendre des mois voire plus d'une année) et favoriser leur vie de tous les jours en attendant que l'OFPRA et éventuellement la CNDA statuent sur leur sort.
Ces expériences que nous avons choisi de vivre (…) nous ont certes demandé des efforts mais nous ont énormément apporté individuellement en termes de découverte, d'ouverture et de partage et collectivement grâce aux liens nouveaux que ce projet a générés entre des habitants qui ne se connaissaient pas du tout au départ et aussi avec la Mairie, les travailleurs sociaux et d'autres associations locales. A titre d’exemples, une vieille dame du Merle blanc nous a confié que eux (les résidents de l'HUDA) au moins ils disaient bonjour et l'aidaient à porter ses sacs et un élu municipal qui était contre la venue d'une famille syrienne à Mosnay a tenu à nous faire savoir au bout de quelques semaines qu'il avait changé d'avis.
C'est un projet qui, comme ailleurs, soulève des peurs, des doutes voire des hostilités féroces dans la population quand les appréhensions sont exploitées à des fins idéologiques mais ce sera vite une belle aventure à Belâbre aussi et qui vous apportera beaucoup de satisfaction et de fierté quand les choses se seront calmées et que les habitants seront rassurés. »
(extraits de la lettre envoyée le 1.3.2023 par l’association à l’équipe municipale de Bélâbre)


Besoins de main d’œuvre

« Plus de trois millions de projets de recrutement sont prévus cette année, selon la dernière édition de l’enquête réalisée par Pôle emploi sur les « besoins en main-d’œuvre » (BMO) des entreprises. 72 % de ces projets concernent des emplois durables, et l’hôtellerie-restauration, le secteur agricole, la santé ou encore les services à la personne arrivent en tête des secteurs qui recruteront le plus au cours de l’année. »
(https://www.pole-emploi.fr/candidat/decouvrir-le-marche-du-travail/besoins-en-main-doeuvre.html)

« L’OCDE [Organisation de coopération et de développement économiques] dit qu’en 2050, l’Europe manquera de 95 millions de travailleurs. Je préfère être à la manœuvre d’une immigration contrôlée que de subir. »
(L. Laroche, maire de Bélâbre, https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/04/07/accueil-des-refugies-de-la-reussite-de-sommieres-du-clain-a-la-polemique-de-belabre-quinze-ans-plus-tard-deux-visions-de-l-integration_6168668_3224.html)

« Après une baisse record en 2020, « la migration permanente vers les pays de l’OCDE » a atteint 4,8 millions d’entrées en 2021. Une bonne nouvelle pour des pays manquant de main-d’œuvre, comme la France. Les mouvements migratoires ont fortement rebondi en 2021, tirés en particulier par l’immigration de travail vers les pays de l’OCDE, où sept immigrés sur dix ont un emploi, selon le rapport annuel de l’organisation économique publié lundi. Après une année 2020 de baisse record des flux en raison de la pandémie de Covid-19, « la migration permanente vers les pays de l’OCDE a rebondi de 22 % en 2021 », avec 4,8 millions d’entrées, a indiqué l’Organisation de coopération et de développement économiques dans ce document consacré aux migrations internationales.
Une inversion de tendance « due à un fort rebond de l’activité économique, à la réouverture des frontières, à l’augmentation des besoins de main-d’œuvre et à la reprise des délivrances de visas », estime le directeur de l’emploi, du travail et des affaires sociales Stefano Scarpetta, cité dans le rapport. La courbe devrait se prolonger en 2022, année marquée par la guerre en Ukraine, prévoit l’organisation. »
(https://www.sudouest.fr/economie/emploi/l-immigration-de-travail-reprend-dans-l-ocde-des-besoins-de-main-d-oeuvre-a-combler-12549037.php, 10.10.2022)

