Les clichés sur la campagne sont légions. Entretenus parfois par les gens du cru, parfois par des journalistes des villes qui regardent de loin ces pauvres gens qu'ils déplorent de voir abandonnés de tous.
Premier cliché : celui du désert. Tout le monde abandonne les campagnes. En 2017, selon l'INSEE, les territoires ruraux réunissaient 88% des communes françaises et 33% de la population. Il y a du monde dans le désert.
Dans le dernier numéro de Village Magazine (1), trimestriel qui sillonne les campagnes et fait "le plein d'énergies positives", Bernard Farinelli s'attaque à ces clichés.
"La révolte des paysans, éternelle jacquerie, affecte d'une façon uniforme tous les secteurs. Maraîchers, éleveurs, céréaliers, vignerons, bio, conventionnels, en montagne ou en plaine, au nord ou au sud, tous souffriraient des mêmes maux... imprécis, pluriels... La fermière qui vend au marché ses fromages de chèvre serait pénalisée par les traités de libre-échange ! Tant pis pour l'approximation, la campagne souffre de son agriculture."
La volonté de régulation de la chasse ne serait que celle de bobos urbains qui ne supportent pas les traditions rurales. "Les chasseurs sont des ruraux auxquels on suspend des brins de liberté acquis à la Révolution. Non, la moitié d'entre eux habitent des villes de plus de 20 000 habitants."
Les moyens technologiques ont bouleversé l'espace et le temps. Les TGV, les autoroutes, Internet la fibre ont permis à nombre de professions de s'installer loin des villes. Les coins perdus ne le sont pas pour tout le monde. Et on trouve du travail à la campagne : la Lozère, département le moins peuplé, dispose de cinq mille offres d'emploi non pourvues, constate Bernard Farinelli.
Les habitants des campagnes seraient fermés à la nouveauté et incapables d'accueillir les nouveaux venus. Cette campagne, "à qui on reproche d'accueillir des alternatifs de tout poil !" Alors, oui, il y a des coins où l'on restera à jamais un étranger, même si c'est simplement parce qu'on vient de l'autre bout du département. C'est dans ces mêmes coins parfois que le natif devient petit-à-petit l'étranger à force de se cantonner derrière ses rideaux en regardant son monde changer par l'énergie qu'y insufflent ces nouveaux venus.
Vu de Paris ou des grandes métropoles, la campagne française (comme si elle était uniforme - on en parle comme on parle de la province) est peuplée de victimes d'un système politique centralisateur, comme si les élus et les habitants ne pouvaient que subir. Alors oui, trop de services publics disparaissent, trop de commerces ferment, trop d'élus restent rétifs à la participation citoyenne, trop de ruraux vivent dans l'attente d'ils ne savent pas trop quoi, un deus ex-machina qui les sauvera d'une déprime qu'ils se plaisent à entretenir, trop d'habitants sont prompts à accuser leur maire d'être responsable de la fermeture d'un commerce local dans lequel ils n'ont jamais mis les pieds parce que c'est tellement plus simple de faire toutes ses courses au supermarché à vingt kilomètres de chez soi. Mais il en est beaucoup d'autres qui prennent en main leur avenir et celui de leurs enfants (même si c'est parfois sous l'œil goguenard ou critique de leurs voisins qui semblent se complaire dans le défaitisme). Beaucoup qui prennent plaisir à vivre à la campagne, à la faire vivre, qui créent de nouvelles activités dans les domaines les plus variés : économique, artisanal, social, culturel, touristique, artistique, sportif, etc.
A lire Village Magazine, à écouter Carnets de campagne (2), on découvre des campagnes vivantes, actives, énergiques, inventives, qui donnent envie d'y vivre. Loin des clichés.
(1) N° 161, automne 2024 - villagemagazine.fr
(2) Sur France Inter, du lundi au vendredi, de 12h3à à 12h45 -
(2) Sur France Inter, du lundi au vendredi, de 12h3à à 12h45 -
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