dimanche 28 juin 2020

En avant, citoyens!

En France, la Convention citoyenne pour le climat (1), expérience inédite et jugée passionnante par les 150 citoyens, de 16 à 80 ans, tirés au sort qui y ont participé, a remis ses propositions au gouvernement. Sa mission: définir des mesures permettant d'atteindre une baisse d'au moins 40% des émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030 (par rapport à 1990), et ce dans un esprit de justice sociale.
Ces citoyens ont auditionné quantité d'acteurs et d'experts et débattu pendant huit mois et, partant de constats dans les domaines des déplacements, du logement, de la consommation, de la production, du travail, de l'alimentation, ont défini des objectifs et formulé 150 propositions concrètes pour les atteindre. Toutes semblent marquées du sceau du bon sens et devraient être adoptées si l'humanité veut se sauver de la catastrophe annoncée. "Les citoyens bien informés vont plus loin et plus vite que leurs élus", estime une membre de la Convention.
Tous les regards se tournent à présent vers le président de la République pour connaître ses réactions à ces propositions. Parce qu'en France, on le sait, il n'est de salut en dehors du président. Même si les communes, les communautés de communes, les départements, les régions, les entreprises, les associations et les citoyens pourraient tous et toutes se saisir de ces propositions et les concrétiser, chacune et chacun à son niveau. C'est d'ailleurs ce qu'espèrent "Les 150" (le nom de l'association qu'ils ont formée pour donner des suites à leur travail): "ces propositions ne nous appartiennent plus. Nous vous les remettons à vous, Françaises et Français, et vous invitons tous et toutes, voisins, parents, amis, collègues, à vous en saisir, à les critiquer, à débattre, et à envisager l'avenir avec autant de responsabilité, d'esprit critique, d'investissement et de passion que nous avons eu l'honneur et le plaisir de le faire", disent-ils (2).
Emmanuel Macron recevra ce lundi les participants à la Convention et leur fera part des suites qu'il compte donner à leur conséquent et ambitieux travail. Enverra-t-il ces propositions au parlement? Les soumettra-t-il à référendum? Et si oui, quelles propositions et avec quelle formulation? Le gouvernement adoptera-t-il lui-même les mesures réglementaires qui peuvent l'être?

"Aujourd'hui, on mobilise d'importants moyens financiers pour des plans d'urgence et de relance. Il faut en profiter pour orienter l'économie française dans une autre direction. (...) Nous vivons un moment de bascule. Donc oui, c'est un tournant et il faut le prendre", affirme Laurence Tubiana (3), présidente de la Fondation européenne pour le Climat, qui a coprésidé le Comité de gouvernance de la Convention.
La question de la pédagogie sera centrale, le rôle des médias aussi. D'autres expériences de forums citoyens ont échoué à engendrer, au-delà de leurs intéressantes et parfois ambitieuses propositions, des résultats concrets (comme le montre David Van Reybrouck dans "Contre les élections" (4))  parce que les référendums donnent rarement des résultats progressistes et parce que de nombreux médias, surtout privés, se sont montrés méprisants et caricaturaux vis-à-vis de ces expériences démocratiques. 
Une des propositions de la Convention a été mise en avant par certains médias, "comme si on voulait cristalliser l'opinion", dénonce Cyril Dion (5), un des promoteurs de la Convention. C'est celle de la limitation de vitesse à 110 km/h sur autoroute. Un institut de sondage s'est dépêché de prendre l'avis de la population française et en conclut que les trois quarts des Français sont opposés à cette mesure et que 66% la considèrent comme "une mesure technocrate" déconnectée de leur quotidien. Ces grognons qui pensent que seuls les autres doivent changer sont-ils déconnectés du dérèglement climatique qui perturbe gravement notre quotidien et nous oblige, que nous le voulions ou non, à changer notre mode de vie? 
"Quand on sera face au mur climatique, il faudra prendre ces mesures. Donc, est-ce qu'il vaut mieux les prendre maintenant (...) dans un procesus démocratique (...) ou être obliigé de prendre des mesures radicales, comme ça a été le cas pour le confinement?, demande Cyril Dion.

Post-scriptum: dans la soirée électorale, ce soir, sur France 2, Laurent Delahousse demande aux représentants de partis présents sur le plateau de donner rapidement leur avis sur la limitation à 110 km/h. Pas sur les 149 autres mesures, juste sur celle-là. Cet homme est-il journaliste?

(1) https://www.conventioncitoyennepourleclimat.fr
(2) https://www.huffingtonpost.fr/entry/convention-citoyenne-pour-le-climat-macron-doit-faire-son-job-comme-on-fait-le-notre_fr_5eef6aa9c5b66598b235f760?utm_hp_ref=fr-homepage
(3) https://www.nouvelobs.com/planete/20200628.OBS30583/la-convention-citoyenne-pour-le-climat-doit-recevoir-une-reponse-serieuse-previent-laurence-tubiana.html
(4) Babel essai, 2014.
(5) https://www.huffingtonpost.fr/entry/les-110-kmh-sur-autoroute-rebutent-les-trois-quarts-des-francais_fr_5ef59447c5b612083c4b8056?utm_hp_ref=fr-homepage

EU et Canada: 100

1 commentaire:

Philippe Dutilleul a dit…

A la dernière question de ta chronique, je réponds non, deux fois plutôt qu'une....