mercredi 29 décembre 2021

Que se taisent les morts

C'est une scène qu'on retrouve dans de nombreux films fantastiques : le monstre reste insensible aux coups d'épée, les flèches ne peuvent rien contre sa carapace, même l'effondrement d'une montagne sur son dos le laisse de marbre. Le spectateur croit le monstre définitivement anéanti quand il a disparu en hurlant sous une rivière d'or en fusion. Mais non, il en renait après quelques instants, en rugissant de plus belle.
Ainsi va le régime russe qui n'en finit jamais avec le soviétisme.

Hier, la Cour suprême de Russie a prononcé la dissolution de Memorial International, présentée par Le Monde (1) comme "l’ONG russe la plus ancienne et la plus connue pour ses travaux de recherche sur les répressions de l’époque soviétique". Elle avait été cofondée par le prix Nobel de la paix Andreï Sakharov. Selon le procureur Alexeï Jafiarov, "il est évident que Memorial, en spéculant sur le thème de répressions au XXe siècle, crée une image mensongère de l’URSS comme Etat terroriste ». Il l'accuse, en outre, de « blanchir et de réhabiliter les criminels nazis ». 
"Pour de très nombreux Russes en quête d’informations sur le sort passé de leurs proches, poursuit Le Monde, l’ONG a joué un rôle de premier plan dans la documentation de la terreur stalinienne dont ont été victimes les familles. Elle continue encore aujourd’hui à le faire, alors que ces crimes sont relativisés ou mis sous le tapis. Sa disparition est en ce sens parlante : le pouvoir russe actuel, dont les représentants revendiquent fièrement l’héritage des services de sécurité soviétiques, se débarrasse de la dernière organisation critiquant ouvertement ce legs et pointant les similitudes entre pratiques passées et présentes." 

La veille, lundi, la Justice russe avait condamné l'historien du goulag Iouri Dmitriev à 15 ans de détention. "Pour de nombreuses ONG, relève Le Monde (2)M. Dmitriev paye pour ses recherches sur l’ampleur des répressions staliniennes, une page de l’histoire dont le Kremlin s’efforce de minimiser l’importance car en contradiction avec le discours officiel sur l’héroïsme et la grandeur de la Russie, héritière de l’URSS. M. Dmitriev a passé des décennies à localiser des charniers et à exhumer les restes de victimes. Sous Vladimir Poutine – qui est un ancien officier du KGB, l’organisation héritière des polices politiques de Lénine et Staline –, l’accès aux archives d’Etat concernant ces sujets a été considérablement réduit et les identités des exécutants des purges, classées secrètes. "

Du passé, faisons table rase. Et faisons taire celles et ceux qui veulent entretenir la mémoire de gens qui n'ont jamais existé. Iouri Dmitriev et ses amis voulaient que justice soit rendue aux milliers de prisonniers du Goulag morts en captivité, notamment ceux de Sandormokh, un hameau abandonné en Carélie russe, où ils avaient découvert en 1997 un charnier de centaines de fosses communes.
"Rien ne devait se savoir", écrit Bernard De Backer dans un article glaçant, très documenté, récemment publié sur son blog et consacré au livre Sandormokh - Le livre noir d'un lieu de mémoire, d'Irina Flige (3)," ni l’exécution, ni le nom, ni la date, ni le lieu du supplice et de l’enfouissement des cadavres sous terre, ni, bien sûr, l’identité des auteurs. Quelques survivants ou évadés, témoins d’époque qui passèrent par les îles Solovki entre les deux guerres, membres des familles sans nouvelles de leurs proches, habitants du voisinage ayant vu ou entendu des mouvements suspects conservaient leurs souvenirs en silence." Le silence de l'Etat soviétique était plus lourd encore, plus oppressant, plus effrayant. Un silence totalitaire. Celui du régime de Vladimir Poutine l'est tout autant. Comme s'il endossait la responsabilité des dirigeants soviétiques, l'Etat russe veut à toute force enfermer son passé dans le mensonge. Ce qui a eu lieu n'a pas eu lieu. Les morts inconnus n'ont jamais existé. Le vernis démocratique dont se targuait encore parfois le régime poutinien ne cherche plus à faire illusion. Le monstre est toujours vivant. 

