dimanche 30 novembre 2014

Tous les goûts sont dans la culture

Nicolas S(h)arkozy est donc redevenu le Napoléon de ses troupes. Son rictus s'agrandit, grand bien lui fasse. Mais, quand même, on se pose une question. On peut reprocher bien des choses à François Hollande: sa mollesse, son indécision, ses reculades. Mais il a, globalement, une attitude digne de sa fonction. Pourquoi ont actuellement la cote, en politique en France (relativement, il est vrai, mais plus que Hollande), des personnages tels que Marine Le Pen et Nicolas Sarkozy qui personnifient la suffisance et la vulgarité? On s'interroge.

Post-scriptum: à écouter: le billet de Sofia Aram (ou plutôt Ludovine de la Malbaise) sur France Inter ce lundi matin: http://www.franceinter.fr/player/reecouter?play=1013199
Le bon goût français.

Post-scriptum bis: rue89.nouvelobs.com/2014/12/07/sarkozy-chemin-256437

samedi 29 novembre 2014

On ne se refait pas

C'est une surprise, nous dit-on: au congrès du parti de la famille Le Pen, c'est la petite-fille à son papy qui arrive en tête des membres du Comité central du parti désignés par les militants (1). Quelle surprise? Cette première place confirme simplement qu'au FN on a le sens de la famille (outre celui du travail et de la patrie) et qu'on y adore toujours le vieux chef dont on sait que la petite-fille préférée reste proche des positions, notamment sur l'immigration et l'insécurité. L'attitude réactionnaire n'attend pas le nombre des années. On voit par là que le Front Néandertal (2) reste bien un parti d'extrême droite, quoi qu'en dise la fille à papa et tante de la nièce.
Une anecdote amusante avec ce Front qui plaide pour la préférence nationale (ou la priorité, selon le degré de prudence de ses responsables et militants) et la fermeture des frontières: il vient d'emprunter 9 millions d'euros auprès d'une banque russe (3). Mais ce n'est pas de sa faute, dit-il: les banques françaises n'ont pas voulu lui prêter d'argent. Heureusement que les banques du pays du président Poutine, modèle pour la fille à papa, sont plus ouvertes que les banques françaises. 
Que retenir de tout ceci? Que le FN est, plus que jamais, le parti de la famille Le Pen et que l'argent n'a pas d'odeur.

(1) www.liberation.fr/politiques/2014/11/29/vote-au-fn-marion-marechal-le-pen-devance-florian-philippot_1153178
(2) voir la série de Jul "Silex and the city":
www.lefigaro.fr/bd/2014/09/08/03014-20140908ARTFIG00232-jul-avec-le-front-neanderthal-on-retourne-au-jurassique.php
(3) www.lefigaro.fr/politique/le-scan/insolites/2014/11/25/25007-20141125ARTFIG00405-emprunt-russe-du-fn-la-structure-intermediaire-a-touche-140-000-euros.php
www.levif.be/actualite/international/le-front-national-emprunte-9-millions-d-euros-a-une-banque-russe/article-normal-354777.html
www.lemonde.fr/politique/article/2014/11/23/le-front-national-a-emprunte-de-l-argent-a-une-banque-russe_4527889_823448.html

vendredi 28 novembre 2014

Pinocchiozy

La droite républicaine française va se choisir un nouveau président. Choisira-t-elle un politique ou un humoriste? C'est ce dernier qui est donné favori. Il s'appelle Sharko, il a des rictus de requin et est devenu l'égal d'un Frank Dubosc ou d'un Jean-Marie Bigard. Il adore raconter des histoires, il est devenu le roi de l'impro: s'il sent que son public est réactif, il tord la vérité dans tous les sens, il est capable de dire n'importe quoi, pourvu qu'il fasse rire (1). Il est loin le temps de la France grognonne. La droite se marre. Elle est prête à se choisir un chef qui n'a ni idées, ni programme, ni projet, qui flingue tous les autres, y compris dans son propre camp, mais n'a aucune idée de ce qu'est l'auto-critique. Il est tellement bon, il a une jolie femme, est un jeune papa tout en étant un homme d'expérience. Que demander de plus? 
Un bémol à son succès: cet homme est tellement dépassé par son ego que son corps ne le supporte plus. Il se secoue dans tous les sens. C'est un cadeau pour tous ceux qui analysent le langage non verbal, un magnifique modèle à analyser dans les formations en communication.
Allez savoir pourquoi, on a l'impression que l'humoriste ne fera pas rire longtemps. Ou alors jaune.

