dimanche 2 mai 2021

Dédiabolisation du putsch

Marine Le Pen fait tout ce qu'elle peut pour dédiaboliser le parti dont elle a hérité de son paternel. Elle l'a fait passer de la notion de front à celui rassemblement et a compris que si elle voulait réussir il valait mieux qu'elle se taise. Que ce serait toujours autant de bêtises en moins. Cette stratégie de l'effacement lui réussit plutôt bien, si on en croit les sondages. Mais cette fois, elle n'a pas pu s'empêcher de parler. Elle s'est mise au garde-à-vous devant les généraux. Elle ne résiste pas à un bruit de bottes. C'est dans ses gènes. "Oui, chefs! Bien, chefs!", a-t-elle répondu à la tribune d’une « vingtaine de généraux, une centaine de hauts gradés et plus d’un millier d’autres militaires » (1). 

Pour eux, "l’heure est grave, la France est en péril, plusieurs dangers mortels la menacent. Notre honneur aujourd’hui tient dans la dénonciation du délitement qui frappe notre patrie », affirment-ils virilement. Aussi envisagent-ils « l’intervention de nos camarades d’active dans une mission périlleuse de protection de nos valeurs civilisationnelles ». Autrement dit, ils menacent le président de la République, le gouvernement et les parlementaires d'un putsch. Et pour que les choses soient claires, ils ont choisi de publier leur tribune le 21 avril, soixante ans jour pour jour après le putsch d'Alger (2). La direction générale de l'armée et toute la classe politique les ont vilipendés. Pas la fille à papa, seule contre tous. "Je vous ai compris", leur a-t-elle répondu, assurant partager leurs inquiétudes et les invitant à la rejoindre. C'est que si elle veut atteindre son objectif, elle doit à la fois se donner une allure de démocrate respectueuse des lois, mais aussi soutenir tous ceux qui pensent que tout fout le camp et qui rêvent du bon vieux temps. Celui de l'ordre et de la discipline. Quitte à faire le grand écart (3). Hier, elle a lancé sa campagne pour l'élection présidentielle de 2022. Elle entend être "la candidate de la paix civile". Son humour nous échappe.

(1) https://www.lemonde.fr/politique/article/2021/04/26/marine-le-pen-applaudit-la-tribune-des-anciens-militaires-publiee-dans-valeurs-actuelles_6078123_823448.html

https://www.marianne.net/agora/tribunes-libres/tribune-des-generaux-dans-valeurs-actuelles-un-petit-putsch-pour-que-tout-rentre-dans-lordre

https://www.huffingtonpost.fr/entry/jean-pierre-fabre-bernadac-le-militaire-derriere-la-tribune-des-generaux-a-dirige-le-service-dordre-du-fn_fr_608973d5e4b0ccb91c2cd1e6


(2) Le 21 avril 1961, les généraux Salan, Challe, Zeller, Jouhaud et quelques autres déclenchaient à Alger le « putsch des généraux », en réaction à la politique menée par le général de Gaulle, considérée comme une trahison, à savoir cesser la guerre et négocier l’indépendance de l’Algérie.

(3) https://www.huffingtonpost.fr/entry/marine-le-pen-peut-elle-tenir-son-grand-ecart-jusqua-la-presidentielle_fr_608aa9c4e4b05af50dc04bd2

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