Peuples gores et peineux, aux pensées anomiques
Nations mornes et fangeuses, esclaves anachroniques
Qui marchent lentement sous l'insulte et la trique
Des tribuns revenus de la nuit soviétique
C'est l'histoire assassine, qui rougit sous nos pas
C'est la voix de Staline, c'est le rire de Beria
C'est la rime racoleuse d'Aragon et d'Elsa
C'est le cri des enfants morts à Karaganda
"Karaganda (Camp 99)", Hubert-Félix Thiéfaine (Stratégie de l'inespoir)

(1) https://www.lemonde.fr/international/article/2021/12/29/en-russie-la-dissolution-de-l-ong-memorial-marque-l-ampleur-du-recul-democratique-de-l-ere-poutine_6107571_3210.html
(2) https://www.lemonde.fr/international/article/2021/12/27/en-russie-l-historien-du-goulag-iouri-dmitriev-condamne-a-quinze-ans-de-prison_6107414_3210.html
(3) https://geoculture.blog/2021/11/25/regler-son-compte-a-sandormokh/#more-11978

Il reste possible de continuer à soutenir Memorial, notamment via Memorial France: 
http://memorial-france.org/about-us/

lundi 13 décembre 2021

Miss Foie gras 2022

A quoi tient un pays? Valérie Pécresse, la candidate de la bonne vieille droite à l'élection présidentielle, est très inquiète. Elle ne dort plus, la France est en danger. Les décisions de certains maires écolos lui font craindre le pire. Voici qu'après Strasbourg, Villeurbanne et Grenoble, c'est la ville de Lyon qui annonce qu'il n'y aura plus de foie gras dans les repas officiels. Cette absence de foie gras étouffe Valérie Pécresse. "Y aura du foie gras, parce qu'on aime le foie gras. On aime le foie gras. Je vais vous dire: si être français, c'est de ne plus avoir de sapin de Noël, c'est ne plus manger de foie gras, c'est ne plus avoir la chance d'élire Miss France, à un moment donné, la France, c'est la France et le foie gras, c'est la France." On le voit, l'heure est grave. Déjà que les Français ne portent plus de béret, ne roulent plus en 2CV et ont sensiblement diminué leur consommation de vin, que deviendra la France si ses habitants ne trouvent plus, au pied de leur sapin de Noël, Miss France les bras remplis de boîtes de foie gras ? Ce pays va à vau-l'eau. 

Ce sketch peut être revu sur: https://www.france.tv/france-3/19-20-journal-national/2942171-edition-du-dimanche-12-decembre-2021.html (à +/- 12').

dimanche 12 décembre 2021

Invasion mythique

La France est menacée d'invasion. Elle est déjà occupée par trop d'immigrés. Les Français ne sont plus chez eux. C'est ce que charlemartèlent les Zemmour, les Le Pen, les identitaires qui pensent qu'un bon Français doit s'appeler Jean-Marie et une bonne Française France.
La réalité est bien différente. De nombreux pays regardent éberlués cette France qui se laisse enfermer dans la question de l'immigration. Une fausse question, aux yeux de beaucoup d'observateurs étrangers.

"A peu près tous les voisins de la France ont une plus grande proportion d’immigrés dans leur population", écrit le New York Times. "Au cours de la dernière décennie, l’immigration a moins augmenté en France que dans le reste de l’Europe ou dans d’autres nations développées du monde. (...) En 2020, en France, la part des immigrants dans la population – 13 % – est inférieure à la moyenne des pays de l’OCDE." 
La rubrique CheckNews de Libération (1) constate que "si l’on se fie à la notion d’immigré telle que définie par l’Insee et l’Ined (soit une personne née étrangère à l’étranger, excluant donc celles nées françaises à l’étranger), la France comptait l’an dernier 6,8 millions d’immigrés, soit 10,2 % de sa population totale d’après les dernières données de l’Insee."
Le dernier bilan de l’OCDE indique, souligne encore Libération, qu’en moyenne, entre 2010 et 2019, les entrées d’immigrés dits permanents en France ont représenté chaque année 0,4 % de la population du pays. Un chiffre nettement inférieur à la moyenne des pays de l’OCDE, qui était de 0,69 % sur la période. " On peut dire que notre taux d’immigration est modéré comparé à la plupart des pays occidentaux ", explique Jean-Christophe Dumont, directeur de la division des migrations internationales de l’OCDE.

