samedi 8 décembre 2007

La révolution petite-bourgeoise est en marche... arrière

Il y a quelques jours, deux architectes, Eric Marchal et Quentin Wilbaux, présentaient aux habitants du quartier du Pic-au-Vent, à la sortie de Tournai, leur projet d'habitat groupé passif, soit 36 logements dont la contigüité même permet de travailler à une conception passive de ces habitations. La construction y est conçue pour répondre aux défis d'aujourd'hui: des besoins en chauffage quasi inexistants, la récupération et le traitement des eaux de pluie, une vision plus collective qu'individuelle de l'extérieur. Le coût annoncé de ces habitations économes s'avère particulièrement intéressant.
Le concept même a séduit tant les politiques et l'administration que les entrepreneurs en bâtiment. Mais pas les voisins qui ont sorti leurs fourches...
La presse nous apprend en effet que les futurs voisins sont venus à la réunion en très grand nombre, armés de fausses informations, d'a priori et de rumeurs difficilement démontables par les auteurs de projet eux-mêmes, tant l'ambiance n'était pas au dialogue, malgré les tentatives de médiation de l'animateur engagé dans ce but par les auteurs de projet.

Les attaques les plus délirantes et les plus inattendues ont surgi:
- il s'agira d'un ghetto de gens partageant la même philosophie, alors que les 80 maisons du quartier voisin constituent un "ensemble pluraliste" (sic);
- les enfants de ces habitations vont rouler à mobylette;
- l'accroissement du nombre de voitures va forcément engendrer des accidents;
- rien ne garantit que les nouveaux habitants se conduiront de manière civique;
- pourquoi ces nouveaux habitants paieraient-ils leur énergie moins chère que leurs voisins?
- il y aura des fêtes toutes les nuits dans la salle des fêtes des nouvelles habitations;
- j'ai payé cher ma maison, laissez-moi tranquille!
Bref, des arguments sidérants qui pourraient laisser croire que François L'Embrouille et ses complices avaient pris place dans la salle pour pertuber les architectes. Mais il n'y avait pas plus de caméra invisible qu'il n'y a de salle des fêtes dans le projet.

Cette attitude ahurissante, mesquine, égoïste et agressive (biffez les mentions inutiles s'il échet...) me rappelle un débat auquel j'ai participé il y a quelques années à Celles.
A l'époque, un promoteur envisageait d'implanter trois ou quatre éoliennes dans la campagne celloise. Les riverains (certains habitant parfois à quelques kilomètres du lieu d'implantation prévu) s'opposaient fermement à ce projet. Ecolo avait décidé d'organiser un débat sur les éoliennes et, bien au-delà, sur la nécessité d'investir dans les énergies alternatives et de modifier nos modes de vie. José Daras, Ministre de l'Energie, y avait participé, de même que la '"facilitatrice éolienne" et un représentant du bureau chargé de l'étude de ce projet.
Les arguments des opposants cellois étaient du même tonneau que ceux des piqués-au-vent: pourquoi certains auraient-ils le droit de s'approprier le paysage? pourquoi accepterions-nous un projet qui ne nous fera pas gagner d'argent? les éoliennes font du bruit, tuent les oiseaux, provoquent des migraines, ne sont pas belles... L'agressivité était incroyable, le dialogue quasi impossible. C'est là qu'à la suite du débat, un homme est venu me trouver pour me dire, pointant son index sur ma poitrine: "vous, quand vous étiez présentateur télé, je vous aimais bien, mais aujourd'hui, je vous déteste!" Sur le moment, j'ai éclaté de rire. Mais il y avait de quoi pleurer face à ce repli petit bourgeois et surtout à cette absence sidérale de la notion même de raison. On était dans l'émotion pure, dans le délire. La notion d'hystérie collective prenait tout son sens. Il n'était plus possible de raisonner, d'échanger des arguments "sensés".

A Celles comme au Pic-au-Vent, les opposants s'affirment bien sûr totalement favorables au principe même de ces projets. Bien sûr, disent-ils, il faut lutter contre le réchauffement climatique! Bien sûr, il faut investir dans les énergies climatiques, dans l'éco-construction! Bien sûr qu'elle est importante la conférence de Bali! Mais du balai! Pas de ça, près de chez moi. Dégagez! Vous dérangez mon petit confort. Il faut sans doute que tout change, mais pas que ça me dérange!
Le changement fait peur. Le collectif fait peur. Les enfants font peur (c'est qu'ils risquent fort de devenir des jeunes un jour!).
Ailleurs, ce sont des riverains qui s'opposent à une crèche près de chez eux: vous imaginez ces voitures qui vont s'arrêter pour déposer et reprendre les enfants! Certains voisins dénonçaient déjà les cris d'enfants dans le jardin...
Ailleurs encore, ce sont des riverains qui s'opposent à un casse-vitesse devant chez eux, à un arrêt de bus, à un panneau de prévention signalant l'école.
On n'est pas seulement dans la peur. On est dans le nombrilisme exacerbé. Dans l'individualisme forcené. Ce sont des gens de murs, de clôtures. Ce qui compte, c'est moi, ma tranquillité, ma petite maison quatre façades, mon petit garage, mon petit jardin, mon petit esprit. Ces gens-là se reconnaissent à des signes distinctifs: des panneaux "propriété privée" ou "ici, c'est moi qui monte la garde".
Ils ne se rendent évidemment pas compte qu'eux aussi se sont appropriés le paysage avec leurs maisons, leurs garages, leurs hangars. Ils ne se demandent pas si eux aussi auraient dû donner des gages de civisme à leurs voisins avant de s'installer dans un quartier. Ils ne se posent pas la question de l'empreinte écologique de leur maison quatre-façades, un mode de construction qui ne devrait plus être autorisé aujourd'hui.
Ils se retirent de la société, à l'abri de leurs murs, ne les quittent pour que pour les défendre. Même si ceux-ci ne sont pas menacés.
Ce sont les nimbies *.
Dans une carte blanche (publiée dans la Libre Belgique du 2 novembre 2007), Jean-François Viot, auteur dramatique et citoyen de la commune de Gesves, distingue les Nimbies et les Nin Biesses: il dénonce les "revendications partiales et les arguments partiels" des Nimbies, "arguments régulièrement déformés, amplifiés, arrangés". Les Nin Biesses, dit-il, "sans céder à la panique ou à l'égoïsme, choisissent sereinement de défendre la cause qui leur paraît, en humanistes, la plus juste. Ils se souviennent que le monde ne leur est que prêté, qu'ils ne sont eux-mêmes à peine plus que cet arbre ou cette fleur qu'ils admirent. Et ils en concluent: "please, in my backyard!"

*Nimby: Not In My BackYard: pas dans le fond de mon jardin

dimanche 25 novembre 2007

Les contes de fée, tous comptes faits...

"Etre bon prince: faire preuve de générosité, de bienveillance, de tolérance" (le Petit Robert)

Le Courrier de l'Escaut de ce 24 novembre nous apprend que le "trésor" découvert dans le bollewerk du château d'Antoing sera propriété du prince de Ligne.
Vingt-cinq pièces d’or avaient été trouvées par des guides touristiques de la Ville, enfouies dans une contremarche d’un escalier à l’abandon. La loi précise, dans le code civil, qu'en cas de découverte d'un trésor sur le terrain d'autrui, ce trésor se partage en parts égales entre son inventeur (le découvreur) et le propriétaire.
Mais ici à Antoing, monsieur le prince, dans sa grande bonté, n'accorde qu'une pièce à chacun des cinq inventeurs, se gardant pour sa bourse personnelle les vingts pièces d'or restantes. Pour qui sait calculer, 50/50, c'est une proportion qui vous a des allures d'équilibre démocratique inacceptable. Tandis que 80/20, voilà une proportion qui laisse chacun à sa place. Il faut dire que monsieur a ses frais, nous dit le journal: il doit restaurer sa toiture (noblesse oblige!) et ce trésor est une aubaine qu'il n'entend pas laisser passer. Et qu'importe la loi, elle n'est de toute façon faite que pour les manants. Arrière, marauds! Les guides touristiques avaient fait part de leur découverte en toute honnêteté au châtelain. Mais face à sa menace de déposer le dossier auprès de ses avocats et sous la pression du bourgmestre qui craint de voir le château fermé au public, les guides ont décidé de laisser tomber leurs prétentions à leur part (l)égale du trésor. Et tant pis pour la famille antoinienne dans le besoin à qui - noble attitude ! - ils avaient décidé de donner leur part.

A l'heure où le même prince entend créer sur 350 hectares de ses terres un "centre européen des sports de glisse", au mépris du réchauffement climatique et de toutes les politiques de préservation de l'environnement et d'économies d'eau et d'énergie, il apparaît qu'il ne faut décidément pas croire aux princes charmants: ils se sont transformés en princes marchands.
L'autre leçon à tirer, c'est que Monseigneur Picsou, prince de Glisse (avec un petit "de" comme dans denier) continue à régner en monarque absolu sur Antoing, le bourgmestre n'hésitant pas à s’habiller en laquais pour lui venir en aide.

L'histoire n'a en tout cas pas de quoi rassurer tous ceux qui, d'une manière ou d'une autre, suivent le dossier du "centre de glisse": pour sa souverainissimité, seul compte l'argent et les lois ne sont que roupies de sansonnet!

