dimanche 13 avril 2014

Triomphe de l'autruche

Comment va la Terre? On ne peut mieux. Nous n'avons pas eu d'hiver et le printemps est exceptionnellement beau et chaud.
Evidemment, les experts du GIEC ne peuvent s'empêcher d'essayer de plomber cette ambiance radieuse. Leur nouveau rapport a été publié à Yokohama le 31 mars. Insécurité alimentaire, difficultés d'accès à l'eau, déplacements de population, voilà quelques-uns des impacts qui vont toucher tous les continents. Le changement climatique va "ralentir la croissance, créer de nouvelles poches de pauvreté". Les risques de conflits violents vont augmenter, les maladies liées à la malnutrition et à la mauvaise qualité de l'eau aussi. Aucune région du monde ne sera épargnée. En Europe et en Asie, on nous annonce une aggravation des inondations, de plus en plus de vagues de chaleur (1).
Les villes étouffent sous la pollution et les particules fines. Les citadins sont obligés de prendre leur voiture chaque week-end pour se réfugier à la côte. Bientôt, ils pourront y aller à vélo, la mer sera peut-être à deux pas de chez eux, tant elle ronge les côtes. Elle érode les plages, les dunes et les digues en Normandie, en Aquitaine, en Pays basque et partout où elle peut. Des habitants doivent quitter définitivement leur logement (2).
Même phénomène à l'autre bout de la planète: dans le golfe de Thaïlande, la mer monte, les six cents kilomètres de côtes sont de plus en plus érodés. Les inondations et les tempêtes se succèdent, un nombre incalculable de maisons ont disparu, les nouvelles digues sont déjà détruites, la mousson s'éternise. Bangkok s'enfonce de trois centimètres chaque année. Le rendement des cultures, des rizières notamment, s'effondre (3).

A peine nommée à un grand ministère de l'écologie (4), Ségolène Royal a annoncé une mesure forte: le report, voire la suppression, de l'écotaxe. Elle veut remettre à plat le système. Pas de "'écologie punitive", dit-elle (5). Il faut inciter les gens, pas les punir. Voilà quarante ans qu'on "incite les gens" à changer de mode de consommation, à faire des économies d'énergie, à préserver la planète. Cette politique incitative n'est guère fructueuse, il faut le constater. Les écologistes, les ONG environnementales protestent contre l'annonce de la ministre. Même un sénateur UMP de l'est de la France, François Grosdidier, dénonce "un bond de dix ans en arrière", lui qui voit passer par chez lui les camions qui évitent la Suisse et l'Allemagne qui appliquent une écotaxe. 
Pour fêter la bonne nouvelle que constitue l'annonce de S'EGO, des Benêts rouges (6) ont incendié, dans les Deux-Sèvres, un portique écotaxe (7). Déjà la Terre respire.

(1) La Nouvelle République, 1er avril 2014.
(2) Thalassa, France 3, 4 avril 2014.
(3) "Sale temps pour la planète - Thaïlande, à fleur d'eau", France 5, 11 avril 2014.
(4) ministère refusé par les Verts (qui commettent là une erreur historique) pour de sombres raisons électoralistes.
(5) La Nouvelle République, 5 avril 2014.
(6) selon le nom que leur donne un ami breton.
(7) La Nouvelle République, 12 avril 2014.

A lire aussi:
www.lesoir.be/519665/article/actualite/monde/2014-04-13/pour-giec-il-est-urgent-d-agir-grande-echelle-sur-gaz-effet-serre

3 commentaires:

gabrielle a dit…

Quelles sont donc ces "sombres raisons électoralistes" qui ont poussé la responsable des Verts à refuser un ministère de l'Ecologie (ce qui est tout de même un comble)?

Michel GUILBERT a dit…

Visiblement, les deux ministres Verts du gouvernement Ayrault ont décidé de ne pas poursuivre l'expérience dans le gouvernement Valls, considérant - à raison sans doute - que celui-ci est trop à droite. Cette décision, il l'aurait prise en engageant leur parti, mais sans consulter celui-ci.
François Hollande avait proposé à Cécile Duflot d'être numéro 2 du nouveau gouvernement, à la tête d'un grand ministère de l'Ecologie, incluant les Transports. Selon Libé, cité par Bernard Maris dans Charlie Hebdo (9 avril), elle aurait pu "résister aux lobbies", "bousculer les conservatismes", faire de la "social-écologie", "préparer un avenir intense en emplois". "Il fallait essayer", estiment Cohn-Bendit et d'autres au sein d'EE-LV. D'autant que, comme le souligne, Bernard Maris, "Valls est contre N.D-des-Landes. Valls voulait sortir du nucléaire dans les primaires socialistes(...). Il est contre le gaz de schiste, pour les OGM de seconde génération comme Le Foll...".Mais Duflot n'a pas voulu. "A-t-elle peur que son parti lui échappe, suite à un 2e passage au gouvernement?, demande Maris. (...) Elle voit les Verts passer devant les socialos aux européennes...". C'est sûr qu'on prend moins de risques en étant dans l'opposition, mais ce n'est qu'un étant dans le gouvernement qu'on peut agir. Cette décision est d'autant plus aberrante que les Verts accordent leur confiance au gouvernement tout en refusant d'en être... Une des plaies de la démocratie, c'est sans doute les élections (lire "Contre les élections", de David Van Reybrouck).

gabrielle a dit…

Merci pour les explications.
Si l'on peut comprendre en effet que le nouveau gouvernement n'ait pas provoqué un enthousiasme débordant chez les Verts, il semble que des intérêts "personnels" aient primé sur l'intérêt général.