mercredi 21 mai 2025

mardi 13 mai 2025

Le silence du Rambo russe

Comme tous les dictateurs, Vladimir Poutine a un sens de l'humour qui lui est propre. Il s'était dit prêt à un cessez-le-feu si les livraisons d'armes à l'Ukraine cessaient. Ainsi sont les tyrans, prêts à se montrer magnanimes avec ceux qu'ils ont mis à genoux et qui ne peuvent même plus se défendre.
Aujourd'hui, il déclare qu'il veut négocier directement avec l'Ukraine. Volodymyr Zelensky le prend au mot et lui propose de venir discuter directement avec lui en Turquie ce jeudi. Mais le chef mafieux se tait. On ne l'entend pas dans le bruit et la fureur qu'il continue à faire tomber sur l'Ukraine. Zelensky dénonce un "silence bien étrange". Il a déploré que "malheureusement, le monde n’a toujours pas reçu de réponse claire de la Russie aux nombreuses propositions de cessez-le-feu". Poutine, dit-on, malgré ses airs bravaches et ses roulements de mécaniques, a une peur panique qu'on attente à sa vie.  Le tueur en série aura-t-il le cran d'aller jusqu'en Turquie et de discuter avec son homologue ukrainien ?
Son porte-parole, lui, a rejeté toute idée de cessez-le-feu inconditionnel de trente jours : " ce langage d’ultimatums est inacceptable pour la Russie, il ne convient pas. On ne peut pas s’adresser à la Russie avec un tel langage", a déclaré Dmitri Peskov. Pour s'adresser à l'Ukraine, la Russie ne connaît que le langage des bombes. 
La Russie, championne de l'hypocrisie, s'est enfermée dans une fuite en avant : elle ne veut que la paix et ne fait que la guerre.

A voir ce soir à 21h sur Arte : "Zelensky", documentaire d'Yves Jeuland, Ariane, Chemin et Lisa Vapné.


mercredi 7 mai 2025

What a wonderful world

On sentait bien qu'il y avait un manque. Poutine et sa clique de tueurs qui veulent avaler le territoire ukrainien quel que soit le prix du sang et qui terrorisent leur propre population ; Nétanyahou et son gouvernement d'extrême droite qui veulent raser Gaza et faire fuir ses habitants qu'ils n'auront pas tués ; le Hamas qui préfère voir mourir les Palestiniens que de relâcher les otages israéliens ; le Soudan qui se déchire, tout comme le Yemen ; la guerre entre le Rwanda et la République Démocratique du Congo ; l'Iran et l'Afghanistan qui enferment les femmes qui ont le grand tort de ne pas se contenter de vivre dans leur cuisine ; la Chine qui menace Taïwan ; l'Algérie et la Tunisie qui emprisonnent leurs intellectuels ; le régime turc qui enferme ses opposants ; la Birmanie, la Corée du nord, la Biélorussie et tant d'autres pays qui empêchent toute liberté à leurs habitants ; la Chine et la Russie qui colonisent l'Afrique ; les extrémistes de droite et les populistes qui s'installent au pouvoir ou s'en approchent ; l'antisémitisme qui revient au grand galop avec l'aide, notamment, de l'extrême gauche ; les demandeurs d'asile qui sont considérés comme des pestiférés ; le réchauffement climatique qui s'accélère tandis que les voyages en avion n'ont jamais été aussi nombreux ; le Père Ubu qui a pris la tête des Etats-Unis et s'amuse à tout casser ; tout cela ne suffisait pas. Voilà que l'Inde et le Pakistan se font la guerre. 