Filippo de Terre

P.S. : L’anecdote nous amène à imaginer une alternative au projet de centre de glisse : le « site aux trésors » accueillerait des chercheurs qui, pour la somme de 30 €, pourraient fouiller le domaine pendant une période de deux heures. En cas de découverte du trésor, les inventeurs récupéreraient leur mise de 30 €, laissant le reste du butin aux actionnaires.

jeudi 8 novembre 2007

La conjuration des imbéciles *

Ils ont voté, et puis après? (comme disait Ferré) Après, les affaires continuent. Leterme, qui a perdu énormément de crédit, même en Flandre, est toujours missionnaire, chargé de former un gouvernement au plus vite. Et les francophones outrés du MR et du CDH ne se sont donné d'autre choix que de le faire lanterner un peu.
Leterme s'est montré ces derniers jours plus fuyant que jamais, n'assumant rien, ne communiquant pas, coursant les journalistes. Même s'il est un jour premier ministre, il ne sera jamais réellement reconnu à cette fonction par les Francophones.
Si la Belgique se retrouve aujourd'hui divisée comme jamais elle ne le fut, c'est que ce pays est aujourd'hui bloqué, depuis 150 jours, par des champions flamands uniquement obnubilés par les élections régionales de 2009, uniquement soucieux de reprendre des voix au Vlaams Blok. De Wever le pâle borné connaît aujourd'hui son heure de gloire, lui qui rêve toutes les nuits de la fin de la Belgique. Leterme et lui ont fait la preuve tant de leur incapacité intellectuelle que de leur absence de volonté de négocier, de travailler à des compromis, de trouver des solutions acceptables par tous. L'attitude entêtée du CDV/ NVA est hallucinante. Mais des bulldozers sont-ils capables de mener une stratégie?
Le vote d'hier touche à la symbolique, c'est un message aux électeurs nationalistes flamands. Il est clair que BHV ne sera pas scindé demain, et que le pays ne va pas voler en éclats du fait de cette gifle. Mais la Belgique dans son ensemble en sort affaiblie.
Le vote de ce 7 novembre, c'est le triomphe de la faiblesse. De l'incapacité à faire de la politique. Le triomphe du nationalisme le plus borné, celui des populistes et des fascistes du Blok qui ont réussi à occuper tout le champ politique. Le compromis à la belge a pris des coups et on entend aujourd'hui certaines voix flamandes revendiquer fièrement le droit du plus fort, sans souci des minorités. Ce serait donc cela la (leur) démocratie?
Heureusement, il est d'autres propos plus sensés. Au JT de la mi-journée de la RTBF, ce 8 novembre, Luc Vanderkeelen, éditorialiste de Het Laatste Nieuws déclarait que "avoir le courage d'être modéré dans ce pays est le seul moyen pour la Belgique d'en finir avec ce conflit". Et il faut souligner l'attitude courageuse de la députée écologiste Tinne Van der Straete qui s'est abstenue sur cette loi, seule contre l'équipe de la honte qui ne l'a même pas laissée s'exprimer. Ces attitudes et ces déclarations sont rassurantes. Elles nous permettent, même si certains ont perdu la tête, de ne pas perdre le nord!

Au-delà du cas belge, sommes-nous aujourd'hui dans une ère de recul de la diversité culturelle? On ne peut imaginer qu'un jour la Belgique s'engage dans un scénario tragique à la yougoslave ou à la libanaise. Mais on ne peut que s'inquiéter des rêves de certains d'une ceinture linguistiquement pure (een zuiver taalgordel?) autour de Bruxelles...


* La conjuration des imbéciles est le titre d'un roman jubilatoire de John Kennedy Toole (10/18 n°2010).
Son héros, Ignatius Reilly, a beau être un immense producteur de flatulences, d'éructations, d'esbroufe, de mépris et d'invectives, il n'en reste pas moins plus sympathique que les tristes héros de ce 7 novembre.

vendredi 12 octobre 2007

Le pays de l'accueil

Le village calabrais de Riace s'est donné pour surnom "pays de l'accueil". Ici cohabitent Italiens, Kurdes, Erythréens, Afghans... Un reportage au JT de France 2 ce jeudi soir nous apprend que le maire de ce petit village lutte à sa manière à la fois contre l'exode rural et pour l'accueil de réfugiés. Ceux-ci sont logés par la commune et reçoivent en outre une aide financière. Plusieurs d'entre eux ont ouvert des ateliers d'artisanat. Interrogé, un villageois originaire du village considère qu'il n'est que normal d'accueillir des gens qui ont dû fuir leur pays parce qu'ils y étaient en danger. Les réfugiés sont une chance pour nos villages qui se vidaient, dit le maire... Chez nous, en Belgique, les négociateurs de "l'orange bleue" estiment que l'immigration est "ressentie comme une menace par la société" et entendent donc la limiter. Comme l'écrit Dorothée Klein dans l'éditorial du Vif/L'Express (12.10.07), "il faut se rendre à l'évidence : la peur et l'opportunisme l'ont emporté sur les préoccupations humanitaires". Elle rappelle que de plus en plus d'Etats européens veulent sélectionner les "bons" immigrés", ceux qui seront rentables pour nos économies. Y a bon(s) immigrés! Le nord va donc puiser au sud les bras et les cerveaux qui lui seront utiles, au mépris du développement même du sud. Dans Charlie Hebdo (26.09.07), Philippe Val dénonce lui aussi l'immigration choisie, chère au gouvernement Sarkozy et rappelle que "tous les démographes, tous les économistes, ainsi que les rapports de l'ONU le soulignent : l'Europe et la France auront dans la génération qui vient un besoin vital de l'immigration. Contrairement au fantasme caressé par la droite, plus jamais le Blanc européen ne fera assez d'enfants pour assurer sa puissance démographique. Son avenir est dans l'intégration, le mélange, le métissage, et la conversion de ceux qu'il accueille à la culture démocratique." Mais, dit-il, comment imaginer que les immigrés "choisis" vont accourir chez nous alors qu'on va prélever leur ADN pour décider de qui, dans leur entourage, peut ou non les accompagner, alors qu'ils savent qu'ils seront moins payés que les autres, qu'ils vivront des tas de tracas administratifs, etc. ? Cessons d'avoir peur des immigrés et surtout de participer à l'entretien de cette peur. Ce qui revient à donner raison aux discours stupides et haineux de l'extrême-droite. Considérons, dans ce monde ouvert, qu'il n'est que normal que des hommes et des femmes recherchent bien-être et sécurité, ailleurs que chez eux où ils sont en danger, pour leur appartenance ethnique, leurs idées ou simplement parce qu'ils n'arrivent pas à nourrir leurs enfants. Il y a urgence à repenser autrement l'immigration. A la considérer non comme la peste, mais, comme à Riace, comme une chance partagée !

jeudi 11 octobre 2007

Pour rester critique et éveillé

Quelques choix de lecture (et d'écoute) pour ne pas penser unique...

- le site de ProChoix: www.prochoix.org
"ProChoix est une revue d'investigation, de réflexion et d'analyse au service de la défense des libertés individuelles menacées par l'essentialisme, le racisme, l'intégrisme et toute idéologie totalitaire ou anti-choix."

- le blog de Caroline Fourest: carolinefourest.canalblog.com
C. Fourest est journaliste à Charlie Hebdo et à ProChoix.

- le site de Rue89: rue89.com
"Notre ambition: inventer un média qui marie journalisme professionnel et culture de l'Internet.
Créé par des journalistes, dont plusieurs sont issus de Libération, ce site se concentre sur les sujets qui font parler, jaser, débattre, dans tous les domaines, de la politique au sport, en passant par les nouvelles technologies, la culture ou l'environnement. Nous rêvons que Rue89 devienne peu à peu le point de référence obligé pour tous ceux qui ne veulent pas se contenter de "consommer" l'information et se passionnent pour la confrontation d'idées.
Le site est ouvert sur le reste du monde. Il ne se contente pas de critiquer, il est toujours à la recherche de solutions et se propose d'aider à leur mise en oeuvre (rubrique "Passage à l'acte"). Il fait une large place à la photo et à la vidéo.
Son contenu repose sur le travail en commun de trois cercles:
► Une rédaction, composée de journalistes expérimentés et de jeunes reporters: elle assure l'organisation du contenu du site et une bonne partie de sa production.
► Un cercle de spécialistes, de passionnés et de témoins qui apportent leurs regards et leurs lumières sur l'actualité.
► Le troisième cercle est celui des internautes eux-mêmes, qui participent à la vie de Rue89 par leur commentaires mais aussi en soumettant des articles, des liens vers d'autres sites, des photos et des vidéos. La rue est à vous!"

- le blog de Mohamed Sifaoui: www.mohamed-sifaoui.com
M. Sifaoui est journaliste, écrivain et réalisateur. Son blog publie "les opinions d'un musulman laïque et démocrate qui refuse la compromission avec l'islamisme".

- la chronique de Paul Hermant sur la Première (RTBF radio) chaque matin du lundi au vendredi, vers 7h17.
Le billet quotidien d'un observateur au regard parfois amusé, parfois acéré. Toujours juste.

- Charlie Hebdo (chez tous les bons libraires, chaque mercredi en France, plus souvent le jeudi en Belgique)
L'actualité et des réflexions en textes et en dessins. Des railleurs indispensables. Des journalistes qui décodent.

- Philippe Val : Traité de savoir survivre par temps obscurs (Grasset, 2007)
Le rédacteur en chef de Charlie se demande si l'aventure humaine touche à sa fin, si l'homme du XXIe siècle agit librement, si l'athéisme est tabou, si les singes sont fascistes...

- Normand Baillargeon: Petit cours d'autodéfense intellectuelle (Instinct de Liberté, Lux Editeur 2006)

jeudi 27 septembre 2007

J'ai acheté des plantes à Mooieoog

On a beaucoup parlé de la décision prise fin août 2006 par la Commune de Merchtem, au nord de Bruxelles, d'interdire aux enfants des écoles communales de s'exprimer dans la cour de récréation dans une autre langue que le Néerlandais. Big Brother is watching you, kinderen! Le malheureux gamin francophone qui aurait le malheur de parler dans sa langue maternelle à sa soeur ou à son copain risque la retenue, voire le renvoi. C'est "schild and vriend" en plus soft!
La Commune de Merchtem fait fort en la matière, puisqu'elle avait même voulu interdire aux commerçants de vendre leurs produits sur les marchés dans une autre langue que le néerlandais.
Dimanche dernier, j'ai visité le salon du jardin dans le parc du château de Beloeil. En terre dite wallonne, où les habitants parlent français. L'organisateur, flamand, avait bien fait les choses. Au bord de l'étang et au milieu des charmilles, son salon ne manquait pas de style et la centaine de commerçants présents offrait une belle palette de plantes rares, d'arbustes, de buis taillés, de mobilier de jardin ou de bains d'extérieur. La moitié d'entre eux venait de Flandre, l'autre moitié se partageait entre wallons, bruxellois, français et hollandais. On y parlait donc autant le français que le néerlandais, l'essentiel étant de se comprendre. Parmi les néerlandophones, nombreux étaient ceux qui n'avaient pas pris la peine de modifier les petits panneaux de présentation de leurs produits pour signifier que roze signifie rose, buksboom buis ou bol bulbe. Et alors? Y eut-il des grincements de dents, des indignations, des évocations de la loi du talion? Pas que je sache. Les amateurs de fleurs aiment les fleurs, qu'elles s'appellent tulipes ou tulps.
Les autorités communales de Merchtem jouent un jeu dangereux: bien sûr l'ostracisme peut mener aisément à la purification. Mais leur attitude est surtout stupide et, si l'on n'était en Belgique, pays d'arrangements, leur décision pourrait se retourner contre leurs propres commerçants.
Elle est d'autant plus stupide que cette interdiction d'usage d'une autre langue que le néerlandais a peu de chances d'être respectée, même par les flamands, car qui parle encore Néerlandais en Flandre? C'est la question que posait Jan De Troyer, rédacteur en chef de TV Brussel dans une carte blanche publiée par La Libre Belgique récemment (voir le billet België Blues). Les parlers sous-régionaux reprennent le dessus... Quelle langue est-on donc censée parler à Merchtem: het néerlandais "pur" of le patois local? Le repli sur soi montre vite l'étroitesse de ses limites.

mercredi 26 septembre 2007

PS: on ne se refait pas...

La Libre Belgique de ce jour nous apprend qu'Evelyne Lentzen, présidente du CSA depuis dix ans, ne serait pas reconduite dans ses fonctions par le Gouvernement de la Communauté française (entendez: par le Boulevard de l'Empereur, qui n'a jamais si bien porté son nom). On lui ne reproche pas son incompétence. Au contraire. C'est plutôt sa compétence qui lui vaudrait de perdre cette fonction.
Il y a quelques jours (le 22 septembre précisément), la même Libre Belgique rapportait les propos élogieux de Wolfgang Closs, directeur de l'Observatoire européen de l'audiovisuel: " le CSA de la Communauté française jouit d'une excellente réputation au niveau européen", déclarait-il à l'occasion du dixième anniversaire du CSA. Et LLB d'ajouter: "Joli compliment pour un organe de régulation qui a dû se battre pour obtenir les moyens humains et financiers à hauteur de ses missions."

Pour rappel, le Conseil Supérieur de l'Audovisuel "est chargé de la régulation du secteur de la radiodiffusion en Communauté française de Belgique. Ses missions sont principalement de contrôler le respect des obligations :
• des éditeurs de services (RTBF, télévisions locales, télévisions et radios privées) ;
• des distributeurs de services (câblodistributeurs, Belgacom, Be TV, Proximus, Mobistar, …) ;
• des opérateurs de réseaux (câblodistributeurs, Belgacom, RTBF, …).
Le CSA est composé de deux Collèges : une instance d’avis (Collège d’avis) chargée de rendre des avis sur toute question relative à l’audiovisuel et une instance décisionnelle (Collège d’autorisation et de contrôle) chargée :
• d’attribuer les autorisations d’émettre aux télévisions et radios privées établies en Communauté française ;
• de contrôler le respect des obligations des éditeurs de services, distributeurs de services et opérateurs de réseaux ;
• de sanctionner les infractions à ces obligations." (voir www.csa.be)

Le CSA n'a pas manqué, à plus d'une reprise ces dernières années, de rappeler à ces opérateurs leurs obligations et de les mettre devant leurs responsabilités. Pierre-François Lovens (dans LLB du 22.09.07) considére le CSA comme "mature et respecté", mais ajoutait "même si le monde politique francophone et certains opérateurs peinent encore à tirer tous les enseignements d'une autorité administrative indépendante".
Quelques jours plus tard, le même journaliste nous apprend donc que les enseignements sont tirés: le PS (parti dont Mme Lentzen porte pourtant l'étiquette) ne supporte pas l'indépendance et la rigueur dont a pu faire preuve la présidente, tout au long de ses deux mandats. Elle sera donc "débarquée" du CSA. A l'heure où la pub est de plus envahissante dans les programmes radio et télé, même de la RTBF et des télévisions locales, et où son influence sur les grilles de programmes et son intrusion au coeur même des émissions posent de graves questions, l'annonce de cette probable décision (qui serait imminente) a de quoi inquiéter. L'indépendance a des limites que n'ont pas les lois du marché.
Evelyne Lentzen sera sans doute remplacée par un ancien porte-parole d'Elio Di Rupo, conseiller du centre d'études du PS.
PS, avec un S comme soviétique, comme suffisant, comme subjectif ou comme... socialibéral?

Wallonie, paradis des beaufs?

La Cellule de Développement Territorial, mise sur pied par le Ministre wallon à la même fonction, André Antoine, a six dossiers prioritaires sur le feu. Parmi ceux-ci, des jonctions d'autoroutes qualifiées de "chaînons manquants" et des accès aux aéroports régionaux. Pour soutenir le développement durable, on a vu projets plus novateurs! Mais pas en Wallonie visiblement. Les deux seuls projets privés retenus comme prioritaires sont le projet de technopôle moto à Elouges et le projet de "centre européen des sports de glisse" à Maubray.
L'avenir de la Wallonie repose donc sur la moto et sur le ski...
Le promoteur intelligent aura vite compris que le Gouvernement wallon l'accueillera au champagne s'il vient le trouver avec un projet de terrain de quad, de 4x4 ou de 8x8!

Si ces deux projets ont retenu toute l'attention du Gouvernement wallon, c'est qu'ils "seraient" créateurs de centaines d'emplois: la moto en générerait 300, la glisse 400. Et on ne vous parle là que des emplois directs. Le sport comme solution au chômage wallon. Evidemment, aucun de ces chiffres n'est justifié par les promoteurs qui les avancent. Au contraire.

La moto à l'entrée des Hauts Pays
Les habitants des villages de Thulin, Hainin, Elouges et Boussu-Bois se mobilisent contre l'implantation d'un circuit de sports moteurs.
"Ce projet mégalo, expliquent-ils, consiste à transformer plus de 50 ha de terres agricoles en une sorte de Francorchamps bis dédié à la moto et doté d'une piste asphaltée de 4,1 km pour permettre aux passionnés d'y faire joujou sept jours sur sept, de mars à octobre. Le prétexte utilisé est l'annonce tapageuse de la création de 300 emplois (excusez du peu !). Nous nous sommes rendus sur les circuits du nord de la France et nous avons étudié la chose, c'est du pipeau. Le potentiel de création d'emploi par rapport à ce qu'il y a sur le zoning voisin de Dour serait en fait de l'ordre de la dizaine dans le meilleur des cas. Une disproportion énorme avec le gaspillage d'argent, de terrain et de qualité de vie des villages de Elouges, Thulin, Hainin (1500 habitants dans un rayon de 1000 m!)..."
Le circuit accueillerait des compétitions de moto les week-ends entre mars et octobre. Mais qu'on se rassure (!): l'investissement serait rentabilisé durant toute l'année, puisque les voitures prendraient le relais en hiver.
Interpellé au Parlement wallon, le Ministre de l'Economie, Jean-Claude Marcourt, a reconnu que le chiffre de 300 emplois pourrait finalement n'être que de... 8!
Le Ministre Antoine, toujours au Parlement, a affirmé - sans rire - que ce projet avait notamment pour objectif de "faire progresser la cohésion sociale et valoriser le capital social wallon, s'inscrire dans une perspective d'amélioration continue du cadre de vie; assurer un développement social équilibré."
"Heureusement, disent les opposants, le projet ne semble plus avoir autant le vent en poupe qu'à son annonce fin 2004. KYOTO parvient tout de même à remuer (un peu) certaines consciences !!! Pourtant la menace est de taille et n'est toujours pas écartée."
Le projet de révision de plan de secteur (procédure lancée en janvier 2005) a en effet été adopté le 19 juillet dernier par le Gouvernement Wallon. Les citoyens auront 45 jours pour donner enfin leur avis lors de l'enquête publique, attendue pour les semaines à venir.

Les riverains dénoncent les incohérences de ce projet avec toutes les politiques d'amélioration du cadre et de la qualité de vie. Eux qui, à raison, ne peuvent tondre leur pelouse le dimanche, entendraient à longueur de week-end des tondeuses puissance 100 accélérer et décélérer à proximité de chez eux. Ils se sont organisés en créant l'asbl " Un Circuit ? Non merci ! " dès 2005. Et ont lancé sur leur site (www.uncircuitnonmerci.be) une pétition on-line. Ils espèrent ainsi enterrer un projet qui s'oppose frontalement à la notion de développement durable, quoi qu'en dise André Antoine dans ses sophismes que ne renierait aucun jésuite.