(1) www.liberation.fr/politiques/2014/11/24/sarkozy-ce-n-est-plus-du-mensonge-c-est-carrement-du-roman_1147897
www.lalibre.be/actu/international/voici-les-quatre-blagues-que-sarkozy-repete-a-chaque-meeting-54775cc23570a0fe4c641632

mercredi 26 novembre 2014

Des larmes de crocodile

Hier, journée internationale pour l'élimination de la violence faite aux femmes, on apprend qu'une femme sur trois dans le monde a été victime de violences, qu'en France c'est le cas d'une femme sur dix et que, dans ce pays, tous les trois jours, une femme décède sous les coups de son conjoint. 
On apprend ce même jour que la Ville de Toulouse a annulé une expo de BD centrée sur le harcèlement de rue dont sont victimes les femmes (1). Les hommes y sont représentés en crocodiles guettant les proies féminines qui passent à portée de leur regard et de leur bave. L'auteur belge Thomas Mathieu (2) y traite du sexisme ordinaire, y illustre des cas vécus par des femmes et suggère des attitudes qu'on ("on" étant aussi bien un homme qu'une femme) peut avoir pour réagir face à des situations malsaines et agressives. "Le harcèlement est agressif, explique Thomas Mathieu (3), jamais innocent. Le minimiser serait un retour en arrière. On parle souvent de drague urbaine. Mais le collectif Stop harcèlement de rue, lui, parle de drague imposée. Quand c'est imposé, ce n'est plus de la drague, c'est du harcèlement." Cette pratique de lourdingues, de tous âges et de toutes origines, n'est pas nouvelle: "le harcèlement de rue n'est ni une nouveauté ni une facette inaliénable de la nature humaine, estime la sociologue Irène Zellinguer. Il fait partie d'un système qui traverse et organise notre société: la domination masculine (3)".
L'exposition n'a finalement pas eu lieu à Toulouse parce que, selon le quotidien Le Monde (4), une élue de la majorité UMP a jugé le projet vulgaire. Et là, on s'interroge: qu'est-ce que la vulgarité? Où est-elle? Dans les dessins qui témoignent de situations bien réelles? Ou plutôt dans cette drague de relous? Dans l'attitude d'élus qui préfèrent se mettre la tête dans le sable? Dans les commentaires, sur des forums, de certains hommes si sûrs d'eux et si fiers de l'image qu'ils ont d'eux-mêmes ? Ils se voient en coqs, en boucs ou en taureaux et ne sont que crocodiles. Juste des reptiles, même avec leurs petites pattes.

Lisez Causette, "plus féminine du cerveau que du capiton", un magazine féminin, féministe, qui milite avec humour. Roboratif!

(1) www.lalibre.be/culture/livres/jugee-vulgaire-l-expo-d-une-bd-belge-sur-le-harcelement-de-rue-annulee-a-toulouse-5474a47435707d02ac2a4870
(2) http://projetcrocodiles.tumblr.com/
(3) "Thomas Mathieu croque les relous", Causette, octobre 2014.
(4) www.lemonde.fr/bande-dessinee/article/2014/11/25/bd-les-crocodiles-suscitent-la-polemique-a-toulouse_4528918_4420272.html

mardi 25 novembre 2014

Hugues Le Bars

C'est par le courrier des lecteurs du Télérama de ce jour que j'apprends la mort d'Hugues Le Bars, survenue le 1er novembre dernier. C'était pour beaucoup un illustre inconnu. On connaissait certaines de ses musiques, nombre de ses sons, mais sans le connaître lui. Lui qui a composé pour Maurice Béjart, pour Radio France, pour différents films. Lui qui était le Prévert de la chanson: un poète colleur. Il collectait des sons qu'il accompagnait de poum-tchak. On peut lire (ou écouter) l'hommage que France Culture lui a rendu et (ré)écouter son interview pour mieux le connaître (1).
On apprend, à l'occasion de sa mort, qu'il est le père du joyeux Féloche (2). Il est donc toujours là.

