lundi 23 septembre 2019

Au feu

Ce blog a souffert de la sécheresse. Difficile de le faire vivre sans connexion Internet, ce qui fut le cas durant plusieurs jours suite à un important incendie qui a ravagé quelque quatre cents hectares de prés, de haies et de bois aux abords du village et dans l'un de ses hameaux. Le pire a été évité: aucune victime à déplorer et aucune habitation touchée grâce à l'action efficace de trois cent cinquante pompiers, dont certains venus de très loin pour combattre un feu qui, aidé par un vent assez violent, a galopé sur quatre kilomètres.
Un autre incendie s'était déclaré le même jour et sur une superficie analogue dans une forêt voisine.
Et d'autres encore dans les départements voisins de la Haute-Vienne et de la Creuse ces derniers temps.
Le département de l'Indre était devenu une véritable boîte d'allumettes, déclarait un colonel des pompiers, tant la sécheresse était extrême dans cette région, pourtant connue pour sa richesse en eau, grâce à ses "mille étangs" (qui sont en réalité trois à quatre mille), à ses mares, à ses rivières, à ses fossés remplis d'eau à ras bord en période de pluie. Mais la pluie, jusqu'à hier, n'était plus qu'un lointain souvenir. A part l'une ou l'autre rare averse, il n'avait plus réellement plu ici depuis quatorze mois, constatait récemment Christian Toussaint d'Indre Nature (1). De nombreuses rivières sont totalement sèches, avec de graves conséquences pour leur faune et leur flore. D'autres rivières, où l'on peut habituellement pratiquer le kayak, sont réduites à quelques flaques d'eau. 
Il y a une semaine, le niveau de la rivière Indre a baissé de soixante centimètre en quarante-huit heures. A Ardentes, près de Châteauroux, on est à 4% du débit habituel en septembre. La Creuse est en situation d'écoulement négatif: l'évaporation y est supérieure à l'apport en eau.
Quand ils n'ont pas été calcinés, les arbres sont gris, certains ont déjà laissé tomber leurs feuilles. Les feuilles mortes crissent sous les pas, se réduisent en miettes dès qu'on les piétine.
A Guéret, chef lieu du département voisin de la Creuse, longtemps qualifié de "château d'eau de la France", les réserves d'eau sont quasiment épuisées. Le maire, m'explique un ami néo-creusois, a acheté 16.000 bouteilles d'eau qu'il fera distribuer aux habitants le jour très proche où les robinets ne délivreront plus une goutte.

Les exploitations piscicoles, nombreuses dans le Pays des 1000 étangs, sont au bord de la faillite. La Fédération de l'Indre pour la pêche et la protection du milieu aquatique réclame "une aide financière exceptionnelle et urgente" (2). Mais on sait déjà, toutes les études l'indiquent, que cette situation, impensable il y a quelques années encore, se repètera dans les années à venir et qu'on ne pourra pas multiplier les aides exceptionnelles. Ce que vit cette région du centre de la France n'est qu'une illustration parmi tant d'autres des conséquences dramatiques du réchauffement climatique. 
Plus qu'à distribuer des aides financières aux pêcheurs, aux pisciculteurs, aux agriculteurs, aux éleveurs, aux forestiers, aux pépiniéristes, il y a une extrême urgence à changer nos modes de vie incendiaires. Ce qui passe notamment par un réinvestissement dans les transports en commun et simultanément par - la Cour des Comptes vient d'en rappeler l'importance - l'application d'une taxe carbone. Mais le gouvernement, tétanisé par les Gilets jaunes, n'en veut pas. Récemment, suite aux tensions dans le Golfe persique, le prix du baril de pétrole avait fait un bond de 15%. Immédiatement, des Gilets jaunes avaient hurlé pour exiger une garantie du maintien des prix à la pompe. Aujourd'hui, on apprend la faillite de l'agence de voyage Thomas Cook. Six cent mille voyageurs sont bloqués ici, là et ailleurs. Dont des touristes qui ont pris l'avion pour un week-end de trois ou quatre jours à Venise, Barcelone ou Vienne. Nos modes de vie basés sur un plaisir égoïste et insouciant mettent le feu à la planète. Et donc à nos villages.

Post-scriptum: Le Journal de 19h de France 3 Centre - Val de Loire de ce lundi nous apprend que le niveau de l'Indre a à nouveau baissé de 60 cm en 48 heures. Au point que la rivière est quasiment à sec. Les dégats seront irréversibles, estime Indre Nature. La moitié des cours d'eau du département sont à sec, soit 2500 km de rivière. Les autres présentent des débits de 80% inférieurs aux minima connus jusqu'ici. Et les responsables politiques restent muets face à cette situation catastrophique, dénonce Indre Nature. Il faudrait 50 jours de pluie pendant quatre mois pour revenir à une situation à peu près normale.















(1) https://www.lanouvellerepublique.fr/indre/secheresse-l-indre-a-baisse-de-60-cm-en-48-heures-des-degats-irreversibles?queryId%5Bquery1%5D=57cd2206459a452f008b4594&queryId%5Bquery2%5D=57c95b34479a452f008b459d&page=57&pageId=57da5ce5459a4552008b469a
(2) "La Fédération de pêche de l'Indre tire la sonnette d'alarme", La Nouvelle République Indre, 19.9.2019.

1 commentaire:

Unknown a dit…

Quand je pense que certains en sont encore à vouloir nier les effets du réchauffement climatique... il n'y a de pire sourd... comme on dit.