Le ski sur les Plaines de l'Escaut
A Maubray dans l'entité d'Antoing, le prince de Ligne envisage de créer, sur une superficie totalement démesurée de 350 ha, un "centre européen des sports de glisse". Au départ d'une tour de 65 mètres de haut dominant le Grand Large, les skieurs pourront s'élancer sur deux pistes de.. 200 mètres de long. Le bonheur est dans le pré, sur poudreuse artificielle bien sûr. Ces sportifs en chambre pourront également s'ébattre dans un stade de glace, une piscine tropicale ou encore sur une rivière qualifiée de sauvage. Le caractère dépassé et ridicule du projet semblait avoir, au départ, échappé au Gouvernement wallon qui a mis en chantier la procédure de révision du plan de secteur pour ce "projet novateur, unique au monde".
Peu à peu, le Gouvernement, lisant le rapport de l'étude d'incidences sur l'environnement (réalisé par le bureau d'études Planeco), l'avis défavorable de la CRAT, celui du Parc Naturel des Plaines de l'Escaut (B), du Parc Naturel régional Scarpe-Escaut (F), les critiques de centaines de riverains, d'écologistes et de naturalistes, peu à peu donc le Gouvernement semble prendre conscience du caractère gaspilleur en eau, en énergie et en espaces naturels de ce projet. Le promoteur a déjà été chargé de revoir sa copie, mais semblerait cependant avoir beaucoup de difficultés à comprendre les messages qui lui sont adressés et persisterait dans le maintien de toutes ses activités gaspilleuses, polluantes et destructrices de calme et de nature.
Le Gouvernement wallon, visiblement mal à l'aise, n'en finit pas de reporter sa décision.
Au niveau sous-régional, le Conseil de Développement de la Wallonie Picarde (c'est de ce nom nettement plus vendeur (?) qu'a été rebaptisé le Hainaut Occidental) a décidé de se pencher sur le projet fin octobre en auditionnant les différents acteurs: promoteurs (jusqu'ici très taiseux), opposants (jusqu'ici très actifs), communes, parcs naturels, IDETA, etc. On ne peut qu'espérer que les pilotes de la Wallonie Picarde diront leur opposition à ce projet totalement antinomique à toute politique de développement durable, notion sur laquelle ils entendent fonder leur sous-région. Faute de quoi, leur Wallonie Picarde devrait plus pertinemment s'appeler Alpes Occidentales, comme le suggèrent les opposants qui rappellent l'existence du centre Ice Mountain à Comines (dans l'ouest du HO), le projet Snow Games à Lessines (à l'est) et ce dernier projet à Maubray (au centre). La neige artificielle sera-t-elle le ciment de la Wallonie Picarde?
Voir le site de la Coordination Internationale des Alpes Occidentales: www.c-i-a-o.eu

Demain la chasse?
Si le Gouvernement wallon veut poursuivre dans sa vocation de soutien aux projets de beauf, on peut, par exemple, lui suggérer de concrétiser une idée qu'avait lancée l'ineffable José Happart, voici quelques années alors qu'il était Ministre de l'Agriculture et de la Ruralité. Visitant la réserve naturelle des Marais d'Harchies, seule zone "Ramsar"* de Wallonie, il avait suggéré d'y créer une école de pêche. Peut-être pourrait-on aussi envisager d'ouvrir les réserves naturelles à la chasse et les sentiers pédestres aux quads...
En attendant, l'avenir wallon, s'appuyant sur la F1, la moto et le ski, s'annonce enfin rayonnant.
Voilà poukwé no s'tons firs d'iess wallons!
Michel Guilbert

* La convention de Ramsar protège les zones humides d'une grande richesse naturelle. Il s'agit d'un label international.

lundi 10 septembre 2007

België blues (1)

ou... Impasse du nationalisme

La Belgique avance dans le brouillard depuis maintenant trois mois exactement.
Peut-être séduits par la victoire d’un Sarkozy qui a ratissé large dans les terres lepénistes, le CDV et la NVA se sont lancés dans une course aux électeurs flamingants pour tenter de prendre la main sur le Vlaams Blok/Belang et la liste Dedecker. Et ils n’en démordent pas : un jour (plus ou moins...) prochain, que les Francophones le veuillent ou non, la Flandre sera indépendante.
En attendant, ils réclament toujours plus de compétences régionales. Toujours sous le prétexte que ces riches Flamands en ont assez de payer pour ces chômeurs wallons, pauvres et malades. Les clichés mènent la danse en Belgique.
Il y aurait donc en Flandre une part non négligeable de l’opinion publique qui n’entendrait plus jouer le jeu de la solidarité. Tout Etat, tout niveau de pouvoir démocratique fonctionne sur un système de répartition et de redistribution des richesses. Ceux qui ont un travail paient pour ceux qui n’en ont pas ou n’en ont plus ; les bien portants paient pour les malades ; les riches paient pour les pauvres.
Le même principe de solidarité fonctionne au sein de l’Europe : les régions les plus aisées aident celles qui sont en retard de développement à améliorer leur niveau de vie. C’est ainsi que des pays comme le Portugal ou l’Irlande se sont spectaculairement redressés.
Si les Flamands vont au bout de leur logique « l’argent des riches reste chez les riches », la Flandre indépendante ne devrait pas demander son adhésion à l’Union européenne, mais faire cavalier seul. Et quitter ces « Eurorégions » en construction où, à une échelle sous-régionale, des Flamands, des Wallons et ici ou là des Français, des Allemands ou des Néerlandais tentent de nouer des liens de partenariat. Ces coopérations ont-elles un sens quand on ne veut plus assumer, par ailleurs, sa part de solidarité ? C’est d’ailleurs ce que dit Geert Van Istendael (auteur du Labyrinthe belge – Castor Astral 2004) dans Libération aujourd’hui : « Si la Belgique est impossible, l’Europe est également impossible, car si on ne peut concilier deux ou trois communautés et langues, comment le faire à 27 ? »

A l’intérieur même d’une Flandre indépendante, quelles seraient les limites d’une solidarité réinventée ? Le principe « l’argent des riches appartient aux riches » devrait vite montrer ses limites et il ne fera pas bon être malade, vieux ou chômeur en Flandre. On sait qu’on ne vit pas aussi bien dans le Limbourg que dans la région de Courtrai. La Flandre soi disant riche va-t-elle devoir se débarrasser de ses sous-régions « en retard de développement » ?

De toute façon, quel serait l’intérêt de plus de régionalisation ? Les routes belges seront-elles plus sûres une fois la sécurité routière régionalisée ? Le Wallon qui se rendra à Bruxelles en voiture aurait alors trois codes de la route différents à respecter. Alors qu’il faudrait tenter d’harmoniser les règles de sécurité routière au niveau européen, certains voudraient choisir la voie inverse, par pur orgueil nationaliste. La SNCB serait promise au même sort, avec les mêmes conséquences absurdes et sans doute coûteuses.

Et puis à l’heure où la diversité culturelle est dans toutes les déclarations politiques, comment peut-on à ce point se replier sur son nombril nationaliste en rejetant son voisin ? Aucun nationalisme n’est progressiste. Ils sont tous réactionnaires et individualistes, tournés vers le passé, la nostalgie, le rejet.

De quelle Flandre parlent les nationalistes ? Et en parlent-ils d'une même voix? Dans une carte blanche récente (LLB – 03.09.07), Jan De Troyer, rédacteur en chef de TV Brussel, constate le retour en force des dialectes en Flandre, au point que des téléspectateurs flamands (et plus encore néerlandais) ne comprennent pas des séries télé ou des chanteurs pourtant flamands:
« on est donc arrivé en Flandre dans la situation bizarre qu’après des décennies de lutte d’émancipation flamande et de lutte pour la reconnaissance du néerlandais comme langue de culture, nos artistes retournent à la langue régionale et les profs de néerlandais abandonnent les bases de l’enseignement linguistique. (…) Bien qu’il semble être à la mode, l’arbitraire linguistique n’est pourtant rien d’autre qu’un repli sur soi-même et une exclusion de l’autre. »

C’est quoi la Belgique ? « Un pays petit tombé par accident dans un trou de l’histoire », comme le dit Claude Semal, mais aussi un pays multiculturel, où tout se mélange. Un pays zinneke. Où chacun a au moins un ancêtre qui venait de l’autre côté de la frontière linguistique. Où l’ancien ministre-président wallon porte un patronyme flamand, alors que son équivalent flamand affiche un nom francophone. Où les Flamands se sentent chez eux dans les Ardennes, autant que les Francophones à la côte. Où Arno l’ostendo-bruxellois fait un tabac, autant que la rocheforto-monégasque Justine Hénin. Cette multicultarité est-elle donc si haïssable aux yeux des nationalistes ? Après la fin de la Yougoslavie, celle de la Belgique ?
Mais sérieusement, cette fin est-elle possible ? Ou jouons-nous à nous faire peur ? De toute façon, Bruxelles, ville francophone en territoire flamand, empêche cette scission.

Et puis où en est l’opinion publique flamande ? Y a-t-il vraiment une majorité derrière cette volonté d’indépendance ?
Il serait temps que les intellectuels et les artistes se fassent – plus - entendre. Il y a quelques mois, Arno présentait son nouveau CD au casino d’Ostende et déclarait que l’urgence n’était pas de savoir qui serait le président d’une Flandre indépendante, puisque de toute façon à la fin du siècle les Ostendais et bien d’autres Flamands auraient les pieds dans l’eau à cause du réchauffement climatique. Et Arno de prévoir qu’un jour pas si lointain le président flamand se verrait forcé de se réfugier à Bruxelles.
« Et puis nous, on préfère s’envier et se détester
On adore les histoires de quartier
Ca part dans tous les sens
Rien qu’on se bat mais on se trompe de sens
Carrément on passe pas pour des gens qui pensent. »
(Arno et Faf Larage : I’m not into hop)


P.S. : Sur le plan parlementaire, seuls « grands » partis politiques à être nés chacun de leur côté alors que le processus fédéral était enclenché, les Ecologistes flamands et francophones constituent à la chambre un groupe commun. Une particularité dans ce pays qui suit plutôt un processus de division. Les trois familles traditionnelles (socialiste, sociale-chrétienne et libérale) ont suivi le chemin inverse : les partis nationaux se sont « communautarisés", jusqu’à n’avoir parfois plus beaucoup de contacts entre eux.
Les Ecologistes plaident pour une circonscription électorale unique : que les électeurs belges puissent élire, pour une part de leurs élus nationaux, des hommes et des femmes politiques qui auraient une légitimité dans tout le pays. Pour cela, il faudrait mieux se connaître et plus s'intéresser à "l'autre".

P.S.2: Signe des temps, le sens de l'auto-dérision typiquement belge n'a pas encore fait sa rentrée, semble-t-il...

P.S.3: La Belgique est un plaisir et doit le rester.