(1) http://www.franceculture.fr/emission-ce-qui-nous-arrive-en-musique-hugues-le-bars-poum-tchack-de-fin-2014-11-05
(2) www.feloche.fr

Schtroumpf grognon

Manifester pour refuser les autres est à la mode en France. Des députés UMP alsaciens s'y sont mis, arborant dans l'Assemblée nationale un calicot: "Ne tuez pas l'Alsace ". Ils auraient voulu que - dans la réforme territoriale voulue par la majorité - la région Alsace reste seule, sans être associée à la Lorraine et à la Champagne-Ardennes (1). Un député UMP a tenté de se justifier sur France Inter (2). Il fut assez obscur, dans tous les sens du terme. Jusqu'à ce qu'il nous dise qu'il faut tenir compte du contexte économique, que l'Alsace est la deuxième région économique de France. Et là, tout s'éclaire: son raisonnement est le même que celui des indépendantistes flamands, italiens du nord, catalans et de tant d'autres: celui des riches. De ceux qui ne veulent pas partager. Mais qui n'aiment qu'une chose: vendre leurs produits à l'extérieur.
On se dit alors qu'on devrait laisser entre eux ceux qui ne veulent pas des autres, mais les pousser dans leur logique. Ce qui voudrait dire qu'en dehors des Alsaciens, personne ne consommerait plus de choucroute, de munster, de riesling ou de gewurtzraminer. Nous, nous boirons du vin de Loire, de Jurançon, du Chili, de Roumanie ou d'Algérie.
On se dit aussi qu'on comprend que de plus en plus de Wallons se sentent différents des Flamands (3). A force de se sentir rejeté, de s'entendre critiqué, on ne peut rester insensible. A force de dire qu'on n'aime pas les autres, on finit par susciter l'impression chez ces autres qu'ils ne sont pas les mêmes. Gagne-t-on quelque chose à ce jeu-là?

lundi 24 novembre 2014

Business as usual

Dans le nouveau gouvernement fédéral belge, très à droite, on trouve en charge de l'énergie une ministre qui n'en manque pas. Il faut le reconnaître. Marie-Christine Marghem, avant d'occuper cette fonction ministérielle était à la fois avocate, députée, échevine, elle était donc partout. A vouloir être partout, on n'est nulle part, on le sait. Elle n'a pas, de ce fait, la réputation de maîtriser ses dossiers. Mais qu'attend-on d'un politique? Elle l'a compris. Il suffit d'avoir l'air.
Récemment, avant d'être nommée ministre, elle a rencontré, en sa qualité d'échevine, des opposants à un projet de poulailler industriel (38.000 poules) à Marquain (Tournai). Ils dénoncent un projet totalement contraire aux politiques environnementale et agricole qu'entendent mener tous les niveaux de pouvoir. "Je comprends vos arguments, leur a-t-elle dit, mais il n'y a pas une seule manière de produire et de créer de la richesse et de la valeur ajoutée." (1) La voilà maintenant ministre et elle entend bien prolonger de dix ans l'existence des centrales nucléaires de Doel (2). Elle n'a "aucun tabou", dit-elle.  Même si en tant que députée elle a confirmé il y a un an sa volonté, et celle de la majorité des élus, de sortir du nucléaire. Maintenant qu'elle est "aux affaires", elle estime sans doute qu'il faut bien que tout le monde vive.
Résumons-nous: la ministre de l'Energie est une vraie libérale qui pense comme on pensait dans les années '60 et que les affaires sont les affaires.


(1) L'Avenir - Le Courrier de l'Escaut, 7 octobre 2014.
(2) www.lalibre.be/actu/belgique/marghem-deposera-dans-quelques-jours-une-note-sur-la-prolongation-de-doel-546b90433570243a9f34c68a

vendredi 21 novembre 2014

Chère com'

La Ville d'Orléans débourse 400.000 euros pour accueillir le concours Miss France (1). L'opposition proteste: une telle somme pour un concours aussi ringard a quelque chose d'indécent, d'autant plus que les subventions culturelles ont été réduites. Oui mais, se défend le maire, ce concours fait parler d'Orléans. 
La preuve.

