Il aurait aimé qu'on l'appelle Monsieur 5%. Mais il faut bien l'appeler Monsieur 10 %. Nicolas Sarkozy, fraîchement élu président de la République, avait promis - c'était en 2007, dans l'émission "A vous de juger" (1) - qu'à la fin de son quinquennat le chômage serait passé sous la barre des 5%. Et s'il y en a 10%?, lui demande Arlette Chabot. "Alors, c'est qu'y a un problème", répond-il. Et s'il n'arrive pas à ces 5%? "Alors, c'est un échec, j'ai échoué. Et c'est aux Français d'en tirer les conséquences", dit-il. Le chômage est aujourd'hui en France à 10%. "La démocratie, faut qu'elle vive", dit-il encore. Elle vit, elle vit, et elle vivra.
samedi 31 mars 2012
vendredi 30 mars 2012
Atomiser le gaspillage
L'idée de François Hollande de réduire la part de l'énergie nucléaire est "folle", selon le candidat président Sarkozy. La France est le pays le plus nucléarisé qui soit. Au cœur de la récente vague de froid, le 7 février très exactement, le record de consommation électrique y a été dépassé. La France a ainsi dû acheter de l'électricité à l'étranger. Le nucléaire ne serait donc pas la panacée? Et s'il était la cause de ce gaspillage? L'électricité d'origine nucléaire entraîne une culture de la consommation effrénée. Quantité de maisons en France sont équipées du chauffage électrique, plutôt que d'un chauffage ayant recours aux énergies renouvelables. Des études l'ont indiqué: plus la part du nucléaire est importante, plus on est dans une habitude de gaspillage. "Notre modèle énergétique est fondé sur une production censée augmenter indéfiniment pour satisfaire une consommation en croissance permanente, explique Thierry Salomon, un des promoteurs en France du concept de négaWatt (1). On a construit cinquante-huit réacteurs en s'assurant que la consommation serait au rendez-vous, quitte à la stimuler par les moyens les plus absurdes, comme la promotion du chauffage électrique dans des logements mal isolés, ce qui fait de nous une exception en Europe!"
La révolution énergétique n'est pas pour demain en France où le lobby nucléaire entretient la confusion entre électricité et énergie. Le nucléaire n'y représente pas 80% de l'énergie mais 80% de l'électricité et seulement 20% de l'énergie totale consommée.
Mais le nucléaire, c'est l'autonomie énergétique, clament ses thuriféraires qui semblent (?) oublier que la totalité du minerai brut d'uranium est importé du Kazakhstan, du Canada et du Niger qui ne nous semblent être ni des DOM ni des TOM.
En Belgique, une étude (2) estime que la diminution de notre consommation d'énergie permettrait la fermeture d'un, voire de deux des trois plus anciens réacteurs nucléaires (Doel 1 et 2). L'objectif d'une diminution de 4 TWh (5% de la consommation électrique) ou même de 6 TWh est raisonnable, selon Greenpeace et le Bond Beter Leefmilieu. Il faudrait pour cela que tous les nouveaux bâtiments publics respectent les normes de construction passive et que soient améliorées les performances en matière d'efficacité énergétique.
Pour diminuer les consommations, Thierry Salomon pointe deux approches: "l'investissement dans l'efficacité des appareils électriques, qui permet une baisse de la consommation à service rendu égal, mais aussi une politique de sobriété, qui consiste à traquer les gaspillages - et qui a l'avantage d'être gratuite! En combinant les deux, dit-il, on diminue de 45% notre consommation d'énergie" (1).
"Est-ce qu'on a besoin d'autant d'électricité?, se demande Hideo Furukawa, l'un des plus importants auteurs contemporains japonais (3). L'été dernier, à Tokyo, avec l'arrêt d'un certain nombre de réacteurs, il y a eu des consignes pour économiser l'énergie. Résultat: la consommation a diminué de 15% . Et tout le monde a vécu normalement."
Pendant ce temps-là, le président Sarko, celui qui marche sur l'eau, ne jure que par le nucléaire.
C'est le nucléaire ou la bougie, dit-il, tel un millénaro-catastrophiste. Les Japonais ont les deux en même temps. Mais il n'est de pire sourd que celui qui veut se faire réélire contre le cours de l'histoire.
(1) "Révolution énergétique, c'est pour aujourd'hui ou pour demain?", Télérama, 1er février 2012.
(2) réalisée par Climact à la demande de Greenpeace et du Bond Beter Leefmilieu (voir LLB, 28 février 2012).
