mercredi 1 mai 2024

Un endroit tranquille où mourir

Un mardi après-midi (hier), on apprend en lisant "Le Couteau" (1), le dernier ouvrage de Salman Rushdie, que son ami Paul Auster ne va bien, qu'il souffre d'un cancer du poumon. On s'inquiète pour lui. "Il faudrait lui retirer deux ou trois lobes du poumon. Je lui rappelai que le dramaturge devenu président de la République tchèque, Vaclav Havel, lui aussi gros fumeur, s'était retrouvé après son opération avec seulement la moitié d'un de ses poumons et qu'il se portait bien. Il en a ri et a déclaré qu'il espérait faire mieux. C'était bon de le voir et de l'entendre rire. J'étais heureux de le voir si optimiste. Mais le cancer était sournois. On ne pouvait qu'espérer que tout aille pour le mieux."
Le lendemain (ce matin), on apprend que Paul Auster est mort. L'un (qui ne croit pas aux miracles) aura échappé miraculeusement à une vingtaine de coups de couteau, l'autre aura dû céder face au cancer. 

Dans Le Monde (2), Denis Cosnard le décrit comme "un immense écrivain américain. L’un des plus brillants de sa génération, le plus francophile aussi. Un orfèvre dans l’art du récit, plongeant dans son enfance, son histoire, ce qu’il appelait sa « zone intérieure », pour nourrir des textes romanesques, autobiographiques ou même politiques d’une intelligence et d’une sensibilité extrêmes. Il savait retracer comme nul autre la vie de ses personnages ou la sienne dans toute leur amplitude, leurs contradictions, leurs sinuosités, leurs bifurcations liées parfois à d’apparents hasards." Il salue aussi sa "langue limpide", et sa "maitrise de la narration". Le critique du Monde relève que "ses premières phrases sont des modèles du genre". Au hasard, parmi d'autres de ses livres, on ouvre "Brooklyn Follies" (3). On lit la première phrase : "Je cherchais un endroit tranquille où mourir. Quelqu'un me conseilla Brooklyn et, dès le lendemain matin, je m'y rendis de Wetchester afin de reconnaître le terrain". Paul Auster est mort hier soir dans sa maison de Brooklyn.

(1) Salman Rushdie, "Le Couteau", Gallimard, 2024, trdaction de Gérard Meudal.
(2) https://www.lemonde.fr/disparitions/article/2024/05/01/le-grand-ecrivain-americain-paul-auster-auteur-de-moon-palace-et-leviathan-est-mort-a-77-ans_6230916_3382.html
(3) Paul Auster, "Brooklyn Follies", Actes Sud, 2005, traduction de Christine Le Bœuf.

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