(1) België blues était le titre d'une chanson de Walter De Buck, à la fin des années '70.

vendredi 8 juin 2007

J'ai reçu une lettre d'Elio

Elio m'a écrit! Il s'adresse à moi "personnellement", me dit-il. Woaw! Mais qu'ai-je fait pour que l'empereur de toutes les Wallonies (la picarde, la boraine, la centrale, la liégeoise et toutes les autres) s'intéresse à ma petite personne? C'est que, me dit-il, "les indépendants créent la richesse de notre pays". Il doit y avoir erreur sur la personne ou alors les services impériaux devraient mettre à jour leurs fichiers: si je me souviens bien, j'ai dû être indépendant en 1987-1988... Et je n'ai jamais créé beaucoup de richesse (quoique... de la richesse intellectuelle peut-être?)
Mes deux fils ont également reçu une lettre d'Elio, parce qu'ils sont jeunes et que "les jeunes doivent pouvoir vivre heureux, c'est (sa) profonde conviction." Certains de mes étudiants ont reçu le même lettre personnelle.
Une de mes connaissances a également reçu une lettre "personnelle" d'Elio, en tant que retraité.
Ca commence à faire beaucoup de lettres personnelles et je me sens moins privilégié.
Aux jeunes, il dit que "vivre avec des colocataires, ça n'a qu'un temps!" J'ai relu la lettre attentivement, j'ai vu en tout petit dans le coin inférieur droit www.ps.be. Ce qui semble confirmer qu'il parle bien au nom du PS et non du MR. parce que si je le comprends bien, le partage de logement, la vie communautaire, c'est pas son truc. Il prône plutôt l'individualisme, Elio, c'est ça le socialisme du XXIe siècle. D'ailleurs, son parti, c'est le vrai parti des indépendants et "de toutes (ses) forces", il est à mes côtés et "c'est pour les petits indépendants que le PS travaille le plus".
Je me demande ce qu'il dit aux chômeurs, aux SDF, aux sans-papier...
Allez, le plus vieux métier du monde a toujours de l'avenir...

Ps (c'est le cas de le dire): j'aimerais quand même bien savoir à quels fichiers les services (du boulevard) de l'empereur ont accès pour envoyer tous ces courriers personnels et ciblés...

mardi 22 mai 2007

Pour ne (surtout) pas en finir avec Mai 68

Ainsi donc, le nouveau président français veut faire table rase des acquis de mai 68 !
Où en seraient les droits des femmes, des homosexuels, des jeunes, des étrangers sans Mai 68 ? Où en serait l’écologie, l’environnement, les droits de l’homme, le féminisme ? Quelle place y aurait-il pour l’idée même d’alternatives à la société de consommation ? Quelle place y aurait-il pour les débats, le rapprochement entre les citoyens et les politiques, la démocratie culturelle, la diversité culturelle ? Peut-on encore imaginer, si l’on s'assied sur les acquis de '68, des libertés nouvelles, plus d’autonomie pour les citoyens, plus de justice sociale ?
Aujourd’hui, on peut penser par soi-même, sans être obligé (comme on l’était avant ‘68) de vivre comme vivaient nos parents, d’endosser leurs valeurs, celles de l’église, de l’école, du gouvernement.
C’est donc cela la rupture annoncée par Sarkozy : le retour à l’ORTF, à cette pensée unique fondée sur un ordre bien établi, sur les seules valeurs d’une élite bien pensante, celles d’une réussite individuelle avant tout économique, celles de la compétition, de la consommation ?
Cette rupture-là n’a évidemment rien de révolutionnaire, rien de progressiste. Cette rupture-là est rétrograde. C’est l’annonce d’un monde plus divisé que jamais, où il y a ceux qui ont réussi et ceux qui bavent de réussir un jour. C’est l’Italie de Berlusconi, un monde de rêve… pour ceux qui ont réussi (la réussite ne s’entendant qu’en monnaie sonnante et trébuchante ou en notoriété).
En fait, l’ORTF est revenue depuis longtemps : elle s’appelle TF1. Et la Star AC ou la Nouvelle Star sont des modèles symboliques de cette société de rupture que nous propose cette droite méprisante, qu’elle s’appelle UMP en France ou MR chez nous.
En face de cette droite-là, celle de la réussite individuelle, du « succès-à-tout-prix », la gauche. Ou plutôt les gauches. L’une (suivez mon regard…) repliée sur la sauvegarde de la sécurité sociale et la protection-mise-sous-tutelle des laissés pour compte du système. L’autre imaginative, libératrice et créative. « Etre de gauche, c’est s’inscrire dans une aventure créatrice à la conquête des libertés nouvelles, et seule la jouissance de ces libertés nous permettra d’inventer les régulations de demain. », écrit Philippe Val dans Charlie Hebdo du 16 mai 2007. « Le grand projet de la gauche : être un moteur intellectuel et politique pour briser des tabous, et faire suffisamment aimer le présent pour vouloir agir en vue d’y vivre le plus heureux possible dans une société où le pouvoir est soucieux de la justice et insoucieux des mœurs, tant qu’elles ne lèsent pas des tiers. »
Allez, sous les pavés, la plage !

samedi 19 mai 2007

La parade des paons

Est-ce la contagion du Festival de Cannes? En ce moment, chez nous, là où il y a des gens, il y a des paons. Et les paons font ce qu'ils savent faire de mieux: ils se pavanent.
En campagne, les paons n'ont aucune honte. Ils sont capables de plastronner même dans des organisations auxquelles ils n'ont jamais prêté le moindre intérêt, auxquelles ils n'ont jamais voulu accorder le moindre subside, parce que ces organisations n'entraient pas dans leurs cases élitistes ou partisanes.
Mais les paons ne ratent aucune occasion de se montrer, de serrer des mains, tout sourire, le noeud-pap' frétillant, la bouche en coeur, un petit mot gentil pour chacun. Ces fêtes prennent brusquement - pour eux - tout leur sens, même si, en temps ordinaire (1), les paons ne leur manifestent, au mieux, qu'indifférence.
A peine ont-ils traversé à pas mesurés l'espace populeux qu'ils sont partis ailleurs, à la recherche d'autres mains à serrer.
"Non, je ne puis souffrir cette lâche méthode qu'affectent la plupart de vos gens à la mode. Et je ne hais rien tant que toutes les contorsions de tous ces grands faiseurs de protestations. Ces affables donneurs d'embrassades frivoles, ces obligeants diseurs d'inutiles paroles..." (Molière - Le Misanthrope)
(1) les temps ordinaires sont ceux où les paons ne sont pas en situation de ne pas être réélus.

jeudi 10 mai 2007

10 raisons pour lesquelles je suis candidat aux élections du 10 juin sur la liste 10

Parce qu’il y a urgence à changer de mode de vie et que l’écologie politique est le seul mouvement politique à s’inscrire dans un vrai projet d’avenir.
Parce que la lutte contre le réchauffement climatique est - tout le monde en convient – la priorité des priorités et que seuls les Verts portent un programme adapté à cette problématique et sont cohérents dans leurs positions.
Parce que les plus défavorisés seront – et sont déjà – aussi les plus touchés par ce réchauffement climatique. Chez nous comme dans le sud.
Parce que l’éthique en politique n’est pas un vain mot, et que les Ecologistes ne multiplient pas les mandats et ne les utilisent pas à des fins personnelles.
Parce qu’il faut travailler à une autre économie, plus solidaire, plus créatrice d’emplois de qualité et non délocalisables.
Parce qu’il faut rééquilibrer les rapports nord-sud, annuler la dette du tiers-monde, assurer la souveraineté alimentaire des peuples et lutter pour une correcte application du droit d’asile.
Parce qu’il faut se préparer à l’après-pétrole, en entrant dans une vision prospective. Tous les indicateurs sont aujourd’hui dans le rouge. Et les socialibéraux continuent à penser et à agir comme si on vivait toujours les années ’60.
Parce qu’il faut défendre à tout instant une liberté d’expression aujourd’hui bien fragile, menacée par des obscurantistes qui s’appuient sur le droit à la différence pour tenter d’imposer leurs règles religieuses rétrogrades et brutales.
Parce que j’ai toujours préféré ceux qui « sont » et qui « font » à ceux qui « paraissent » et qui « disent ».
Parce que "La vie prime l'économie. Telle est la pratique individuelle et collective d'où naîtra la véritable internationale du genre humain." (Raoul Vaneigem)

Voilà pourquoi je suis 4e candidat effectif sur la liste Ecolo pour le Sénat, aux côtés d'Isabelle Durant, de José Daras, de Carine Russo, de Jacky Morael, de Marianne Leterme et de tous les autres.
Michel Guilbert

lundi 7 mai 2007

Nouvelle victoire à la Star Ac

C’est donc Nico qui l’a emporté au terme d’un suspense palpitant qui aura tenu la France en haleine durant des mois. Quatre candidats au titre avaient été sélectionnés par toutes les chaînes de télé : Nicolas, l’énervé au parler vrai ; Ségolène, la bourgeoise rigide mais exaltée ; François, le paysan cul-(béni)-entre-deux-chaises ; et Jean-Marie, l’éructeur d’un autre âge. Depuis le début, les médias avaient fait leur choix, les huit autres n’étaient là que pour la figuration et pour profiter de leur quart d’heure de médiatisation.
Quand Nicolas, au lendemain de l’annonce officielle de sa candidature à la Star Ac, s’est promené dans les ruelles du Mont-Saint-Michel, il n’y a croisé que quelques touristes japonais surpris. Mais il a entraîné dans son sillage des dizaines de journalistes, photographes et cameramen, soucieux de témoigner de la démarche altière et de la vision large de l’homme d’Etat qui déjà pointait sous Napoléon. Jean-Marie, autrefois évité par la presse qui refusait de tendre ses micros à un ennemi déclaré de la démocratie, s’est cette fois complu sur les plateaux de télévisions trop heureuses d’accueillir ce tribun dont le néo-fascisme pèse peu face à son "médiatisme". Ségolène fut vite fascinante dans son rôle de Jeanne de Poitiers contre les éléphants, même si (et sans doute parce que) elle agit précisément comme un éléphant dans un magasin de porcelaine, s’asseyant sur le programme de son parti et sur la notion même de gauche. François fut la surprise, sortant de son rôle de provincial coincé et déclarant à tout journaliste qui voulait l’entendre qu’il incarnait le renouveau du centre, tout ministre de droite qu’il fut.
Si ces candidats font des voix, c’est qu’ils font aussi de l’audience. Et réciproquement. Bref, tout le monde s’y retrouve.

