vendredi 23 juin 2023

Centrale beauté

L'argument principal des opposants aux éoliennes, c'est qu'elles gâchent les paysages. Les anti-éoliennes sont souvent, explicitement ou dans les faits, pro-nucléaires. On les comprend : les centrales nucléaires se fondent dans le paysage.





jeudi 22 juin 2023

Vélophobie

Le vélo, c'est pour les touristes. Et encore, ceux qui roulent sur les axes prévus pour eux. Ailleurs, ils ne sont pas toujours les bienvenus.
Vous quittez Mer, petite commune du Loir-et-Cher (41) au nord de la Loire, avec l'intention de franchir celle-ci pour vous rendre à deux pas de là, à Muides-sur-Loire, sur la rive droite. Mais la route qui mène au pont et qui fait à peine plus de deux kilomètres, est interdite aux vélos. S'il ne veut pas se mettre en contravention et moins encore risquer sa vie, le cycliste n'a qu'à redescendre vers Suèvres pour trouver le parcours de La Loire à vélo, itinéraire touristique, pour accéder au pont franchissant la Loire qui dispose, lui, d'une piste cyclable. Le détour : 10 kilomètres.
Les habitants de Mer qui veulent se rendre à Muides (et inversement) n'ont donc pas d'autre choix que la voiture. Faut-il comprendre que ces deux communes sont restées coincées dans la culture des années '60, celle du tout à la bagnole ? On le craint. En attendant, on ne mettra plus les pieds ou moins encore les roues ni à Mer ni à Muides tant que ces communes ne seront pas entrées dans le XXIe siècle.

mardi 13 juin 2023

La vie béate

Il est temps que la presse cesse de parler de ce qui va mal. Dans les Pyrénées-Orientales, nous dit Le Monde (1), "le secteur du tourisme accuse les médias de faire baisser les réservations des estivants, en rendant compte de la sécheresse. Elle est pourtant bien réelle, et le préfet a réuni, le 6 juin, élus locaux et acteurs économiques pour commencer à envisager des solutions de long terme". Laissons venir les touristes comme si tout était normal. Ils découvriront toujours assez vite les limitations d'eau et auront la chance de recevoir des bouteilles d'eau en plastique pour cuisiner ou se rafraîchir.
Cessons de parler des méfaits du tabac sur la santé. Les buralistes ont le droit de gagner leur vie en détruisant celles des autres. De toute façon, il faut bien mourir de quelque chose.
Arrêtons d'inviter les consommateurs à acheter de manière responsable et respectueuse des droits de l'homme. S'ils achètent des produits plus chers, ils n'auront plus les moyens d'aller en vacances dans les Pyrénées-Orientales.
Sans doute faudrait-il aussi ne plus parler de la guerre d'Ukraine. Tous ces reportages y ont fait baisser drastiquement les investissements.
Cessons de regarder autour de nous, gardons la tête dans le sable. Mais craignons les coups de soleil sur les fesses.

(1) https://www.lemonde.fr/planete/article/2023/06/08/chaleur-et-secheresse-sont-de-retour-sur-une-partie-de-la-france_6176663_3244.html


mardi 6 juin 2023

Indomptable

Il est de ces hommes qui ne plient pas. Malgré les menaces de goulag, il continue à dénoncer haut et fort la dérive fasciste du régime de Poutine. Fin avril 2022, au pied du Kremlin, il brandissait une pancarte qui disait : « URSS 1945 : le pays vainqueur du fascisme. Russie 2022 : le pays du fascisme victorieux ». (1) Peu avant, il avait déjà affiché la phrase suivante : « Notre refus de savoir la vérité et notre silence font de nous les complices de crimes ». Oleg Orlov, l'un des fondateurs de Memorial, sera alors arrêté, pour la cinquième fois en un peu plus d'un an. Après-demain, il sera jugé, soupçonné à la fois de "réhabilitation du nazisme" et de discrédit de l'armée russe pour avoir désigné la Russie comme un Etat fasciste. Donc, si on comprend bien, pour soutenir le fascisme et pour le dénoncer. Le régime poutinien est aussi orwellien. Les contradictions font partie de son ADN. Elles existent et n'existent pas.