(1) France 3 Centre, Journal, 17 novembre, 19h.

jeudi 20 novembre 2014

Un modèle mal footu

Des dirigeants de clubs de foot de division 2 en France sont accusés d'avoir truqué des matches à la fin de la saison dernière. Une fois atteint le score qui arrangeait les deux équipes, les joueurs ont fait semblant de jouer, se passant gentiment le ballon en attendant que l'heure tourne.
En Italie, c'est tout le championnat qui semble bien ressembler à un spectacle d'illusionnistes (1). Ce n'est plus le ballon qui est l'enjeu, mais l'argent.
On comprend que l'Etat français ait décidé d'exonérer d'impôts et de taxes (hormis la TVA) toutes les entreprises qui colaboreront à l'organisation de l'Euro 2016 de foot qui se jouera en France. Parce qu'un secteur aussi sain, modèle du genre, doit être soutenu et montré en exemple. Il s'agit d'une exigence de l'UEFA pour qui il ne peut y avoir d'organisation sans exonération (2). On voit par là que tous ceux qui iront dépenser le moindre euro pour assister à ce spectacle indécent seront les dindons d'une farce de mauvais goût.

(1) 


lundi 17 novembre 2014

Humour de coiffeur (2)

Il y a quelques années, j'avais consacré un billet (1) à ces enseignes qui témoignent de l'humour des coiffeurs, des professionnels qui n'hésitent pas à couper les cheveux en quatre pour se trouver un nom qui leur donne bel hair.
En voici deux autres repérés récemment:
- Pl' Hair
- I.D. Coif'
Résumons-nous: les capilliculteurs ont un humour décoiffant.

Post-scriptum:
Et depuis, j'ai découvert,
- Aur' Kidécoif
- Coiff' Emoi
- Figura-tif

(1) C'était le 10 juillet 2011, sous le titre "Un humour de coiffeur".
Le voici, pour mémoire:

Je suis plein d'admiration pour la créativité des coiffeurs. Non pour leurs talents de capilliculteurs - je ne peux en juger, mon passage chez eux ne se justifiant plus - mais pour les noms qu'ils donnent à leurs salons.
En voici quelques-uns glanés au gré de mes déplacements en Belgique et en France:
- Les mots tifs
- Diminue-tifs
- Atmosp'hair
- Changement d'hair
- l'Ac'tif
- Réac-tif
- Admira-tif
- A'hair coif
- Bel hair
- Hair du temps
- Val Hairie.

On voit par là que les coiffeurs ont de l'humour. En tout cas, un humour qui leur est propre.
Personnellement, j'éviterais d'aller au salon "Réac-tif". On sait que les coiffeurs sont bavards. Celui-là ne doit nous épargner aucune de ses opinions dénigrant les jeunes, le progrès, l'évolution des moeurs. Ou même l'hair du temps.

P.S. Vu ce week-end (13 novembre 2011) dans le Pas de Calais, Fée Hair'ique. En effet.
P.S.bis: repérés aussi: Hair Borist et Addy Tiff
P.S. ter: à Maubray (Antoing): Hair du Large

Gabrielle me rappelle, en commentaire au billet de ce 17 novembre, qu'elle avait, à l'époque, déjà apporté sa contribution à l'exercice. Voici ces enseignes qui indiquent bien que l'humour des coiffeurs est sans limite:
- Imagin'Hair
- Hair Borist
- Revolution'Hair
- A capello
J'avais aussi ajouté alors
- Séduc'tif
- Evolu'tif
- Cap'tif.

dimanche 16 novembre 2014

Un homme conciliant

Nicolas Sarkozy est un homme fondamentalement gentil. Il l'a démontré hier. En meeting devant les candidats UMP, il a annoncé que, s'il revenait au pouvoir, il entendait "réécrire de fond en comble" la loi Taubira sur le mariage pour tous. Devant la foule qui scandait "abrogation", il a tout de suite cédé et a promis cette abrogation. "Si ça vous fait plaisir, ça ne coûte pas très cher", a-t-il dit.
Je ne suis pas militant UMP, mais je permets néanmoins d'avancer quelques demandes à celui qui espère redevenir calife à la place du calife:
- fixer dans ses priorités la mise en œuvre d'urgence de mesures de lutte contre le réchauffement climatique et, entre autres, une taxe sur le CO2 de type écotaxe et l'abandon de projets tels que l'aéroport de Notre-Dame des Landes;
- fixer dans ses priorités un plan de lutte contre la pauvreté et l'exclusion (quelles que soient les origines des personnes) et la reconnaissance des mêmes droits à tous;
- lutter contre tous les excès liés au capitalisme et à l'argent et contrôler strictement les banques.
Voilà, c'est pas grand chose. Je sais que je ne dois pas me bercer d'illusion. Mais, quand même, ça ferait plaisir à pas mal de gens. 
Ceci dit, Sarkozy ne doit pas, lui non plus, s'illusionner: il ne suffit pas de marcher dans les pas de la fille à papa Le Pen pour espérer la rattraper.