(3) Charlie Hebdo, 21 mars 2012
mardi 27 mars 2012
Le regard qui tue
Le rictus et le regard de Nicolas Sarkozy sont ceux d'un tueur. On ne sait à qui d'autre les associer. Cette image date de l'époque où l'hyperkinétique président était ministre de l'Intérieur. On l'a vue (ou revue) ce mardi soir dans un documentaire diffusé sur Arte: "Bunker Cities".
Nicolas Sarkozy respire la suffisance, provoque les policiers, toise longuement du regard certains d'entre eux. Face aux caméras, il les nargue, visiblement il est venu pour les humilier. Il leur explique que leur rôle n'est pas social, qu'il sont là pour l'investigation et l'action. C'est à ce moment-là qu'il a annoncé la fin de la police de proximité et supprimé des milliers d'emplois. Résultat: la délinquance qui a chuté dans les quartiers réputés difficiles est remontée en flèche. Quel est son but?, se demande-t-on. Sans doute ouvrir la voie à une police privée, suggère un ancien responsable de la police, écœuré, qui estime que "il y aura alors une police pour les riches et une pour les pauvres".
C'est le même Sarkozy qui, depuis, a supprimé des postes par milliers dans l'éducation et se plaint d'une montée de la violence, d'un irrespect des règles. C'est toujours le même, candidat à sa succession, qui sort de son chapeau, quelques heures après la mort de Mohammed Merah, une batterie de mesures qui laisse pantois, le même qui envoie à ses compatriotes de l'étranger (même ceux qui tentent de se désabonner de ses courriers qu'ils n'ont jamais demandés) un message dans lequel il défend son "projet d'une France forte dans une Europe forte, de la production et de l'emploi" (1). On voit par là que la cohérence n'est pas la première de ses qualités. Si tant est qu'il en eût.
(1) on notera que ce projet est pour le moins flou rien que d'un point de vue syntaxique.
lundi 26 mars 2012
Les cycles du temps
Il faut toujours fêter ses quarante ans, ne serait-ce que pour prouver qu'on est toujours vivant. Le Taal Aktie Komitee (T.A.K.) l'a compris. Alors qu'on pouvait croire que la N.V.A. l'avait achevé, quelques dizaines de ses militants ont manifesté ce dimanche. On ne sait plus ni où ni pourquoi, mais là n'est pas l'important. Il s'agissait surtout de rappeler que le groupe sévit toujours depuis quarante ans. On devrait plutôt parler de groupuscule, au vu du petit nombre de manifestants. Mais peut-être tire-t-on des conclusions hâtives de ce faible nombre. Sans doute d'autres militants du T.A.K. étaient-ils mobilisés pour agiter des bannières flamandes le long du parcours de la course cycliste Gand-Wevelgem. Le T.A.K. préfère mettre son énergie au service de l'industrie de la pharmacie plutôt que pour la fin de la Belgique et l'indépendance de la Flandre. O tempora, ô mores! Ce qui en français signifie: tout fout le camp et les quadragénaires s'empâtent.
dimanche 25 mars 2012
L'art de savoir se taire
Le meurtrier de Toulouse - Montauban était un con. Bien sûr, on peut ajouter d'autres qualificatifs. Un con barbare, un con fou furieux, un con violent, un con salaud, un con lâche, un con narcissique. Mais c'était avant tout un con. Prétendant venger des musulmans, il a pris le risque de retourner contre eux la haine d'autres cons, faisant ainsi le jeu de l'extrême droite, exacerbant la haine contre les musulmans qui, eux, condamnent fermement et unanimement son attitude, ses propos et ses actes. "Tuer une seule personne, c'est tuer toute l'humanité", disait avec raison un représentant de la communauté musulmane (1).
Au début de l'enquête, Marine Le Pen, nous dit la presse, s'est tue, craignant qu'il s'agisse d'un militant d'extrême droite. Elle s'est laissée aller ensuite, pensant que le tueur n'en était pas. Ce en quoi elle se trompait. Al Qaida (dont il se revendiquait) et le Front National sont les deux facettes d'une extrême droite qui prône le rejet de l'autre, juste parce qu'il est autre. Quelle différence y a-t-il entre Anders Brevnik et Mohammed Merah? Des jeunes partis en vrille dans une idéologie violente qui leur fait croire qu'ils peuvent être des héros en abattant ceux qui ne pensent pas, ne sont pas comme eux. Les autres. Le problème, c'est qu'on est toujours l'autre de quelqu'un. On ne sait alors où s'arrêter. On est toujours un étranger. Tous ceux qui ont un jour bâti leur programme politique sur le rejet de l'autre ferait bien aujourd'hui de ne rien dire.
