jeudi 27 avril 2017

Risque d'incendie

Quand les enfants gâtés de la démocratie jouent avec les allumettes ils risquent fort non seulement de se brûler, mais bien plus de mettre le feu à la maison et même à toute la ville. La France et l'Europe entière pourraient y passer. Il y a des moments où chaque (oui, chaque!) électeur porte une responsabilité historique.
Un ami néerlandais me disait récemment que les dictatures sont dangereuses, on retrouve à leur tête des fous furieux. Mais que la démocratie, c'est mieux: on peut choisir  soi-même d'être présidé par les fous furieux. Ou de les laisser élire. Les abstentionnistes aux analyses sommaires, on les appellera les idiots utiles de Marine Le Fiel.
En attendant, j'ai décidé (y arriverai-je?) de ne plus suivre les infos franco-françaises, partagées entre  d'un côté la course derrière la fille à papa: MLP sauve une usine, MLP fait du bateau, MLP aime les vaches, MLP déteste l'Europe, MLP adore l'Europe, et de l'autre côté les fines bouches du "7 mai sans moi" qui veulent rester sans voix et propres sur eux.

A lire à ce sujet cet excellent appel (plus mesuré que mon billet):
http://www.liberation.fr/elections-presidentielle-legislatives-2017/2017/04/27/lettre-a-mes-amies-de-gauche-qui-ne-voteront-pas-contre-le-pen-le-7-mai_1565588

mercredi 26 avril 2017

Le temps de l'hystérie

Si de plus en plus de Français sont coincés dans une vision totalement personnelle (égoïste?) de l'avenir de leur société, il faut en finir rapidement avec ce système d'élection présidentielle. Ils sont nombreux ceux qui prétendent ne pouvoir ou vouloir voter que pour le candidat qui leur convient totalement, sinon ils ne voteront pas, et les conséquences de leur abstention leur importent peu. Un porte-parole de Mélenchon, très énervé, affirme que personne ne peut lui demander d'adhérer au projet de Macron (1). Mais qui le lui demande? Tous les électeurs de gauche qui ont voté pour Chirac en 2002 n'adhéraient aucunement à son programme, mais avaient simplement fait le choix de défendre l'intérêt collectif de la France et de lui éviter l'abject.
Heureusement, à Orléans ce soir, une conseillère Front de gauche appelle à une manifestation contre la Le Pen et annonce qu'elle votera Macron sans pour autant partager son programme (2).
Et Nicole Ferroni, elle, assume aussi (3).
"Sans moi le 7 mai", certains se déchaînent, nous dit-on. Et sont très fiers de constater que leur non-position est partagée par des centaines de milliers de tweeters (1). Une diffusion massive serait-elle signe d'intelligence? A ce compte-là, TPMP serait la meilleure émission de la télé française et Guillaume Musso devrait être Prix Nobel de littérature. Le slogan a été lancé par le site jeuvidéo.com. Faut-il expliquer à ces gens qu'il ne s'agit pas d'un jeu, que nous sommes ici dans la réalité et que celle-ci dès le 8 mai pourrait être très brutale si la fille à papa l'emporte grâce à l'absention?

L'hystérie gagne la France d'extrême droite comme d'extrême gauche et une bonne partie des médias qui transforment en information capitale le moindre commentaire du premier quidam venu ou montent en épingle la moindre déclaration de soutiens de l'un ou l'autre candidat.
Les arguments les plus stupides, les plus simplistes se succèdent. Les candidats sont poussés à faire n'importe quelle promesse. Les travailleurs de Whirlpool attendent des promesses qui ne concernent pas un président de République. François Hollande en sait quelque chose, lui qui en 2012 s'était engagé trop légèrement  à sauver les aciéries de Florange. Macron reste prudent et refuse de s'engager à sauver l'entreprise. La fille de Jean-Marie l'a suivi comme un roquet, prête à le mordre au mollet et à promettre n'importe quoi. Avec elle, l'usine ne fermera pas, elle s'y engage, prenant en otage les travailleurs d'Amiens (4). Elle - la députée européenne -  qui, il y a une semaine,  a fait enlever le drapeau européen du cadre de l'émission de TF1 où elle était invitée, s'affirme maintenant comme une européenne convaincue. Elle est passée à la vitesse supérieure, celle où elle multiplie plus que jamais les mensonges et les volte-face et tord à sa façon la réalité (5). La candidate de la marche arrière se trumpise un peu plus (oui, c'est possible). Demain, elle annoncera qu'avec elle quatre millions d'emplois seront créés, que la France deviendra la première puissance mondiale, qu'elle guérira les lépreux et multipliera les pains et que son père recevra le Prix Nobel de la paix. 

Je me trompe ou cette France devient folle? Si vous avez des cartons utiles pour un déménagement, je suis preneur.

(1) France Inter, journal de 13h, 26 avril 2017.
(2) France 3 Centre, journal de 19h, 26 avril 2017.
(3) https://www.youtube.com/watch?v=9RwcEL641sw
(4) http://www.lemonde.fr/election-presidentielle-2017/article/2017/04/26/marine-le-pen-s-invite-dans-la-visite-d-emmanuel-macron-a-whirlpool_5117926_4854003.html

