jeudi 29 novembre 2012

Avec mes salutations les meilleures

La personne que je croise et que je ne salue pas existe-t-elle? Et si elle-même ne me salue pas existé-je? Voilà des questions que l'on se pose.
Le maire de Lhéraule, village de l'Oise de 185 habitants, vient de prendre un arrêté obligeant chacun à dire "bonjour" et "merci" à la mairie (1). A défaut, il obligera la personne à quitter les lieux et, s'il le faut, fera intervenir la gendarmerie, explique-t-il. Ses concitoyens l'approuvent. Le boucher du village s'en prend à ces jeunes qui réclament un bifteck sans y mettre les formes. Les braves gens le savent: "le respect se perd dans les usines de mon grand-père" (2). Mais quand s'est-il perdu si tant est qu'il le soit? Les jeunes ont bon dos. Sur le chemin de halage, circulant en semaine à vélo, on croise d'autres cyclistes, des marcheurs solitaires. La plupart du temps, des adultes, voire des seniors. La majorité d'entre eux regardent l'horizon. Ou parfois leur guidon ou le chien qui les promène. Vous passez à leur hauteur, ils ne vous voient pas, ne vous saluent même pas d'un regard. Les promeneurs du week-end sont plus avenants. Sans doute sont-ils de meilleure humeur. On voit par là qu'on ne devrait se promener que le week-end.
Dans des formations en communication, on enseigne le B.A.-ba de celle-ci: le SBAM: s'il vous plaît, bonjour, au revoir, merci. On peut penser que si l'on sbame, les relations entre nous sont facilitées.
Revenons à Lhéraule. L'arrêt du maire précise qu'il "ne sera pas applicable en cas de force majeure" ou lors des "jours d'élections ou de célébration des mariages" (3). On se perd en conjectures. Quelle force majeure peut empêcher de dire bonjour? Un incendie? Il est si simple de dire "Bonjour! Je me permets de vous signaler que la mairie est en feu. Passez une bonne journée". Et pourquoi donc ne serait-on pas obligé de se saluer à l'occasion d'un mariage, alors qu'on serait, semble-t-il, plus enclin encore que les autres jours à le faire? Enfin, pourquoi serait-on dispensé de se saluer un jour d'élections? C'est souvent le lendemain qu'on en a moins envie. Bien le bonjour, Monsieur Copé. Bien le bonjour, Monsieur Fillon.


(1) JP de France Inter, 29 novembre 2012, 13h.
(2) Poulailler's song, Alain Souchon.
(3) Le Courrier picard, 28 novembre 2012.



Aucun commentaire: