mardi 13 avril 2010

Wapi à froid

Comme beaucoup d'autres j'imagine, j'ai reçu hier par la poste, un exemplaire du tout nouveau "Wapi à chaud - reflets culturels du territoire". Un bulletin qui a - ça crève les yeux - pour objectif d'asséner un peu plus encore le nouveau nom de Wallonie picarde - ou plus familièrement de Wapi - auprès des décideurs et du secteur culturel et de glorifier notre belle sous-région, tellement en avance sur son temps que tout le monde nous envie.
Le 29 octobre 2009, j'avais reçu par courriel une demande de culture.wapi (ex-ACHO) qui souhaitait avoir mon avis sur le projet de territoire de la Wapi pour l'intéger dans cettte publication alors en devenir. "N'hésitez pas à vous carrer dans votre fauteuil et à vous exprimer sans faire de rond de jambe", me disait-on. Un message suivant m'indiquait que je pouvais "dresser un constat général du Projet, indiquer ses atouts, souligner ses faiblesses... A votre convenance, à votre envie..."
Je ne m'étais pas fait prier. N'ayant pas l'habitude des ronds de jambe et des révérences, l'exercice me convenait.
J'ai donc lu le Projet de Territoire de la Wallonie Picarde et couché sur papier mes réflexions. Personne ne s'étonnera de savoir qu'elles étaient pour le moins critiques. La demande était limitée à 2500 signes. C'était bien peu par rapport à ce que je voulais dire. Qu'à cela ne tienne, j'ai affiché sur mon blog l'ensemble de mes réflexions le 9 novembre et, le même jour, j'envoyais à culture.wapi une synthèse de ce texte en une seule page cette fois, pour répondre à la demande.
Je n'eus plus de nouvelles jusqu'à ce que je rencontre, à l'occasion de l'inauguration du crématorium de Frasnes (c'était le 22 janvier dernier), l'un des deux rédacteurs de "Wapi à chaud" (signataire de l'édito) qui me dit qu'il se verrait dans l'obligation de censurer mon texte, que "ils" ne l'accepteraient jamais. Je crus sincèrement à une plaisanterie. Pourquoi me demander un avis critique si c'est pour aussitôt le censurer? S'imaginaient-"ils" que je lirais ce projet en humant les effluves d'un encensoir? Et pourquoi me l'avoir demandé à moi? Il y a tant de gens gentils en Wapi (comme son nom l'indique).
Et voilà donc que je découvre le magazine hier. Mon texte en est totalement absent. Tout comme celui de Walter De Kuyssche qui avait reçu la même demande que moi. Je lis dans l'édito que "cette appellation de Wallonie picarde est déjà entrée dans l'imaginaire collectif". J'ai quelques doutes. En tout cas, dans ma réalité personnelle, elle y entre d'une triste manière.
Le slogan affirme que la Wapi est terre de coeur et de talent. Pas espace de débat visiblement.
Si la Wapi se cherche une sainte patronne (il faut bien rassembler tout le monde), je lui suggère Anastasie.

Ci-dessous le texte que j'ai envoyé à culture.wapi le 9 novembre (texte complet sur ce blog à la même date et avec le même titre).
Et ensuite, le texte que Walter De Kuyssche a envoyé (retrouvez d'autres réflexions de W. DK sur http://athois-la-terre.jimdo.com/).

WALLONIE PICARDE, OU EST L’AUDACE ?

Un important catalogue de projets intéressants, mais surtout de vœux pieux (et parfois vieux), voilà comment m’apparaît le « projet de territoire Wallonie picarde 2025 ». Un projet sympathique, trop consensuel, et de ce fait – à l’image de son diminutif - gentillet, sans ambition forte, sans choix déterminant.

Quid novi sub sole ?
Le développement durable est évoqué. Mais, comme d’autres thèmes, de manière floue et contradictoire. Et sans être posé comme la pierre angulaire du projet de territoire. D’autres régions, d’autres villes se sont donné, en la matière, des objectifs autrement forts, ambitionnant de se situer dès demain dans une perspective post-Kyoto, d’être en CO2 neutre à l’horizon 2020 ou 2025, de développer de réelles alternatives en termes d’énergie, de mobilité, d’axes économiques.
Comment comprendre qu’un projet comme celui du centre de loisirs et de glisse entende s’implanter, sans opposition politique majeure, au cœur du Parc naturel des Plaines de l’Escaut ? Aujourd’hui, on a l’impression que les surfaces agricoles (quelle est place de l’agriculture dans ce projet ?) n’ont plus pour vocation que d’accueillir de gigantesques centres commerciaux, des terrains de golfs, des lotissements d’habitations ou des zones d’activité économique toujours plus dévoreuses d’espace. La ville s’installe à la campagne !
Notre région réclame aujourd’hui des choix clairs, fermes, tranchés C’est sur le positionnement de la « Wapi » sur des dossiers comme ceux-là qu’on verra si elle a réellement une longueur d’avance.

