vendredi 28 juin 2019

Maintenant ou jamais

On va enfin savoir si l'homme est définitivement un imbécile suicidaire ou si son intelligence lui indiquera la voie à suivre. Celle d'un changement de mode de vie radical.
Une bonne partie de l'Europe étouffe plus que jamais. Et le pire est devant nous. Le réchauffement climatique et son cortège de perturbations graves de l'environnement et de la santé humaine ne peuvent plus être contestés que par d'égoïstes autruches.
Que faire maintenant sinon modifier totalement nos façons de produire, de consommer, de nous déplacer? 
Il revient bien sûr aux politiques de prendre des mesures fortes. Mais aussi aux consommateurs d'agir d'abord en citoyens. De cesser d'acheter des produits qui viennent de l'autre bout de la planète, de ne prendre notre voiture qu'en cas de vraie nécessité, de cesser de prendre l'avion comme on change de chemise. Toutes ces mesures et bien d'autres aptes à freiner le dérèglement climatique sont connues depuis longtemps, mais nous obligent à vivre autrement. 
Nous n'avons pas le choix, nous le savons. Mais serons-nous capables de remettre en question notre confort? Serons-nous capables d'être pratiquement intelligents?


mercredi 26 juin 2019

Vue imprenable

L'homme a de la suite dans les idées. On peut même dire qu'il est opiniâtre. En 1970 déjà, il avait muni des vaches d'un hublot qui permettait de contrôler directement l'efficacité de leur régime alimentaire sur leur production de viande (1). Après tout, à quoi peut bien servir une vache sinon à être transformée en steak ou à produire du lait? D'où l'importance de surveiller au plus près le fonctionnement de son système digestif et sa capacité à produire de la viande et donc de l'argent. Cette usine à quatre pattes doit assurer le plus rapidement possible un rendement maximum. Il n'est donc que normal qu'on perce un trou dans la panse des bovins à travers lequel on peut déposer des aliments ou effectuer des prélèvements. La pratique de la fenêtre sur estomac s'est répandue aujourd'hui encore et vient d'être dénoncée par l'association L214 (2). Mais, qu'on se rassure, elle n'est qu'expérimentale. La secrétaire d'Etat à la transition écologique, Brune Poirson, trouve cette pratique "choquante mais utile". Vendre des armes est choquant aussi, mais tellement utile. On voit par là qu'il ne faut pas se laisser choquer. Il faut toujours penser utile. La canicule actuelle peut nous choquer. Mais n'oublions pas qu'elle est utile à la vente de systèmes de climatisation et de piscines.
Résumons-nous: cinquante plus tard, l'homme reste un apprenti sorcier sans foi ni loi.

Pétition sur
https://www.mesopinions.com/petition/animaux/condamnation-crime-contre-humanite-poseurs-hublots/23652

(1) https://www.youtube.com/watch?v=CpMh_4bODA8
(2) http://www.leparisien.fr/societe/vaches-a-hublots-choquant-mais-utile-defend-brune-poirson-21-06-2019-8099757.php