mardi 25 avril 2017

Le temps des pharisiens

Le système électoral français est fait comme cela: vicié dès le début. Au premier tour, c'est du premier choix; au second, du deuxième. C'est comme ça. Faut faire avec. Pour l'instant en tout cas.
Mais certains ne veulent rien savoir et refusent de choisir, affirmant que Le Pen et Macron sont bonnet blanc et blanc bonnet. Visiblement, il semble que l'irrationnel soit contagieux.
Contrairement à ses porte-parole, Jean-Luc Mélenchon a (jusqu'à présent?) refusé de se prononcer, il ne veut pas donner de consigne de vote à ses électeurs. C'est que ceux-ci sont adultes et capables de savoir ce qu'ils ont à faire. Ses fans y voient la preuve que le chef des Insoumis est un grand  démocrate: il va consulter ses électeurs avant de se prononcer. Ainsi donc, l'homme qui a combattu, plus d'une fois, virulemment et avec brio, les Le Pen, père et fille, qui a exprimé tout le mal qu'il pensait du FN, qui a alerté sur le grave danger qu'il représente ne saurait plus quelle position tenir? Le voilà qui rompt avec une tradition républicaine de gauche. Curieux positionnement pour celui qui vient de s'installer comme le leader de cette gauche et ne dit rien ni ne négocie rien à partir de ce statut. Qu'il n'appelle pas à voter pour Macron on peut le comprendre, mais la moindre des attitudes d'un vrai démocrate serait d'exhorter à faire barrage au F.N.
Certains électeurs de JLM annoncent fièrement qu'ils n'iront pas voter le 7 mai, laissant ainsi la porte ouverte à la possibilité du pire, à l'arrivée au pouvoir de l'extrême droite avec toutes les conséquences qu'elle pourrait avoir sur le sort des réfugiés, sur la montée du racisme, de l'antisémitisme, de l'homophobie, du retrait de l'Union européenne. Mais visiblement, tout cela compte peu face au premier souci de  ces électeurs: garder les mains blanches. Ils sont trop vertueux pour choisir entre un centriste et une candidate d'extrême droite. Ils se drapent dans leur toge de Ponce Pilate.
En 2002, eux-mêmes ou leurs parents avaient, en se pinçant le nez, voté pour Chirac, candidat solidement de droite, pour éviter Le Pen père et pire. Aujourd'hui, ils refusent de voter pour un centriste.
Que feront-ils le soir du 7 mai les absentionnistes si, par malheur, l'extrême droite se retrouve au pouvoir? Descendront-ils dans la rue pour affirmer que ce n'est pas ce qu'ils voulaient? La politique réclame du courage. Aussi de la part des électeurs. Et les irresponsables ne sont pas uniquement du côté des politiques.
Qu'est-ce qu'être démocrate? Qu'est-ce qu'être citoyen? Certainement pas de jouer les Tartuffe.

Sur le ni-ni mélenchonnien, lire ou écouter Thomas Legrand sur France Inter ce matin:
https://www.franceinter.fr/emissions/l-edito-politique/l-edito-politique-25-avril-2017
Et sur les différences Macron - Le Pen, Bernard Guetta, toujours sur F.I.:

dimanche 23 avril 2017

Ouf ! (1?)

On a évité le pire aujourd'hui en France. Le pire eût été une nette victoire de la reine des nuisibles et un duel Le Pen - Fillon au second tour, avec un risque de victoire de la fille à papa.
Reste à voir si le front républicain fonctionnera au second tour comme il y a quinze ans. La gauche avait alors appelé à voter Chirac pour éviter Le Pen père (ou pire). La droite, qui s'est baptisée Les Républicains, se montrera-t-elle à la hauteur de son nom, appellera-t-elle à voter Macron? Mélenchon en fera-t-il autant? Ses soutiens sauront-ils faire la différence entre un candidat centriste, mais européen et ouvert à l'accueil de ceux qui viennent d'ailleurs, et une candidate qui a transformé la haine de l'autre en valeur? La grande déception (pour moi), c'est le score trop faible de Benoît Hamon eu égard à la pertinence de son projet. Il est vrai qu'on n'est jamais que dans une élection  présidentielle, où ce qui compte c'est la capacité de séduction du candidat, beaucoup moins l'intelligence de son programme.

Post-scriptum presque immédiat:
- Fillon se montre à la hauteur du nom de ce parti:
http://www.lalibre.be/actu/france/francois-fillon-decu-je-voterai-en-faveur-d-emmanuel-macron-discours-58fcf333cd70e8051308003d
- sur les différences entre les candidats du second tour:
http://www.lalibre.be/actu/france/voici-un-resume-des-programmes-de-marine-le-pen-et-emmanuel-macron-58fcee3ecd70e8051307f842
Post-scriptum de 21h50: ai-je été été, comme tout le monde, un peu trop rapide (?). La LIbre Belgique annonce que ce serait Marine Le Fiel qui arriverait en tête (?). A vérifier: http://www.lalibre.be/actu/france/presidentielle-marine-le-pen-passerait-devant-emmanuel-macron-direct-58fc8a6ecd70e80513061a54



vendredi 21 avril 2017

Une vie ratée

A quoi consacrons-nous notre vie? Certains à travailler, à créer, à écrire, à peindre, à parcourir la planète, d'autres à rêver, à sauver des vies, à réfléchir, à rencontrer d'autres personnes, à apprendre, à éduquer, à fabriquer des objets utiles ou non, à planter des arbres ou des fleurs, à faire la cuisine, à faire du bien autour d'eux, à regarder passer les trains, à les prendre ou à les faire circuler.
L'homme qui a tué un policier hier soir sur les Champs Elysées était, nous dit une journaliste de France Inter (1), "sans activité connue si ce n'est s'en prendre à des policiers". Il n'en était pas à sa première agression. Cette activité-là l'a amené à tuer et l'a tué. On appellera cela passer à côté de sa vie.
Marine Le Pen, comme son père, semble avoir dédié sa vie à faire du bruit, entendez par là à dire n'importe quoi. Ce fut encore le cas à propos de cet événement sur lequel elle s'est jetée comme un chien affamé sur un os (2). Un peu de retenue, de réflexion et d'intelligence semble toujours bienvenu. Encore faut-il en avoir les moyens. Qui lui dira qu'elle est en train de rater sa vie tout autant que ce psychopathe ou djihadiste (ou les deux à la fois)? Peut-être les électeurs ce dimanche ? 