Ce qui nous ramène, aussi, à l'omniprésent et omniparlant président français qui trouve qu'il y a trop d'étrangers en France. Qui sont les étrangers les plus présents en France? Une étude du Gouvernement français nous indique que ce sont les Portugais. En 2007, ils étaient 491.000 en France. Si Sarkozy les mettait dehors, il y aurait ainsi 491.000 étrangers en moins. C'est peut-être une solution. Mais on ne sait à quoi. Peut-être préfèrerait-il expulser les 475.000 Algériens? Ou les 452.000 Marocains? Ou les Irakiens et les Afghans qui ont fui la guerre? N'y eut-il pas, à une époque, trop de Hongrois en France? En Belgique, les étrangers les plus nombreux sont les Italiens, puis les Français. Si notre premier ministre était pris d'une lubie xénophobe, les éjecterait-il? Pierre Desproges avait raison: il y a trop d'étrangers dans le monde.
Pendant ce temps, aux Etats-Unis un vigile abat un adolescent noir et reste impuni. La même logique de l'autre.
Ce début de printemps a des allures estivales. Allez savoir pourquoi il fait si froid.
(1) JT de 20h, France 2, 21 mars 2012
(2) www.immigration.gouv.fr/spip.php?page=dossiers_det_res&numrubrique=232&numarticle=2475
mardi 20 mars 2012
Nausée
La Belgique, les Pays-Bas et la Suisse unis pleurent vingt-deux de leurs enfants et six adultes morts dans un accident d'autocar. L'émotion est vive, la compassion réelle. On crie à l'injustice face à ce qui apparaît comme une quasi fatalité. Un accident vraiment, événement fortuit, imprévisible, mais injuste, tellement inacceptable.
Dans le même temps, en France, un tireur que l'on dit fou assassine de sang froid, lâchement, d'autres enfants, d'autres adultes. L'acte est ignoble, répugnant, incompréhensible. On soupçonne l'assassin de racisme et d'antisémitisme.
Des candidats aux élections présidentielles françaises proposent une trève dans la campagne. Mais les mêmes s'empressent de se rendre à Toulouse rendre hommage aux victimes ou dans une école pour y observer une minute de silence, en prenant bien soin de prévenir la presse de leur visite. Oui, le climat politique est délétère en France, comme le dit une partie de la presse étrangère (1). Pour le reste, on se taira, écœuré. Triste et écœuré.
(1) lire www.rue89.com/2012/03/20/
la-fusillade-de-toulouse-vue-de-la-presse-etrangere-230362
et aussi le billet de Charline Vanhoenacker:
http://blog.lesoir.be/parisbysoir/2012/03/20/la-campagne-suspendue/
jeudi 15 mars 2012
Les vrais problèmes des vraies gens
On ne s'en était pas rendu compte, mais la question écologique a visiblement été réglée. Ce n'était qu'une question de volonté. Certains ont tenté de nous affoler avec un problème qui a rapidement trouvé sa solution. C'est ce qu'on se dit en suivant la campagne présidentielle française. Qui parle de l'écologie? Qui s'y intéresse? La candidate des Verts n'a pas droit à la parole, ou si peu. Quand on s'adresse à elle, c'est pour lui demander de réagir aux phrases chocs des autres candidats ou à leurs attaques (1) : elle n'est pas française, elle a un accent, elle n'est pas jolie, elle porte des lunettes rouges. Presque jamais pour lui demander d'exposer son programme. Et d'ailleurs ce programme est-il clinquant? Fait-il rêver? La presse doit craindre que ce ne soit pas le cas, préfère les forts en gueule et les prestidigitateurs et ne pose pas de question aux candidats sur ce sujet qui ennuie.
Nicolas Sarkozy a laissé loin derrière lui son Grenelle de l'Environnement (c'était en octobre 2007, il y a une éternité) où il invitait les Français à "une révolution dans nos façons de penser, dans nos façons de décider". Depuis, il trouve que "toutes ces questions d'environnement, ça commence à bien faire". Business is business quand même. Si les candidats ne parlent pas d'écologie, les journalistes ne pensent pas à leur poser de questions sur ce sujet brutalement devenu ringard. "Et quand, ô miracle, Jean-Luc Mélenchon aborde de lui-même la question verte - à trois reprises, écrit Weronika Zarachowicz (2), aucun journaliste ne le relance. (...) A croire que pour l'establishment médiatique, poursuit-elle, la lutte contre le changement climatique, l'étalement urbain, la transition énergétique, les transports collectifs, les déchets nucléaires, la destruction du tissu paysan... ne sont pas d'actualité."
Dans le même temps, voilà que la Banque asiatique de développement (Bad), qui à première vue ne semble pas être une organisation écologiste radicale, estime que ces deux dernières années les catastrophes - typhons, sécheresse, inondations - liées à des événements climatiques ont entraîné le déplacement de 42 millions de personnes en Asie-Pacifique (2). Soit l'équivalent de deux tiers des Français. Dans les années à venir, à cause du dérèglement climatique, les catastrophes et en conséquence les réfugiés climatiques seront bien plus nombreux encore, estime la Bad. Des réfugiés auquel le candidat Sarkozy, engagé dans une surenchère avec la candidate Le Pen, entend fermer la porte de son pays.