Nicolas Sarkozy voudrait faire oublier le nom de l'UMP, devenu synonyme d'affairisme et de panier de crabes, en lui en donnant un nouveau. Une suggestion: RPR, pour Rassemblement Profondément Réactionnaire.

A lire:
www.liberation.fr/politiques/2014/11/16/sarkozy-pris-en-flagrant-delit-de-cynisme_1144161

samedi 15 novembre 2014

Grands travaux inutiles

Sur quelle planète vivent les travailleurs et responsables d'entreprises françaises de travaux publics? Visiblement pas sur la Terre. Ou alors ils n'ont jamais entendu parler de réchauffement climatique, de perte de biodiversité, de gaspillage d'énergie et de terre. Hier, ils ont manifesté à Nantes pour soutenir le projet d'aéroport de Notre-Dame des Landes. Sans lui, ils n'auront plus de travail, pleurnichent-ils. Il leur est vital. "Et si les travaux publics s'arrêtaient?", demandent-ils sur un calicot. Leur porte-parole exhorte le premier ministre à ignorer "les Khmers verts et les djihadistes verts" (1). Un peu d'intelligence dans ce monde de brutes ferait du bien. Peuvent-ils comprendre que derrière leurs insultes (imbéciles) aux écologistes, c'est l'avenir de la planète et leurs propres enfants qu'ils injurient? Peut-on suggérer à ces personnes d'ôter leurs œillères, de réfléchir un peu, de lire le dernier rapport du GIEC et d'investir et de s'investir dans les travaux d'isolation des bâtiments et les énergies renouvelables plutôt que dans des activités d'un autre siècle, nuisibles à la planète? 

Note: qu'on en finisse avec cette insulte de Khmers, qu'ils soient verts ou de n'importe quelle couleur. Bien sûr, le régime des Khmers rouges fut atroce. Mais la civilisation khmère fut d'une très grande richesse. En faire une insulte, c'est faire preuve d'inculture.

(1) France 3, Journal, 14 novembre 2014, 19h30.

jeudi 13 novembre 2014

Ne pas confondre

La Cour de Justice européenne vient de donner raison à l'Etat allemand qui avait refusé d'accorder des allocations de chômage à une jeune Roumaine (1): elle vivait à Leipzig, sans avoir ni même chercher de travail. On les appellent "touristes sociaux", ces pauvres des pays les plus pauvres de l'Union européenne qui tentent de profiter des avantages offerts aux pauvres des pays moins pauvres.
La fille à papa Le Pen s'est empressée d'exprimer sa satisfaction. Elle ne supporte pas le "tourisme social". Elle préfère le tourisme politique. De loin en loin, elle se rend à Bruxelles et Strasbourg pour tenter de justifier les 12.000 euros mensuels qui lui sont alloués en sa qualité de députée européenne. Une fonction que l'héritière ne prend pas vraiment le temps d'assumer (2). On voit par là qu'il y a touristes et touristes.

A la question que lui pose Télérama (3), "quelle est votre plus grande peur?", le chanteur Miossec répond d'un mot: "Marine".

(1) www.courrierinternational.com/article/2014/11/12/la-cour-de-justice-europeenne-dit-non-au-tourisme-social
(2) lire sur ce blog "Chère Marine", 19 mai 2014.
(3) 12 novembre 2014.

jeudi 6 novembre 2014

Basse cour

Les agriculteurs français manifestaient hier un peu partout. Pour diverses raisons. Notamment pour exiger plus de consommation en France de produits français. Et aussi pour protester contre certaines règles auxquelles ils sont soumis, telles que la directive sur les nitrates. Visiblement, cette profession, une des plus subventionnées d'Europe (sans doute la première), ne veut pas comprendre qu'elle doit changer radicalement de manière d'agir et de stratégie et qu'est fini le temps où la terre n'était considérée que comme un matériau qu'on pouvait malmener comme l'entendait l'industrie agro-alimentaire. On ne demande pas mieux de consommer "national", et mieux encore local, mais alors des produits de qualité. Si manger français et manger McDo, c'est pareil: où est l'avantage?

