lundi 5 avril 2021

Tavernier et les censeurs

Bertrand Tavernier est mort récemment. Ce fut l'occasion de rappeler que ce grand réalisateur et fin connaisseur du cinéma américain s'est fâché contre la cancel culture, cette chasse aux sorcières menée par des néo-puritains qui veulent que disparaissent des mémoires les noms de celles et ceux qui, à un moment ou un autre, n'ont pas été dans la droite ligne qu'ils ont, eux les censeurs, définie.

"Tarvernier, disait Claude Askolovitch dans la revue de presse de France Inter du 26 mars (1), enrageait d'avoir appris que "dans l'Ohio, une université avait débaptisé son cinéma Lilian Gish, pour punir l'actrice qui un siècle plus tôt avait joué dans Naissance d'une nation, un film monument de DW Griffith, mais aussi un film raciste envers les noirs". Lilian Gish fut une grande actrice du muet et pour ce seul film il fallait que son nom soit effacé. Et Griffith, rappelait Bertrand Tavernier, avait aussi tourné un film sur Abraham Lincoln, et "montré la traite des esclaves dans toute sa violence. Est-ce qu’ils le savent à l’université dans l’Ohio ? Est-ce qu’ils savent ce que Griffith a produit?, s'indignait-il: Le lys brisé, A travers l’orage, Les deux orphelinesdes films incroyables, comprenant la première histoire d’amour interraciale sur l’écran!". Bertrand Tavernier "dénonçait la dictature du présent, l'ignorance de notre temps. Il avait dit au Monde en 2011, que l'histoire était une arme de construction massive contre toutes les dictatures et les incompréhensions". Il estimait aussi que "tout film, comme tout être humain, doit être présumé innocent ». Il est bon de s'en souvenir en cette période où des meutes de chiens virtuels dévorent à belles dents les proies qu'ils se sont choisies. 

(1) https://www.franceinter.fr/emissions/la-revue-de-presse/la-revue-de-presse-26-mars-2021 

Aucun commentaire: