samedi 19 avril 2025

La confession

Le Vatican et les évêques de France vont-ils se confesser ? Depuis 1955, ils savaient que l'abbé Pierre était un sacré déviant. Depuis septante ans, ils avaient connaissance d'accusations à son encontre d'agressions sexuelles. Mais ils se sont tus. C'est que selon l'évêque de Versailles de l'époque, l'abbé Pierre était devenu « un symbole aux yeux des masses qu’il galvanise à la manière d’un prophète ». On ne touche pas aux prophètes. Seuls eux peuvent toucher.
Ce sont les journalistes Laetitia Cherel et Marie-France Etchegoin qui révèlent cette information dans leur livre  « L’Abbé Pierre, la fabrique d’un saint » (Allary Editions). "Elles rapportent, écrit Le Vif (1) une « ‘procédure judiciaire’, entamée par l’organe de la curie romaine chargé de contrôler les moeurs et la foi des membres de l’Église, le Saint-Office », qui a été « freinée par les évêques en France, vite refermée et enterrée deux ans plus tard, en 1957″. Les alertes ont été nombreuses entre 1955 et 1957, venues notamment du Canada et des Etats-Unis, mais ignorées. Et l'abbé vedette a pu poursuivre ses agissements pervers en toute sérénité pendant des décennies.

Peut-être ses supérieurs hiérarchiques se sont-ils contentés de l'inviter à se confesser. C'est pratique la confession : vous avouez vos péchés, et hop une petite amende que l'Eglise catholique appelle pénitence. Deux pater, trois ave, éventuellement un peu de flagellation et vous voilà lavé de vos péchés. Vous récidivez ? Pas de problème : vous vous confessez à nouveau. C'est le godwashing. Reste à présent aux victimes de ce prophète malsain à porter plainte contre le Vatican et tous ceux qui savaient mais ont pratiqué l'omerta pour ne pas faire tomber un faiseur de fidèles.

Mais l'affaire est déjà éclipsée : en ce week-end pascal, l'Eglise catholique fait la fête. Elle n'a jamais vu autant de jeunes venir à elle. Le nombre de jeunes qui demandent le baptême atteint des records : "plus de 17 800 personnes devaient recevoir le baptême à Pâques, rapporte Le Monde (2), soit 45 % de plus qu’en 2024. Si les femmes représentent environ les deux tiers de ce groupe, c’est surtout sa jeunesse qui frappe : les mineurs constituent 41 % de l’ensemble, et les 18-25 ans 42 % des adultes. Si le dynamisme est indéniable, il ne compense toutefois pas la chute, ces dernières décennies, des baptêmes de nouveau-nés."
Les évêques et les prêtres constatent que "parmi ces catéchumènes, et en particulier chez les plus jeunes d’entre eux, la découverte de la foi s’accompagne d’une soif de radicalité, qui, elle-même, passe par une demande de cadres stricts et de règles comportementales précises. Là encore, le mimétisme avec l’islam saute aux yeux : pour beaucoup, établir ces règles revient à tracer une frontière nette entre le licite et l’illicite."
Une frontière qui semble bien floue pour une Eglise enfermée dans son hypocrisie.

(1) https://www.levif.be/international/europe/france/le-vatican-savait-tout-et-depuis-longtemps-des-agissement-de-labbe-pierre/
(2) https://www.lemonde.fr/societe/article/2025/04/18/les-catechumenes-une-jeunesse-catholique-en-quete-de-radicalite_6597472_3224.html

Aucun commentaire: