mercredi 30 décembre 2015

Charlie le joyeux

A quelques jours d'un sinistre anniversaire, je termine la lecture de l'ouvrage de Philippe Val "C'était Charlie" (Grasset). Il raconte la belle aventure de la joyeuse équipe qui, partie de l'éphémère "Grosse Bertha", a ressuscité "Charlie Hebdo" en 1992.
Un Charlie qui s'est construit avec celles et ceux qui le fabriquaient chaque semaine, dépassant la dérision pour rire encore de l'actualité et de ceux qui la font, mais aussi pour partager des réflexions, prendre des positions, susciter le débat. Un journal laïc, féministe, antiraciste, antifasciste et antitotalitaire, universaliste, défendant les droits de l'homme. Un journal engagé pour un monde meilleur et plus drôle. Un journal qui a vu peu à peu certains de ses proches lui cracher à la figure parce qu'il avait l'outrecuidance de dénoncer l'islamisme, cette forme de fascisme qui a suscité (et suscite encore, mais de manière à présent plus larvée) une bien étrange tolérance de la part d'une certaine gauche avant tout anti-américaine. Un journal qui s'est retrouvé bien seul dans la tourmente, sans le soutien du reste de la presse française, après sa publication des caricatures danoises de Mahomet. Un journal que certains ont voulu réduire à de sordides affaires d'argent après le massacre de huit de ses membres par de sombres barbares.
Comme il l'a fait pour des milliers d'autres lecteurs, cet hebdo m'a aidé à me construire, à réfléchir, à prendre position, à mettre des nuances, quoi qu'en pensent et en disent ceux qui voudraient n'y voir qu'une entreprise de démolition et d'islamophobie (un terme inventé pour éviter précisément la dérision, la réflexion et la critique). Ce livre, qui relate cette histoire foutraque, compliquée, enthousiaste, fédératrice malgré les divergences, est un hommage à la mémoire de Cabu, de Charb, d'Elsa Cayat, d'Honoré, de Bernard Maris, de Mustapha Ourrad, de Tignouss et de Wolinski, et aussi à celles et ceux qui continuent aujourd'hui à produire Charlie chaque semaine sous protection policière.
"Charlie était un journal habité par la joie de vivre, parce que le courage se mesure à la joie de vivre", écrit Philippe Val dans sa conclusion.

dimanche 20 décembre 2015

L'héritière

Elle voudrait bien ne pas ressembler à papa. Mais c'est difficile. D'abord, elle porte son nom grâce auquel elle occupe la position qui est la sienne: celle de présidente de ce parti qu'il lui a transmis. Comme lui, sur scène, face aux militants, elle ouvre les bras en position christique, de celle qui s'offre pour sauver son peuple de ces étrangers qui veulent le réduire à néant. Mais elle voudrait bien ne pas avoir les mêmes idées nauséabondes que lui. Du moins le faire croire. Alors, elle contrôle son discours, autant qu'elle peut. Mais quand on la renvoie à son essence, elle pète un câble (comme dit Libération), elle se vautre avec délectation dans l'abjection. Parce que le politologue Gilles Kepel a fait un parallèle entre Daech et le Front national - tous deux prônant le repli identitaire avec les conséquences que l'on voit et qu'on peut craindre - l'héritière de la PME Le Pen (slogans haineux et éructations sur mesure depuis 1972) a "twitté" des vidéos de décapitations réalisées par Daech à des fins d'immonde propagande. "La blonde espérance de la France furieuse" (1) ne savait pas très bien qui s'exprimait ni de quoi, mais elle a voulu signifier là l'extrême violence des djihadistes islamistes. La différence avec les pratiques du FN est patente, mais elle ne s'est pas rendu compte, dans son emportement, qu'elle donnait ainsi raison, sans souci des victimes, à tous ceux qui la rejettent: les règles n'existent pas pour elle. Elle qui a "la volonté de tout prendre à papa, même la méchanceté" s'est "rediabolisée elle-même" (1).
Le journaliste Hervé Ghesquière, qui a été, dix-huit mois durant, l'otage des talibans, lui répond vertement (2): "je pensais avoir tout vu, tout entendu de votre part: le mensonge, le cynisme, la manipulation, le fiel, l'intolérance. (...) Je suis à la fois révolté et écœuré par cette ignominie. Comment avez-vous pu avoir l'idée d'utiliser ces images horribles diffusées par l'EI au bénéfice de votre propre propagande?" Qui peut imaginer une seule seconde cette femme impulsive, capable de pratiques aussi ignobles, à la tête de la République française? "L'EI se sert en France du Front national qui prône la division, la suspicion envers les musulmans, les étrangers et classe les citoyens en catégories. Et le FN utilise la monstruosité de Daech pour attiser la peur. Finalement, l'un se nourrit de l'autre", dit-il.
Elle voudrait bien ne pas ressembler à papa. Mais "à son oreille, un vieil homme murmure: tu es ma fille, Marine, et en vain tu m'as renié" (1).

