dimanche 7 décembre 2025

Au plus bas

Le monde actuel ressemble à une cour de récréation. Les caïds y imposent leur loi, aidés par les petits bras, les bas du front, les courtisans, les flagorneurs dont ils s'entourent et qui prennent plaisir à frapper les petits, à leur voler leur goûter ou leur casquette.

Les brutes que sont Poutine ou Trump s'imposent partout par leur pouvoir mais aussi grâce aux munichois, aux obligés serviles, aux cireurs de bottes qui leur font la cour.
Le premier ministre indien Narendra Modi vient de recevoir chaleureusement son ami Poutine. Orban, Fico et tant d'autres populistes se plaisent à insulter Zelensky pour faire les yeux doux au président russe tout en affirmant aux démocrates leur volonté de gouverner leur propre pays d'une main de fer.
Les leaders populistes d'Amérique latine Milei et Bukele s'affichent comme d'ardents soutiens à Trump quand d'autres présidents latino-américains (au Guatemala, au Panama, en Equateur) ont accepté de se plier aux droits de douane que leur impose le Père Ubu américain (1). Il règne en roi grâce à ceux qui le flattent et qui acceptent ses humiliations et ses caprices d'enfant gâté.
Le sommet de la bassesse a été atteint il y a quelques jours par Gianni Infantino, le président de la Fédération internationale de football, qui a remis à Trump un « prix de la paix » qu'il a inventé pour l'occasion. Infantino ne pourrait s'abaisser plus bas pour plaire à son ami caïd qu'il vénère.  Le voilà transformé en carpette. "Le moment où ce « prix de la paix » est décerné est particulier, au regard de la politique extérieure des Etats-Unis ces derniers temps, fait remarquer Le Monde (2). Donald Trump a ordonné le déploiement de troupes en mer des Caraïbes, dans un cadre de montée des tensions avec le Venezuela, et son président Nicolas Maduro, dont l’administration américaine demande le départ."
Il y a les grands hommes et il y a les hommes bas.

(1) Jack Nicas, "La doctrine Donroe : une tentative de mise au pas de l'Amérique latine", The New York Times, 17.11.2025, in Le Courrier international, 4.12.2025.(2) https://www.lemonde.fr/international/article/2025/12/05/le-patron-du-football-mondial-offre-a-donald-trump-un-prix-de-la-paix-sur-mesure_6656196_3210.html

jeudi 4 décembre 2025

Fausses études, vraie peste

Les pesticides sèment la peste. Nombre d'études médicales l'attestent. Mais quantité de paysans veulent garder la tête dans le sable. Business as usual, voilà leur credo. Surtout ne rien changer à des pratiques dont ils sont souvent les premiers à souffrir.
Certains d'entre eux ont d'ailleurs créé il y a près de quinze ans une structure nationale pour venir en aide à l’ensemble des professionnels (agriculteurs, pépiniéristes, viticulteurs) victimes des pesticides : Phyto-Victimes (1). 

Récemment, le collectif Stop-Pesticides a installé quelque trois cents panneaux « Les pesticides tuent ! »  à l’entrée de différentes communes de l’Indre. Une centaine d'autres devraient s'y ajouter.
Dans un communiqué, relate La Nouvelle République (2), "le collectif a annoncé avoir commencé un mouvement « de sensibilisation de la population sur les dangers des pesticides » et a rappelé plusieurs effets néfastes des pesticides qui « tuent des insectes », « tuent des oiseaux » et « tuent des humains ». « Les pesticides et leurs résidus (métabolites) s’accumulent dans les organismes vivants et se retrouvent dans la chaîne alimentaire avec des conséquences établies sur la santé. Les médecins et scientifiques de plus en plus nombreux dénoncent l’arrivée “ d’un tsunami de cancers ” », explique le communiqué, qui dénonce également la pollution engendrée par ces pesticides."
Le syndicat agricole Coordination rurale de l'Indre (proche de l'extrême droite) a annoncé, nous dit encore La Nouvelle République, "qu'il avait commencé à retirer plusieurs de ces pancartes avec lesquelles il était en désaccord". Que les membres de la Coordination rurale ne voient pas de problème à s'empoisonner eux-mêmes, soit, mais ils devraient quand même comprendre que la population ne le tolère pas qu'ils se plaisent à empoisonner les autres. A moins que, comme le Rassemblement national, il ne s'agisse que d'un mouvement très nombriliste, fermé sur lui-même, qui ne voit que ses propres intérêts et refuse toute vision d'avenir. Les anti-système sont souvent les plus fervents soutiens du système.