(1) Journal de 13h, ce jour.
(2) http://www.huffingtonpost.fr/2017/04/21/sur-lattentat-des-champs-elysees-marine-le-pen-ne-separgne-au_a_22049044/?utm_hp_ref=fr-homepage

jeudi 20 avril 2017

Le Pen, le pire

Marine Le Pen a oublié son slogan de "France apaisée". Se tassant dans les sondages, elle revient, dans ces derniers jours de campagne, aux fondamentaux du F.N.: elle s'en prend ouvertement aux migrants, soutenue par ses affidés qui scandent "on est chez nous".
Ils pourraient être bien seuls demain à s'entendre crier "on est chez nous" quand leur région se sera, un peu plus encore, désertifée, quand les Britanniques, les Néerlandais, les Belges, d'autres ressortissants de l'Union européenne, les réfugiés qui ont fui la guerre ou la misère ne viendront plus s'y installer. Ils seront chez eux, oui, tout seuls enfin. A qui pourront-ils alors reprocher, une fois qu'ils n'auront plus l'U.E. et les étrangers comme boucs émissaires, leur abandon, sinon à eux-mêmes? Chez eux et oubliés de tous parce qu'ils l'auront voulu ainsi.

Marine Le Pen, si elle est élue, annonce qu'elle suspendra les accords de Schengen et donc rétablira les contrôles aux frontières. Cette femme ne voyage pas assez. Si elle le faisait, elle se rendrait compte que la disparition des frontières est devenue totalement naturelle pour celles et ceux qui vivent de part et d'autre.
J'ai vécu soixante ans à deux pas de la frontière franco-belge. Je me souviens des arrêts à la douane, des coffres ouverts, des bouteilles de vin ou de bière (selon le sens de passage) comptées. Je me souviens aussi des manifestants anti-nucléaires empêchés de passer la frontière à Givet un jour de manif à Chooz. Puis, j'ai vu les passages devenir de plus en plus aisés, avec des contrôles aléatoires. On se contentait de ralentir à hauteur du poste de douane, on apercevait de l'autre côté de la fenêtre du bureau la main du douanier qui nous faisait signe de passer sans même nous regarder. Puis, après les accords de Maastricht, la frontière a totalement disparu. Et chacun a pris ses habitudes, passant de l'autre côté pour aller acheter tel ou tel produit, travailler, étudier, habiter, boire un verre, aller danser ou faire la fête... Les commerçants de part et d'autre de la frontière apprécieront le retour des frontières. La fille à papa Le Pen imagine-t-elle réinstaller des postes de douane aux quelque trois cents points de passage qui existent entre la Belgique et la France? Voilà qui tombe mal: sur l'autoroute Tournai - Lille, les vieux postes de douane, totalement déglingués et inutilisés depuis plus de vingt ans, viennent enfin d'être supprimés, le passage est enfin propre. L'absence de frontières est un plaisir et doit le rester.
Il y a deux mois, le Parlement européen a voté un texte rendant obligatoires le contrôle et le recoupement des documents d'identité de tout citoyen européen et des étrangers souhaitant entrer ou sortir de l'espace Schengen. Il s'agit de s'assurer que des personnes n'entrent pas sur le territoire de l'U.E. avec des documents volés ou falsifiés. La Le Pen avait sûrement mieux à faire ce jour-là (par exemple, dire tout le mal qu'elle pense de cette passoire qu'est l'espace Schengen)  où elle a, une fois encore - c'est une habitude chez elle, brillé par son absence au Parlement européen. Ses petits camarades ou se sont abstenus ou ont voté contre le texte (1). La cohérence n'est le fort de l'extrême arrière.
De même qu'Asselineau, la candidate des Ets de démolition Le Pen et filles apparaît totalement has been. Son programme morbide comporte les mots "mort", "fin", "retour". C'est un programme de recul, de destruction des avancées. Sur le plan culturel, il se résume à la sauvegarde du patrimoine. C'est un peu court. Quand on sait qu'elle a sous-évalué le sien (ce qu'on comprend quand on sait qu'étymologiquement patrimoine signifie héritage du père), on peut être d'autant plus inquiet.

Son programme économique est décrié notamment par vingt-cinq prix Nobel d'économie qui ont publié hier, dans Le Monde, un texte dans lequel ils affirment notamment que
"– La construction européenne est capitale non seulement pour maintenir la paix sur le continent mais également pour le progrès économique des Etats membres et leur pouvoir politique dans le monde.
– Les évolutions proposées par les programmes antieuropéens déstabiliseraient la France et re­mettraient en cause la coopération entre pays européens, qui assure aujourd’hui une stabilité économique et politique en Europe.
– Les politiques isolationnistes et protectionnistes et les dévaluations compétitives, toutes menées au détriment des autres pays, sont de dangereux moyens d’essayer de générer de la croissance. Elles entraînent des mesures de représailles et des guerres commerciales. Au final, elles se révéleront préjudiciables à la France ainsi qu’à ses partenaires commerciaux.
– Quand ils sont bien intégrés au marché du travail, les migrants peuvent être une opportunité économique pour le pays d’accueil. Plusieurs des pays les plus prospères au monde ont su accueillir et intégrer les émigrés."
Ces économistes affirment que ce qu'il nous faut c'est "plus de solidarité, pas moins" et que "ces problèmes sont trop sérieux pour être confiés à des politiciens clivants" (2).
Le même jour sur France Inter, un patron expliquait pourquoi il a appelé ses huit mille salariés à ne surtout pas voter pour la Le Pen et son programme qui ruinerait leur entreprise (3).