* Patrons solidaires

En janvier 2021, un boulanger de Besançon a entamé une grève de la faim pour éviter l'expulsion de son apprenti. Impossible de trouver un apprenti pour sa "Huche à pain", jusqu'à ce qu'il rencontre Laye Fodé Traoré, un jeune guinéen, qui n'avait que deux envies : apprendre et trouver du travail. A l'âge de 18 ans, ce dernier a reçu un ordre de quitter le territoire français. Son patron a fini - en mettant sa vie en jeu - par obtenir gain de cause. Depuis, le jeune homme a obtenu son CAP de boulangerie (…) Stéphane Ravacley, son patron, constate qu'aucun problème n'a été constaté avec tous ces jeunes venus d'ailleurs, qu'ils n'ont jamais fait l'objet d'aucune plainte. Le jeune guinéen boulanger à Besançon a connu une belle réussite scolaire. "Ils sont doués et ont toute leur place dans nos entreprises", constate son patron (1).
Dans l'Ain, un couple de boulangers a formé un autre jeune guinéen. "Il est motivé, il a toutes les qualités requises." Les deux boulangers auraient voulu l'engager comme apprenti, ce qui s'est avéré impossible. Jusqu'à ses 18 ans, Yaya était protégé par son statut de mineur non accompagné. Mais au-delà, il n'avait plus ni statut, ni papier. Pendant trois ans, ils ont effectué toutes les démarches possibles auprès de la préfecture pour qu'il obtienne ses papiers. En vain. Ici encore, une grève de la faim a débloqué la situation.
Pour soutenir tous ces patrons qui galèrent pour pouvoir engager un apprenti venu d'ailleurs, Stéphane Ravacley a créé un collectif national, Patrons solidaires (2). Ils sont nombreux ces jeunes dont l'envie de travailler est contrariée par leur absence de papiers:  Madama, Karim, Noureldien, Amara, Aboubakar, Ousmane, Mohamed, Amadou. Ils ont envie d'être boulanger, menuisier, électricien, boucher et ont un emploi ou un contrat d'apprentissage à portée de main, mais l'Etat, aveugle et sourd, veut les expulser.
Zemmour et l’extrême droite sont totalement déconnectés de l'économie réelle. Ils sont les premiers à déplorer la disparition des petits commerces et des artisans dans les campagnes, sans vouloir voir que ce sont de jeunes migrants qui les sauveront. Zemmour incarne le douanier (qui n'est pas un imbécile, puisqu'il est douanier) stupide et raciste du sketch de Fernand Raynaud: "J'aime pas les étrangers qui viennent manger le pain des Français" (3). Il chasse l'étranger et se retrouve sans pain. L'étranger était boulanger.
(1) https://www.franceinter.fr/emissions/carnets-de-campagne/carnets-de-campagne-du-mardi-14-septembre-2021
(2) https://www.facebook.com/patronsolidaire.immigration/
(3) https://www.youtube.com/watch?v=2CVo3fZr4-o
(https://moeursethumeurs.blogspot.com/2021/10/le-pain-des-francais.html 16.10.2021)

* Un patron métallier de la région de Tours cherche en vain deux salariés.
(France 3 CVDL, 3.4.2023- 19h, +/- 20’ - https://www.france.tv/france-3/centre-val-de-loire/jt-19-20-centre-val-de-loire/4742239-emission-du-lundi-3-avril-2023.html)

* Les patrons peinent à recruter. Notamment dans la restauration. Les deux chefs du restaurant Le Cercle, seul restaurant étoilé de Bourges, ont dû se résoudre, en novembre 2019, à fermer leur établissement, leur appel à engagement de quatre serveurs était resté sans suite.
(France 3 CVDL, 4.4.2023 - 19h, 17’50 - https://www.france.tv/france-3/centre-val-de-loire/jt-19-20-centre-val-de-loire/4746280-emission-du-mardi-4-avril-2023.html) 