jeudi 20 juin 2019

La haine dans le sang

On l'entend régulièrement, ce bruit de haussement d'épaules. On entend de plus en plus dire que puisque les gens sont cons, il faut les laisser tester la connerie, en politique aussi. Et donc qu'il faudrait laisser l'extrême droite accéder au pouvoir, cesser de vouloir à toute force lui faire barrage. Ceux qui l'affirment pensent que, puisque de très nombreux électeurs veulent voir l'extrême droite au pouvoir, il faut qu'ils la subissent, qu'ils en voient les effets et qu'ils en reviendront rapidement. Parce qu'elle fera vite la preuve de son incapacité à gouverner, de son extrême bêtise et prouvera qu'elle mène en bateau ses électeurs. Il est vrai qu'en Autriche l'extrême droite a très vite trébuché, son leader s'étant vu contraint de démissionner de son poste de vice-chancelier suite à la diffusion d'une vidéo où il apparaissait prêt à refiler des contrats publics à un soi disant oligarque russe contre un financement de son parti. Voilà un parti nationaliste qui l'est bien peu, plus soucieux de lui-même que de son pays. On peut cependant douter qu'un tel scandale éloigne la majorité des électeurs d'extrême droite, prêts à croire toutes les théories du complot et à accepter les pires attitudes de la part de leurs hérauts.
Le problème, c'est que le succès de l'extrême droite va de pair avec celui de la haine. C'est que partout où elle avance elle fait reculer les libertés individuelles. Et ouvre les vannes de l'abomination.
Dans divers pays, l'arrivée au pouvoir ou simplement le succès électoral de l'extrême droite ou des populistes a entraîné une augmentation des propos et des actes racistes, antisémites, homophobes, sexistes et on en passe. La voie est libre pour toutes les haines.
A Alost, en Belgique, où le Vlaams Blok-Belang a triomphé aux dernières élections, des étrangers ont trouvé dans leur boîte une lettre éructante de haine et de racisme, les invitant à "fuir" (1).
En Allemagne, c'est pire: un élu local de la CDU qui avait défendu la politique d'Angela Merkel d'accueil des migrants a été assassiné. Ce meurtre a été salué sur les réseaux dits sociaux, certains regrettant n'avoir pas pu commettre eux-mêmes cet assassinat, d'autres se félicitant de la mort d'un "traître" (2).
Il ne faut laisser le moindre espace à l'extrême droite. Elle a la haine dans son ADN. L'Histoire nous l'a montré. L'actualité nous le démontre.

(1) https://www.lalibre.be/actu/politique-belge/courrier-a-caractere-raciste-a-alost-voici-l-integralite-de-la-lettre-scandaleuse-5cf8e3599978e27796e49d2c
(2)  https://www.levif.be/actualite/international/allemagne-le-meurtre-d-un-elu-pro-refugies-salue-sur-les-reseaux-sociaux/article-news-1151335.html

jeudi 13 juin 2019

Histoires romantiques

Les pesticides sont partout. Même là où on ne les attend pas. On a beau manger le plus sainement possible, vivre dans un environnement qui semble encore assez naturel, on en ingère tous les jours à notre insu.
En Indre, soixante-neuf personnes, de trente à quatre-vingts ans, ont fait analyser leurs urines. Et les résultats sont inquiétants: tous sont contaminés au glyphosate. Alors que le taux maximal de glyphosate autorisé dans l'eau potable est de 0,1 ng/ml, on constate des taux moyens de 0,809 ng chez les femmes (avec des taux qui atteignent 2,274) et de 0,868 ng chez les hommes (taux maximal: 2,190). Le collectif "Campagne glyphosate 36", à l'origine de ces tests, compte déposer plainte pour atteinte à l'environnement, tromperie aggravée et mise en danger de la vie d'autrui contre les fabricants de glyphosate, l'Union européenne et l'institut allemand de l'évaluation des risques qui a autorisé la mise sur le marché de l'herbicide (1).

En Bretagne, un maire a pris des mesures pout tenter de minimiser l'impact des pesticides sur sa population: il a interdit les épandages à moins de 150 mètres de toute parcelle comprenant une habitation. Cette mesure qu'on peut considérer comme légère et simplement logique est jugée excessive par la préfète d'Ille-et-Vilaine qui considère que le maire de Langouët n'a tout simplement pas le droit de prendre une telle décision. Elle lui demande de retirer son arrêté, considérant que les circonstances particulières locales ou le cas de péril imminent ne sont pas avérés (2).