L’évolution de la part des personnes nées à l’étranger dans la population totale a évolué de 2,2 points sur la dernière décennie en France: elle était de 11,6% en 2010 et de 13,1% en 2020. 2,2% d’augmentation moyenne donc, quand elle était de 2,9 au Royaume-Uni, de 3,3 en Allemagne ou de 4 en Belgique.
" Ces dernières années, on observe que l’immigration en France est, en proportion, parmi les plus faibles, quelle que soit la mesure considérée ", analyse Marine Haddad, chercheuse à l’Ined et spécialiste de l’immigration.
Ce qui est vrai, explique Libération, c'est que la France est un vieux pays d’immigration, qui a une deuxième génération (ayant au moins un parent immigré) bien plus importante que ses voisins. Le pays, selon une étude de l’Insee, était l’un des seuls pays européens à compter davantage d’enfants de la deuxième génération que d’immigrés. Comparativement à ses voisins, le pays " se caractérise par des flux migratoires plus anciens, mais aussi plus faibles sur la période récente ", écrivait déjà l’Insee en 2012. Voilà pourquoi on est très loin d'une invasion. Pourquoi aussi tous les enfants français ne s'appellent pas Eric ou Marine. On se calme. On respire.

mercredi 8 décembre 2021

Lettre à un jeune maire séduit par un prêcheur de haine

Bonjour, Spike Groen.

Je te connaissais peu jusqu'à présent. Nous siégeons tous deux depuis un an et demi dans le Conseil de notre Communauté de communes. De prime abord, je te trouvais plutôt sympathique. J’admirais ton élégance vestimentaire, ton look entre D’Artagnan et Marcel Proust. Et puis surtout, je me réjouissais de voir qu’un jeune homme de 19 ans était capable de se mobiliser pour sa commune, de prendre ses responsabilités et d’assumer la fonction de maire pour éviter que son village, faute de candidats à l’élection municipale, soit administré par la préfecture.
Et voilà que je découvre que derrière cette allure de dandy et ce militant pour l’autonomie locale vit un fervent supporteur d’un prêcheur de haine. Tu as créé un comité de soutien à l’épouvantail Zemmour et es fier de parader à ses côtés.

Tu as un nom et un âge qui auraient dû te pousser à te mobiliser pour le climat, pour l’avenir de la planète et de ses habitants. Et voilà que tu soutiens un candidat qui n’a d’yeux que pour un passé mythifié, qui réécrit l’Histoire et veut réhabiliter Pétain.
Comment peut-on être si vieux à 21 ans, me demandé-je ? Comment peut-on soutenir un personnage qui n’a pour programme que la fermeture des frontières ? Surtout quand on vient soi-même d’ailleurs.

Tu viens de Frise, je viens de Wallonie et près de cinquante ans nous séparent. Quand j’avais ton âge, je militais contre l’apartheid et le stalinisme, je me définissais comme pacifiste. Toi, tu soutiens un candidat qui a fait de l’agressivité contre les autres sa marque de fabrique. Fabricant de haine, voilà ce qu’il est. Là où il faudrait unir, il divise. Là où il faudrait jeter des ponts, il installe des barbelés. L’urgence aujourd’hui, c’est de créer des liens, d’apaiser un monde où se multiplient les conflits, d’accueillir celles et ceux qui cherchent un refuge, de lutter contre le réchauffement climatique qui menace l’avenir de l’humanité. Mais Zemmour se contente de cracher son fiel, à mille lieues des priorités actuelles. Comment peux-tu faire un héros de ce triste sire ? Comment ce cauchemar peut-il te faire rêver ?