Les Français vont-ils voter pour des autruches?
Les Vertes de rage ont lancé un appel: "Résistez, affirmez et exigez que l'écologie politique participe au débat!" (4)
A part cela, on aura eu une belle journée aujourd'hui, très printanière.
(1) France 5, 22 janvier 2012
(2) "La campagne manque de vert", in Télérama, 14 mars 2012
(3) LLB, 14 mars 2012
(4) voir notamment
www.zegreenweb.com/sinformer/les-vertes-de-rage-s’adressent
-aux-candidats-a-l’election-presidentielle,50756
mardi 13 mars 2012
Le rock conserve
Faites du rock, pas du sport.
Lire l'excellent billet de Fernand Denis dans la Libre Belgique de ce jour:
http://www.lalibre.be/archives/divers/article/725552/
when-i-m-sixty-four.html
Pleurnicheries
Marine Le Pen a obtenu ses cinq cents signatures. On peut penser qu'elle était sûre de les avoir. Mais la posture de la victime lui va bien. Elle s'y complait. Elle ne cessait de pleurnicher. Qui la croisait était bien inspiré d'avoir sous la main une boîte de mouchoirs. Son père, nous dit-on, aimait lui aussi jouer les Calimero avant chaque élection. On ne nous aime pas, on ne vit pas en démocratie, on fait tout pour nous éviter, se plaisent à dire ces gens-là. Parfois, ils ajoutent qu'ils font peur. Ils ont raison.
Bart De Wever n'est pas content. Il gagne 500 euros de moins en étant sénateur de communauté qu'en étant député au Parlement flamand. C'est un scandale. Son collègue Bart Tommelein (de l'Open VLD) geint comme lui. "Tu fais une faveur à ton parti en acceptant de tirer la liste au Sénat bien que tu sois député régional, dit De Wever, et tu te retrouves avec 500 euros nets en moins par mois" (1). Le Parlement fédéral a décidé de diminuer de 5% l'indemnité de base de ses élus, les parlements wallon, bruxellois et de la Communauté française réfléchissent à faire de même, disent-ils. Mais pas le Parlement flamand. Or être un leader flamingant entraîne des frais.
Bart Tommelein déplore, en outre, des vacances écourtées: "les vacances d'été débutent le 23 juillet au Sénat, alors qu'au Parlement flamand tout le monde est en vacances dès le 11 juillet". Ce sont les mêmes qui se plaisent à laisser entendre que le Flamand serait plus travailleur que le Wallon qui ne pense qu'aux congés.
Pauvre Bart(hein!), pauvre bisère.
(1) LLB, 8 mars 2012
lundi 12 mars 2012
Le sort du poète
Même mort depuis septante-cinq ans, le poète est encore rejeté. La statue d'Attila Jozsef, poète hongrois (1905-1937), sera déboulonnée. Ainsi en a décidé le premier ministre hongrois, le populiste Viktor Orban.
La vie d'Attila Jozsef fut un long chemin de croix. Abandonné tout jeune par son père, il est confié par sa mère à une famille adoptive qui lui change son prénom et lui mène la vie dure. Au point qu'il s'enfuit. Il se met à écrire. C'est sa vie. Mais ses poèmes sont jugés tantôt provocateurs, tantôt idéalistes. Ce qui lui vaut d'être exclu du parti Communiste hongrois. Il se suicide à l'âge de trente-deux ans. Il devra s'y reprendre à deux fois: la première fois qu'il se couche sur les rails du train, celui-ci n'arrive jamais: il s'est arrêté en amont à cause... d'un suicide (1).
Aujourd'hui, sa statue, installée près du Parlement hongrois à Budapest, sera déboulonnée. Viktor Orban trouve le poète "politiquement trop marqué à gauche" (2). On voit par là qu'on peut continuer à mener la vie dure même à des morts.
Il a quitté le parti
Qui ne l'a pas accepté
Il a pris part et parti pour l'éternité
Il a quitté la maison
Pour faire un tour pour toujours
Il a quitté le perron aller sans retour
Qu'est-ce que je sais de ce poète-là
Sauf qu'il avait le verbe bref
Et qu'il s'appelait Attila, Attila Joszef
Dick Annegarn
(1) Voir l'introduction de l'œuvre poétique d'Attila Jozsef "Aimez-moi" (éditions Phébus)
(2) "L'exception hongroise", in Télérama, 29 février 2012
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