Nico l’a fait savoir rapidement : pas de débat. C’est qu’il s’agit d’avoir l’air ce qu’on entend paraître. Allez savoir pourquoi, les médias se sont inclinés : au premier tour, il n’y eut donc pas de débat. Trop risqué. Il aurait pu écorner les images fabriquées par les plans de com’ des candidats. Les débats sont ringards, ils ont le désavantage d’obliger les participants à sortir de textes bien huilés et de se confronter à d’autres points de vue, à l’inattendu parfois.
Ce fut quand même le cas lors du seul débat, celui – obligé – du second tour, quand la madone sortit de ses gonds pour une « saine colère » contre le candidat énervé soudain devenu zen.

Le remarquable documentaire de Serge Moati « La prise de l ‘Elysée » (diffusé ce lundi par France 3) témoigne de la prédominance de la com’ dans nos systèmes politiques, met en lumière les calculs, les bassesses, les cynismes, la morgue.
Et aussi la ferveur des militants et des électeurs pour ces stars (ou tsars ?) fabriquées. Mais pourquoi donc les hommes et les femmes ont-ils tant besoin de dieux vivants, de ces dieux malades d’eux-mêmes, d’exaltation, de suffisance, de prétention ?

lundi 16 avril 2007

Etre de droite, est-ce inné?

Sur les ahurissantes déclarations de Nicolas Sarkozy sur l'inné, lire le portrait de Sarko par Michel Onfray (qui fut, par son interview pour Philosophie Magazine, à l'origine de ces déclarations): "Le cerveau d'un homme de droite" - http://michelonfray.blogs.nouvelobs.com
(le texte est également consultable sur www.prochoix.org)
Et aussi l'édito de Philippe Val dans Charlie Hebdo du 11 avril: "Sarkozy Ier, roi de la génétique".

Le Pen comme alternative?

Entendu ce matin au Journal Parlé de la RTBF, un électeur de Le Pen expliquer que s'il vote pour le vieux facho (il ne l'a pas dit comme cela), c'est parce qu'il est opposé au permis à points: on empêche de rouler d'honnêtes gens qui ont besoin de leur voiture pour aller travailler, alors qu'on laisse courir les délinquants!
La veille, au JT de la RTBF, un ancien mineur du Nord expliquait que s'il va voter Le Pen c'est parce que la droite a créé une situation sociale déplorable. La gauche? On l'a déjà eue, c'était pas mieux. Reste l'alternative Le Pen. Ruquier fait des dégâts avec son émission "On a tout essayé". Mais, quand les français auront tout essayé, que restera-t-il d'eux et de la France? Se le demandent-ils?
Dans son programme, Le Pen place en tête le dossier immigration: les aides sociales et les allocations familiales seront réservées aux seuls français, le regroupement familial sera supprimé, la France sortira de l'espace Schengen. Au hasard (ou presque) des autres dossiers: rétablissement de la peine de mort, construction de nouvelles prisons, présomption de légitime défense pour la police, remise en question de la dépénalisation de l'avortement, refus du mariage homosexuel, sanctuarisation (sic) de l'école (suppression des "heures de vie de classe"), suppression des allocations sociales et famialiales pour les familles d'enfants perturbateurs, rétablissement de l'autorité à l'école et des mérites de la sélection, refus de la coopération policière et judiciaire européenne, libération au maximum des entreprises des contraintes qu'elles subissent, libération du travail et de l'entreprise de l'étatisme, du fiscalisme et du réglementarisme. Restons-en là. Pétain est encore vivant.
Mais c'est bien Le Pen qui est invité sur toutes les chaînes télé et radio. Le vieux néo-fasciste (comme on l'appelait encore en 2002 et comme on ne l'appelle plus aujourd'hui) peut aujourd'hui développer comme et où il l'entend ses discours de peur, de haine, de rejet de l'autre, de populisme, de poujadisme, de réaction, de nationalisme et de démagogie. Il est loin le temps où sa venue générait des manifestations de protestation. Les médias et l'opinion publique l'ont banalisé (jusqu'à en faire un "candidat érotique"? , comme l'écrit Jean-Baptiste Thoret dans Charlie Hebdo du 11 avril).
Le voilà donc comme une alternative pour les déçus, les beaufs, les râleurs, les individualistes forcenés, les cyniques, les je-m'en-foutistes, les je-les-emmerde-tous.
Aux royaume des aveugles, les borgnes sont rois...
(Et tant pis si ce royaume est - pour l'instant...- une république.)

Skier à Maubray ou surfer sur le réchauffement climatique ?

Le monde court à sa perte et le réchauffement de la planète constitue une grave menace pour des populations et des générations entières. Il est urgentissime de modifier nos modes de vie et de production pour réduire les émissions mondiales de gaz à effet de serre non pas de 7,5 ou 10% mais de 60 à 80 % d’ici 2100.
Voilà, en substance, ce qu’on peut retirer de la lecture des rapports des experts du Giec réunis à Paris, puis à Bruxelles en ce début 2007.

Rejoignant le discours écologiste, les autres partis se montrent bien décidés à affronter le problème. « Il est temps d’être radical, pour notre climat, pour nos familles, pour notre environnement, pour notre mobilité, pour nos travailleurs, pour nos entreprises, pour nous tous…», déclarait en décembre dernier la présidente du CDH. « Le réchauffement de la planète est devenu un défi majeur. Nous devons absolument favoriser les économies d’énergie, à la fois parce que l’énergie coûte de plus en plus cher à nos concitoyens, mais aussi parce que la lutte contre l’effet de serre est une question de survie. », affirmait le PS en janvier.
Tout le monde est donc d’accord : face au plus grand problème auquel ait dû faire face la planète entière, il faut changer radicalement de manière de vivre. Tout le monde ? Non, à Maubray, petit village de l’entité d’Antoing, un promoteur résiste : le prince de Ligne veut, contre vents et marées (!), produire de la neige et de la glace toute l’année. Augmentant ainsi le réchauffement climatique et faisant ainsi un bras d’honneur aux autres citoyens de la planète.

S’il devait se réaliser, le « Centre européen de sports de nature et de glisse » (on notera que le terme de nature a été ajouté tardivement, face aux réactions, et ne figure pas dans le projet remis par le promoteur au Gouvernement wallon) s’étendrait sur 350 ha et un périmètre de 19 km ; il accueillerait 1.500.000 personnes/an. La consommation d'eau est estimée à 500.000 m³/an , puisée par un forage dans la nappe du Calcaire Carbonifère (déjà surexploitée dans le Tournaisis).
Ses besoins énergétiques sont de 54 millions de kWh de gaz/an (l'équivalent de la consommation de 2250 ménages), et 31 millions de kWh d'électricité/an (l'équivalent de la consommation de 8940 ménages)
Le Parc Naturel des Plaines de l’Escaut a calculé que ce projet pharaonique produirait 21.000 tonnes de CO2 par an (sans compter le CO2 produit par les véhicules des clients, attendus dans un rayon de 300 km).

En réaction à ce projet s’est constituée la CIAO (Coordination Internationale des Alpes Occidentales) qui regroupe des écologistes, des naturalistes et des riverains. Face au mutisme du prince qui refuse de communiquer, la CIAO a mis le projet… en ligne: www.c-i-a-o.eu

Si, à l’exception d’Ecolo, les partis politiques soutiennent ce projet, c’est qu’il annonce la création d’emplois: 400 temps pleins, 700 partiels, plus quelques centaines dans l’Horeca et à l’extérieur. Mais aucun élément dans le dossier ne justifie ces chiffres. Pas un mot sur le plan d’entreprise, sur une quelconque étude de marché, ni sur les investisseurs.
Réchauffement climatique ou pas, le Gouvernement wallon croit dans ce projet : dans sa note de présentation du projet (du 27 avril 2006, signée A. Antoine), il se montre enthousiaste pour ce « concept novateur » « de haute qualité environnementale », sans se soucier le moins du monde de son impact en matière d’utilisation d’eau et d’énergie, ou de production de CO2. André Antoine, ministre de l’énergie et de l’aménagement du territoire, vice-président du Gouvernement wallon, était à Tournai récemment. Interpellé par deux membres de la CIAO à la suite d’une intervention au cours de laquelle il a appelé tous les Wallons à économiser l’énergie, il ne s’est pas opposé au projet de centre de sports de glisse, comparant ce projet aux aéroports, eux aussi polluants mais fournisseurs d'emplois… On est loin des appels au changement radical évoqués plus haut !
Le projet est actuellement soumis à une étude d’incidences sur l’environnement.

Egalement interrogé par un membre de la CIAO lors de son passage à Tournai, le climatologue belge Jean-Pascal van Ypersele (Professeur à l’Institut d’Astronomie et de Géophysique G. Lemaître à l’UCL, membre de la Commission fédérale du développement durable, représentant de la Belgique au GIEC) a déclaré : « Nous n’avons pas d’autre choix que de changer radicalement la manière dont l’économie fonctionne. Bien sûr, il faut trouver un équilibre entre l’environnement, l’économie et le social, c’est le défi du développement durable. Mais fabriquer de la neige n’est certainement pas la bonne manière d’économiser l’énergie. Construire des pistes de ski dans un pays qui va devenir chaud touche à l’absurde. »

La CIAO a entamé un vaste travail d’interpellation d’associations et d’organisations, de personnalités scientifiques et médiatiques, des partis politiques à tous les niveaux.
Leurs positions par rapport à ce projet d’un autre âge (celui où « on ne savait pas ») sont et seront publiées sur le site. Jusqu’à présent, seuls parmi douze listes politiques d’Antoing, Brunehaut et Péruwelz Ecolo Brunehaut et Ecolo Péruwelz ont fait part de leur positionnement. Les autres groupes politiques (socialistes, libéraux, listes diverses), courageusement, se taisent.
Le projet de Centre de Glisse constitue, à l’évidence, un beau cas de figure face auquel les partis sont et seront amenés à faire preuve de leur capacité de cohérence et de mise en œuvre de leur volonté de s’attaquer « radicalement » au réchauffement climatique. Au risque de… déraper.