Aujourd'hui, Le Monde nous apprend (3) que la revue Regulatory Toxicology and Pharmacology a annoncé avoir retiré de ses archives une étude de 2000 qui concluait à la sûreté du Glyphosate. En fait, "les réels auteurs de l’article ne seraient pas ses signataires – Gary M. Williams (New York Medical College), Robert Kroes (Ritox, université d’Utrecht, Pays-Bas) et Ian C. Munro (Intertek Cantox, Canada) –, mais plutôt des cadres" de la société Monsanto. Il s'agit là de « ghostwriting » (littéralement « écriture fantôme »), une forme de fraude scientifique. "Elle consiste, écrit encore Le Monde, pour certaines firmes, à rémunérer des chercheurs afin qu’ils acceptent de signer des articles de recherche dont ils ne sont pas les auteurs. La motivation est simple : lorsqu’une étude s’avère favorable à un pesticide ou à un médicament, elle apparaît bien plus crédible si elle n’est pas signée par des scientifiques de la société qui le commercialise."
Dans une enquête qu'il a menée, "Le Monde avait identifié d’autres articles « ghostwrités », dans les revues Critical Reviews in Toxicology ou encore Journal of Toxicology and Environmental Health, Part B. Aucun n’a été rétracté."
Gageons que ces pratiques frauduleuses et dangereuses n'amèneront pas la Coordination rurale à sortir sa tête du sable.

(2) https://www.lanouvellerepublique.fr/chateauroux/pourquoi-des-pancartes-contre-les-pesticides-ont-ete-installees-partout-dans-l-indre-1764685332
(3) https://www.lemonde.fr/planete/article/2025/12/03/glyphosate-l-une-des-plus-influentes-etudes-garantes-de-la-surete-de-l-herbicide-retractee-vingt-cinq-ans-apres-sa-publication_6655817_3244.html
Le titre en une du Monde de ce jour est le suivant : "PFAS : contamination générale de l'eau potable".

mardi 2 décembre 2025

Intense présence

La chanson française a perdu un de ses plus grands interprètes. Le plus intense peut-être. Jean Guidoni est mort. La théâtralité qu'il mettait à interpréter les textes noirs de ses chansons - ceux de Pierre Philippe en particulier - lui donnait sur scène une présence d'une intensité exceptionnelle. En juin dernier encore, il en témoignait à Festiv' en Marche, festival de la chanson belle et rebelle. A la fin de son récital, comme tant de spectateurs, la chanteuse Juliette essuyait ses larmes : "j'ai pris une claque", dit-elle.
"Singulier, sulfureux, théâtral toujours", écrit de lui Odile de Plas dans Télérama (1). "Jean Guidoni, écrivait dans Le Monde Véronique Mortaigne (2), fut un magnifique homme de scène, qui n’a jamais oublié de payer ses dettes aux femmes de cabaret, la « diseuse » Marianne Oswald, la réaliste Lys Gauty ou l’ange bleu Marlene Dietrich. D’elles, il avait appris le droit à la marge, aux paradis interdits. Complexe, charmant, perfectionniste, Jean Guidoni fut un cas."
Il avait sorti au printemps dernier son dernier album : Eldorado(s). Les derniers mots de la dernière chanson, Regarde mon amour, sont les suivants : "Toute la vie, c'est trop court. Pour nous". Oui, pour nous tous.

(1) "La voix écorchée des marges", Télérama, 3.12.2025
(2)  https://www.lemonde.fr/disparitions/article/2025/11/22/la-mort-de-jean-guidoni-chanteur-a-l-esthetique-radicale-et-sombre_6654433_3382.html?search-type=classic&ise_click_rank=1

samedi 29 novembre 2025

La vie des autres

Répondre à la violence par la violence, à la haine par la haine, c'est tout ce que sait faire le gouvernement israélien. Deux Palestiniens qui se rendaient à l'armée israélienne ont été tués sciemment en Cisjordanie (1). Des documents filmés en attestent. Et alors ? Quelle importance ? C'étaient des terroristes, balaie le ministre de la Sécurité nationale. Il sait qu'il a l'opinion publique avec lui. Cette exécution, rapportait hier un journaliste de France Inter, laisse la population israélienne indifférente. Depuis le 7-octobre, seuls les rares médias de gauche et quelques ONG s'indignent. Les vies humaines ne comptent pas, ne comptent plus.
Pas plus qu'en Russie. Pour le tueur en série Poutine, les centaines de milliers de morts qu'engendre sa guerre, y compris dans les rangs de son armée, n'ont aucune valeur. Il a aussi l'opinion publique avec lui. Il la contrôle d'une main de fer. Lui a sans cesse peur, affirment différentes sources, pour sa vie, mais celle des autres n'éveille aucun intérêt chez lui.
Tous ceux qui pensent qu'on n'a jamais essayé l'extrême droite et qu'il faut lui laisser sa chance feraient bien d'y réfléchir. L'extrême droite est étrangère aux notions de vie, de droit et d'humanité.