* Migr’Action

Le programme « Migr’Action de l’association Batik International cherche à favoriser l’insertion socioprofessionnelle des personnes réfugiées par l'agriculture en zones rurales françaises
« Le rayonnement des zones rurales françaises est en déclin depuis de nombreuses années. Les problèmes structurels du secteur agricole sont concomitants à ce phénomène. Ainsi, bien que la France soit la première puissance agricole de l’UE, le nombre d’exploitations agricoles est en baisse, faute de trouver des exploitant-es et employé-es qualifié-es pour les reprendre et en conséquence de la concurrence des grosses exploitations. (…)
Migr’Action souhaite permettre aux migrant-es de découvrir concrètement le monde rural et le secteur agricole par des accueils découverte de quelques jours chez l’agriculteur-rice. Des ateliers sont également animés auprès des migrant-es pour déconstruire les préjugés sur les zones rurales et auprès des agriculteur-rices pour les former à l'interculturalité. A terme, le projet vise à construire des relations professionnelles pérennes entre les migrant-es et les agriculteurs-rices et développer des parcours de formation aux métiers agricoles adaptés aux réfugié-es. De plus, il veut permettre aux habitants du monde rural d’avoir une vision positive de la migration et de revitaliser ces territoires. »
(http://batik-international.org/projets/insertion-socio-economique - à lire : « A la ferme, les vacances occupées des réfugiés », magazine Village, février 2023)

* Besoin de main d'œuvre immigrée en Italie

Un éleveur italien cherche cinq saisonniers, mais sait qu’il ne les trouvera que très difficilement. Il espère l’arrivée de cinq travailleurs marocains qui se chargeront de l’irrigation des champs. Pour l’éleveur, il est temps que le gouvernement d’extrême droite revoie à la hausse ses quotas d’immigration pour la main d’œuvre qualifiée. L’an dernier, faute d’avoir pu en engager, son équipe et lui ont dû assurer le travail en trimant 15 heures par jour. Le patron d’une usine de chauffage fait la même demande : seule l’immigration permettra de contrebalancer l’hiver démographique italien, avec de plus en plus de travailleurs qui partent à la retraite. Rien qu’en Vénétie, dit-il, les entreprises ont besoin de 146.000 ouvriers. Or, la loi actuelle ne prévoyait que 11.000 personnes pour notre région en 2022. Il faut ouvrir des voies d’immigration légale. Le Ministre italien de l’agriculture a dû admettre la nécessité d’ouvrir plus grandes les portes de son pays, en accueillant jusqu'à 500.000 personnes les deux prochaines années.
(Journal Arte 28.3.2023 - https://www.arte.tv/fr/videos/114279-000-A/italie-la-politique-anti-immigration-remise-en-cause)

* Riace

Le village calabrais de Riace s'est donné pour surnom "pays de l'accueil". Ici cohabitent Italiens, Kurdes, Erythréens, Afghans... Un reportage au JT de France 2 nous apprend que le maire de ce petit village lutte à sa manière à la fois contre l'exode rural et pour l'accueil de réfugiés. Ceux-ci sont logés par la commune et reçoivent en outre une aide financière. Plusieurs d'entre eux ont ouvert des ateliers d'artisanat. Interrogé, un villageois originaire du village considère qu'il n'est que normal d'accueillir des gens qui ont dû fuir leur pays parce qu'ils y étaient en danger. Les réfugiés sont une chance pour nos villages qui se vidaient, dit le maire...
(https://moeursethumeurs.blogspot.com/2007/10/le-pays-de-laccueil.html - 12.10.2007)


vendredi 14 avril 2023

Jeûner ou jouer, il faut choisir

C'est le Printemps républicain qui nous l'apprend (1) : des footballeurs musulmans demandent que soient interrompus les matchs joués en début de soirée pour leur permettre de rompre le jeûne du ramadan. "Portée depuis quelques jours dans l’espace médiatique, cette revendication tourne au procès en « islamophobie » contre la France, comme ce fut le cas dernièrement avec le burkini à Grenoble, les abayas dans les collèges ou le hidjab, à nouveau, sur les terrains de foot."
Bref, c'est à  nouveau à la société de s'adapter à la religion, nous disent ces croyants, et non l'inverse. C'est le grand bond en arrière, à l'époque où la religion faisait de ses règles la loi publique.