Faudra-t-il attendre des drames comme en connaît quotidiennement le Paraguay pour que les maires puissent enfin agir? Là-bas, les habitants ne comptent pas, moins, beaucoup moins en tout cas que les intérêts économiques de l'agro-industrie. Coincés au milieu de milliers d'hectares de soja arrosés de pesticides par d'immenses tracteurs et des avions, ils développent - leurs enfants surtout - de nombreuses maladies. Certains en meurent. Dans le documentaire "Vert de rage" (3), un homme raconte la mort de ses deux fillettes de six mois et trois ans, à quelques heures d'intervalle, après vingt-quatre heures non stop d'épandage. "Nous sommes les oubliés du pays", déplore une femme dont le fils souffre de crises incessantes de toux et de diarrhée. Une autre a une fille qui souffre d'hydrocéphalie. "Les malformations congénitales constituent la deuxième cause de mortalité néonatale", constate une pédiatre. Une étude a démontré que 46% de l'ADN d'enfants exposés directement aux pesticides sont endommagés.
La production de soja transgénique a explosé au Paraguay depuis vingt ans et s'étend maintenant sur cinq millions d'hectares. La quasi totalité est destinée à l'exportation, un tiers vers l'Europe. La vie des habitants de ce qui reste de campagne ne vaut rien face à la valeur du soja: plus de trois cents dollars la tonne. Et ce n'est pas le ministre de l'Agriculture qui les défendra: "il s'agit d'économie, pas de romantisme", se borne dit-il à déclarer. Se soucier de la vie humaine serait donc romantique. Comment qualifier le souci de l'économie? De cynique? D'assassin?




(1) "Les soupçons se confirment: tous contaminés au glyphosate", L'Echo - La Marseillaise, 7.6.2019.
(2) https://www.ouest-france.fr/bretagne/langouet-35630/langouet-l-arrete-contre-les-pesticides-considere-comme-illegal-6392181
(3) "Vert de rage", diffusé sur France 5, le 5.6.2019 à 20h55 - "Les horreurs de l'or vert", Etienne Labrunie, Télérama, 29.5.2019.

mardi 11 juin 2019

Autocensure

Ce silence-là fait à peine du bruit. Le New York Times, l'un des plus grands quotidiens au monde, vient de décider de ne plus publier de dessin de presse dans son édition internationale, alors qu'il n'y en a déjà plus depuis longtemps dans son édition nationale. C'est qu'un dessin récent a été jugé antisémite: on y voit un Donald Trump aveugle coiffé d'une kippa tenir en laisse un Benjamin Netanyahu représenté en chien avec une étoile de David accrochée à son collier. C'est ce qu'on appelle une caricature. Et comme toute caricature, elle évoque une situation réelle, souvent pire, bien pire que ce que le dessin montre. On pense à "Ceci n'est pas une pipe" de Magritte. Le dessin n'est qu'un dessin. Il caricature une réalité. Qui est autre chose. Le président américain, incapable de voir quoi que ce soit, se laisse mener par le premier ministre israélien. On a le droit de le penser. Et même de le dire. En quoi ce dessin est-il antisémite? On ne sait, mais peu importe. Le dessin a déplu à certains, les reproches ont plu et le le responsable d'édition a été sanctionné. Les réseaux dits sociaux font la loi. Et interdisent qu'on se moque de leur camp ou de leurs héros. Car se moquer, c'est "méchant", comme pourrait dire le Donald. Dès lors, plus question de choquer qui que ce soit. Voici venu le temps des Tartuffe imprécateurs, des indignés moralisateurs qui hurlent à la moindre critique. Si un journal de la taille du NYT s'écrase devant "une foule en colère", selon l'expression de Patrick Chappatte, dessinateur vedette du quotidien, on peut sérieusement s'inquiéter pour la liberté d'expression et d'opinion. D'ailleurs, ça fait un bon moment qu'on s'inquiète. Après le dessin, les mots? 