La culture de qui, pour qui et avec qui ?
Le chapitre consacré à la culture, s’il comporte des propositions intéressantes, reste globalement faible. Quelle place pour l’éducation permanente ? Quelles réflexions par rapport à des politiques tant de démocratisation de la culture que de démocratie culturelle ? Comment réduire la fracture culturelle ? Comment mettre fin au désert culturel dans lequel vivent certaines de nos communes rurales ?
Que la région s’appuie sur les arts du cirque et de la rue, très bien, ils représentent quelques-uns de ses atouts majeurs. Qu’elle travaille à partir du patrimoine et du végétal, excellente idée ! Mais je me méfie des « événements » que certains entendent créer de toutes pièces. Quel est leur sens ? A quelles finalités répondent-ils ? Ils s’inscrivent le plus souvent dans une démarche de consommation et de promotion. Dans la « com’ ». Une com’ qui envahit un peu trop ce projet de territoire. Aux actes, citoyens !

Michel Guilbert (en son nom personnel)
Texte complet sur moeursethumeurs.blogspot.com – 09.11.09


Brève critique de Wallonie picarde 2025
Projet de territoire - Rapport du Conseil de Développement


Si je me souviens bien, hier, c’était un prof de l’UCL, un certain Michel Quévy, je crois, qui, au temps de la SIDEHO, tenait la vedette, prévoyant l’avenir et promettant le ciel et la terre. Aujourd’hui, c’est l’Institut Destrée.

Deux méthodes de travail et de pensée différentes, belles intelligences toutes les deux, mais qui ne me convainquent, ni l’une, ni l’autre. Mais que l’on ne s’inquiète pas, il y aura toujours des réfractaires et des incroyants dans les rangs.

Je pense, quant à moi, que la seule issue pour l’avenir probablement sombre ou pour le moins très difficile qui nous attend (cessons donc de penser en termes de croissance et de développement, alors qu’il y a la moitié du monde qui se trouve dans la misère et qu’un milliard d’humains meurent de faim) est de restituer les questions essentielles à la population. Ces questions n’appartiennent ni aux experts, ni aux spécialistes, ni aux scientifiques, ni aux politiques, ni aux industriels, ni aux financiers, qui se les sont appropriées. Elles appartiennent à tous les citoyens. Et tant que ceux-ci ne se seront pas (ré)approprié ces questions, nous auront beau faire.

Sait-on que nous changeons de monde et de civilisation ?

Quévy et « Destrée » sont de belles intelligences, font de belles démonstrations, élaborent de belles et superbes hypothèses et thèses, mais cela, à mon sens (mais qui suis-je pour juger ainsi ?) ne sert guère le « schmilblick ».

Demain, nous aurons davantage de chômeurs (d’autres spécialistes nous le prédisent) et la catastrophe des subprimes recommencera un jour prochain (d’autres super spécialistes nous le prédisent également), tandis que les gens, puisque l’on fait tout pour qu’il en soit ainsi, regarderont jouer au foot (avec ou sans l’Excel) ou iront se divertir ailleurs, tandis que des humains mourront de faim.

Alors, la « Wapi » et sa subordination à Lille-Métropole… ? Enfin. A chacun sa philosophie.

Sachons aussi que les gens de la région d’Ath-Lessines-Enghien (soit un tiers de la Wallonie Picarde – belle minorité !) trouvent essentiellement du travail à Bruxelles, vont surtout à l’université à Mons, à Bruxelles ou à Louvain-la-Neuve, fréquentent volontiers les hôpitaux universitaires de Bruxelles, vont souvent au cinéma, au musée, en sortie ou faire des courses à Bruxelles ou à Mons. Alors, Lille-Métropole… ? Pour ceux qui sont collés à la France, je peux bien comprendre leurs envies et fantasmes. Mais pour nous, ceux d’Ath-Lessines-Enghien, on rigole ou quoi ?

Ce texte est un texte technocratique (vocabulaire creux ; on peut tout y mettre), avec un toilettage communicationnel évident : lire le plan.

Diagnostic ? On relève les termes : fragile, vigoureux, confus, éclaté, menacé, bridé… Enjeux ? La veine n'est pas moins cocasse : gouvernance (gestion sans axe politique autre que le maintien de ce qui existe avec éventuel lifting), métropolisation, maîtriser, impulser, compétitivité du territoire, dualisation, redéploiement, etc.

Voudrait-on faire un sketch, toute la matière y est !

Cela me fait penser au Contrat d'Avenir pour la Wallonie que j'ai lu il y a 4 ou 5 ans, qui était de la même veine et dont personne ne parle plus. Il ne fallait rien oublier afin d'éviter toute critique ! Tout, tout y était, sauf… des axes forts et concrets.

La vraie question est : qui a commandé ce texte (ce n'est pas une étude, c'est une compilation) et combien cela a-t-il coûté ?

Walter De Kuyssche
Novembre 2009

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