"La Fédération Française de Football, invoquant l’article 1er de son règlement et en appelant à la « laïcité », a rappelé aux clubs et aux arbitres que toute expression religieuse est interdite dans le cadre sportif. Faux, rétorquent les vigies : la laïcité ne s’applique qu’à des services publics, pas à des joueurs."
Que dit le droit ? "Il a été avancé que les footballeurs n’étant pas des agents publics, c’est à tort que la laïcité a été invoquée. C’est exact, du moins si l’on rabat la laïcité sur le critère de neutralité des services publics. Mais n’est-ce pas restreindre à l’excès la portée du principe ? Rappelons qu’au terme de la Constitution, c’est la République qui est laïque, et pas uniquement les collectivités publiques. Mais alors, qu’est-ce que cela veut dire pour les « simples » particuliers que sont les joueurs de foot ? Eh bien, s’ils ne relèvent pas de la loi de 1905, on peut tout à fait les rattacher au régime juridique de la neutralité en entreprise, puisque nous sommes bien dans un cadre de droit privé.
Longtemps contestée, la neutralité en entreprise est désormais bien identifiée par le droit national et, chose importante mais méconnue, par le droit européen. C’est la célèbre « affaire Babyloup », du nom de cette crèche imposant la neutralité de ses personnels au nom de la laïcité et des valeurs féministes et universalistes, qui a donné l’occasion à la Cour de cassation de confirmer la possibilité, pour une entreprise ou une association, de restreindre la liberté religieuse de ses salariés." (1)

De toute façon, si chacun commence à appliquer les règles qu'il veut bien se laisser imposer par ses croyances, plus personne ne jouera une compétition avec les mêmes règles.
"Le règlement de la FFF prévoit explicitement la neutralité des compétitions. Il ne saurait donc être question d’exprimer son appartenance religieuse pendant un match – règle qui, au demeurant, est appliquée avec une certaine souplesse d’ores et déjà… Si on veut aller plus loin et changer la règle, pourquoi pas ? Mais il y a des procédures pour cela. Et il faudra, au passage, convaincre toute la communauté sportive qu’il faut changer la loi pour satisfaire à la revendication d’une minorité, ou plus précisément la revendication d’une minorité d’une minorité. Et s’apprêter à ce que d’autres revendications particulières surgissent." (1)

Au-delà des règles, est-il indiqué de jouer un match de football professionnel - ou de travailler sur un chantier - quand on ne mange ni ne boit ? Le Monde explique  (2) que les jours de match, le coach du FC Nantes a fixé comme condition de s’alimenter et de boire pour pouvoir être retenu dans l'équipe. Selon le docteur Philippe Kuentz qui a travaillé à l'AS Monaco, « le jeûne faisait chaque année l’objet d’une réflexion globale avec le staff ». « Ce qui nous inquiète le plus, c’est la déshydratation », souligne-t-il en citant aussi « l’augmentation du risque de blessure musculaire » et « la performance altérée », qui sont documentées dans la littérature scientifique. « Ça dépend de pleins de conditions et c’est au cas par cas. »
L’entraîneur Pascal Dupraz raconte qu'à l’AS Saint-Etienne, lors du premier jour du ramadan en 2022, l'équipe avait, sur la feuille de match, 13 joueurs sur 20 de confession musulmane qui respectaient le jeûne. Mais à la mi-temps, cinq d'entre eux ont demandé à être être remplacés "parce qu’ils étaient cuits… »

La demande d'interruption de compétitions sportives pour cause de rupture de jeûne n'est qu'un moyen de plus pour des organisations du type Frères musulmans de marquer de manière très visible leur capacité à imposer leurs règles dans la société. Il y a un mot pour cela : orthopraxie. 
Selon Wikipedia, "l'orthopraxie est l'accomplissement d'une action, l'exécution d'un geste, la conduite d'une affaire, une praxis (au sens du grec ancien πρᾶξις) menée avec justesse ou rectitude, selon le droit et la justice (au sens du grec ancien ὀρϑός). Dans le domaine moral ou religieux, l'orthopraxie se réfère à une conduite conforme aux rites traditionnellement construits", ces rites primant sur la loi publique.
Dans nos sociétés, l'orthopraxie chrétienne a été remise à sa place depuis un bon moment, après des siècles de lutte. Et voilà que l'orthopraxie musulmane veut prendre sa place.