Dans la Somme, près d'Abbeville, s'est construite la "ferme des Mille vaches", le genre de projet qu'on croyait appartenir au passé, mais qu'un industriel développe avec le soutien des autorités socialistes. A deux pas, à Doullens, autre projet - qui a lui aussi le soutien, y compris financier, des pouvoirs publics - tout aussi actuel et tout aussi dépassé: un élevage de 319.500 poules réparties dans trois bâtiments de 6.000 m2, soit neuf poules par mètre carré. "On ne peut pas mettre toutes les poules en plein air, explique le gérant, Pascal Lemaire. C'est la solution pour sortir de la crise et manger français le moins cher possible." (1)

Hier, certains agriculteurs, à Nantes, ont balancé des ragondins derrière les grilles d'une administration, les ont aspergés de peinture et frappés à coups de pied (2). 
On voit par là que le ragondin a toujours tort. L'agriculteur, lui, a toujours raison. Il a raison de protester contre l'excès de règles, même si elles ont été établies à cause des dommages que cause à l'environnement l'agriculture productiviste. Il a raison de s'opposer aux écotaxes et de démolir, pour bien se faire comprendre, du matériel public, même si ces taxes ont été décidées par l'ensemble des partis démocratiques. Et il a raison de soutenir la création du barrage de Sivens puisqu'il a été décidé démocratiquement. Cherchez la contradiction (voir note ci-dessous).
De nombreux agriculteurs et leur syndicat productivisto-capitaliste, la FNSEA, veulent que le projet de barrage de Sivens devienne réalité. Il faut de l'eau pour arroser le maïs, disent-ils. Est-ce à la nature et à l'environnement de s'adapter à l'agriculture ou l'inverse?

Il est temps que les agriculteurs remettent en question leurs pratiques. Tout le monde y gagnerait. Eux les premiers. L'agriculture intensive et les pesticides qui lui sont liés font de plus en plus de dégâts parmi la profession. De plus en plus d'agriculteurs sont atteints de la maladie de Parkinson, inscrite depuis mai 2012 au tableau des maladies professionnelles des paysans.
Olivier Colin, médecin au CHU de Poitiers, en témoigne: "Parkinson, qui touche environ 150.000 personnes en France, dont plus de la moitié diagnostiqués avant soixante ans, n'est donc pas une maladie de vieillesse. Elle est pour le moment la seule maladie clairement reliée à l'exposition aux pesticides, mais d'autres pourraient suivre." Notamment des lymphomes, cancers du système lymphatique.

Question: vaut-il mieux être poule, ragondin, agriculteur affilié à la FNSEA ou consommateur français ? On se le demande. Heureusement, de plus en plus d'agriculteurs, ceux de la Confédération paysanne notamment, ont décidé de ne plus être les dindons de cette mauvaise farce.

Note: Xavier Beulin, président de la FNSEA, a traité les opposants au barrage de Sivens de "djihadistes verts". Outre la bêtise de l'expression, Gérard Biard fait remarquer dans Charlie Hebdo (4) que "quand, il y a deux mois, des agriculteurs ont attaqué et incendié les bâtiments de la Mutuelle sociale agricole à Morlais, il n'a vu dans cette destruction délibérée des symboles de l'Etat qu'une simple manifestation d'exaspération, tandis que Thierry Merret, président de la FNSEA 29, a carrément tiré son chapeau aux auteurs du saccage.