La pauvre victime des médias qui ne veulent pas l'inviter à annulé sa venue à France Inter, le meilleur moyen sans doute d'éviter les questions qui pourraient fâcher la candidate de la France apaisée. Patrick Cohen lui a malgré tout adressé quelques-unes des questions qu'il comptait lui poser, en s'appuyant sur des archives récentes. On y apprend ainsi que celle qui reste bel et bien la fille de son père affirmait en octobre 2012 que la répression sanglante des Algériens du FLN à Paris le 17 octobre 1961 était "un bobard" (4). Bon sang ne peut mentir.


(1) http://www.huffingtonpost.fr/2017/02/18/marine-le-pen-critiquee-pour-avoir-seche-un-vote-sur-le-renforce/?utm_hp_ref=fr-homepage
(2) http://www.lemonde.fr/idees/article/2017/04/18/25-nobel-d-economie-denoncent-les-programmes-anti-europeens_5112711_3232.html?xtmc=stiglitz&xtcr=1
(3) https://www.franceinter.fr/emissions/l-invite-de-7h50/l-invite-de-7h50-19-avril-2017
(4) https://www.franceinter.fr/emissions/le-7h43/le-7h43-19-avril-2017

mardi 18 avril 2017

L'heure du choix

Cette élection poussera-t-elle les Français à repenser leur système démocratique? Vont-ils enfin cesser de croire en l'homme ou la femme providentiel-le? Ont-ils compris qu'il ou elle n'existe pas? Le croquemitaine existe, oui, il a pris la forme d'une blonde, mais le père Noël n'existe pas plus que le prince charmant. C'est dur à admettre mais il faudra en passer par là pour que la démocratie avance.
Les Français attendent tout de leur président, tout et son contraire. Il doit mettre fin au chômage, sauver les petits commerces en milieu rural, redynamiser les banlieues, redonner sa fierté à la France,  rénover fondamentalement le système scolaire, ne pas bousculer les institutions, être proche d'eux et être au-dessus de la mêlée, prendre rapidement et avec sang froid les décisions qui s'imposent sans précipitation, il doit être proche et distant, juste, intelligent et compassionnel, stratège et spontané, sévère et sympathique.
Quelle place cette campagne (les candidats et les médias) a-t-elle sérieusement accordé aux vrais enjeux: cette arrivée sans précédent de réfugiés, le dérèglement climatique, les conflits moyen-orientaux, le partage des ressources et des richesses, les règles du vivre-ensemble? On a parfois l'impression que les candidats ont passé plus de temps à dézinguer leurs adversaires qu'à développer leurs projets.
Amnesty International a formulé des recommandations par rapport à l'accueil des réfugiés et la protection des libertés individuelles et, après avoir analysé les propositions des onze candidats en ces matières, a bien dû constater (1) qu'ils n'étaient qu'une poignée à s'en préoccuper de manière positive. Si certains ne s'en soucient tout simplement pas, d'autres formulent des propositions dangereuses, parfois contraires aux engagements pris par la France. Seuls Hamon, Macron et Mélenchon rejoignent, pour partie au moins, les positions d'A.I.

Quel choix auront ce dimanche les Français? Ceux qui se soucient de défendre la valeur famille pourront choisir entre Madame fille de et tante de et Monsieur époux de et père de
Plus largement, si on ne prend compte que les principaux candidats, le choix se fera entre Monsieur Bloodsweatandtears, Madame J'aimepaslesautres, Monsieur Langelot, Monsieur Lefrondeurfrondé et
Monsieur Leslendemainsquichantent. Chacun avec son enthousiasme, mais aussi ses contradictions, ses approximations, ses erreurs voire ses mensonges, avec parfois des solutions aussi simplistes que les analyses qui les justifient. Beaucoup d'électeurs choisiront celui ou celle qui les fait espérer ou rêver ou les deux. De quel espoir est porteur quelqu'un qui veut quitter l'Union européenne, qui veut rejeter les migrants à la mer, qui dit son admiration pour Trump ou pour Poutine ou qui pense que la Syrie ne peut se passer d'Assad? Beaucoup d'électeurs affirment ne pas vouloir voter "par défaut". Mais le défaut n'est-il pas dans le fruit dès le début? Pourquoi la France ne pourrait-elle avoir un président comme les autres, comme en Allemagne, au Portugal, en Suisse, en Autriche, en Italie, quelqu'un qui préside sans règner, qui joue le sage au-dessus de la mêlée et laisse son gouvernement gouverner? François Hollande voulait être un "président normal". ll y a maldonne. Les Français veulent un président omnipotent, qui leur promet la lune et aussi les étoiles et le soleil. Et qu'ils conspueront dès qu'il sera élu.

(1) https://www.amnesty.fr/liberte-d-expression/actualites/les-candidats-et-les-droits-humains?utm_medium=email&utm_source=newshebdo


samedi 15 avril 2017

Des histoires de portes

A une semaine du premier tour de l'élection présidentielle française, le nombre d'indécis n'a jamais été aussi important, affirment les instituts de sondage. On pourrait donc croire que les meetings de campagne servent à convaincre. Ce n'est pas le cas de ceux de François Fillon: ils n'ont visiblement pour but que de galvaniser les supporteurs, pas de faire passer un message auprès de ceux qui s'interrogent. Trois personnes qui assistaient au meeting toulousain du candidat de la droite pour "se faire une idée" ont été mises à la porte parce qu'elles n'exprimaient pas assez d'enthousiasme. Elles avaient "une attitude de neutralité qui pouvaient les rendre suspectes" (1). Dans un meeting,  on attend de vous que vous soyez fan(atique)s. Qui cherche à se faire sa propre opinion inquiète.

Pendant ce temps, la bête de scène qu'est Jean-Luc Mélenchon grimpe dans les sondages. L'homme est incontestablement de gauche, je devrais m'en réjouir, mais je n'y arrive pas.
D'abord, je me méfie de ceux qui disent parler au nom du peuple. Le peuple existe-t-il? Est-il homogène, parle-t-il d'une seule voix, pense-t-il de la même manière? Il faut toujours préférer le pluriel au singulier. Qui sait ce qu'est le peuple? Un homme qui exerce des responsabilités politiques depuis plus de trente ans, qui a été conseiller régional, sénateur, ministre, président de parti, député européen sait-il ce qu'est le peuple?
On sent chez Mélenchon des accents populistes qui (m') inquiètent. On connaît sa hargne envers la plupart des journalistes. Il rejoint là celle de bon nombre de populistes qu'une presse libre dérange.
Il est, et c'est réjouissant, pour une France qui ouvre ses portes aux candidats réfugiés. "Candidat de la paix", il veut offrir l'asile à ceux qui fuient la guerre, la misère et le terrorisme. Bravo! Mais, dans le même temps, il est prêt à quitter l'Union européenne. Il veut renégocier les traités européens et, si cela s'avère impossible, il menace de quitter le navire. En février 2016, le député européen organisait "le procès" de l'U.E. et de sa "masse immense d'insectes bureaucratiques". Une expression qui, elle aussi, flirte avec le populisme. Ainsi donc, pour Mélenchon, la France devrait ouvrir davantage ses frontières en même temps qu'elle les refermerait? Peut-on être internationaliste à l'autre bout du monde et nationaliste à sa porte? Peut-on critiquer les murs et les frontières et vouloir en rétablir autour de soi? Mélenchon est-il le frère de Chevènement qui est à l'origine du nationalisme de gauche? "Face aux faiblesses d'une Europe coupable, selon lui, de tous les maux, écrivait Libération à l'occasion de ce "procès" (2), il s'agirait ni plus ni moins de préparer le Plan B, c'est-à-dire la sortie de l'euro et de l'Union européenne. Il s'agit là d'une logique binaire qui réduit le champ des possibles à une alternative. (...) Les peuples européens n'ont pas à choisir entre l'Europe des marchés et l'Europe des Nations. Entre l'Europe libérale et le Plan B, il existe une autre voie, celle d'une Europe démocratique, écologique et solidaire".
Moins d'Europe ne sauvera personne. Au contraire. Comment améliorer les politiques sociales, environnementales, sécuritaires, de migration, sinon en les harmonisant, en les tirant vers le haut au niveau du continent? Oui, le modèle économique européen est inégalitaire; oui, l'U.E. n'est pas assez démocratique. Mais la quitter pour ces raisons serait témoigner d'un manque d'imagination, de volonté et de combativité; faire preuve de lâcheté et de mépris pour toutes celles et tous ceux qui se sont battus pour abolir les frontières. Quitter l'U.E. serait choisir la régression. Avons-nous un autre choix que d'aller de l'avant, vers une Europe plus forte et plus solidaire?
Dans de très nombreux pays, l'U.E. est devenu le bouc émissaire idéal. L'ancienne ministre belge et ex-députée européenne Isabelle Durant, aujourd'hui députée du parlement bruxellois, le déplore: selon elle, écrit la Libre Belgique (3), "nombreux sont les parlementaires qui ont préféré plonger tête baissée dans la logique du c'est la faute à Bruxelles, plutôt que de se retrousser les manches pour jouer un rôle dans la construction européenne. On est typiquement dans l'européanisation des échecs et la nationalisation des réussites, note la députée." Nombreux sont les parlementaires qui hurlent, de facto, avec les loups populistes, qui expriment critique et dédain pour l'U.E. Quand demain les Britanniques auront quitté l'Europe qui pourront-ils rendre responsables de leurs échecs? Récemment, le Parlement bruxellois organisait un débat intitulé "Europe, je t'aime, moi non plus". "Il y avait six parlementaires sur 89", note Isabelle Durant. Cracher semble plus facile qu'entrer dans un débat.

Post-scriptum:
sur la sortie de l'euro et de l'UE, un billet Jean Quatremer:
http://bruxelles.blogs.liberation.fr/2017/04/11/sortir-de-leuro-ben-voyons/
et l'avis de Joan Sfar qui s'apprêtait à voter Mélenchon, mais a changé d'avis...:
http://tempsreel.nouvelobs.com/presidentielle-2017/20170415.OBS8050/le-coup-de-gueule-du-dessinateur-joann-sfar-contre-la-melenchonsphere.html
et l'avis de Jean-Pierre Filiu par rapport à la position de Le Pen et de Mélenchon sur la Syrie:
http://filiu.blog.lemonde.fr/2017/04/16/le-pen-melenchon-meme-combat-en-faveur-de-bachar-al-assad/

(1) http://www.liberation.fr/elections-presidentielle-legislatives-2017/2017/04/14/pas-assez-enthousiastes-ils-se-font-virer-d-un-meeting-de-fillon_1562897
(2) http://www.liberation.fr/planete/2016/02/02/europe-le-contresens-du-plan-b-de-melenchon_1430572
(3) "Les Belges veulent se réapproprier l'Europe", LLB, 1.4.2017.
(re)lire sur ce blog "Vive l'Europe (quand même!)", 15 mars 2017.

vendredi 7 avril 2017

Lettre à Elvire et à mes amis français

Cette lettre a été envoyée personnellement par mél à mes amis, connaissances et copains français.

Chère Elvire,
Cher-e-s ami-e-s français-es,

je sais qu'aucun d'entre vous ne votera pour Marine Le Pen, qu'aucun d'entre vous ne se laisse abuser par son sourire carnassier, qu'aucun d'entre vous ne peut croire à l'entreprise de dédiabolisation de son parti, qu'aucun d'entre vous ne pense qu'on peut avancer en faisant marche arrière.
Mais certains d'entre vous laissent entendre ou entendent autour d'eux qu'il faudra peut-être en passer par là pour se débarrasser du F.N., qu'après tout, si une majorité de Français devait se donner une présidente d'extrême droite, celle-ci ferait vite la démonstration de son incompétence et de la bêtise de son programme et que le Front national perdrait aussi vite le crédit dont il dispose actuellement parce qu'il n'a jamais exercé le pouvoir.
Certains estiment aussi que, de toute façon, même si la fille à papa devait présider la France elle n'arriverait pas à la gouverner, faute de disposer d'une majorité parlementaire. Ce dont je ne suis pas si sûr, vu les positions de plus en plus dures du parti nommé Les Républicains, vu aussi les appétits de pouvoir de certains, prêts à vendre leur âme au (dé)diable pour quelques portefeuilles ministériels.
L'hypothèse Le Pen m'angoisse. Le jusqu'au-boutisme de François Fillon et l'éclatement prévisible de la droite autant que de la gauche pourraient bien profiter à la Le Pen. Ce qui est incompréhensible, parce que, au vu de la quantité de casseroles qu'elle trimbale derrière elle, on croirait plutôt qu'elle concourt pour Top Chef (1). Mais - on l'a vu avec la victoire du Brexit et de Donald Trump - nous avons visiblement quitté l'ère du raisonnable. Aujourd'hui, tout est possible et permis et la probité compte peu. Marine Le Pen ne jure que par la police et réclame une justice plus ferme et plus rapide, sauf quand elle est concernée personnellement, pauvre petite fille riche martyrisée par un système dont elle aura profité mieux que personne.

Nous sommes venus de Belgique nous installer en Berry, Hélène et moi, il y a bientôt quatre ans, dans une France  ouverte, un des acteurs majeurs de l'Union européenne. C'est en tant que citoyens européens, libres de circuler et de s'installer dans cet immense espace commun que nous pouvons vivre cette belle aventure d'un changement de vie qui nous a notamment permis d'avoir le plaisir de rencontrer plusieurs d'entre vous. Aujourd'hui, je suis inquiet. Pour nous, mais aussi et surtout pour tous ceux, Français ou non, qui vivent déjà dans des conditions difficiles. Je pense particulièrement à ceux qui vivent de manière extrêmement précaire, à ceux qui ont cru que la France, patrie des droits de l'homme, leur ouvrirait ses portes et leur permettrait de vivre en sécurité, loin d'une terre natale qui ne leur offre que guerre et misère. Tels les jeunes Afghans, Érythréens, Pakistanais, Soudanais à qui, avec beaucoup d'autres (et c'est réjouissant de voir autant de gens se mobiliser!), j'apporte un peu d'aide.

Il ne faut jamais donner sa chance au pire. Il est toujours pire que ce qu'on imagine.
Une victoire de l'extrême droite, ce serait un triomphe pour les racistes, les sexistes, les homophobes, les antisémites, une libération de la violence verbale comme physique. C'est ce qui se passe aujourd'hui aux Etats-Unis, où les agresseurs racistes et antisémites se sentent légitimés par la victoire de Trump. Marine Le Pen est l'arbre qui cache (mal) la forêt. Dans l'arrière-cuisine du F.N., derrière sa façade repeinte, ça sent toujours le même graillon qui donne envie de vomir.
Proche de l'autocrate Poutine (dont elle a été chercher la bénédiction à Moscou), soutien du boucher Assad (2), admiratrice d'Ubu Trump (qu'elle est convaincue avoir inspiré), l'héritière dirige un parti affairiste et fondamentalement raciste qui compte, et de loin, le plus grand pourcentage d'élus mis en examen ou condamnés (3). A lire et entendre les militants et sympathisants du FN, le racisme s'y porte bien et s'y exprime allègrement (c'est le terme le plus approprié, hélas) (4). Ses soutiens inventent et diffusent des théories du complot, toutes plus hallucinées les unes que les autres. La vérité ne compte pas pour eux, seuls valent les arguments, même totalement insensés, qui peuvent semer le trouble dans des esprits prêts à se laisser coloniser.
Marine Le Fiel se présente fièrement comme une des deux seules femmes candidates à l'élection présidentielle et a été faire un sketch à Beyrouth, tentant de se faire passer pour une féministe. Curieusement, elle est la seule candidate qui ait refusé de rencontrer l'équipe du mensuel féministe Causette (5). Courage, fuyons!

Une victoire de Le Pen constituerait une menace immense pour l'Union européenne, si elle parvenait à mettre en application son projet d'abandon de l'euro (6), voire de retrait de l'Union européenne et de fin de la libre circulation des citoyens européens. Son programme se résume en un mot: casser.
Peut-être faut-il rappeler aux électeurs potentiels de la démolisseuse pourquoi l'Union européenne s'est construite. Pour unir des peuples qui pendant plus de deux millénaires se sont affrontés; pour éviter désormais toute guerre militaire et économique; pour bâtir des projets communs; pour se donner des règles collectives, parce que la nature, l'eau, la pollution, la culture, la vie n'ont pas de frontières.
Les pro-Brexit, les anti-européens, Trump, Poutine, les islamistes, les populistes se frottent déjà les mains, émoustillés par la perspective de la fin d'une union et du triomphe du nationalisme. Allons-nous nous retrouver dans une France racrapotée sur elle-même, fermée aux étrangers? Si cela devait être le cas,  il y aura eu, pour nous, tromperie sur la marchandise. Ce n'est pas cette France-là que nous avons choisie, pas cette France-là qui nous a accueillis. Pas une France qui se donnerait une petite présidente, mesquine, repliée sur un passé mythifié, voilée dans son drapeau. Faire confiance à Marine Le Pen serait monter dans une voiture conduite par un conducteur qui enclenche la marche arrière et appuie à fond sur l'accélérateur en roulant sans rétroviseur. L'embardée ne devrait pas tarder. Et elle ferait d'innombrables victimes. Surtout parmi les plus vulnérables.

Ne laissez personne dire qu'il votera pour Le Pen sans réagir, ne laissez personne penser que la France peut traverser aisément une expérience aussi rétrograde qui s'avérera vite génératrice de dégâts difficilement réparables. Un million quatre cent mille étrangers membres de l'Union européenne vivent en France, dont la moitié d'actifs. Le principe de "préférence nationale" et la taxe sur les emplois d'étrangers les pénalisera (7). Ils le seront plus encore si la France quitte la zone euro et, pire, l'Union européenne. Si les étrangers devaient fuir la France, ce serait une catastrophe totale pour les régions françaises qui se désertifient. Certaines revivent un peu, ou en tout cas subsistent, grâce à l'installation de citoyens européens attirés par la qualité de vie et de paysage des campagnes françaises. Certaines écoles rurales restent parfois ouvertes grâce à l'arrivée d'enfants venus d'ailleurs, notamment de réfugiés. Refermer le pays sur lui-même serait une erreur historique pour ces zones qui se sentent déjà abandonnées et le seraient ainsi bien plus demain.
Quitter l'U.E. serait une catastrophe de plus pour les agriculteurs, quoi qu'en dise la Le Pen qui multiplie mensonges et contre-vérités pour les séduire. Les étudiants français savent-ils que, si leur pays devait quitter l'Union européenne, il abandonnerait du même fait le programme Erasmus?
Quitter l'U.E. serait une catastrophe totale pour une ville comme Strasbourg qui accueille non seulement le Parlement européen mais aussi de nombreux services et organismes européens (8). Ce serait une perte pour Angers qui accueille l'Office communautaire des Variétés végétales, pour Valenciennes où siège l'Agence de l'Union européenne pour les chemins de fer.
En Grande-Bretagne, les conséquences négatives du Brexit se font déjà sentir: l'Orchestre baroque de l'Union européenne, qui y était basé depuis 1985, va quitter le Royaume-Uni pour s'installer à Antwerpen en Belgique. Sa directrice estime que les restrictions en matière d'immigration et de libre circulation deviendront trop compliquées à gérer. L'Orchestre des jeunes de l'Union européenne va, lui aussi, quitter la Grande-Bretagne pour un autre pays européen, pour éviter les contraintes administratives à venir (9). Diverses entreprises et institutions s'apprêtent à faire de même. De nombreuses banques de la City pensent délocaliser une partie de leur personnel à Francfort.
Un constructeur automobile allemand qui envisage un investissement de 80 millions en Alsace a ajouté une clause dans le contrat: si d'ici la fin 2017 la France manifeste son envie de sortir de la zone euro, le contrat sera nul et non avenu (10).
Ce n'est pas moins d'Europe qu'il nous faut, c'est une meilleure Europe, plus axée sur le social et sur le culturel. Marine Le Pen se dit convaincue que hors de l'U.E. la France retrouvera sa grandeur, alors qu'elle ne sera plus qu'un petit pays sur la scène mondiale.

Chère Elvire,
Cher-e-s ami-e-s français-es,
j'espère que le pire n'arrivera pas et je n'ai pas voix au chapitre (électoral). Mais je vous en prie, faites tout ce qui est en votre pouvoir pour cela. Parlez, argumentez, votez et encouragez à aller voter (pour un candidat qui défende une Europe plus forte et plus juste), faites barrage aux nuisibles, faites comprendre à celles et ceux qui sont tentés de voter pour la candidate de l'extrême arrière que ce serait là le choix du suicide, même pas assisté.
Certains observateurs estiment que l'abstention pourrait être importante et qu'elle profiterait à MLP. Beaucoup de jeunes annoncent leur intention de voter blanc ou de s'abstenir, si pas au premier, en tout cas au second tour. J'ai entendu un jeune affirmer qu'il votera Mélenchon au  premier tour et qu'il devra se retenir pour ne pas voter MLP au second "pour créer de l'instabilité". L'anthropologue et spécialiste de la finance Paul Jorion affirme recevoir des mails de personnes annonçant qu'elles voteront Mélenchon au premier tour et Le Pen au second si Mélenchon n'y est pas (11). Tous ces gens veulent "leur" donner une leçon, ce "leur" étant visiblement un pronom indéfini. Ils n'ont pas l'air conscients que cette leçon, cette instabilité ils seront les premiers à se les prendre dans la figure, comme un boomerang incontrôlé. Tous les programmes, tous les candidats ne se valent pas. Certains sont extrêmement dangereux!
Certains experts estiment que la reine des nuisibles pourrait être élue grâce aux abstentionnistes: c'est l'absention différenciée qui pourrait la faire gagner même avec moins de 50% des voix (12). Si on veut éviter le pire, il faudra absolument aller voter, en se bouchant le nez s'il le faut. Peut-être pas pour quelqu'un qu'on apprécie, mais pour éviter la peste noire, une épidémie qu'on éradique difficilement.