(1) Communiqué du 7.4.2023, "Le ramadan, les deux neutralités et l’éthique sportive".
(2) https://www.lemonde.fr/sport/article/2023/04/08/ramadan-le-jeune-un-enjeu-complexe-pour-les-footballeurs-entre-convictions-religieuses-et-devoir-de-performance_6168810_3242.html


dimanche 9 avril 2023

La solitude du tyran

Vladimir Poutine est un homme seul. Un homme qui s'est isolé, ne consulte que quelques rares personnes, n'utilise ni téléphone mobile, ni Internet et ne suit que la télévision d'Etat.
Un officier russe réfugié à l'étranger, ancien membre de son service de sécurité, considère Poutine comme "un criminel de guerre" qui vit la plupart du temps dans ses résidences, notamment dans son palais tsariste de 18.000 mètres carrés (1). Craignant "de manière pathologique pour sa vie", il se déplace dans un train blindé. L'ancien officier le voit "déconnecté du monde", vivant "dans un cocon informationnel" depuis quelques années. "Il n'utilise réellement ni Internet ni le téléphone". Dès lors, toutes les informations dont il dispose ne proviennent que de ses proches, des gens qui l'idolâtrent.
Combien de rois et de présidents sont tombés de leur trône pour n'avoir écouté que leurs courtisans ? Par définition, un courtisan courtise. Loin de lui l'idée d'être sincère ou critique. Et celui qui l'écoute a fatalement tort. C'est ce qui visiblement arrive au tsar stalinien et explique le cuisant échec de sa guerre qu'il pensait éclair.

Mercredi dernier, dix-sept nouveaux ambassadeurs étrangers en Russie (notamment des Etats-Unis, du Danemark, du Paraguay, de Norvège, de Syrie, d'Oman, de Guinée équatoriale, du Honduras, du Mexique, du Zimbabwe, etc.) étaient conviés à une cérémonie d’accueil au Kremlin. Vladimir Poutine leur a affirmé que la Russie était "ouverte à un partenariat constructif avec tous les pays sans exception". A ces fadaises, les dix-sept ambassadeurs ont répondu par un lourd silence. Aucun applaudissement à la fin du discours du tsar, juste un froid polaire. Poutine, avec un sourire qui avait tout d'un rictus, a essayé de détendre l'atmosphère regrettant que les circonstances sanitaires empêchent des rencontres en face-à-face, mais le silence est resté aussi plombant. Et aussi parlant. La vidéo vaut la peine d'être vue (2). Un grand moment de solitude.

(1) https://www.lemonde.fr/international/video/2023/04/08/un-officier-russe-raconte-ce-qu-il-a-vu-de-vladimir-poutine_6168799_3210.html
https://www.lalibre.be/international/europe/guerre-ukraine-russie/2023/04/05/vide-informationnel-paranoia-un-ancien-officier-russe-en-exil-livre-des-details-sur-la-vie-de-poutine-6S7EVNTX2VADVBC4MGUVUSI3RQ/
(2) https://www.lalibre.be/international/europe/2023/04/06/moment-de-malaise-au-kremlin-apres-un-discours-de-vladimir-poutine-video-UOJM3Y3RE5BL7E6Y32YTCHEOS4/