Post-scriptum: le dernier billet de Sophia Aram à ce sujet:
http://www.franceinter.fr/player/reecouter?play=1209815

(1) Claude Askolovitch, dans "28 minutes", Arte, 18 décembre 2015, à partir de 29'45: http://www.arte.tv/guide/fr/060828-080-A/28-minutes?autoplay=1
(2) http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/12/20/lettre-ouverte-a-marine-le-pen_4835377_3232.html

jeudi 17 décembre 2015

De si gentils électeurs

Dans le village  où j'habite, aux confins du Berry, du Poitou et du Limousin, c'est le Front Le Pen qui est arrivé en tête tant au premier qu'au deuxième tour. Ici, les seuls étrangers, à des kilomètres à la ronde, sont des Anglais et quelques Néerlandais qui ont une résidence secondaire dans le coin. Ici, l'insécurité, on ne la connaît que par les télés nationales. Ici, le conseiller municipal néerlandais organise durant les mois d'été des rencontres de pétanque entre les habitants. Il déplore qu'elles n'attirent que les étrangers, les gens du cru les boudent. Ici, personne ne connaît les candidats du F.N., mais 82 électeurs sur 200 votants ont choisi les représentants de Marine Le Pen.
Dans le village voisin, le maire UMP est reconnu comme un actif, même s'il a la réputation de décider seul. Il a attiré dans sa localité quelques entreprises et un centre d'accueil pour personnes handicapées, fait installer un champ de panneaux photovoltaïques, rénové le moulin à eau, créé un musée, aménagé et équipé le plan d'eau en espace de détente, équipé un bâtiment communal en boucherie pour y attirer un artisan, fait venir une médecin de Roumanie. Mais, peu importe, les habitants de ce village ont choisi, au premier tour, le Front familial.
Alors, qu'est-ce qui explique un tel choix? Le chômage sans doute pour certains. Mais pour les autres? La peur? Mais de quoi? Peut-être la peur d'avoir peur. 
Dans les communes rurales, écrit Antonio Fischetti (1), 15% des personnes se disent préoccupées par les violences urbaines... alors qu'elles ne sont que 7% à les craindre dans les grandes villes, où ces violences sont bien plus présentes." Et de citer le démographe Hervé Le Bras: "plus les personnes vivent loin des banlieues populaires où se produisent des violences urbaines, plus elles en ont peur."

Beaucoup d'analystes dédouannent les électeurs du FN, les considérant dans leur grande majorité comme des abandonnés "du système". Même si les faits disent autre chose, même si le soi disant système les prend en compte. On a l'impression que le F.N. rassemble ceux qui râlent, ceux qui en ont marre, sans trop savoir de quoi. Marre de tout, des impôts, des radars routiers, du prix de la viande, des élus, du temps qu'il fait, de celui qu'il fera. C'est le vote café du commerce.
Le vote F.N. n'est pas le même dans le nord et dans le sud. Evidemment, l'industrie du Nord - Pas de Calais est sinistrée, les mines de charbon sont fermées depuis longtemps, l'industrie textile a migré et tout le monde achète des vêtement fabriqués au Bangladesh ou au Vietnam. Et certaines familles connaissent le chômage depuis deux, si pas trois générations. Mais l'image du Nord, de Lille s'est totalement et positivement renouvelée. Notamment grâce à la culture. La création du Louvre-Lens, par exemple, témoigne du souci de l'Etat d'investir dans ces régions et, même si elle ne peut tout résoudre à elle seule, cette réussite est jusqu'ici porteuse d'espoir. Et bien sûr, il faut en faire plus, beaucoup plus. C'est l'affaire des politiques et du privé, en ouvrant plus encore vers l'extérieur cette région frontalière plutôt que de refermer les frontières.
Dans le sud, ils sont nombreux les nantis qui votent pour le F.N. parce que c'est le parti des murs, de ceux qu'ils aimeraient bâtir tant autour de leur propriété qu'aux frontières de l'Etat. C'est le parti de ceux qui ne veulent voir qu'eux, ne rien donner, tout recevoir.
Et puis, il y a les cathos intégristes, ceux de la dite Manif pour tous, qui sont contre le mariage des couples homos, contre les plannings familiaux, contre l'égalité homme-femme. Ceux qui rêvent d'un retour de bâton de maréchal à la modernité.
Bref, on peut évidemment comprendre beaucoup de choses, admettre que trop d'élus dans différents partis sont dans des stratégies politiciennes, voire personnelles, que trop de promesses n'ont jamais été tenues, qu'on n'investit toujours pas assez dans le social, dans l'éducation, dans la culture, mais tout cela justifie-t-il le soutien à un parti dangereux pour la démocratie? Le F.N. apparaît comme le parti des râleurs et des réacs, des abandonnés et des nantis, de ceux qui sont contre par principe, de ceux qui pensent que la politique, c'est simple. Qu'il suffit de fermer les frontières et ses volets, de quitter l'euro et l'Europe, de regarder en arrière et de se mettre la tête dans le sable pour voir l'avenir en rose. 

Et puis, il y a les non-électeurs, ceux qui laissent les autres décider à leur place, même si c'est pour choisir l'extrême droite. Parce qu'ils estiment que tout ce qui ne va pas est de la faute du gouvernement, des gouvernements successifs, n'imaginant pas que l'évolution de la société est aussi le fait des entreprises, des indépendants, des associations, des citoyens. Pour eux (je l'ai entendu plus d'une fois), les politiques, de gauche comme de droite, n'ont rien fait depuis quarante ans (certains remontent, allez savoir pourquoi, jusqu'à quarante-cinq ans). Pourtant, la France est un Etat qui fonctionne, avec un système de sécurité sociale performant, d'excellentes écoles, des hôpitaux et des services sociaux efficaces, des infrastructures de transport modernes, un système judiciaire et des forces de l'ordre à la hauteur, un important parc de logements sociaux, des centres culturels et des salles de sport même dans les petites villes, un régime de travail de trente-cinq heures par semaine, une retraite à soixante-deux ans, etc. Tout cela, évidemment toujours perfectible, existerait difficilement si les politiques ne prenaient pas de décisions et ne faisaient vraiment rien pour faire évoluer la société. Mais il est sans doute plus simple de jeter le bébé avec l'eau du bain. On est ensuite plus tranquille. Mais très seul. Et Gros-Jean comme devant.

(1) "Idées reçues sur l'électeur FN", Charlie Hebdo, 16 décembre 2015.
voir la carte des communes de France indiquant, commune par commune, quelle liste est arrivée en tête:
http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2015/12/14/elections-regionales-quelle-liste-est-arrivee-en-tete-dans-votre-commune-au-second-tour_4831192_4355770.html

mardi 15 décembre 2015

Au boulot!

Certains de mes amis ne font pas la même analyse, voyant le verre à moitié vide. Personnellement, je l'ai trouvé plutôt beau ce week-end. Pas exceptionnel, mais de belles journées pour la France, pour l'Europe, pour le monde. Si tous les engagements sont tenus, évidemment.

Cent nonante-cinq Etats ont réussi à trouver un accord pour tenter d'infléchir la courbe des températures sur terre. Les fines bouches le critiquaient avant même qu'il ne soit signé, relevant qu'il ne s'agit que de mots. Certes. Et c'était bien là l'objectif poursuivi. La COP21 n'était pas un atelier de construction d'éoliennes, mais une réunion visant à dépasser les opinions et les volontés opposées d'Etats et de groupes de pression très divergents. Et cet accord, bien sûr imparfait (mais qui pouvait imaginer qu'il serait décidé que dès ce lundi tout le monde roulerait à vélo et deviendrait végétarien?) est, dans les grandes lignes, une réussite en soi. Sa concrétisation dépendra de la volonté et de la mobilisation des Etats, des entreprises, des ONG, des citoyens. On y reviendra.

La France a réussi à éviter le pire, le Front familial ne remporte aucune région. Ce qui n'enlève rien à l'importance des scores d'un parti aux propositions aussi faibles que dangereuses. Ses candidats nous font frémir, mais aussi rire. Notamment quand, alors qu'ils caricaturent depuis des années l'attitude et les pratiques des autres partis et des médias, réunis en ce qu'ils appellent "le système", ils se plaignent d'être "les victimes du rouleau compresseur du système". A cracher sur les autres, on peut difficilement se plaindre d'être rejetés par eux.
Reste que tout le monde a perdu et que personne n'ose triompher. Et qu'une évidence s'impose aujourd'hui en France:  la nécessité d'un vrai sursaut à tous les niveaux. Xavier Bertrand, qui a tenu un discours digne et grave dimanche soir, est le premier à annoncer le changement: il démissionnera de tous ses mandats et ne sera pas candidat à la primaire de droite pour se consacrer entièrement à son mandat de président de la région Nord-etc. Mais Jean-Yves Le Drian, grand vainqueur en Bretagne, entend être à la fois président de région et ministre. N'a-t-il rien entendu des appels? NiNicolas Sarkozy, de son côté, continue à vivre sa vie à lui: il s'est empressé de courir assister au match du PSG dès son discours terminé dimanche soir. Il est temps de prendre les électeurs pour des adultes et d'abandonner les slogans idiots. Valérie Pécresse entend "donner aux Parisiens des preuves d'amour". En demandent-ils tant?  Un élu régional ex-UMP en Ile-de-France indique (1) dans ses priorités l'installation de systèmes de sécurité à l'entrée des salles de spectacles: "vous trouvez normal qu'il n'y ait pas de portiques de sécurité à l'entrée de salles où entrent des milliers de spectateurs? Moi pas!", dit-il, faisant les questions (idiotes) et les réponses à la façon de Sarkozy. Il y a un mois, personne n'y pensait. Même pas lui. Bref, il est temps que les candidats et les élus cessent de prendre les électeurs pour des crétins. Et que ces électeurs entrent dans le débat.

Le magazine Marianne pointe une série de remèdes (2), parmi ceux-ci:
- renouveler et rajeunir le personnel politique. Un appel notamment à Sarkozy et Hollande pour qu'ils ne se présentent pas à l'élection présidentielle de 2017. La fille à papa ne peut apparaître comme le seul visage "neuf" en politique.
- rénover le modèle social: "chaque jour, on nous annonce que les résultats vont être au rendez-vous: que les fonds publics versés aux entreprises (sans contrepartie) vont bien finir par stimuler l'investissement et donc l'emploi. (...) Pourtant, le non-résultat est là. On a beau flexibiliser, dérèglementer, alléger les "charges" sociales, aucune éclaircie n'est en vue." 
Il est temps que les politiques, tous partis confondus, osent reconnaître que le temps du plein emploi est terminé, que les citoyens puissent l'entendre et qu'on remette à plat les problématiques emploi-chômage et répartition du temps de travail et des richesses.
- réinventer les partis, suggère Marianne, et, me permets-je d'ajouter, quitter le sytème majoritaire à deux tours, particulièrement pervers.
- mettre sur pied un plan Marshall pour la ruralité, débloquer l'ascenseur de l'intégration, réinvestir la laïcité, inventer une autre politique européenne et faire rêver la jeunesse. Quand on voit qu'au premier tour des régionales, seul un tiers des jeunes de 18 à 25 ans a été voter et que parmi eux 35% ont voté pour le parti de la famille Le Pen, on ne peut qu'être effrayé en voyant cette jeunesse croire que l'extrême droite peut apporter une solution. Comment le parti qui regarde en arrière peut-il apparaître comme porteur de futur pour tant de jeunes? 

Il y a aussi urgence à redonner sens et intérêt à la vie politique et aux élections. Ou alors il faut changer radicalement le système démocratique. Personnellement, je suis effaré de constater que plusieurs personnes autour de moi, intelligentes, investies dans la vie sociale, n'ont pas été voter, au premier, au deuxième ou aux deux tours. Certains n'ont pas pris le temps, d'autres ont préféré rester chez eux que de voter pour un candidat pas assez à gauche, d'autres encore trouvent que les partis qui se sont succédé depuis quarante ans n'ont rien fait. Tous sont de ce pays tellement convaincu qu'il est un modèle de démocratie où chacun se passionne pour la res publica.