vendredi 7 juin 2019

Un coq qui manque de savoir vivre

L'extinction des espèces s'opère à un rythme trop lent. La nature est trop bruyante. Elle empêche l'homme civilisé de dormir. L'homme civilisé est épuisé par sa vie trépidante. Il a besoin de récupérer. Mais la nature l'en empêche.
Sur l'île d'Oléron, un coq a la mauvaise idée de chanter dès le matin. Et même avant. Ce qui réveille un couple de retraités qui s'en plaint. Maurice - c'est le nom du coq - fait ce qu'ont fait avant lui tous ses aïeux: annoncer le lever du jour. Mais ses voisins civilisés n'ont pas besoin de son chant qu'ils trouvent peu mélodieux: ils ont un radio-réveil qui leur propose de la musique de variétés et même de la musique classique. Ils souhaitent donc que Maurice passe à la casserole ou en tout cas aille chanter ailleurs sans plus les importuner. Il suffirait qu'il cesse de chanter. Ce que ne peut un instant imaginer Maurice qui déprime: enfermé toute la nuit dans une cabane, il ne peut en sortir qu'à 8h30. Mais Maurice n'est heureusement pas seul. Il reçoit beaucoup de soutien d'élus et d'habitants soucieux de préserver le caractère du monde rural avec son lot de cocoricos, de sonneries de cloches, de coassements de grenouilles, de chants d'oiseaux, de meuglements de vaches et de rouspétances des voisins civilisés.

https://www.lemonde.fr/societe/article/2019/06/07/maurice-le-coq-chanteur-devenu-le-symbole-d-une-ruralite-menacee_5472718_3224.html

samedi 1 juin 2019

Echec des copies

En politique, les copies ne séduisent pas.
Aux élections européennes en France, le parti Les Républicains a été sèchement battu, réduit à huit petits pour cent. Son président Laurent Wauquiez est aujourd'hui contesté au sein de son parti. Ses positions trop souvent proches de celles du RN-ex-FN ne lui ont pas permis de faire la différence. Nicolas Dupont-Aignan non plus n'a pas convaincu. Pour les électeurs, c'est le parti de la famille Le Pen qui est le seul à porter le gène de l'extrême droite, de la réaction, de l'anti-européanisme et de la grogne.
De son côté, Europe Ecologie Les Verts a été préféré à d'autres (Place publique - PS - Nouvelle Donne, La France Insoumise, la liste de Benoît Hamon), apparaissant comme le parti véritablement porteur du combat écologiste.
A courir derrière l'original, certains se voient aujourd'hui considérés comme de pâles copies.

Les électeurs du Rassemblement national ont d'ailleurs bien compris que leur parti restait d'extrême droite et ne sont pas dupes de l'affirmation de dédiabolisation du parti. Le RN reste le FN. Seuls quelques journalistes bienveillants se plaisent à tomber dans le panneau. Pour constituer un groupe puissant au Parlement européen, Marine Le Pen drague tous azimuts tout ce qui ressemble à l'extrême droite. Les identitaires lui plaisent beaucoup. Par exemple, le parti d'extrême droite Ekre, troisième parti d'Estonie. On peut la voir sur une photo avec un député de ce parti qui fait de la main le signe des suprémacistes blancs américains. Cet élu ne jure que par la race blanche, supérieure à toutes les autres. Mais en son sein il est convaincu de la suprématie des peuples finno-ougriens: les Estoniens, les Finnois, les Hongrois et quelques peuples scandinaves (1). Peu importe pour la fille à papa de ne pas appartenir à la race qui doit diriger le monde, elle considère que Ekre est un parti "responsable".  Elle en veut pour preuve que ce parti est membre du gouvernement. S'il suffit d'être dans un gouvernement pour être responsable, alors Salvini, Orban, Trump, Poutine, Kim Jong-un, Bolsonaro, les barbus iraniens, Assad et tous les dictateurs de la planète sont autant de gens responsables et estimables.  

(1) Jean-Yves Camus, "Marine Le Pen et les suprémacistes responsables", Charlie Hebdo, 22.5.2019.