mardi 4 avril 2023

Machine arriérée

Le parti présidentiel en France s'appelait En Marche. Il s'appelle à présent Renaissance. Qu'est-ce qui est en marche, qu'est-ce qui renait, sinon le vieux système ? Celui-là même qui a détruit la planète et nous a envoyés dans le mur.
Le Ministre de l'Agriculture défend les pesticides. Selon Le Monde (1), il a demandé à l’Agence nationale de sécurité sanitaire des aliments, de l’environnement et du travail (l'Anses) de revenir sur l’interdiction, décidée par celle-ci, d’un herbicide majeur, le S-métolachlore, responsable d’une pollution quasi généralisée des nappes phréatiques. Cet herbicide, très utilisé sur le maïs, le tournesol et le soja, pollue les eaux souterraines et l’eau de distribution. "En 2021, selon les chiffres officiels, près de 3,5 millions de Français ont reçu au robinet une eau non conforme aux critères de qualité alors en vigueur, pour cause de présence d’un métabolite de ce pesticide au-delà du seuil réglementaire de 0,1 microgramme par litre." Le S-métolachlore est classé cancérogène suspecté. 
De son côté, le Secrétaire d'Etat à la Mer est fier d'annoncer que, grâce à son intervention, la Commission européenne a renoncé à son plan : le chalutage de fond dans les aires marines protégées ne sera finalement pas interdit d’ici à 2030. "La mesure, explique Le Monde (2) visait à protéger poissons, coquillages et crustacés mais aussi des tortues et oiseaux marins menacés par l’usage d’engins de fond mobiles (chaluts, dragues, palangres, casiers…), dans des aires qui devraient couvrir jusqu’à 30 % des eaux européennes en 2030. Bruxelles dénonçait une pêche très gourmande en carburant et forte émettrice de CO2, qui, en raclant les fonds, détruit des écosystèmes constituant eux-mêmes des puits de carbone, fragilise les populations de poissons qui s’y abritent et s’y reproduisent, et favorise des prises accidentelles « disproportionnées » faute de sélectivité. La Commission demandait alors aux Etats membres de prévoir d’adopter des mesures pour « éliminer progressivement » cette pêche controversée." Mais les pêcheurs français n'en voulaient pas (au point de brûler quantité de pneus devant l'Office français de la biodiversité à Brest - tout un symbole !) et le gouvernement leur a donné raison.
Quant au président Macron, tout en nous invitant à économiser l'eau, il relance la filière nucléaire, grande consommatrice d'eau.
Quelques exemples parmi beaucoup (trop) d'autres. Avec Renaissance, c'est machine arrière et même arriérée. 

Ceux qui se battent pour des mesures de protection de l'environnement et de la biodiversité et de lutte contre le réchauffement climatique sont aujourd'hui taxés d'écoterroristes. 
Comment qualifier ceux qui font vivre  ce vieux système nuisible à la vie et participent activement à l'augmentation de ce réchauffement ? Agroterroristes ? Conservatoterroristes ? Capitaloterroristes ? Cynicoterroristes ?

"J'ai compris (...) que nous nous trouvions précisément au point tournant d'une époque. La preuve, on déployait maintenant l'énergie du désespoir pour salir la lutte écologiste, accusant les citoyens mobilisés d'encenser ces voyous, ces terroristes environnementaux."
Gabrielle Filteau-Chiba, "Bivouac", Stock, 2023.

(1) https://www.lemonde.fr/planete/article/2023/03/31/pesticides-la-volonte-du-ministre-de-l-agriculture-de-revenir-sur-l-interdiction-du-s-metolachlore-suscite-un-tolle_6167798_3244.html
(2) https://www.lemonde.fr/economie/article/2023/04/03/chalutage-de-fond-les-pecheurs-francais-ont-gagne-a-bruxelles-la-technique-est-maintenue_6168040_3234.html

