mardi 10 septembre 2019

Les pesticides à la porte

Le gouvernement français a entendu la demande d'une bonne partie de la population: il la consulte.
Tous les citoyens peuvent réagir sur sa proposition d'imposer une distance entre l'épandage de pesticides et les habitations (1). Et le gouvernement est audacieux: selon les cultures, il propose des distances de cinq à dix mètres. Oui, de 5 à 10 mètres.  Et on pourrait même descendre à trois mètres dans certains cas. "Fake news?", s'est demandé Daniel Cueff, le maire de Langouët qui, lui, a imposé une distance de 150 mètres.
Mais ces distances minimes sont définies "scien-ti-fi-quement", a affirmé très sérieusement Brune Poirson, Secrétaire d'Etat auprès de la Ministre de la Transition écologique et solidaire. Aussi scientifique sans doute que le constat de l'arrêt du nuage de Tchernobyl au niveau du Rhin, pile-poil à la frontière française.
Comment expliquer scientifiquement les traces de pesticides qu'on trouve partout, dans l'eau, dans les sols et sous-sols, dans l'air, dans nos organismes, mêmes dans ceux des urbains, sinon parce qu'ils se propagent allègrement en fonction des vents et des courants ?
Le gouvernement affirme que ses propositions reposent sur une étude menée par l'ANSES, l'Agence nationale de Sécurité sanitaire de l'alimentation. Une étude basée sur des données des années '80. Donc totalement dépassées. L'agence elle-même appelle à de nouvelles études.
"Nous n'avons aucune confiance en elle", peste l'association Nous voulons des coquelicots à propos de l'ANSES. "L'affaire des SDHI - une nouvelle classe de fongicides toxiques pour la santé - montre qu'elle a partie liée avec l'industrie des pesticides. Car, malgré les alertes lancées par des scientifiques indépendants, elle laisse ce redoutable poison être épandu dans toute la France. Cette agence, celle-là même qui donne les autorisations de mise sur le marché (AMM) de ces poisons, peut-elle sérieusement nous protéger contre ses propres décisions?"
Le gouvernement tente de se donner bonne conscience en imposant des distances d'épandage, mais elles sont tellement minimes qu'elles ne changeront rien à l'impact des pesticides sur la santé des habitants.
C'est l'interdiction pure et simple des pesticides qui devrait s'imposer. Peut-on croire à la quasi innocuité de produits qui obligent les agriculteurs à se travestir en travailleurs du nucléaire? 
De plus en plus de collectivités agissent pour préserver la santé des leurs. Les maires sont de plus en plus nombreux à prendre des mesures contraignantes. Le département du Val de Marne, las d'attendre une décision du gouvernement, a interdit le glyphosate. A Saint-Hilaire-Saint-Mesmin, dans le Loiret, le maire, à la suite d'une concertation entre un producteur de fruits et les parents des élèves de l'école du village, a interdit les épandages à moins de cent mètres de l'école et une charte de bonne conduite a été signée (3).
C'est sûr, l'interdiction des pesticides demande un peu de courage que n'ont pas des gouvernements très en retard sur l'opinion publique qui, très majoritairement, réclame l'interdiction de ces produits qui tuent la vie et ne font vivre que l'industrie chimique. A l'heure où meurt la biodieversité, il y a des priorités qui obligent à sortir la tête du sable.

(1) http://www.consultations-publiques.developpement-durable.gouv.fr/spip.php?page=forum&id_article=2032#mon_ancre
(2) https://nousvoulonsdescoquelicots.org/2019/09/08/5-ou-10-metres-des-habitations-vous-vous-foutez-de-nous/
(3) France 3 Centre - Val de Loire, Journal, 19h, 10.9.2019.


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