Les élus changeront vraiment leurs pratiques si les citoyens s'investissent dans la vie politique, plutôt que tout attendre des pouvoirs publics, en se contentant d'aller voter (ou non) tous les cinq ou six ans.

(1) France Inter, 15 décembre 2015, 8h50.
(2) "14 idées pour faire barrage...", Marianne, 11 décembre 2015.
A lire, ces commentaires des résultats des élections:
http://www.huffingtonpost.fr/thomas-guenole/analyse-resultats-elections-regionales-2015-fn_b_8801106.html?utm_hp_ref=france
http://www.huffingtonpost.fr/mohamed-sifaoui/regionales-2015-front-national-islamisme_b_8799870.html?utm_hp_ref=france
et ces réflexions (que je partage) de Luc Le Vaillant, de Libération, qui avait fustigé le retrait des candidats socialistes au second tour: http://www.liberation.fr/debats/2015/12/14/se-desister-pas-si-benet_1420702


samedi 12 décembre 2015

Profession: pourrisseuse

Elle ne comprend pas, elle se sent ostracisée. Pourquoi tous les autres partis se liguent-ils contre le sien? Vraiment, la fille à papa ne voit pas pourquoi les médias et ses adversaires la présentent comme quelqu'un qu'il faut à tout prix éviter. On doit se contenir pour ne pas verser une larme sur son triste sort, en pleurnichant comme elle. Elle qui n'a cessé de mettre tout le monde dans le même sac, parlant d'UMPS, affirmant qu'ils sont tous pourris, profiteurs, cumulards, dénonçant le "système". Même si elle et les élus de son parti sont des modèles de ces genres, profitant au maximum de ce système.
C'est vrai qu'on a du mal à comprendre pourquoi il faudrait à toute force rejeter quelqu'un qui annonce que si elle est élue elle a pour projet de "pourrir la vie du gouvernement" (1). Parce que ça, c'est vraiment un chouette projet, positif, créatif, intelligent. D'autant plus chouette que, on est sûr qu'on peut compter sur elle, si elle n'est pas élue, elle en fera tout autant.
Quand dans un panier une pomme pourrit les autres, mieux vaut s'en débarrasser au plus vite.

http://www.lemonde.fr/elections-regionales-2015/live/2015/12/10/en-direct-les-candidats-se-succedent-dans-les-matinales_4828306_4640869.html

mercredi 9 décembre 2015

Une (mauvaise) blague

Ils sont bien naïfs ceux qui croient le Front familial quand il se présente comme une alternative qui va modifier les pratiques politiques. Le parti, on l'a dit ici maintes fois, est fondé sur le népotisme, distribuant au sein d'une même famille (riche) les fonctions et les postes.
Le cumul des mandats que les Le Pen et consorts fustigent chez les élus des autres partis y est et y sera pratiqué. Mais la présidente du parti, députée européenne, qui se voit déjà présidente de région, annonce qu'elle n'abandonnera aucun mandat. Où est le problème?, demande-t-elle, puisqu'elle est claire depuis le début et que les électeurs votent en connaissance de cause (1): pour quelqu'un qui fait ce qu'elle vomit chez les autres.
Nicolas Bay, député européen et tête de liste en Normandie, tient la même position, arguant du fait qu'il pourra, grâce à son mandat au Parlement européen, aller chercher des aides européennes pour sa région. Faut-il rire ou pleurer d'un tel argument de la part du représentant d'un parti qui veut mettre à terre l'Union européenne et qui retombe dans les vieilles pratiques politiciennes: plus on a de mandats, plus on se rend indispensable, plus on peut faire tomber de l'argent dans sa circonscription (au détriment des autres) et plus on a de chances d'être réélu... On apprend vite au F.N., notamment que le pouvoir rend insatiable et que les principes ne sont que des mots.
La petite fille à son papet est l'une des rares à annoncer qu'elle démissionnera de son mandat national si elle est élue à la tête de la région PACA. Il faut dire qu'elle sera très occupée entre son mandat de présidente, la messe en latin, les neuf enfants qu'elle aura pour mieux séduire encore son électorat catholique intégriste, la fermeture des centres de planning familial et la lecture de livres d'histoire consacrés à cette belle époque de Vichy. (2)
En attendant, ceux qui ont l'outrecuidance de dénoncer les méfaits économiques, sociaux, politiques qu'aurait le basculement à l'extrême droite de leur région se font insulter et menacer par les électeurs du Front néandertal. Au point de ne plus oser s'exprimer (3). Voilà qui augure de l'ambiance terroriste qui règnerait en France si ces joyeux lurons arrivaient au pouvoir.