samedi 1 avril 2023

Le bas-parleur

Il a tout du patron d'un bar poisseux, de ces troquets où l'on parle - jusqu'à plus soif (mais ça n'arrive jamais) - de tout et de rien. Où personne ne connaît rien à rien mais où tout le monde est expert en n'importe quoi et se doit d'avoir un avis tranché sur tout, en particulier sur ce qui paraît scandaleux ou incroyable. On n'y refait pas le monde, on le défait un peu plus. TPMP, ce n'est pas le café philo, c'est le café toxico. Tous les complotistes de France y ont leur tabouret au comptoir. Touche pas à mon poste n'est pas un salon où l'on cause mais un bouge où se diffusent rumeurs, bêtises, blagues sexistes et racistes, attaques personnelles, fausses informations.
Récemment, Cyril Hanouna recevait un homme, dont le nom importe peu, ancien dealer reconverti dans les théories complotistes, qui ne l'a pas déçu : « L’adrénochrome, c’est du sang d’enfant. Céline Dion, elle en prend », a-t-il déclaré, avant de charger une série d'autres personnalités. Hanouna confirme  les délires de son invité parti en vrille : "Mais en tout cas c’est une pratique, ça existe et ça, il a raison de le dire, il a raison de le dire". Réaction de Sophia Aram dans sa chronique du 13 mars sur France Inter (1) : "Oui c’est ça, il confirme. C’est d’ailleurs un peu le problème quand on attend d’un décérébré qu’il régule un autre décérébré, c’est un peu comme nettoyer du vomi avec du vomi, ça marche moyen moins."
L'humoriste en arrive cependant à prendre la défense de Cyril Hanouna : " Si, si, j’en suis là… Parce qu’après avoir mis des nouilles dans le slip d’un de ses employés, organisé des canulards homophobes et sexistes, alimenté un mouvement factieux en jaune fluo, laissé libre antenne à tous les antivax en période de pandémie, dessiné une cible sur Mila ou sur Charlie, privilégié l’exposition d’un candidat raciste pendant la campagne présidentielle, sacrifié les droits de la défense sur l’autel d’une justice expiatoire, insulté un député pour lui interdire de parler de Bolloré… Si personne ne l’arrête, à un moment ce n’est plus de sa faute. Depuis le temps qu’il promeut le sale et popularise le pire, s’il y a encore des artistes, des auteurs, des journalistes, ou des annonceurs pour aller vendre leur soupe dans ce cloaque, ce n’est plus de sa faute. S’il y a autant de responsables politiques pour continuer de légitimer ce crétin en participant à ses émissions, ce n’est plus de sa faute. (...) Franchement, tant que nous serons aussi peu nombreux à prendre nos responsabilités, Cyril Hanouna a raison de s’en tamponner le coquillard comme de son premier 4X4 et de continuer à faire dans le poste jusqu’à ce que celui-ci déborde et que la horde de complotistes finisse par peser vraiment dans le jeu démocratique."