Je maudis la guerre, toute guerre, quelle qu'en soit la forme, quel qu'en ait été le motif. Tout vaut mieux que la guerre, il ne peut y avoir aucune exception à cela, cela n'admet aucune clause. Seule une personne sur mille veut la guerre, et c'est celle qui a tous les moyens de s'en mettre à l'abri et qui compte en tirer un profit ; pourquoi les autres souffrent-ils ? (...)
La guerre n'a pas de fondement dans les lois de la nature. La nature est calomniée ! La vie de tous les êtres vivants est fondée sur la convergence des intérêts, sur la coopération. Le chêne ne peut vivre sans le mycélium, de même que le mycélium ne peut vivre sans le chêne, ou la plante sans les insectes qui pollinisent ses fleurs. Nous parlons. d'
entre-dévorement des animaux et ne savons pas lire les pages de leur contrat. Ah, si les hommes se dévoraient les uns les autres, cela pourrait être une sorte de justification. Dans le monde des animaux, nous ne connaissons qu'une seule guerre : celle des fourmis ; il n'y a presque aucun doute que l'humanité future s'organisera à la manière des fourmis : heureux esclavage universel, atrophie de la pensée et de la volonté, mécanisation des mouvements, suppression des sentiments. Nous en approchons à pas de géant.
Mikhaïl Ossorguine, "Dans une bourgade paisible de France" (Verdier, 2025), écrit au tout début de la seconde guerre mondiale.
(M. Ossorguine avait connu les prisons tsaristes, puis bolcheviques et était alors réfugié en France où il a fui Paris occupé par l'armée nazie pour s'installer en zone dite libre.)

(1) https://www.lemonde.fr/international/article/2025/11/29/la-mort-filmee-de-deux-palestiniens-revelatrice-des-methodes-de-l-armee-israelienne-en-cisjordanie_6655347_3210.html

mercredi 26 novembre 2025

Ne dites plus MAGA, dites MARGA

Comment dit-on larbin en américain ? On pourrait ainsi qualifier Donald Trump. On peut se prendre pour le roi et n'être qu'un valet.
Elle est loin, la guerre froide. Les deux puissances américaine et russe n'en sont plus à se regarder en chiens de faïence avec le doigt sur la gâchette nucléaire. Leurs dirigeants se font des ronds de jambe, se donnent du "cher ami", se congratulent mutuellement. Les Américains sont même devenus, de manière parfaitement consciente, les larbins des Russes. Make America Great Again se combine avec Make Russia Great Again. Leur plan de paix qu'ils veulent imposer aux Ukrainiens a en réalité été rédigé par les Russes.
Plusieurs analystes ces derniers temps soupçonnaient le plan de la Maison blanche de n'être qu'un copier-coller de celui du Kremlin. On en a maintenant la preuve.
L’agence Bloomberg vient de révéler des conversations qui témoignent de la grande proximité qui existe entre le conseiller de la Maison Blanche, le promoteur immobilier Steve Witkoff, et ses interlocuteurs russes et du stratagème russe pour faire passer le projet de plan de paix du Kremlin (1). "Je pense qu’on va juste faire ce document à partir de nos positions, et je le transmettrai de façon informelle, en disant clairement que tout est informel. Qu’ils fassent comme si c’était à eux. Mais je ne pense pas qu’ils prendront exactement notre version, mais au moins ce sera aussi proche que possible de cela." C'est ce qu'a dit à Iouri Ouchakov (conseiller diplomatique de Poutine) Kirill Dmitriev, patron du Fonds d’investissement direct russe et principal interlocuteur de Steve Witkoff.
Celui-ci, de son côté, a suggéré à Ouchakov quelle attitude avoir avec Trump : le flatter encore et encore et lui dire qu'il est "un homme de paix". Witkoff a aussi affirmé sa "conviction" que la Fédération de Russie "a toujours voulu un accord de paix". Il a même fait plus fort encore : "Tu sais que j’ai le plus profond respect pour le président Poutine".

L'Ukraine pourra être dépecée avec les félicitations d'Ubu roi et de ses courtisans à l'agresseur. Les extrêmes droites les plus puissantes s'entendent comme larrons en foire sur le dos des plus petits qui ont juste le droit de se taire et de s'aligner. Et le devoir de dire merci en criant Make America and Russia Greats Again. Amen.

(1) https://www.lemonde.fr/international/article/2025/11/26/steve-witkoff-un-envoye-special-de-donald-trump-tres-proche-de-ses-contacts-russes-j-ai-le-plus-profond-respect-pour-le-president-poutine_6654831_3210.html
https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/geopolitique/geopolitique-du-mercredi-26-novembre-2025-9869769
Verbatim de la conversation entre Witkoff et Ouchakov :
https://www.lemonde.fr/international/article/2025/11/26/l-integralite-de-la-conversation-entre-steve-witkoff-envoye-special-de-donald-trump-et-iouri-ouchakov-conseiller-diplomatique-de-vladimir-poutine-revelee-par-bloomberg_6654892_3210.html

mercredi 19 novembre 2025

Avenir obscurci

Un professeur d'une université américaine affirme (sous le pseudonyme de Hilarius Bookbinder) que "la plupart de nos élèves aujourd'hui sont des analphabètes fonctionnels. J'entends par là qu'ils sont incapables de lire et de comprendre des romans pour adultes sérieux écrits par des auteurs grand public (...). Nos diplômés sont littéralement incapables de les lire d'un bout à l'autre en comprenant ce qu'ils ont sous les yeux. Ils n'ont ni le désir d'essayer, ni le vocabulaire nécessaire pour saisir le sens des phrases, et certainement pas la capacité d'attention nécessaire pour finir. (...) Mais le pire, c'est leur résistance à toute pensée originale. il y a une soumission réflexe au cliché le plus banal, et un refus de toute nouvelle idée". (1) Une étude de 2022, publiée dans The Chronicle of Higher Education, faisait le même constat et en attribuait les causes à l'usage excessif des portables et des réseaux dits sociaux, aux conséquences du confinement lors de l'épidémie de Covid-19 et à l'intelligence artificielle. 

Hier matin, dans sa revue de presse sur France Inter (3), Nora Hamadi expliquait, citant un article du quotidien La Croix, que "le prestigieux MIT a mené une expérience auprès d’un groupe d’étudiants. Leur activité neuronale a été mesurée pendant qu’ils rédigeaient une dissertation en 20 minutes : les uns avec ChatGPT, les autres avec un moteur de recherche de type Google, et les derniers sans aucun soutien externe. Conclusion : c’est ce troisième groupe qui produisait le plus de connexions neuronales, comparativement aux deux autres. Les étudiants avec ChatGPT voient une baisse moyenne de 55 % de leur activité neuronale, ils se souvenaient beaucoup moins bien de leur écrit. L’étude a conclu à une diminution probable des compétences d’apprentissage. En gros, « ChatGPT rend bête ». « Déléguer le raisonnement humain a des algorithmes probabilistes, cela engendre une perte d’efforts cognitifs et une perte de pensées critique », explique Laure Tabouy, neuroscientifique : « Sur le long terme, il y a un risque d’atrophie de certaines zones cérébrales au détriment d’autres »".

Dans le même temps, le Père Ubu américain (dont on sait qu'il ne lit absolument rien sinon les propos élogieux à son égard - rien d'autre ne l'intéresse) fait la guerre aux universités. "De ce point de vue, écrit Marc Weitzmann (2), l'offensive catastrophique de l'administration Trump contre les campus et contre la science en général, dont nous paierons tous le prix à la première pandémie, ou lors du réchauffement climatique, paraît s'inscrire dans la continuation d'un processus de destruction initié par les universités elles-mêmes, leurs départements des sciences humaines et leurs administrations en particulier. Des médias aux universités, tous les lieux du savoir, comme l'écrit l'essayiste Ted Gloria, connaissent une crise, voire un effondrement sans précédent. Il est remarquable qu'on assiste en parallèle à la montée d'un catholicisme réactionnaire, voire moyenâgeux, qui trouve des alliés improbables chez certains magnats de la haute technologie."