(1) http://www.marianne.net/au-fn-on-est-anti-systeme-pas-forcement-anti-cumul-100238535.html

lundi 7 décembre 2015

Une sale odeur

La France s'est réveillée ce lundi avec la gueule de bois, dans une odeur d'égout. Le parti de la famille Le Pen triomphe dans une marée noire où se trouve engluée la démocratie. On peut parier qu'aucune de ses propositions pour les régions n'a séduit le moindre électeur. C'est le climat général qui a porté cet électorat vers ce parti dangereux, aux projets passéistes et inquiétants.
Les terroristes ont fait le lit de l'extrême droite. Mais ils ne sont pas les seuls. Les responsabilités sont partagées dans l'ensemble de la société française: 
- les reculs du Parti socialiste, du gouvernement et du président Hollande, de plus en plus à droite, qui ont déçu nombre d'électeurs;
- l'ex-UMP et son président, si peu "républicains", qui courent derrière le F.N., ne voulant pas comprendre qu'ils ne font que renforcer celui-ci, en se déforçant eux.;
- tous ceux qui crachent sur les représentants politiques, qui clament qu'ils sont tous pourris, mettant dans le même sac, dans un rejet populiste, profiteurs et élus engagés; 
- la gauche qui, par bienveillance idiote et/ou calcul électoral, a trop longtemps refusé de s'attaquer au danger islamiste, ouvrant un boulevard à l'extrême droite;
- l'islam de France qui a laissé un cancer se développer en son sein;
- les médias qui se disputent la fille à papa parce qu'elle fait de l'audience et l'invitent sans vraiment démonter ses mensonges et ses projets ringards et idiots;
- les réseaux dits sociaux où triomphent les analyses simplistes et imbéciles, où se répandent les racistes, les antisémites, les homophobes, les sexistes;
- les chaînes de télé qui se sont muées, de plus en plus, en grands instruments de crétinisation;
- les abstenstionnistes, un électeur sur deux ce dimanche, qui font la fine bouche parce qu'aucun parti ne correspond à cent pour cent à leurs idées.
Tout ceux-là favorisent le choix d'un parti haineux et dangereux, aux idées nauséabondes qui ont pris le contrepied de l'intelligence. Le parti de ceux qui n'aiment pas les autres.

Le succès du parti de la famille Le Pen est un danger pour la France et pour l'Europe.
Il y a urgence dans cette France qui perd la tête à sortir des calculs politiciens mesquins, à imaginer un (ou des) projet novateur, rassembleur et solidaire, tournant le dos à cette France agressive, triste et rance, racrapautée sur elle-même. A s'attaquer aux sources du terrorisme, à rétablir des règles identiques pour tous et respectueuses des uns et des autres, à s'attaquer véritablement au problème du chômage en reconnaissant enfin que, à cause de la révolution numérique, il faut cesser de rêver encore de plein emploi et qu'il faut donc imaginer une autre façon de donner sa place à chacun, d'où qu'il vienne et quelles que soient ses origines. Il y a urgence à sortir de ce système majoritaire à deux tours, si peu démocratique. Il y a urgence à redonner sa place à l'intelligence.

samedi 5 décembre 2015

En arrière, toute!