L'animateur et comédien Hervé Pauchon a traversé la France à pied en demandant aux gens croisés sur sa route ce qui les rend heureux (1). Le plus souvent, c'est leur lien avec la nature qu'ils citent. On voit par là que la nature est bien plus rassurante que l'humanité. 

https://www.youtube.com/watch?v=VqhCQZaH4Vs

(1) https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/carnets-de-campagne/carnets-de-campagne-du-mercredi-07-mai-2025-6502218

vendredi 2 mai 2025

Derrière l'écrivain, un peuple réduit au silence

Dans deux semaines, il y aura six mois que Boualem Sansal est emprisonné à Alger. Coupable d'être critique envers le régime algérien. Comme l'écrit Le Monde (1), "le silence s’installe autour de sa cause. Il menace d’aggraver le sort d’un homme qui paie de sa liberté le choix d’avoir voulu rester dans son pays tout en cinglant le pouvoir de ses critiques".   
Lisa Romain vient de publier un essai : "Boualem Sansal à l’épreuve du réel" (2). "L’autrice, écrit Le Monde, montre (...) avec talent que l’œuvre de (Sansal) consiste en un effort de retrouvailles avec le réel. Car l’accès au réel s’est trouvé obturé par la propagande islamiste comme par celle du régime algérien, que Boualem Sansal a l’une et l’autre combattues en démocrate, en laïc et en partisan des identités plurielles dont son pays est fait (arabe, kabyle, juive, européenne, etc.). Aux yeux de Sansal, les médias algériens aux ordres et les consciences occidentales au jugement altéré par la culpabilité postcoloniale contribuent à brouiller la réalité de l’Algérie contemporaine. Tout comme la tendance au « quituquisme » (qui tue qui ?). On désigne par là une mentalité frisant le complotisme, qui empêche d’attribuer les massacres islamistes à leurs véritables auteurs, soit qu’on cherche à ceux-ci des circonstances atténuantes en en faisant de modernes « damnés de la terre », soit qu’on voie dans leurs exactions la main des militaires algériens (les puissants d’Alger n’étant par ailleurs nullement exonérés par Sansal de leurs propres méfaits)."

En Belgique francophone, à l'initiative du Pen Belgique francophone, une quarantaine d'auteurs ont publié en commun des textes de soutien à leur prestigieux confrère algéro-français, réunis sous le titre "Amorces de récits - En soutien à Boualem Sansal" (3).
L'un de ces auteurs, Christophe Roche-Ford, revient sur l'accusation principale adressée par le pouvoir à l'écrivain : avoir osé enfreindre un tabou. Dans une interview, il a questionné "la légitimité historique du tracé de la frontière héritée de la colonisation entre l'Algérie et le Maroc". La Guerre des Sables avait eu lieu en 1963 à son sujet. C'est l'Organisation de l'Unité africaine qui y avait mis fin, "reconnaissant l'intangibilité des frontières coloniales, essentielle à la stabilité du continent africain". Pour avoir questionné ce tracé, Sansal est aujourd'hui poursuivi notamment pour "acte terroriste ou subversif" et la presse algérienne parle de lui comme d'un "traitre" et d'un "pantin révisionniste anti-algérien". 
Voilà l'Algérie, qui s'est enfermée dans son passé de lutte anti-colonialiste, qui défend la frontière tracée par les colons.

"En invoquant l'histoire pour interroger les frontières, il (Boualem Sansal) a fait sortir de sa contenance un pouvoir intransigeant sur le contenu du pays", écrit Jean-Marc Rigaux, avocat et écrivain. "La ligne artificielle dessinée par l'ancien colonisateur pour séparer le royaume chérifien du Maroc de l'Algérie encore inexistante devient paradoxalement une ligne de défense du caractère intangible du pays. Tout ce qu'a fait ou non la France a été et reste néfaste. Sauf cela. La limite. Ici. Chez nous. Là. Chez eux."

"En attendant, écrit encore Christophe Roche-Ford, "ce passé qui se met en travers du présent verrouille la situation politique et est une pièce maîtresse de la névrose du pouvoir algérien, se réclamant de la guerre de libération du peuple algérien tout en confisquant sa liberté, et qui a conduit à l'arrestation arbitraire de Boualem Sansal." L'emprisonnement d'un écrivain questionne la liberté de tout un peuple. "La nuit de Boualem Sansal en sa prison est aussi la très longue nuit du peuple algérien." 

(1) https://www.lemonde.fr/livres/article/2025/04/30/boualem-sansal-a-l-epreuve-du-reel-de-lisa-romain-l-ecrivain-qui-engage-son-lecteur_6602011_3260.html
(2) éditions Cerf.
(3) Asmodée Edern, Pen Belgique francophone.