En France, l'islam prend de plus en plus de place dans la vie des jeunes musulmans. Une étude de l'Ifop, rendue publique hier et commentée dans Charlie Hebdo de ce jour (4), indique que "65% des musulmans (de France) pensent que la religion a raison face à la science sur la question de la création du monde" (19% chez les adeptes d'autres religions) ; que "57% des musulmans âgés de 15 à 24 ans pensent que le respect des règles musulmanes est plus important que celui des lois françaises" ; que "32% des moins de 25 ans ont de la sympathie pour les Frères musulmans (13% chez les musulmans de plus de 50 ans) et que seuls 12% des 15 à 24 ans souhaitent que "l'islam se modernise" (ils étaient 41% en 1998). "Il est troublant de constater que ce sont les plus jeunes qui sont les plus traditionalistes, alors que les plus âgés le sont moins", commente Riss.

En Espagne, de plus en plus de jeunes voient le franquisme comme "une période idyllique". En France, de plus en plus de jeunes sont séduits par le ballon de baudruche Bardella et son RN très FN.

On voit par là qu'une partie inquiétante de la jeunesse avance à reculons. Dans l'obscurité et vers le pire.

(1) cité par Marc Weitzmann, "La part sauvage", Grasset, 2025.
(2) op. cit.
(3) https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/dans-l-oeil-de/dans-l-oeil-de-du-mardi-18-novembre-2025-6529260
(4) Jean-Loup Adénor, "Les jeunes musulamns en pincent pour l'islamisme" - Riss, "Islamisme made in France", Charlie Hebdo, 19.11.2025.

dimanche 16 novembre 2025

Philistins antirépublicains

     Sensibilité, empathie, solidarité, fraternité, humanité, voilà autant de notions qui échappent à l'extrême droite. Les élus du RN-FN n'ont visiblement aucune notion de psychologie et ont le cœur desséché. Ils sont incapables de verser la moindre larme devant le Chœur du 13, cette chorale de rescapés et de familles de victimes des tueries du 13 novembre 2015, interprétant Shooting Stars (1). Au contraire. Ils se moquent, ricanent, persiflent. C'est tout ce qu'ils sont capables de faire.
Le Monde rapporte (2) les propos d'élus du RN sur le réseau X : « Les islamistes découragés à la vue de ces images », a écrit le député Alexandre Sabatou ;  « J’ai honte », a déclaré son collègue Julien Odoul qui se demande : « Quelle est la prochaine étape ? Une chorale avec Salah Abdeslam ? Cette cérémonie a été l’illustration d’une forme de lâcheté, de déni et de pacifisme totalement scandaleux au regard de la mémoire qu’on doit aux victimes. Les mouvements islamistes qui ont regardé leur télé ont dû bien rigoler. »
Le président de l’association de victimes Life for Paris, Arthur Dénouveaux, leur a répondu : « De cette cérémonie est né un sentiment de réunion républicaine, autour de valeurs que l’extrême droite essaie de nous confisquer : liberté, égalité, fraternité, et le drapeau français. Ils sont paniqués de voir que la société civile n’est pas dans l’envie de vengeance, alors ils réagissent à leur manière : en salissant et sortant les choses de leur contexte. Ils démontrent juste qu’ils sont profondément antirépublicains ».

Résumons-nous : le RN devrait se choisir des représentants humains.

(1) https://www.youtube.com/watch?v=7E9duxhyDrk&list=RD7E9duxhyDrk&start_radio=1
(2) https://www.lemonde.fr/politique/article/2025/11/14/le-rassemblement-national-tourne-en-derision-la-commemoration-des-dix-ans-du-13-novembre_6653464_823448.html

jeudi 13 novembre 2025

La terreur perd et gagne

    Voilà donc dix ans déjà que la terreur islamiste se répandait dans tout Paris. Cent vingt personnes ont été tuées froidement et sans raison, des centaines d'autres blessées, des milliers terrorisées, tout un pays et ses voisins pétrifiés par l'horreur. Mais les terroristes n'ont pas gagné par rapport à l'opinion publique. Ils ne nous ont pas fait changer nos modes de vie. On sort toujours boire un verre en terrasse, on va toujours aux stades ou aux concerts. Et contrairement à ce qu'espéraient les islamistes et ce que veulent absolument croire certains, ce qu'ils appellent islamophobie ne s'est pas développé. "Je garde une certaine admiration pour les Français aujourd'hui, affirme Stefano Montefiori, correspondant à Paris du Corriere della Sera (1). Vu le choc, on aurait pu s'attendre à beaucoup de haine, mais je retiens surtout la douleur et la dignité des réactions tout autour de moi."
Son confrère du Spiegel, Leo Klimm, lui fait écho (2) : "Je sais ce que l'on ressent quand on est la cible du terrorisme. Et à quel point une société fait la démonstration de sa force quand elle résiste à la tentation de haïr en retour. Aucun autre pays d'Europe n'a été autant mis à l'épreuve par le terrorisme islamiste que la France. Jamais elle n'a réagi en sombrant dans l'hystérie."