Le F.N. ou le parti de l'extrême arrière.
Le parti familial veut que la France quitte l'euro et ferme ses frontières. Un projet dénoncé de toutes parts comme une folie économique suicidaire (1).
La petite-fille à son papy a de grands projets pour la région qu'elle ambitionne de présider: elle va couper les subventions aux plannings familiaux (2). Vive la nature! La sienne est profondément catholique, les femmes doivent faire des enfants pour repeupler la France. Finalement, les intégrismes se rejoignent. F.N. et salafisme sont deux faces d'une même médaille.
Sa tati chérie, elle, lance des imprécations: c'est elle ou l'enfer islamiste. Sans le FN, la charia va remplacer la constitution, a-t-elle affirmé il y a trois jours, comme si elle y croyait vraiment. La burqa sera imposée à toutes les femmes, la musique interdite et la barbarie s'installera (3).
A Béziers, le père Ménard, tout maire qu'il soit, se mue de plus en plus en père Fouettard. Voilà qu'après avoir donné à ses policiers un nouvel "ami", en l'occurence un pistolet,  il veut créer une milice. Il appelle anciens policiers, gendarmes, militaires et pompiers à rejoindre "la garde biterroise" qui viendra en renfort de la police municipale (4). Etranger, passe ton chemin, Béziers n'est pas pour toi.
Pendant ce temps, les candidats du parti familial continuent à se lâcher avec des propos racistes, antisémites et autres messages peu empathiques (5).
Où s'arrêtera le Front national dans sa marche arrière? Il invite à revenir avant 1993 et le traité de Maastricht. La nièce à papy propose de revenir à une période d'avant 1968 où la femme était soumise. Le père Ménard nous ramène à Vichy, l'héritière à l'Inquisition et certains candidats au Moyen-Age, cette belle époque où on brûlait les sorcières. 
F.N. ou Front néandertal (6).

(1)voir, sur ce blog, "Sortie de route", 20 février 2015.
(2)  http://www.liberation.fr/france/2015/12/03/planning-familial-ils-repondent-aux-menaces-du-front-national_1418001
(3) http://lelab.europe1.fr/emmanuelle-cosse-scandalisee-par-le-votez-pour-moi-ou-demain-il-y-aura-letat-islamique-de-marine-le-pen-2630241
(4) http://www.liberation.fr/france/2015/12/01/menard-veut-creer-une-garde-biterroise-de-benevoles-pour-patrouiller-dans-beziers_1417485
(5) http://www.lemonde.fr/politique/article/2015/11/27/regionales-des-candidats-fn-loin-de-la-dediabolisation-voulue-par-le-parti_4819022_823448.html
(6) cf "Silex and the city", Jul.

jeudi 3 décembre 2015

Le nord se perd

Bien sûr, c'est un peu tard, mais mieux vaut cela que jamais. Des quotidiens régionaux s'inquiètent clairement de l'impact d'une victoire du parti de la famille Le Pen. C'est le cas tout d'abord de la Voix du Nord (1) qui en profite pour rappeler qu'il est né de la Résistance, ce qui lui donne un peu plus de légitimité dans cette dénonciation d'un parti qui dupe un peuple qu'il prétend défendre.
Marine Le Pen, fait remarquer la Voix du Nord, n'habite pas la Région Nord - Pas de Calais - Picardie, mais La Celle - Saint-Cloud, à côté de Versailles. Elle vient juste dans le nord de la France chercher des voix et un succès. Pire: elle laisse clairement entendre qu'en cas de victoire elle n'assumera que très brièvement la fonction de présidente de région, ce rôle n'étant qu'un marche-pied vers la fonction dont elle rêve dans son ambition infinie: celle de présidente de la République. Elle a déjà son homme de paille pour la remplacer: Philippe Eymery, un vrai réac, proche de son père (qu'elle ne peut plus voir, ou en tout cas entendre). Pour la présidente d'un parti qui ne cesse de fustiger l'attitude irresponsable des autres partis, on a connu positions plus pertinentes (et intelligentes, mais ce serait là trop demander à ce parti).
Le Front national veut réinstaurer des droits de douane, souligne la Voix du Nord. Dans cette région frontalière avec la Belgique et la Grande-Bretagne, on pouvait imaginer des propositions plus ouvertes et dynamiques. Là où la frontière, notamment économique, a vraiment disparu, le FN voudrait donc la rétablir. Avec toutes les conséquences qu'on imagine catastrophiques pour les entreprises et les commerces de la deuxième région de France pour les investissements directs étrangers. Une région qualifiée par la fille à papa de "grande terre de pauvreté, de misère et de désindustrialisation". Le terme nuance et délicatesse sont totalement inconnus du F.N. Les nordistes sont donc, si on suit bien le F.N., des misérables.
Les affiches du parti d'extrême droite annoncent "100% FN, 0% migrants". Tout slogan est idiot, mais celui-ci l'est particulièrement.  Ne plus accepter en région Nord un seul migrant serait suicidaire. La balance démographique serait vite déficitaire avec toutes les conséquences qu'on imagine.
La Voix du Nord rappelle aussi que Marine Le Pen aime se présenter comme l'incarnation de l'anti-système, elle qui a été élevée dans un château à Saint-Cloud, une propriété de cinq mille mètres carrés (estimée à 6,5 millions d'euros), devenue celle de son père suite à un legs contesté. Elle qui est conseillère régionale, députée européenne (très peu présente et active) et présidente de parti, ici encore on a connu plus anti-système que des cumulards qui veulent cumuler plus encore. 
Le quotidien du Nord constate que le FN a refusé de répondre à des demandes d'interview, alors qu'il est toujours prêt à commenter les sondages qui lui sont favorables. En revanche, la fille à papa a annoncé - c'est plus qu'une habitude chez elle, un réflexe dès qu'on la criitique - qu'elle déposerait plainte contre le journal et que, une fois élue, elle lui couperait les subventions. Qui n'existent pas (3). Mais elle n'est pas à un mensonge près. C'est là son principal outil d'argumentation.
Le Courrier picard, lui aussi, s'inquiète d'une problable victoire du FN en région Nord (2). Il rappelle que cette inquiétude est partagée par les milieux économiques et culturels.
L'héritière n'est pas l'incarnation de l'anti-système, mais de l'arrogance, de la vulgarité et du mépris de ses électeurs. Quand ceux-ci se rendront compte qu'ils ont été bernés, il sera hélas trop tard.  

