mercredi 31 juillet 2013

La femme n'est pas un homme comme les autres

Qu'est-ce qu'un philosophe? C'est, nous dit Robert (le petit) se plaçant dans une perspective historique, "une personne qui s'appuie sur la raison, et récuse la révélation, la foi". C'est aussi plus couramment une "personne qui pratique la sagesse, conforme sa vie à ses principes".
Omer Tugrul Inançer est-il un vrai philosophe? On a du mal à le croire, bien qu'il nous soit présenté comme un philosophe islamique, ce qui - déjà - est contraire à la première définition. L'homme en question n'aime pas la vie et ses manifestations physiques. "Voir les femmes enceintes en public n'est pas seulement immoral, mais aussi laid", a-t-il déclaré sur la chaîne publique TRT. "Après sept-huit mois, les femmes enceintes devraient sortir avec leur mari en voiture pour prendre l'air, mais le faire dans la soirée" (1), a-t-il ajouté, ne se souciant visiblement pas de la température de la soirée, mais de la sienne. On voit par là qu'il est plus névrosé que philosophe. Très sainement, dans différentes villes turques, des femmes enceintes et des hommes portant des oreillers sous leur chemise ont manifesté contre lui.

A Brooklyn, dans le bus 110, les femmes sont priées de s'asseoir à l'arrière. Il s'agit de ne pas choquer les ultra-orthodoxes hassidiques coutumiers de cette ligne qui relie Williamsburg et Borough Park. Ces hommes n'ont pas le droit de regarder les femmes. Ils contemplent donc leurs chaussures, plus admirables. Ou moins excitantes, allez savoir. Les femmes, hassidiques elles aussi, se plient à la règle et la font respecter par celles qui veulent l'ignorer, malgré le panneau spécifiant que "la discrimination fondée sur le sexe est interdite". (2)

Ailleurs, c'est le voile qui est imposé à des millions de femmes au nom de la décence et de la religion, même si l'université al-Azhar, centre théologique de l'islam sunnite,  estime qu'il s'agit d'une tradition et non d'une obligation religieuse (3). 
L'homme a le droit de s'exhiber, de marcher tête et torse nus,  d'avancer le poitrail et le sexe en avant, tel un coq. La femme doit se cacher. 
Le pape François, "proche des pauvres et partisan d'une Eglise missionnaire et ouverte sur le monde"  (4) s'oppose, comme ses prédécesseurs, à l'ordination des femmes. La religion est affaire d'hommes.
A-t-on le droit d'être une femme? Oui, mais le plus discrètement possible, disent les religions.
En 2013, le féminisme a plus que jamais du sens. "Le féminisme est intimement lié à la défense de la laïcité, estime Caroline Fourest (5), mais envers toutes les religions patriarcales et tous les intégrismes. Etre féministe, c'est être à la fois laïque et antiraciste."
"Ca fait très longtemps que les monothéismes ont noué un pacte avec le patriarcat, dit-elle. Ils avancent ensemble." Et c'est en marche arrière.

(1) "Un philosophe islamique turc engendre la polémique", Libération, 27 juillet 2013.
(2) "Les femmes et les enfants après", Télérama, 24 juillet 2013.
(3) Charlie Hebdo, 24 juillet 2013.
(4) Télérama, 31 juillet 2013.
(5) "Le féminisme est l'avenir de l'homme", Charlie Hebdo hors série, avril-mai 2011.

samedi 20 juillet 2013

Pierre qui roule n'amasse pas réflexion

Va-t-on réduire les vitesses maximales sur les routes françaises? Un récent rapport le préconise. 
La sécurité routière et l'environnement y gagneraient. A 120 km/h sur autoroute, 80 sur routes normales et 30 en ville, les accidents seraient moins nombreux et le CO2 moins abondant. Mais le bon sens des spécialistes n'est pas celui des automobilistes. Oh la!, disent certains d'entre eux, n'allons pas trop vite. A prendre ce type de décisions, veulent-ils dire. "C'est n'importe quoi, il est plus dangereux de rouler lentement que vite", affirme un jeune conducteur (1). On espère qu'il roule mieux qu'il ne réfléchit.  Une réduction d'un seul pour cent des vitesses maximales entraîne une diminution de quatre pour cent du nombre de morts sur les routes, indiquent des études qui constatent aussi qu'un usager dit faible ne peut sortir indemne d'une rencontre avec une voiture si celle-ci roule au-delà de 30 km/h.
Le lobby des gentils automobilistes s'insurge déjà. Le changement, sera-ce maintenant? 