Dans l’article que Le Monde t’a consacré pour essayer de te comprendre, je lis que tu as placé un drapeau bleu-blanc-rouge sur le portail de ta mairie. Derrière le drapeau français, il y a une devise: liberté - égalité - fraternité. Ton héros défend la première de ces valeurs (liberté de dire et de faire ce que l’on veut), mais piétine à chacune de ses interventions les deux autres. On aimerait l’entendre sur l’égalité entre les êtres humains, entre les hommes et les femmes, entre ceux qui sont nés ici et ceux qui viennent d’ailleurs. On aimerait savoir, s’il est encore républicain, comment il entend faire vivre la valeur de fraternité, lui qui ne connaît pas le mot « accueil » et ne rêve que de refoulement, de rejet, d’exclusion. Il porte la vision d’une France rance, rabougrie, refermée sur elle-même. Une France triste.

Depuis toujours, depuis qu’il diffuse ses idées nauséabondes sur les plateaux de télé, Z. me fait penser à Tullius Detritus, ce personnage de « La Zizanie », album des aventures d’Asterix. Il a pour mission de semer la discorde dans les rangs gaulois.
Raciste assumé, condamné pour incitation à la haine raciale, nostalgique du pétainisme, Zemmour conspue le « Système » qui l’a fait. Connu comme journaliste polémiste grâce à la télé, il crache sur les médias et sur ses ex-confrères et consœurs, dénonce une élite à laquelle il appartient, sème la haine mais joue les victimes quand il la reçoit en boomerang. J’aimerais comprendre ce qui peut te séduire chez un personnage qui m’apparaît aussi repoussant.

Le Monde te dit « angoissé par une hypothétique progression de l’islam politique ».
Sais-tu que ton champion, parlant des djihadistes, a affirmé qu'il "respecte des gens qui meurent pour ce en quoi ils croient - ce dont nous ne sommes plus capables » ? Il a même, dit-il, de l'admiration pour eux : "des gens qui meurent pour leur foi, on devrait plutôt être admiratifs que méprisants". Le parquet a ouvert une enquête à son égard pour apologie de terrorisme.
Te rends-tu compte que l’islamisme et l’extrême droite sont les deux faces d’une même triste médaille ? Celle de ceux qui sont sûrs d’avoir raison contre tous les autres, de ceux qui ont fait de la haine pour ceux qui ne sont pas ou ne pensent pas comme eux une valeur.

Depuis quatre ou cinq ans, j‘anime, avec d’autres bénévoles qui continuent à croire en la solidarité (une notion qui semble étrangère à ton mentor), des ateliers d’apprentissage du français auprès de demandeurs d’asile accueillis à Argenton-sur-Creuse. Certains d'entre eux pratiquent déjà un peu l'allemand, l'italien ou le turc, parce que leurs errances et surtout les rejets dont ils ont été l'objet les ont amenés à passer du temps dans ces pays. Aujourd'hui, ils apprennent le français avec l'espoir de s'intégrer ici. J’aimerais que tu rencontres un jour ces personnes, venues du Soudan, d’Afghanistan, du Tibet, du Pakistan, de Mauritanie, de Géorgie, de Guinée, du Nigéria, de tant de pays qu’elles ont fuis à cause de la guerre, de la misère, des menaces. Ces gens ont connu la faim, la soif, le rejet, la prison, la haine, le désespoir, la torture parfois. Ils ont tous une même envie, celle que nous avons tous : vivre en sécurité. Et pour cela, trouver un travail dans le pays qui voudra bien leur donner leur chance.
Connais-tu l’association « Patrons solidaires » ? Elle a été créée par des artisans - boulangers, bouchers, électriciens, menuisiers, etc. - qui peinent à recruter et se battent pour que les jeunes réfugiés africains ou asiatiques qu’ils ont recrutés puissent conserver leurs papiers. Ils ne trouvent quasiment plus de Français - de souche, comme vous les appelez - pour exercer ces professions. Te rends-tu compte que ton Zemmour et la fille à papa Le Pen sont totalement déconnectés de l'économie réelle ? Ils sont les premiers à déplorer la disparition des petits commerces et des artisans dans les campagnes, sans vouloir voir que ce sont de jeunes migrants qui les sauveront. Zemmour incarne le douanier (qui n'est pas un imbécile, puisqu'il est douanier) raciste du sketch de Fernand Raynaud: "J'aime pas les étrangers qui viennent manger le pain des Français". Il chasse l'étranger et se retrouve sans pain. L'étranger était boulanger.