Vaut mieux être gonflée que gonflable.
Pas vrai, poupée?
Jacques Higelin

Post-scriptum: ajoutons que, si la façade du parti a été ravalée, la cuisine sent toujours le graillon (voir 4)
Post-scriptum 2: Le Monde sort aussi du bois et dénonce l'imposture que constitue le F.N.:
http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/12/04/le-front-national-cette-imposture_4824550_3232.html

(1)
http://www.lavoixdunord.fr/politique/regionales-pourquoi-une-victoire-du-fn-nous-inquiete-ia228354b229664n3191673
http://www.lavoixdunord.fr/region/regionales-marine-le-pen-et-le-fn-ne-sont-pas-ce-ia0b0n3192995
(2)
http://www.lemonde.fr/elections-regionales-2015/article/2015/12/02/elections-regionales-2015-le-courrier-picard-s-engage-a-son-tour-contre-le-fn_4821974_4640869.html
(3)
http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2015/11/30/marine-le-pen-promet-de-supprimer-des-subventions-a-la-presse-inexistantes_4820714_4355770.html
(4) http://www.lemonde.fr/politique/article/2015/11/27/regionales-des-candidats-fn-loin-de-la-dediabolisation-voulue-par-le-parti_4819022_823448.html

A (re)lire sur ce blog, notamment "Le F.N., résumons-nous", 28 novembre 2015.

mercredi 2 décembre 2015

Ni Nicolas

Républicain, Nicolas Sarkozy? Quelle idée! Le qualificatif est visiblement usurpé. Il l'a annoncé: il refusera tout "front républicain" et si son parti, l'ex-UMP rebaptisé en "Républicains", est en position pour se présenter en triangulaire au deuxième tour des élections régionales, il le fera. Il est dans le "ni-ni", ne veut choisir entre le centre-gauche et l'extrême droite. Et tant pis si c'est en définitive tout profit pour cette dernière. Il ne fait donc pas de différence entre le Parti Socialiste ou d'autres partis démocratiques et le parti de la famille Le Pen. Il est vrai qu'il court tellement derrière l'extrême droite qu'il doit ne plus voir grande différence entre elle et lui. Mais les électeurs la font, eux qui préfèrent toujours l'original à la copie.
C'est le même Sarkozy qui ces jours-ci estimait qu'on en fait trop avec la COP21 dont il avait demandé le report avant de se raviser (1). Lui qui s'exclamait il y a quelques années "l'écologie, ça commence à bien faire".
Cet homme commence à bien faire, non? Fait-il de la politique? Quelles valeurs défend-il? Se soucie-t-il de l'avenir de son pays? Ou juste du sien? Qui est chaque jour un peu plus pathétique.

Faut savoir dire stop.
Alain Bashung

(1) http://www.liberation.fr/france/2015/12/01/la-cop21-enerve-sarkozy_1417502