(1) JT de France 3, 18 juillet, 19h30.

Post-scriptum:
Nouvelle preuve du haut niveau de réflexion de l'automobiliste lambda qui n'envisage évidemment pas de diminuer sa vitesse: un lecteur de la Nouvelle République (2) estime que la diminution de la vitesse à 80 km/h sur route et à 120 sur autoroute va augmenter le nombre d'accidents et donc de morts "dûs à l'endormissement". Diable! Voilà donc un automobiliste parfaitement éveillé à 90 ou 130 km/h, mais qui s'endort à 80 ou 120. Un cas clinique intéressant.
Autre argument pour refuser de lever le pied: il polluerait plus en roulant moins vite. Un argument qui ne tient pas... la route. Voilà un an, traversant la Wallonie d'est en ouest (soit pas loin de 200 km), je l'ai fait par le chemin des écoliers: des nationales et des petites routes de campagne, limitées à 50, 70 ou 90 km/h. Résultat: une consommation moyenne de 3,2 litres/100 km.

(2) 30 juillet 2013.

jeudi 18 juillet 2013

Aveugle admiration

En vacances, l'homme a besoin de rêve, d'évasion. Il doit fuir son quotidien si triste, où il est dirigé par des tricheurs. Partout, en France, en Espagne, en Grèce, en Slovénie et dans tant d'autres pays, les scandales politiques se multiplient. On ne compte plus les élus qui contournent le fisc et la loi. L'homme n'a que mépris pour eux.
Il se tourne donc vers le Tour de France. Le maillot jaune est insolent de puissance. Il suscite l'admiration, même si on ne peut s'empêcher de le suspecter de dopage. Mais qu'importe pour l'homme. Ils le font tous et on n'y pourra jamais rien, dit un fana du Tour. Ce qui compte, c'est le spectacle, estime un autre (1). Il est vrai qu'ils ont du mérite. Qui d'autre que les coureurs du Tour pourrait supporter de traverser une haie de Superman, de Batman et autres Supportmen qui hurlent à leurs côtés et leur agitent des drapeaux devant le guidon, comme devant de vulgaires taureaux?
Les supporters peuvent aboyer, la caravane passe.

(1) entendu au Journal de France Inter ce 18 juillet, 8h.

jeudi 4 juillet 2013

A Monsieur Albert

Cher Monsieur De Tweede,
je comprends parfaitement votre décision de passer la main à près de quatre-vingts ans. Personnellement, un peu plus jeune que vous, j'ai décidé de faire de même. Il faut lutter contre le chômage des jeunes, que diable! Je n'ai qu'un regret: c'est que vous cédiez votre place à votre fils. Ne craignez-vous pas que cela soit vu comme du népotisme?
Si vous m'aviez consulté, je vous aurais conseillé de nommer à votre place le marquis de Motte. C'est un homme dans la fleur de l'âge, plein d'expérience. On le nomme déjà, dans sa baronnie, Wapiléon Ier. Devenant roi, il aurait donné du travail à un ministre-président de la Région wallonne, à un ministre-président de la Communauté française, à un vrai bourgmestre de Tournai et à quelques autres personnes qui se se seraient soucié de l'Eurométropole et de la Wallonie dite picar(d)esque.
Vous n'avez jamais été élu, Monsieur De Tweede. Vous avez bien raison, vous n'avez de compte à rendre à personne. Les électeurs sont versatiles. Voyez ce qui arrive dans le même temps à Monsieur Morsi, chef de l'Etat égyptien. Il a été élu voilà un an et aujourd'hui l'armée le "dépose" comme un vulgaire dictateur parce que le peuple, dont le changement d'humeur est une des caractéristiques, n'en veut plus. 
L'Histoire est aussi étrange que les peuples, Monsieur De Tweede, même si parfois elle hoquète comme ces moteurs que vous affectionnez.
Votre gentil fils vous remplacera aussi utilement que vous avez gentiment remplacé votre gentil frère à la tête de ce gentil pays.
Les journalistes affirment que vous allez devenir un citoyen comme les autres. Je vous souhaite la bienvenue dans la normalité, Monsieur de Tweede. Si vous avez besoin de conseils pour remplir votre déclaration fiscale, pour prendre le bus ou pour monter une tente, je suis à votre disposition.