Le dimanche 27 mai en matinée, la CIAO organise une mobilisation, sous forme de balades à pied et à vélo autour du site concerné. Des naturalistes feront découvrir les richesses naturelles de la zone.
(info sur www.c-i-a-o.eu ou au 069 34 42 11)

Embrassons-nous, Folleville!

Le 21 avril, on se fait un câlin à Namur. Le mouvement Free Hugs, parti d’Australie en 2004, se décline aujourd’hui dans toutes les langues : Câlins gratuits – Gratis Knuffels – Objeti zdarma – Ilmaisia haleja – Pelukan Percuma – Abracci gratis - etc. (1) Le terme de « mouvement » est approprié : il vous porte vers un(e) inconnu(e) avec qui, pendant quelques brèves secondes, vous échangez un peu de tendresse. Les Sick Puppies en ont fait un clip plein de charme où l’on voit des passants tomber dans les bras l’un de l’autre.
Chaque jour, dans plusieurs endroits dans le monde, des anonymes s’étreignent juste pour le plaisir du geste et le bien qu’il apporte.
Ce samedi 21 avril à partir de 14h, ce sera sur les grands axes de Namur.
Dans ce monde de brutes, voilà une information très printannière et revigorante.

Et pendant ce temps-là, des barbus névrosés ne trouvent rien de mieux que de lancer une fatwa contre une ministre, exigeant sa démission parce qu’on l’a vue faire l’accolade à son instructeur après un saut en parachute ! Au Pakistan, un tribunal islamique (heureusement illégal, il ne manquerait plus que cela !) considère que la Ministre du Tourisme a posé « de manière obscène » sur des photos avec des parachutistes français. Il y a une bonne nouvelle dans celle-ci : c’est que les islamistes, refusant qu’hommes et femmes s’approchent, ne se reproduiront pas… (2)

(1) Je me rends compte, à cette occasion, que le mot « gratis » est commun à de très nombreuses langues. C’est plutôt une bonne nouvelle dans ce monde où tout se paie !
voir www.freehugscampaign.org et www.calins-gratuits.com
(2) On peut rêver…

samedi 24 mars 2007

Ce que veulent dire les mots

La rénovation a atteint sa vitesse de croisière
On le pressentait : le pétard était mouillé et la découverte de « l’écologie humaine » par le Ps risquait fort de n’avoir que des conséquences superficielles. En fait, il faut comprendre que dans l’appellation « écologie humaine » il y a « écologie » d’un côté, et « humaine » de l’autre.
Traduction : à Antoing, le bourgmestre vient d’annoncer qu’il fera éteindre l’éclairage des monuments publics la nuit. Voilà pour l’écologie. Dans le même temps, il s’est déclaré favorable au projet de centre de sports de glisse porté par le prince de Ligne, projet qui – s’il devait voir le jour - gaspillerait annuellement 54 millions de kWh de gaz, 31 millions de kWh d'électricité et 500.000 m3 d'eau et produirait 21 000 tonnes de CO2, mais qui annonce des création d’emplois. Voilà pour l’humain. Donc, l’écologie oui, mais oui aussi à son contraire. On ne peut que conseiller au bourgmestre d’Antoing et à tant de ses collègues de sortir de leur chère Wallonie pour constater comment une politique soucieuse de l’environnement a été bénéfique également à l’économie et combien d’emplois une véritable politique écologique a pu créer en Allemagne, en Autriche, dans les pays scandinaves, en Espagne, etc.
Mais certains hérauts (à ne pas confondre avec héros) de la Wallonie ont mieux à faire quand ils voyagent. On a appris cette semaine que José Happart et quelques-uns de ses commensaux auraient été chasser en Bielorussie grâce à une caisse noire de la ville de Charleroi alimentée notamment par des fonds européens. Certains avaient cru voir dans le hérisson fouronnais un Astérix wallon se battant avec opiniâtreté et humour contre l’envahisseur. En fait, on a pu constater depuis longtemps qu’il n’était qu’un Abraracourcix même pas drôle, un chef de village qui tombe régulièrement de son pavois. (Luc Delfosse en a tracé un portrait féroce et drôle dans le Soir du 23 mars sous le titre « Mort d’une icône ».) José Happart se soucie, comme de sa première cartouche, de cette caisse noire carolo : « quand je suis invité, je ne me soucie pas de savoir qui règle la facture », a-t-il déclaré. Dans la « Semaine infernale » de ce samedi 24 mars, Pierre Kroll a répliqué qu’il s’en soucie, lui, « pour savoir qui remercier »…
En attendant à Charleroi, toutes les nouvelles révélations ne sont que normales, nous assure Elio Di Rupo : quand on ouvre des placards, il ne faut pas s’étonner d’y trouver des cadavres rances. Donc, tout ce qui arrive et arrivera n’est que normal. Circulez, y a rien à voir.
La rénovation du Ps, elle, suit son cours : le chef de cabinet de Laurette Onkelinx pourrait bien remplacer Georges Dumortier (aujourd’hui inculpé pour des malversations financières) à la direction du Botanique. Même si le C.A. du Bota juge inutile son remplacement à une fonction qui était, jusqu’il y a peu, bicéphale. Henri Simons, ex-échevin bruxellois, a perdu son siège aux dernières élections communales. Son siège mais pas ses ambitions. Transfuge d’Ecolo, le voilà aujourd’hui sur la liste sénatoriale du Ps et peut-être demain président du Bota. Pour le Ps, par « rénovation », il faut entendre « changement de têtes ». (lire l’article « Les copains d’abord » d’Elisabeth Mertens dans le Vif du 23 mars)
Mais il ne s’agit pas de changer toutes les têtes, parfois une même tête peut servir de manière multiple : Philippe Reynaert, l’homme aux lunettes blanches, présentateur à la RTBF et directeur de Wallimage, va désormais cumuler, en plus, un mandat d’administrateur à la RTBF avec la présidence de Télé MB. Deux fonctions incompatibles, mais Reynaert remet en question le décret de la Communauté française du 27 février 2003 sur l’audiovisuel : son cumul serait bénéfique aux deux institutions audiovisuelles (le Soir du 24 mars). Bon sang, mais c'est bien sûr!
Si le Ps se cherche un hymne, il a le choix entre la chanson des Poppys « Non, non, rien n’a changé » et celle de Dalida « Paroles, paroles, paroles ».


Louis Michel, entre Europe et Ego
Louis Michel, commissaire européen au Développement et à l’Aide humanitaire, a mis à son programme l’éradication de l’extrême pauvreté, la lutte contre le sida, la tuberculose et la malaria, l’amélioration de l’accès aux soins sociaux de base, la promotion des droits de l’homme et de la démocratie et d’autres causes tout aussi nobles et urgentes. A de nombreuses reprises, il a eu l’occasion d’expliquer combien il croyait à cette mission. Mais voilà que soudain il a entendu l’appel des urnes : il « poussera » la liste MR du Sénat. On comprend facilement son choix : au MR, loin de l’Afrique qui meurt ou se bat, « le bonheur est au programme » ! « Si le signal de l’électeur est assez fort, j’en tirerai les conclusions », dit-il, ajoutant « je veux d’abord voir quel est mon degré de soutien et de popularité » . Bref, il rêve visiblement - tout en s’en défendant parfois - d’être premier ministre et tous les beaux combats qu’il entendait mener sont peu de choses face au besoin de vérifier combien on l’aime. Si on le comprend bien, s’il recueille beaucoup de voix et que son parti reste dans la majorité, il espère accéder à la plus haute marche du gouvernement ; s’il n’a pas le succès qu’il espère, tout laisse entendre qu’il retournera à l’Europe. L’Europe et la lutte contre l’extrême pauvreté, un pis-aller… A l’heure de la fête pour le cinquantenaire de l’Europe, voilà un message bien éloigné de celui des signataires du Traité de Rome.

Dira-t-on bientôt « l’Exexcel » ?
Bardaf ! C’est l’embardée ! Le château de cartes mouscronnois vient de s’effondrer d’un seul coup. Cent vingt policiers ont emmené des tonnes de documents de l’administration communale, de l‘intercommunale de développement économique, du club de foot, de la société de logement social et d’autres organismes. A Mouscron, l’étonnement tient surtout au fait qu’il ait fallu si longtemps pour que la Justice intervienne. Il y est de notoriété publique depuis longtemps que l’ancien bourgmestre Jean-Pierre Detremmerie (CDH) avait fait passer les intérêts du club de foot l’Excelsior avant tous les autres et que les combines étaient devenues affaires courantes. L’IEG, Intercommunale d’Etudes et de Gestion, aurait dû être baptisée PFF, « pompe à fric du foot ». Le roi de la confusion des genres est aujourd’hui… bien confus.

Bref, encore une bien belle semaine et no s’ton fir’ d’iess’ wallon !

mardi 13 mars 2007

Blasphème ?