    Si l'opinion publique a plutôt bien résisté, on ne peut en dire autant d'une bonne part des partis de gauche, devenus des culs-bénits soucieux d'accepter que se répandent dans la société les modes de vie prétendument rendus obligatoires par l'islam. Une telle attitude qui se veut bienveillante - et est très souvent électoraliste (3) - cache en fait une forme de racisme qui parfois s'ignore. Les mêmes qui montent au créneau pour pourfendre les censures qu'imposent les évangéliques se montrent très tolérants par rapport aux pratiques islamiques qui s'étendent le plus souvent au mépris des femmes et des musulmans qui ont envie de pratiquer leur religion sans ostentation.
"Les enquêtes et les ouvrages qui alertent l'opinion publique sur la stratégie des islamistes pour imposer à notre société leurs dogmes religieux ne manquent pas, écrit Riss (4). Mais l'islamisme, c'est comme le réchauffement climatique : on a beau disposer de toutes les informations sur le phénomène, personne ne le combat efficacement. Au contraire, on nous incite à l'accepter en nous habituant." Le directeur de Charlie Hebdo estime que "la couardise généralisée est plus efficace que les kalachnikovs des attentats de janvier et de novembre 2015, de Toulouse et de Montauban en 2012, et de tous les précédents. Les islamistes n'ont plus à se casser la tête pour diffuser leur idéologie : d'autres s'en chargent très bien et sans violence".

(1) "On oublie parfois quand on est journaliste, qu'on est aussi concerné", Le Courrier international, 6.11.2025.
(2) Leo Klimm, "La France a résisté à la tentation de haïr en retour", Der Spiegel, 29.10.2025, in Le Courrier international, 6.11.2025.
(3) Lire l'interview de Omar Youssef Souleimane : https://www.leddv.fr/actualite/omar-youssef-souleimane-les-islamistes-ont-trouve-chez-lfi-un-echo-pour-leur-propagande-20251111
(4) Riss, "Trente ans de franche rigolade", Charlie Hebdo, 12.11.2025.

mercredi 12 novembre 2025

Enfin !

Boualem Sansal va être libéré après près d'un an de prison. Enfin ! Il n'aurait pas dû être enfermé un seul jour.

Allez, ouste, les dictateurs, les usurpateurs, les mafieux, les crapulards, l'avenir appartient aux gens de bien. Tiens, je crois que c'est ça la bonne définition de cet objet non identifié qu'est l'humanité, que je cherche depuis des années : l'humanité, ce sont ces gens de bien qui, vaille que vaille, assurent le service de la vie. (Boualem Sansal, "Vivre - Le compte à rebours", Gallimard, nrf, 2024)

mardi 11 novembre 2025

Démantèlement durable

     La plus grande centrale nucléaire d'Europe, celle de Sellafield sur la côte nord-ouest de l'Angleterre, ne produit plus d'électricité depuis 2003. Elle est en cours de démantèlement. Il devrait durer jusqu'en 2125. Au moins. C'est ce qu'on apprend en lisant un article du Guardian (1). "Entre l'entreprise chargée des travaux Sellafield Ltd et sa chaîne d'approvisionnement, le site emploie environ 60 000 personnes, dont plus de 80% de la région."
La durée de vie d'une centrale nucléaire est estimée à quarante ans, mais il en faut, dans ce cas-ci, cent vingt pour la démanteler après usage. Voilà donc pourquoi certains parlent à propos du nucléaire d'énergie durable. 

Note : ouvert en 1947, le site de Windscale est chargé de produire du plutonium pour le programme nucléaire britannique. En 1957, une fuite radioactive pollue les environs, pire accident nucléaire avant ceux de Three Mile Island en 1979 et Tchernobyl en 1986. Dans les années '60, le rejet d'eaux contaminées dans la mer d'Irlande provoque la colère des pays scandinaves et de l'Irlande qui portent l'affaire devant l'ONU en 2001. En 1981, le site a changé de nom pour modifier son image de marque. Le démantèlement de Sellafield a été entamé en 2005.

(1) Eve Livingston, "La vie à l'ombre de la centrale nucléaire",  The Guardian, 7.10.2025, in Le Courrier international, 30.10.2025.