En attendant, je vais me mettre à l'espagnol. Ou plutôt au catalan. Cent soixante mille personnes ont manifesté à Barcelone en février pour réclamer l'accueil de plus de réfugiés (13). Si la fille à papa Le Pen l'emporte, allez hop, direction l'Espagne!
Ou alors Lampedusa? Cette île italienne de 6.000 habitants a vu débarquer et passer par chez elle en  vingt-cinq ans 350.000 demandeurs d'asile, sans que cet afflux n'altère "l'esprit d'accueil qui caractérise depuis toujours les Lampédusiens" (14).
Mais, franchement, c'est au beau milieu de la France que j'ai envie de continuer à vivre.
Comme disent les politiques chez vous à la fin de leurs discours, vive la France! Mais celle des Lumières! Et vive l'Europe!
Délivrez-nous du mal. Amen et cordialement.
Michel Guilbert

Les hommes avaient perdu le goût
De vivre, et se foutaient de tout
Leurs mères, leurs frangins, leurs nanas
Pour eux c´était qu´du cinéma
Le ciel redevenait sauvage,
Le béton bouffait l´paysage... d'alors (...)
Oh, tu peux rire, charmante Elvire,
Les loups regardent vers Paris.

                                          Albert Vidalie

Post-scriptum: une nouvelle chanson de Maxime Le Forestier, sur la France. Elle a pour titre "Vieille dame":
http://www.huffingtonpost.fr/maxime-le-forestier/paroles-vieille-dame-maxime-le-forestier_a_22037379/?utm_hp_ref=fr-homepage
http://www.huffingtonpost.fr/2017/04/14/maxime-le-forestier-revient-avec-un-morceau-politique-sur-la-fra_a_22038662/?utm_hp_ref=fr-homepage

A lire aussi: ce patron français qui incite ses 4.500 salariés à ne surtout pas voter pour Marine Le Pen et "son programme aberrant":
http://www.huffingtonpost.fr/2017/04/04/jean-luc-petithuguenin-a-alerte-ses-salaries-sur-les-risques-du_a_22024942/?utm_hp_ref=fr-homepage
Et cet autre chef d'entreprise qui prend aussi une position ferme contre MLP:
http://www.huffingtonpost.fr/guillaume-cairou/chef-entreprise-marine-le-pen_a_22035252/?utm_hp_ref=fr-homepage
Sur les intox des candidats sur l'U.E., lire:
http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2017/04/07/presidentielle-le-festival-d-intox-des-candidats-sur-l-europe-lors-du-grand-debat_5107575_4355770.html
A (re)lire sur ce blog:
"Vive l'Europe (quand même)!", 15 mars 2017;
"Gens honnêtes et honnêtes gens", 17 février 2017;
"Le sens de la famille", 31 janvier 2015;
"Vieilles marmites", 16 janvier 2012
et tant (trop!) de billets sur les Le Pen, leurs mensonges, leur agressivité et leurs casseroles.

(1) http://www.lemonde.fr/videos/video/2017/02/27/les-affaires-qui-menacent-marine-le-pen-en-3-minutes_5086394_1669088.html
(2) Bernard Guetta, France Inter, 21.2.2017, 8h15.
(3) "Le F.N. compte, et de loin, le plus grand pourcentage d'élus mis en examen. De 1997 à 2012, 15,7% des élus F.N. ont été mis en examen ou condamnés, contre 3,12% des élus du parti Les Républicains et 1,94% des élus P.S. Mais peu importe, c'est tout de même le F.N. qui dénonce le plus vivement la corruption de nos hommes politiques." Guillaume Erner, Charlie Hebdo, 8 février 2017.
(4) Revue de presse,  France Inter, 19.2.2017 et chronique de Guillaume Meurice, "Si tu écoutes, j'annule tout", France Inter, 28.2.2017. Et aussi Nadia et Thierry Portheault, "Revenus du Front - deux anciens militants FN racontent", Grasset 2014. Et encore Claire Checcaglini, "Bienvenue au Front - journal d'une infiltrée", éd. Jacob-Duvernet 2012.
(5) "Les allégations féministes de Marine Le Pen", Causette, mars 2017, p. 24.
(6) http://www.huffingtonpost.fr/henri-weber/la-sortie-de-euro-fn-est-un-scenario-catastrophe-anti-national/?utm_hp_ref=fr-homepage
(7) https://oeilsurlefront.liberation.fr/les-intox/2017/03/30/si-une-arrivee-de-le-pen-au-pouvoir-changerait-enormement-de-choses-pour-les-europeens-en-france_1559262
(8) le Centre d'information sur les institutions européennes, l'Enterprise Europe Network, l'Antenne Media, les Centres de Documentation européenne, l'Etat-Major du Corps européen, la Fondation européenne de la Science, l'Assemblée des Régions d'Europe et d'autres institutions encore.
(9) Dépêches Notes, France Musique, 20.2.2017.
(10) France Inter, 1.3.2017, Journal de 7h.
(11) Télérama, 22 mars 2017 et
http://www.lemonde.fr/election-presidentielle-2017/article/2017/03/09/a-roubaix-il-y-en-a-meme-qui-revendiquent-de-ne-pas-aller-voter-a-la-presidentielle_5091970_4854003.html
(12) http://theconversation.com/pourquoi-et-comment-marine-le-pen-peut-gagner-avec-moins-de-50-dintentions-de-vote-74994
(13) http://www.lalibre.be/actu/international/quelque-160-000-manifestants-a-barcelone-pour-l-accueil-des-refugies-en-espagne-58a88c61cd702bc31943f1b6
(14)  Le Courrier international n° 1371, 9.2.2017, p. 42.