(1) "250 000 taulards en pleine liberté", Fabrice Nicolino, Charlie Hebdo, 15 octobre 2014.
(2) www.leparisien.fr/societe/videos-manifestation-a-nantes-des-agriculteurs-filmes-maltraitant-des-ragondins-06-11-2014-4270645.php
(3)  "Trio gagnant - paysans, pesticides, parkinson", Fabrice Nicolino, Charlie Hebdo, 1er octobre 2014.
(4) "Dangers terroristes", 5 novembre 2014.

lundi 3 novembre 2014

Climat détestable

Il faut sauver la biodiversité, préserver l'environnement, lutter contre le dérèglement climatique. Presque tous les partis politiques, presque tous les gouvernements de la planète en sont convaincus depuis vingt ans. Au point que certains se demandent quel est encore le sens de l'existence de partis écologistes. Puisque le souci environnemental est aujourd'hui celui de tous les partis, quelles que soient leurs idéologies. Et de toute façon, les écolos sont des "djihadistes verts". Il y a quelques années encore, ils étaient traités de "khmers verts". Les temps changent. Le climat aussi. En 2013, les émissions de CO2 ont légèrement dépassé les 35 milliards de tonnes, soit presque un tiers de plus qu'il y a dix ans.
Le dernier rapport du GIEC est plus que jamais alarmiste (1). Il indique que, au rythme de nos consommations d'énergies fossiles, nous pourrions atteindre un réchauffement de l'ordre de 4 à 5° d'ici la fin du siècle. Ce qui serait totalement catastrophique. Le réchauffement que connaît la Terre n'a jamais été aussi important depuis 800.000 ans. Si nous voulons la sauver des pires scénarios, il faudrait diminuer les émissions de gaz à effet de serre de 40 à 70%. D'urgence.

"Nous serons incapables de relever le défi climatique tant que nous ne l'envisagerons pas comme une lutte bien plus large entre des visions du monde différentes, écrit Naomi Klein (2), comme un processus visant à reconstruire et réinventer l'idée même de collectivité, de communauté, de bien commun, de société civile et de civisme - idée mise à mal et abandonnée depuis des décennies. Si le défi climatique nous paraît si intimidant, c'est parce qu'il impose de passer outre à toute une série de règles - certaines inscrites dans les législations nationales et les accords commerciaux, et d'autres, non écrites mais tout aussi puissantes, qui font qu'aucun gouvernement ne restera au pouvoir s'il augmente les impôts, refuse de gros investissements, si néfastes soient-ils, ou prévoit de réduire progressivement les secteurs de l'économie qui nous mettent tous en danger."

On a ainsi vu, tout récemment, la ministre française de l'Ecologie, Ségolène Royal, décider de supprimer l'écotaxe annoncée. "Le bon sens a prévalu", ont dit certains. Qu'est-ce que le bon sens?, se demande-t-on. Juste une "absence de courage et de vision", a rétorqué Eva Joly. Est-ce le bon sens de ne pas faire payer les pollueurs? De ne pas réinjecter le produit de ces écotaxes dans des moyens de transport moins polluants? On pourrait l'admettre si, par ailleurs, les gouvernements développaient une vision large et audacieuse d'une nouvelle organisation de la société. On n'en voit nulle trace, même embryonnaire. Partout, on ne pleure que pour voir revenir une bonne vieille croissance, celle qui nous a menés où nous en sommes. En France, on pleure la mort de Christophe de Margerie, "un grand capitaine d'industrie français très lucide sur la situation de la planète" a dit de lui le sénateur écologiste Jean-Vincent Placé (3). Ce capitaine dirigeait Total. "La plus grande entreprise française gagne ses milliards en déstabilisant le climat pour des milliers d'années", écrit Fabrice Nicolino. Et le climat, vraiment, c'est important, affirment les ministres Fabius et Royal: ils appellent à "une mobilisation universelle et immédiate" sur le changement climatique, "menace grave pour la biodiversité, la sécurité alimentaire et la santé" (1). Ils sont aussi convaincants que leurs homologues belges Elio Di Rupo, qui a découvert avec émotion le problème il y a quelques années en s'entretenant avec Nicolas Hulot, ou Joëlle Milquet qui affirmait, il y a tant d'années maintenant, qu'il faut "être radical pour le climat".
N'attendons rien non plus, au contraire, du nouveau commissaire européen  en charge de l'Energie et du Climat, Miguel Arias Canete. Il a été l'un des responsables d'Italcar Espana (ce qu'il a oublié d'indiquer dans sa déclaration d'intérêts lorsqu'il était député européen), lobbyiste pour les OGM et fondateur de Petrolifera Ducar et Petrolis Canarias. Mais qu'on se rassure: avant de devenir commissaire européen, il a transmis ses actions à ses beaux-frères (4). Il ne peut donc être soupçonné de conflits d'intérêts. On ne pouvait trouver meilleures mains européennes à qui confier l'avenir du climat.
Bref, on désespère de voir un ou une responsable politique oser un vrai projet, plutôt que pleurnicher et se gargariser de mots.