La Libre Belgique de ce 13 mars 2007 publie une excellente carte blanche de Patrice Dartevelle, Président de la Ligue pour l'abolition des lois réprimant le blasphème et le droit de s'exprimer librement et Vice-président du Centre d'Action Laïque: il s'inquiète d'un projet de loi réprimant le blasphème. Le Gouvernement belge a déposé devant la Chambre, le 26 octobre 2006, un projet de loi tendant à lutter contre certaines formes de discrimination. "Le but de la loi est louable en soi, estime-t-il: lutter contre toutes les formes de discrimination, qu'elles touchent à la race, à la nationalité, au sexe ou aux opinions religieuses, philosophiques ou politiques. (...) Tout autre chose est ce que prévoient les articles 22 et 38 (qui modifie l'article 453 bis du Code pénal) du projet de loi. Le premier punit l'incitation à la haine à l'égard d'une personne pour l'ensemble des critères de discrimination et donc "la conviction religieuse et philosophique, la conviction politique (article 3) et ce dans tout domaine, même hors du champ d'application de la loi". L'article 453 bis modifié vise pour sa part la question des injures, ce qui est exactement le chef d'accusation utilisé par les adversaires de Charlie Hebdo (...)." "Religions, convictions philosophiques ou convictions politiques relèvent résolument de l'opinion, dit-il, et les protéger va totalement à l'encontre de la liberté d'expression."
Je partage pleinement son analyse et vous invite à la lire (www.lalibre.be)
Le débat politique au sens large - donc le débat d'idées - est le fondement de toute société démocratique, de toute société qui avance. Pour certains croyants, le blasphème est simplement la remise en question de leurs dogmes. Condamner le blasphème reviendrait à mettre les religions hors jeu dans le débat d'idées. On pourrait donc rire de tout, mais pas des religions? On pourrait discuter de tout, mais pas de l'existence de dieu(x)? La législation tente aujourd'hui de protéger les citoyens des nuisances des sectes, mais leur interdirait la critique de la religion? Les religions, comme disait je ne sais plus qui, sont des sectes qui ont (bien) réussi...
Aujourd'hui, on entend de plus en plus des intégristes, tant chrétiens que musulmans, remettre en question le darwinisme et l'évolution des espèces pour imposer les vues créationnistes. Contester le créationnisme sera-t-il considéré comme un blasphème? Considérera-t-on que sous prétexte de respecter les dogmes et les croyances le créationnisme ne peut être critiqué? "Si la critique de la religion devient répréhensible, cela signifie que sur le territoire de la République, lorsque des hommes dénieront des droits aux femmes, comme celui se s'habiller comme elles le veulent, d'aller et de venir et de fréquenter qui elles veulent, on ne pourra plus intervenir. Lorsqu'un macho bafouera les droits fondamentaux des femmes, on laissera faire puisqu'il le fait au nom de la religion" (Philippe Val, Charlie Hebdo, 07.02.07).
Le "sacré" ne l'est que pour celui qui le considère comme tel. De la même façon que le blasphème n'est un péché que pour les croyants. Interdire légalement le blasphème reviendrait à reconnaître légalement le péché. Le blasphème, comme la caricature, comme la critique, est un droit inhérent à la démocratie.
Et les croyants doivent avoir une foi bien fragile pour avoir besoin de la faire protéger de toute remise en question. Dans son intervention au procès de Charlie Hebdo, François Bayrou a rappelé sa foi catholique, mais a mis au-dessus le droit de critiquer les dogmes quels qu'ils soient. Dominique Sopo, le président de SOS Racisme, y a fait la différence entre la critique de la religion et le racisme. Abdelwahab Meddeb y a exposé les nécessités pour les religions d'encaisser les critiques et l'humour (cités par Ph. Val dans Charlie Hebdo, 14.02.07).
Le projet de loi du gouvernement belge (très "laïc", comme le rappelle P. Dartevelle), en ses articles 22 et 38, est plus qu'inquiétant, ses répercussions pourraient être désastreuses pour la liberté de pensée et d'expression et pour le débat d'idées.
J'espère que tous les démocrates s'y sont opposés et s'y opposeront avec vigueur, sans tomber dans le piège du politiquement correct qui voudrait que les religions (et certaine en particulier...) bénéficient d'un traitement divin plutôt qu'humain.

A lire:
"Traité d'athéologie", Michel Onfray, Grasset 2005
"La tentation obscurantiste", Caroline Fourest, Grasset 2005
"Traité de savoir-survivre par temps obscurs", Philippe Val, Grasset 2007
"Contre-prêches", Abdelwahab Meddeb, Seuil
www.prochoix.org

Mauvaise nouvelle : la révolution n’est pas pour demain !

La liste du Ps pour le Sénat n’annonce pas une avancée du progressisme, malgré la présence en son sein de quelques personnalités étiquetées de ce côté de l'échiquier politique Ce ralliement indique surtout le nouveau succès annoncé du Ps. Et signifie donc que le parti social-démocrate ne changera rien à ses pratiques : nominations politiques, cumul des mandats, choix partisans, hiatus entre discours et pratiques, etc. Pourquoi le ferait-il puisqu’il ne cesse d’attirer à lui de nouveaux soutiens et donc de renforcer sa reconnaissance ? La lumière ne cessera jamais d’attirer les papillons.
Le parti qui a tout pouvoir côté francophone va tout doucement virer au parti unique, du centre-droit à la gauche de la gauche.
On sait que le Ps a voulu avoir la peau d’Ecolo, ne supportant pas qu’un parti puisse exister sur sa gauche. Ce « combat »-là, il l’a gagné en bonne partie : Ecolo s’est fait laminer en 2003 et 2004 et prend depuis lors des positions plus tièdes. Pas sûr que la société y ait gagné grand'chose... Le paradoxe, c’est le vide aujourd’hui créé à gauche par les sociaux-démocrates. Y a quelqu’un ???

dimanche 11 mars 2007

Une matinée éolienne

LES GRANDS MESSES EVENTEES DE LA WALLONIE PICARDE

Le vent soufflait fort sur la Wallonie picarde, ce samedi 2 mars. Peut-être a-t-il retenu chez eux les soutiens au projet de région ? Aussi peu suivie que celles des églises, cette grand messe avait plutôt des allures de messe basse, vu le public présent: une petite centaine de personnes plutôt que les deux cents espérés. Aucun représentant politique n’y a participé (à l’exception de deux conseillers provinciaux et de notre Rudy Demotte régional et national arrivé une demi-heure avant la fin) ; deux associations seulement y étaient représentées, mais aucune n’était invitée aux trois tables rondes dans lesquelles se sont exprimés des fonctionnaires, des techniciens et des chefs d’entreprise. En fait, c'était « les technocrates parlent aux entrepreneurs » et vice-versa, et « on-vit-dans-une-belle-région-qui-a-tout-pour-plaire ».
Heureusement qu'il y eut des interventions d'Eric Domb (directeur de Paradisio et président de l’Union Wallonne des Entreprises) et d'Engelbert Petre (directeur de la Maison Culturelle d’Ath et administrateur-délégué de l’Agence Culturelle du Hainaut Occidental) pour apporter quelques réflexions de fond dans ce nouveau salon où l’on cause.
Eric Domb a affirmé que ce serait une « fumisterie » d’imaginer qu’un territoire sans autonomie économique et surtout fiscale puisse monter un projet de développement propre. Il a stigmatisé le saupoudrage sous-régional et le gaspillage des subsides d’Objectif 1 en Hainaut, constatant que les sites touristiques qui en ont bénéficié sont tous déficitaires et ne créent pas d’emploi, contrairement au but poursuivi. Sur le plan international, il a appelé de ses vœux un contre-pouvoir à la compétition mondiale qui amène de plus en plus d’entreprises à se déplacer.
Engelbert Petre a rappelé combien la culture peut apporter du sens aux projets et à une région, tout en constatant la difficulté de la Communauté française à mener des politiques liées à un territoire. Il a appelé à la lutte contre le courant dominant d’une politique de consommation culturelle et a réaffirmé l’importance d’une réelle politique d’éducation permanente avec les populations les plus défavorisées.
De nombreux invités ont fait des efforts visibles pour dire "Wallonie picarde" plutôt que "Hainaut Occidental". Heureusement, car c’était apparemment là un des objectifs de ce forum : imposer le nouveau nom choisi par nos « pilotes ». Il y eut aussi ceux qui continuent à parler de Hainaut Occidental, comme s’ils restaient sourds à l’appel du modernisme !
Il fut beaucoup question de recherche de consensus. Un consensus qui semble peu se différencier de la pensée unique : on ne sort quasiment pas du modèle capitaliste de développement, avec des entreprises classiques, un appel aux investisseurs (parmi lesquels Pétrofina fut cité par Philippe Mettens, patron de la politique scientifique) et le développement des zonings. Tout cela vous faisait comme un bain de jouvence : on se serait cru dans les années ’60.
Bref, autant de vent à l’intérieur qu’à l’extérieur...

mercredi 28 février 2007

Elio et Ecolo sont dans un bateau

Faut-il 1/ en rire ou 2/ en pleurer ? Tapez 1 !

Elio Di Rupo vient de découvrir, en février 2007, l’écologie. Le président du PS a tenu à préciser que ce n’est pas le parti Ecolo qui lui a permis de faire cette découverte. Depuis vingt-cinq ans, il n’a vu ni entendu les Ecolos, Greenpeace, le WWF, Inter-Environnement, les environnementalistes et les scientifiques. Non, tel Paul Claudel découvrant Dieu derrière un pilier de la cathédrale de Paris, c’est en regardant Ushuaïa que Di Rupo a eu la révélation.
Il raconte lui-même sa conversion :
« J’étais assis tranquillement dans mon salon vert, près du second pilier à l’entrée du vestibule, à droite du côté de la cuisine. Et c’est alors que se produisit l’événement qui domine toute ma vie.
En un instant, mon cœur fut touché et je crus. Je crus, d’une telle force d’adhésion, d’un tel soulèvement de tout mon être, d’une conviction si puissante, d’une telle certitude ne laissant place à aucune espèce de doute que, depuis, tous les livres, tous les raisonnements, tous les hasards d’une vie agitée, n’ont pu ébranler ma foi, ni, à vrai dire, la toucher. J’avais eu tout à coup le sentiment déchirant de l’urgence d’une écologie à visage humain, une révélation ineffable. » (1)
Le président du PS, du gouvernement wallon et de la ville de Mons s’est empressé de courir à Paris rencontrer Nicolas Hulot. Il en est revenu transfiguré et a aussitôt réuni ses 111 bourgmestres pour leur remettre les tables de la loi.
Désormais, chaque commune socialiste à visage humain réduira la consommation énergétique de son administration communale, ne construira plus de nouveaux bâtiments « énergivores », offrira des conseils pratiques à ses citoyens relatifs aux économie d’énergie, etc. Bref, quelques mesures totalement révolutionnaires que jamais au grand jamais aucun écologiste d’aucun pays n’aurait bien sûr songé à proposer et, encore moins, à appliquer.
La foi soulève les montagnes…

Michel Guilbert, écologiste à visage inhumain
(1) d'après Paul Claudel