"La Russie peut-elle aujourd’hui être considérée comme un Etat fasciste ?, se demande Jonathan Littell (2). Pour ma part, la réponse ne fait pas de doute." L'écrivain s'appuie, comme le fait Orlov dans un texte qu'a notamment publié Mediapart, sur la définition du fascisme élaborée en 1995, sur demande du président Eltsine, par la très officielle Académie des sciences de Russie : « Le fascisme est une idéologie et une pratique qui affirment la supériorité et l’exclusivité d’une nation ou d’une race particulière et qui visent à inciter à l’intolérance ethnique, à justifier la discrimination à l’encontre des membres d’autres peuples, à nier la démocratie, à établir le culte du leader national, à utiliser la violence et la terreur pour supprimer les opposants politiques et toute forme de dissidence, à justifier la guerre comme moyen de résoudre les conflits interétatiques. »
"Difficile, en lisant cette définition, estime Jonathan Littell, de ne pas l’appliquer à Poutine, qui nie jusqu’à l’existence même de l’Ukraine ou de gens se considérant comme Ukrainiens, qui a lancé une atroce guerre d’agression au nom d’une idéologie impériale et ethnique, qui a détruit avec méthode la démocratie péniblement établie dans son pays dans les années 1990 et qui emprisonne aujourd’hui les moindres de ses opposants, y compris des adolescents ayant « liké » un post antiguerre ou des parents d’enfants ayant montré à l’école un dessin en faveur de la paix."

Après-demain, Oleg Orlov sera selon toute vraisemblance condamné et rejoindra en prison d'autres opposants qui, comme lui, ont refusé de quitter leur pays. "Des hommes comme Orlov et les autres, profondément imbus d’un amour de leur pays indissociable du sens de la justice, se battent pour ce que ce pays devrait être, et non pas pour ce qu’il est. Ils reconnaissent que c’est à eux, les Russes, et à personne d’autre, de transformer leur pays, de le nettoyer du virus fasciste pour en faire un pays libre et démocratique. Et, dans une logique parfaitement russe, ils pensent – à tort ou à raison – que ce combat ne peut pas être mené en désertant, et que si certains doivent être emprisonnés, ou même mourir, c’est le prix à payer pour la liberté de tous. Et aussi pour prouver au reste du monde que les crimes commis en Ukraine, comme en Tchétchénie, en Syrie et ailleurs, ne le sont pas par « les Russes » mais par « des Russes » précis, le régime fasciste qui a capté le pouvoir et les richesses du pays et les millions de ceux qui le suivent, par haine de l’autre, par avidité, par bêtise, par paresse, par peur.
Aller en prison, pour un homme comme Orlov, c’est aller là où il doit être : le seul endroit, dans son pays enfermé, où peut se trouver un homme libre." 
Ces opposants comme Orlov, conclut Jonathan Littell, le régime de Poutine, "un régime de mafieux enivrés de gloriole impériale",  "peut les emprisonner ou les tuer, mais il ne peut pas les faire taire".

(1) ou autre traduction : L’URSS de 1945, un pays qui a vaincu le fascisme. La Russie de 2022, un pays vaincu par le fascisme. 
(2) https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/06/06/jonathan-littell-des-hommes-comme-oleg-orlov-se-battent-pour-ce-que-la-russie-devrait-etre_6176335_3232.html
Portrait d'Oleg Orlov : https://www.la-croix.com/Monde/Oleg-Orlov-pacifiste-russe-indomptable-2022-07-14-1201224878

Post-scriptum :

Perpétuer la mémoire historique
des victimes des répressions
en URSS et la transmettre
aux générations futures, 
pour défendre les droits humains 
dans les régimes autoritaires.
UNE OPINION N’EST PAS UN CRIME !
SOUTENEZ OLEG ORLOV !

Aujourd'hui, jeudi 8 juin à 14h30 (heure de Moscou) commencent les audiences du procès contre Oleg Orlov pour « discrédit répété de l'armée (russe) ».

Le coprésident du Centre « Mémorial » est poursuivi pour avoir condamné la guerre en Ukraine.

Il risque trois ans de prison. Oleg Orlov est âgé de 70 ans.

Depuis 1990, il travaille pour Memorial dans des zones de conflits armés, au péril de sa vie. Pendant les guerres en Tchétchénie, il a lutté contre les « camps de filtration » et a enquêté sur les meurtres de civils.

En juin 1995, en tant que membre du groupe Kovalev, il s'est volontairement échangé contre 1 500 otages à Boudionnovsk.

Orlov a documenté les violations des droits de l'homme en Géorgie à la suite de l'agression russe et en 2014-2016 dans la zone de conflit dans l'est de l'Ukraine. 

En 2022, Memorial a été l'un des lauréats du prix Nobel de la paix.

Aujourd'hui, Memorial, qui s'est battu pour la paix pendant de nombreuses années, est persécuté, à travers lui, pour ses opinions anti-guerre.

Signez la pétition de soutien à Oleg Orlov !

Mémorial-France

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OLEG ORLOV EN 2:19 MINUTES SUR NOTRE CHAÎNE YOUTUBE
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dimanche 4 juin 2023

Barbares

Bizutage en France, baptême en Belgique, le nom change, mais les pratiques barbares sont les mêmes. D'un autre âge, elles se poursuivent, donnant l'occasion à des jeunes d'asseoir le pouvoir qu'ils se donnent et d'exercer leur agressivité et leur mépris, leur violence parfois, sur les nouveaux étudiants.
Le verdict d'un procès en appel en Belgique fait scandale, il laisse penser à une (in)justice de classe.
Dix-huit étudiants de l’Université catholique de Leuven étaient poursuivis pour avoir fait subir en 2018 à Sanda Dia, un étudiant belgo-mauritanien, un véritable calvaire qui a entraîné sa mort. Ils n'ont été condamnés qu'à des travaux d’intérêt général.
Durant trois jours, le bleu fut forcé d’ingérer des quantités d'alcool et quatre litres d’huile de poisson, à haute teneur en sel, de la bouillie pour chien et une souris malaxée, fut arrosé d'urine et plongé dans un trou d'eau glacée. Ses tortionnaires (y a-t-il un mot plus adéquat ?) l'ont empêché de dessoûler en le privant d’eau. L'un d'entre eux, alors que le jeune homme était inconscient, a jugé « pas utile » de l’envoyer à l’hôpital, tandis qu'un autre le filmait plutôt que de l’aider et qu'un troisième envoyait un message estimant que : « Il est bon pour la poubelle ».
Sanda Dia est  décédé d’hypothermie – la température de son organisme avait chuté à 28,7 degrés – et d’un œdème cérébral. 

Cette bande organisée a un nom : le cercle Reuzegom, réputé depuis longtemps pour sa violence et qui voulait des baptêmes « fous et brutaux ». Le fait que Sanda soit noir n'est sans doute pas étranger aux tortures inhumaines dont il a été victime. Mais "la question inévitable du racisme de Reuzegom a été survolée, constate Le Monde, alors même que certains de ses membres ne cachaient pas leurs convictions – l’un d’eux traitait Sanda de « nègre », un autre disait d’Hitler qu’il était « [leur] bon ami allemand »."

Le procureur réclamait des peines de dix-huit à cinquante mois de prison, mais la cour n'a condamné les prévenus qu'à des travaux d’intérêt général (de deux cents à trois cents heures) et à une amende de 400 euros. Leur condamnation ne sera pas inscrite dans leur casier judiciaire et leur identité n'a pas été révélée. C'est qu'il s'agit de « ne pas hypothéquer l’avenir » des jeunes gens concernés, 
Celui qu'on appelait « l’enfant du dimanche », "parce qu’il était joyeux, rayonnant et ouvert aux autres", n'a, lui, plus d'avenir. Pour avoir croisé une meute de chacals dorés. Une espèce protégée.

https://www.lemonde.fr/international/article/2023/05/31/en-belgique-la-clemence-de-la-justice-apres-un-bizutage-fatal-suscite-l-amertume_6175492_3210.html