"Il pourrait être beaucoup moins efficace, poursuit Naomi Klein de se battre pour une taxe carbone minimale que, par exemple, de former une grande coalition pour revendiquer un revenu minimal garanti, non seulement parce qu'un revenu minimum permettra aux travailleurs de refuser des emplois liés aux énergies polluantes, mais aussi parce que le fait même de plaider pour une protection sociale universelle ouvre la voie à un vrai débat de fond sur les valeurs - sur ce que chacun de nous doit aux autres au nom de notre humanité commune, et sur ce qui, collectivement, nous paraît plus important que la croissance économique et les bénéfices des entreprises."
Naomi Klein plaide pour une autre vision du monde, "fondée sur l'interdépendance plutôt que sur l'hyperindividualisme, sur la réciprocité plutôt que sur la domination et sur la coopération plutôt que sur la hiérarchie".

Récemment, le maire Montpellier, épuisé par les inondations à répétition qu'a connues sa ville déclarait qu'on ne pouvait plus dire que le réchauffement climatique n'existe pas. Mais la grande majorité des politiques et des citoyens ont choisi la politique de l'autruche. Ni voir, ni savoir est leur nouvelle devise. Tant qu'on voudra toujours plus de voitures et de camions sur nos routes, plus d'avions dans le ciel, plus de produits phyto sur nos terres, aucune éolienne dans la vue, un kérosène non taxé, un baril de pétrole au plus bas, on prendra le risque de se faire déplumer plus que l'arrière-train. "Ce qui est aujourd'hui politiquement réaliste ne le sera sans doute plus quand nous aurons essuyé d'autres ouragans Katrina, d'autres cyclones Sandy, d'autres typhons Bopha", estime Sivan Kartha, chercheur pour l'Institut pour l'Environnement de Stockholm (5).
Naomi Klein encore: "nous gagnerons en affirmant que de tels calculs (de ceux qui estiment que la lute contre le réchauffement coûte trop cher) sont moralement monstrueux, puisqu'ils insinuent qu'il serait économiquement acceptable de laisser des pays entiers disparaître, des millions de gens mourir sur des terres desséchées et de priver les enfants d'aujourd'hui de leur droit à habiter un monde fourmillant des merveilles et des beautés de la création".

Des notes positives - quand même! - on pourra en trouver dans le documentaire que diffuse Arte ce mardi soir (6): dans "Sacrée Croissance!", Marie-Monique Robin rencontre des "lanceurs d'avenir". "Il y a des initiatives qui sont les germes de la société post-croissance, explique-t-elle, d'une réponse globale au grand désordre planétaire actuel. (...) J'ai choisi des initiatives suffisamment abouties pour qu'on voie la transformation des territoires et des gens." (7) On trouvera dans ce film "un stimulant réservoir d'idées et d'énergie pour inventer demain", écrit Télérama.

(1) http://sciences.blogs.liberation.fr/home/2014/11/le-résumé-pour-décideurs-du-giec.html
(2) The Nation (New York), 16 septembre 2014, à partir de son dernier ouvrage "This Changes Everything: Capitalism vs. The Climate" in Le Courrier international, 2 octobre 2014.
(3) cité par Fabrice Nicolino, in "Derrière Margerie, les morts du pétrole", Charlie Hebdo, 29 octobre 2014.
(4) "Un commissaire européen qui sent le pétrole", Fabrice Nicolino, Charlie Hebdo, 8 octobre 2014. Miguel Arias Canete est le Zemmour espagnol: "il est compliqué de tenir un débat avec une femme, a-t-il déclaré, car montrer de la supériorité intellectuelle pourrait paraître sexiste". Vraiment, un grand monsieur que ce commissaire européen!
(5) cité par Naomi Klein - voir (1).
(6) Arte, mardi 4 novembre, 20h50. A revoir pendant les sept jours qui suivent sur Arte+7 (www.arte-tv.com).
(7) Télérama, 29 octobre 2014.