Les chiffres vous donnent tort, à vous qui avez peur d’être envahis. Sais-tu que l'immigration dans les pays de l'OCDE a atteint en 2020 le plus bas niveau enregistré depuis 2003 ? Une baisse d'au moins 30%. La commissaire européenne aux Affaires intérieures, Ylva Johansonn, estime qu'un aspect positif de la pandémie de coronavirus est d'avoir rendu "évident que nous avons besoin des migrants" sur le marché du travail. A la veille de l’ouverture des stations de sports d’hiver, on voit tous ces employeurs désespérer de trouver des employés. Sais-tu que les immigrés ne coûtent globalement rien à la société ? Leur impact selon les pays et les années oscille entre -1% et +1% du PIB. Et sur la période 2006-2018, il est même le plus souvent positif. Selon l’OCDE toujours, "mieux intégrer les immigrés peut contribuer à renforcer les gains budgétaires. Par exemple, le simple fait de combler l'écart d'emploi entre les personnes d'âge actif issues de l'immigration et celles nées dans le pays, de même âge et de même niveau d'études, pourrait accroître la contribution budgétaire nette totale des immigrés de plus d'un tiers de point de PIB dans un pays sur trois". Mais l'extrême droite préfèrera toujours les slogans simplistes aux chiffres, la haine à la raison. 

Voilà, Spike, mes questions sont nombreuses et réelles. Vraiment, je ne peux te comprendre. J’espère que tu y répondras.
Je ne sais par quelle formule de politesse terminer cette lettre. Certainement pas par « cordialement » ou « amicalement ». Même pas par « au plaisir de te lire ». Je ne suis pas sûr d’y avoir du plaisir. Mais je rêve un peu, quand même, que ce soit le cas, espérant que tu qualifieras demain ton positionnement d'aujourd'hui d’erreur de jeunesse. 

Michel Guilbert 

Post-scriptum: La réponse de S. Groen et diverses réactions sont lisibles dans les commentaires (cliquez ci-dessous).
N'hésitez pas à m'envoyer les vôtres.

(Re)lire sur ce blog: "Ce vieil idéal oublié", 26.11.2021.

lundi 6 décembre 2021

France (Info) soumise

S'il est élu, Jean-Luc Mélenchon nous annonce qu'il sera un président sud-américain. Mais lequel ? On se posait récemment la question (1). On a, depuis hier, la réponse: ce sera Fidel Castro. Le MélenChe entend mettre la télévision publique à son service. Elle est tenue, sous peine d'être accusée de trahir le peuple, de diffuser en direct les discours du futur Lider Maximo.
Hier, en meeting à Paris, le candidat de La France insoumise s'adressait à son peuple et trois chaînes d'information en continu sur quatre retransmettaient en direct et sans filtre son message essentiel. Elles en faisaient de même avec le discours, tout aussi important, de l'épouvantail Z. Les écrans de ces trois chaînes indiquaient que les images étaient fournies par le candidat. Le son l'était aussi. BFM TV, C-News et LCI se sont ainsi "transformées en robinets à propagande électorale". Elles remettent "les clés de leur antenne à des communicants", constate la journaliste de France Inter Sonia Devillers (2). Elle rappelle qu'en 2019 LCI s'était fait remonter les bretelles par le CSA pour "non maîtrise de son antenne". Mais que ce rappel à la déontologie journalistique est restée lettre morte. "Sacrée défaite du journalisme", déplore-t-elle. France Info a, heureusement, refusé de jouer ce jeu dangereux. Ce dont MélenChe s'est plaint pendant son meeting. Il a remercié "les chaînes de télévision qui accomplissent leur devoir civique en nous permettant de nous exprimer devant tous les Français qui le souhaitent, ce qui n'est pas le cas du prétendu service public" (acclamations). On sait maintenant à quoi ressemblerait le service public dans un régime tenu par la France insoumise: un service soumis.

(1) (Re)lire sur ce blog "Le MélenChe, un festival à lui tout seul", 15.11. 2021.
(2) https://www.franceinter.fr/emissions/l-edito-m/l-edito-m-du-lundi-06-decembre-2021