jeudi 26 novembre 2015

Pourquoi?

Tout le monde se le demande: que cherchent-ils, ces psychopathes fanatisés en assassinant aveuglément? A Paris, ils ont visé des lieux où les gens se rencontrent, où ils "prennent du bon temps", dans des quartiers où on croise des gens, des jeunes surtout, de toutes origines.
"Aux auteurs de ces crimes, la France a offert tous les ingrédients d'une vie dans la dignité, écrit le Syrien Habib Saleh sur un site d'opposition (1). Mais ils l'ont trahie, ne voyant que des mécréants autour d'eux. La guerre se mène pour défendre la liberté, la souveraineté du pays et ses intérêts fondamentaux, pas pour faire triompher l'ignorance et la haine,"
Alors, cherchent-ils à détruire notre civilisation? Mais comment mèneraient-ils leur guerre, comment vivraient-ils tout simplement sans téléphones portables, sans ordinateurs, sans 4x4, sans kalachnikovs, sans Rollex, sans grosse berline? "Les voitures que les musulmans conduisent sont fabriquées par les mécréants, tout comme l'avion qui leur permet de se rendre confortablement au pélérinage de La Mecque, écrit Habib Saleh. Et même les hauts-parleurs qu'ils utilisent lors de la prière sont aussi un produit mécréant. Ils interdisent aux non-musulmans de pénétrer à La Mecque, mais ce sont les téléphones portables faits dans les pays mécréants qui y pénètrent à leur place."
Leur objectif n'est pas de détruire la civilisation occidentale, estime l'économiste américain Paul Krugman (2), mais de semer la panique. C'est tout ce qu'ils sont capables de faire. Ils veulent susciter la peur, c'est donc uniquement du terrorisme, qu'il ne faut pas confondre avec la guerre, dit-il. Ajoutant que ce terrorisme est incapable de détruire notre civilisation. Par contre, le réchauffement climatique le peut. S'il faut évidemment lutter contre le terrorisme, on ne peut se laisser détourner des autres priorités. 
"Pour pouvoir se réconcilier avec la modernité, dit encore Habib Saleh, et relever le défi du développement, il faudrait que les musulmans procèdent à une révision historique complète. S'attaquer à la pauvreté, aux maladies qui se propagent et même aux risques de famine devrait être leur priorité, loin devant les débats théologiques." 
La question reste entière: que cherchent-ils en semant la terreur? D'autres se battent pour l'indépendance de leur pays, pour l'autonomie, pour la libération de leurs camarades, pour s'opposer à leur gouvernement. On peut alors éventuellement négocier avec eux. Mais pas avec Daech (quoi qu'en pense quelqu'un comme Michel Onfray) qui n'exprime aucune demande, sinon implicite de laisser  ses soldats pratiquer tranquillement leurs actes barbares.
C'est dans le millénarisme qu'on peut trouver une explication, estime Guillaume Erner (3): "pour eux, la fin du monde est un événement désirable, si désirable qu'il importe de le hâter. (...) Daech veut un nouveau monde, comme tous les mouvements révolutionnaires, mais un nouveau monde qui passe par la disparition de ce monde-ci". C'est d'un monde bâti sur la violence qu'ils rêvent. Donc un monde sans avenir. "Voilà pourquoi ils donnent des leçons à l'enfer", dit encore Guillaune Erner.
"Chercher une raison, un motif, aux massacres commis par Daech, en France, en Europe ou dans le monde, c'est essayer de compter sur ses doigts le nombre d'étoiles dans l'univers, estime Gérard Biard (4). La profession de foi de Daech c'est: je te tue parce que. Parce que tu es décadent. Parce que tu es démocrate. Parce que tu es laïc. Parce que tu es impie. Parce que tu ne pries pas. Parce que tu vénères un faux dieu. Parce que tu es chiite. Parce ce que tu es un mauvais sunnite. (...) C'est vrai, c'est un mode de vie qui a été directement ciblé, à Paris. Mais ce n'est pas un mode de vie exclusivement occidental. La majorité des populations que Daech et les sectes djihadistes qui lui ont fait allégeance ont massacrées ou soumises en Syrie, en Irak, en Afrique, ne vivaient pas à l'occidentale. (...) La croisade entreprise par Daech est un crime contre l'humanité, au sens premier du terme. Daech veut tuer l'humain, le soumettre à un ordre spirituel, nihiliste et totalitaire, dont ses dirigeants pourront tirer un profit très matériel."
C'est à leurs sources de profit (matériel s'entend, puisque de spirituel il n'en est évidemment aucun) que la communauté internationale doit s'attaquer: s'attaquer aux  soutiens de Daech (5), au Qatar, en Arabie saoudite (aux pratiques, légales cette fois, tout aussi barbares), retirer au Qatar l'organisation et l'accueil de la coupe du monde de football en 2022, mettre fin dans les pays voisins de la Syrie, dont la Turquie, aux achats de pétrole à Daech, s'attaquer au marché du Captagon (ou fénéthylline, des amphétamines dont usent les combattants d'Allah pour accomplir tranquillement leurs crimes barbares) (6), bloquer leurs comptes bancaires. Ces fous (furieux) de Dieu sont, en plus d'être des millénaristes ultra violents, de vulgaires et infâmes bandits. C'est à leur vénalité qu'il faut s'attaquer, tout autant qu'à leurs forces militaires et au fanatisme qu'ils répandent comme un cancer.

(1) "Ce fanatisme qui détruit l'islam", in All4Syria (Damas), publié par Le Courrier international, 17 novembre 2015.
(2) http://www.nytimes.com/2015/11/16/opinion/fearing-fear-itself.html?emc=eta1&_r=0
(3) "Daech: leur monde commence où finit le nôtre", Charlie Hebdo, 25 novembre 2015.
(4) "Les bonnes raisons de Daech", Charlie Hebdo, 25 novembre 2015.
(5) http://www.lesoir.be/1053808/article/actualite/france/2015-11-26/attentats-paris-arabie-saoudite-et-qatar-des-allies-encombrants-pour-france-vide
(6) En 2014, plus de 50 milions de pillules auraient été vendues pour un butin de 10 à 20 millions de dollars. Cf "La guerre, une histoire de came", Charlie Hebdo, 25 novembre 2015.

3 commentaires:

Grégoire a dit…

Une réponse, qui en vaut sûrement une autre, dans le Canard Enchaîné de cette semaine :
1. Plus il y aura d'attentats.
2. Plus les populations occidentales pointeront les arabo-musulmans du doigt.
3. plus certains d'entre eux, et ils seront probablement de plus en plus nombreux, se radicaliseront.
4. Plus il y aura d'attentats.
5. Et ainsi de suite jusqu'à la guerre civile.

Michel GUILBERT a dit…

Je ne suis pas sur les réseaux (a)sociaux, j'ei donc peut-être une vision tronquée de la réalité, mais j'ai l'impresseion qu'il n'y a pas de rejet des musulmans. On ne voit pas, ou pas plus qu'auparavant (?), de tags sur les mosquées ou d'agressions de musulmans. Globalement, je trouve que Belges et Français ne tombent pas dans le panneau. Et que les communautés musulmanes se remettent plus en question qu'après le massacre de Charlie Hebdo.

Grégoire a dit…

Je ne suis pas sur les réseaux (a)sociaux non plus, j'ai la même impression de non-rejet général, mais j'ai aussi l'impression qu'une méfiance progressive va s'installer insidieusement. D'autant plus que les auteurs identifiés étaient parfois considérés comme sympathiques et bien intégrés.