jeudi 20 décembre 2018

C'est pas moi, c'est l'autre

Les petites et moyennes villes se vident de leurs commerces. C'est la faute à Macron. Il y a moins de bus. C'est la faute à Macron. Les jeunes quittent les campagnes. C'est la faute à Macron.
Quand ont été construits les premiers centres commerciaux à la périphérie des villes? Il y a quarante ans? Une époque qui a vu naître l'actuel président de la République. C'est donc bien de sa faute. En réalité, ce ne sont même pas les gouvernements successifs qui ont accordé les permis. Ce sont les maires. Si tant de centres-villes se voient en perte de commerce de proximité, c'est à leurs conseils municipaux qu'ils le doivent. Les responsables communaux se sont réjouis des créations d'emplois qu'offraient les supermarchés, sans souci du sort des petits commerçants. Et les syndicats les ont ardemment soutenus, se réjouissant de la perspective d'engranger de nouvelles affiliations. Ils ont toujours préféré les grandes surfaces avec leurs salariés aux petits commerces tenus par des indépendants. Les citoyens, eux, ont vite apprécié les immenses parkings gratuits des zones commerciales et se sont transformés en consommateurs béats. Avant de se rendre compte bien plus tard que leurs villes se sont vidées, avec leur collaboration. Heureusement, ils ont un président qu'ils peuvent accuser de toutes les responsabilités. C'est pratique, un président.

Combien de ruraux n'ont-ils pas pris l'habitude de faire tous leurs achats au supermarché du coin? Ils ne vont pas chez le boucher ou le boulanger du village ou du bourg. Mais ils déplorent que tous les petits commerces ferment. Récemment, une commerçante, au bord de la faillite, avait lancé un apppel au secours. Elle avait reçu, sur les réseaux dits sociaux, des milliers de soutiens de gens indignés qui exigeaient qu'on défende ardemment le commerce de proximité. La commerçante avait apprécié, mais, avait-elle souligné, elle n'avait pas vu un client de plus. Elle a fermé boutique.
Combien de gens qui déplorent la mort du petit commerce achètent sur Internet? Combien de gens qui se plaignent de l'invasion des voitures dans les centres-villes n'envisagent pas d'y venir en bus ou à vélo? Ou n'y vont tout simplement plus parce que les centres commerciaux permettent d'éviter de marcher?

Les Gilets jaunes, à leur corps défendant diront-ils, font les affaires d'Amazon. Faute de pouvoir faire leurs courses, les consommateurs n'ont jamais autant acheté sur Internet. Les colis leur sont apportés par de petits camionneurs d'Europe de l'est, aux conditions de travail et de salaire inacceptables. Beaucoup de commerçants expriment aujourd'hui une grande inquiétude face à la perte de très nombreux clients ces dernières semaines, suite aux nombreux blocages. Amazon, de son côté, n'arrive plus à les compter.
La crise profite bien à Amazon qui engrange des bénéfices faramineux et évite autant que possible l'impôt, qui est pointé du doigt pour la gestion de son personnel, qui refuse de donner une prime de fin d'année à ses salariés (1).
On voit par là qu'il faut toujours penser de manière dialectique.

(1) France 3 Centre - Val de Loire, Journal, 16.12.2018, 19h et France 3, Journal, 20.12.2018, 19h30.

2 commentaires:

Bernard De Backer a dit…

Parfaitement d'accord. On peut constater la même chose pour les "petites lignes". On ne prend pas le train mais on proteste contre la suppression des petites lignes. Le peuple des rond-points et des centres commerciaux est aussi celui qui les a voulu à travers ses élus. De deux choses l'une : soit on adopte la posture du "sociologue-de-la-domination-qui-décrypte-la-violence-symbolique-sur-les-dominés", soit on considère que les citoyens sont AUSSI responsables de leurs actes et pas des sempiternelles victimes. Le pire c'est Le Monde, un journal détenu par des milliardaires et qui fait de la pub pour Chanel, BMW, Saint-Laurent, la Tour d'Argent, les voyages lointains ... tout en se faisant une virginité avec des articles lénifiants sur les GJ. La main rouge-verte doit ignorer ce que fait la main bleue...

Bernard De Backer a dit…

Je voudrais ajouter (la fenêtre des commentaires est minuscule) que Michel Guilbert, écologiste Belge qui vit en France si j'ai bien compris, est très bien placé pour apporter un point de vue de demi-extérieur sur nos voisins et leur monarchie républicaine. Notamment leur extrême difficulté à réformer de manière pragmatique, leur "tout ou rien" forcené, leur rapport hystérique au Monarque, leur prétention universaliste. Pourtant, j'aime beaucoup ce pays, je l'ai traversé à pied et à vélo (et en auto), mais là ils me font vraiment ch... L'Europe, qui est ma vraie patrie, n'a pas besoin de ça !