Dans TPMP, un des passe-temps favoris des habitués est de critiquer les autres et le patron n'est pas le dernier. Mais qu'on ne se mêle pas de le critiquer, lui, parce qu'alors il distille un peu plus son fiel. Hanouna adore faire parler de lui mais ne supporte pas qu'on donne des coups de pied sur son trône de bouffon. Que trouve-t-il à répondre à Sophia Aram ? "Occupe-toi de ta maman, ma chérie » (...) « Khadija Aram, condamnée à deux ans de prison dont six mois ferme… Pourquoi ? »  (...) « Elle est accusée d’avoir berné des personnes en situation irrégulière en leur faisant miroiter des titres de séjour alors qu’elle était adjointe au maire de Trappes. Pas beau ça… » (...) « Sophia, t’as déjà du boulot avec ta famille, lâche-nous ! ». (2) C'est tout ce qu'il a trouvé à répliquer. Ça s'appelle être à court d'arguments et donner raison à ses détracteurs.
Dans sa chronique suivante (3), Sophia Aram s'est livrée, émue et émouvante. "Eh bien, à tous ceux qui me rabâche que ma mère mériterait de passer le reste de ses jours en prison : j’aimerais leur dire que je suis d'accord avec eux  ! (...) Comme tous les enfants ayant eu un parent délinquant ou maltraitant – et ma mère était les deux – c’est un point de vue assez fréquent. Alors pourquoi ne l’avoir jamais dit ? Parce que comme tout enfant d’une mère délinquante et maltraitante, j'avais honte. C’est idiot hein… Mais voilà, ça fait près de cinquante ans que j’ai honte." Hanouna et ses basses attaques, dit-elle, lui donnent "l’occasion pour décider de me débarrasser de la culpabilité d'avoir eu une mère délinquante et maltraitante. Attention, j’ai toujours pensé que personne n'est responsable des actes de ses parents et que la seule chose que l’on peut reprocher à quelqu’un, c'est de reprendre à son compte l'héritage moisi de ses parents. (...) Et pourtant ça fait douze ans qu’après chaque chronique sur l’extrême droite, l’extrême gauche, les antivax, les gilets jaunes, les complotistes, les fans de Morandini, de Raoult, de Zemmour ou d’Hanouna, on me remet le nez dans cette culpabilité. Et ça fait douze ans que je me tais. (...) Mais voilà, maintenant c’est fini." L'attaque d'Hanouna ne parle pas d'elle, mais de lui : "(Elle) dit tout de lui, de sa violence, de l’importance qu’il porte à l’hérédité et au sang, comme porteur d’indignité, d’ignominie ou de déclassement… Mais toujours rien de moi. Alors, si je n’ai jamais laissé ma mère faire de moi une victime, ce n’est pas pour laisser ce crétin et sa meute faire de moi leur victime. Parce qu’au fond de moi, je sais maintenant que je n’ai plus honte."

Ils ont l'air d'être heureux ces gens, ils rient tout le temps
Leurs visages semblent n'être faits que pour l'écran
Ils causent de choses qu'on ne verra jamais ici
Ils ont des bouches qui parlent plus vite qu'il n'est permis
Comme s'ils n'existaient pas vraiment
Dehors on n'entend plus un bruit
Tous les bruits sont pris par l'écran
Où dire compte plus que ce qu'on dit
Nous avons reçu des nouvelles du monde lointain
Puis comme l'écran nous fatiguait on l'a éteint
Dominique A, "Nouvelles du Monde Lointain"

Ou, ultime recours, mesurant que la personne avec laquelle il dispute lui est exceptionnellement supérieure, lui imputer des choses fausses, sordides de préférence, et l'attaquer perfidement en ce qu'elle a de plus intime par des sous-entendus allusifs ou des insinuations grossières. Rien de tel pour réduire votre adversaire au silence du désespoir et triompher de lui, un pied sur sa poitrine (Schopenhauer, stratagème XXXVII).
(...)
Il appelle ses protégés : ses petits ; les fait jouer les uns contre les autres (ça le distrait) ; leur fait miroiter un avenir de luxe et raque ce qu'il faut pour faire leur promo. 
Ceux-ci, victimes de son vice mais craignant de paraître ingrats, le remboursent en louanges mais le détestent en secret.
Lydie Salvayre, "Irréfutable essai de successologie" (Seuil, 2023), extrait du chapitre "L'homme influent".

(1) https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/le-billet-de-sophia-aram/le-billet-de-sophia-aram-du-lundi-13-mars-2023-4567222
https://www.huffingtonpost.fr/medias/article/tpmp-sophia-aram-charge-hanouna-avec-ironie_215180.html
(2) https://www.huffingtonpost.fr/divertissement/article/tpmp-cyril-hanouna-charge-sophia-aram-en-reponse-a-sa-chronique_215197.html
(3) https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/le-billet-de-sophia-aram/le-billet-de-sophia-aram-du-lundi-20-mars-2023-2644432
A lire : le portrait de Sophia Aram dans Le Monde
https://www.lemonde.fr/m-perso/article/2023/03/24/un-apero-avec-sophia-aram-je-suis-de-moins-en-moins-drole-mais-je-m-en-fous_6166871_4497916.html