mercredi 29 mai 2013

Plans sur la comète

Prophète est un métier difficile. Classant des documents, je retrouve une interview donnée à la Libre Belgique par Eric Domb, directeur du centre qui s'appelait alors Paradisio et à l'époque président de l'Union wallonne des Entreprises. "La crise ne va pas durer", affirmait-il. On se réjouissait de l'apprendre. C'était en 2009 (1). Lucide, il estimait cependant que "on est pas près de gagner cette bataille du plein emploi".
La crise s'est installée (in)confortablement et durablement. Et plus personne n'ose aujourd'hui affirmer qu'il aperçoit la sortie du tunnel. Mais comment l'apercevoir si l'immense majorité des responsables politiques ne changent rien à un système capitaliste en échec? Qui, au contraire, l'entretiennent.
Les politiques d'austérité aujourd'hui imposées par l'Europe entendent lutter contre le déficit des Etats qui a une origine claire: le sauvetage du secteur bancaire. Un exemple, cité par Gaël Giraud, économiste et chercheur au CNRS (2): la quasi-totalité du secteur bancaire irlandais fait faillite en 2010. Le Gouvernement décide de prendre à sa charge l'essentiel des dettes bancaires. Résultat: une dette publique qui passe de 25 à 100% du PIB en un an.
"Dexia, ajoute-il, a déjà coûté 12 milliards d'euros aux contribuables franco-belges, et l'Etat français a mis 85 milliards d'euros en garantie pour cette banque. Le sauvetage d'AIG par les contribuables américains en 2008 a permis à la Société générale de récupérer 11,9 milliards de dollars, à BNP-Paribas 4,9 milliards et au Crédit agricole, 2,3 milliards."
Nous sommes donc dans un système qui s'endette pour enrichir les banques et fait payer cette endettement par la population. La crise, nous ne sommes donc pas près d'en sortir si on reste dans cette logique bénéfique pour un système devenu fou et suicidaire pour ceux qui le subissent.
Les solutions selon Gaël Giraud:
- obliger les banques à  séparer - réellement - leurs activités de marché de leurs activités de crédit et de dépôt.
- investir dans la transition écologique. 
Les perturbations climatiques indéniables que nous vivons ces dernières années n'ont visiblement pas encore suffi pour pousser radicalement dans cette voie les gouvernants.
Le printemps automnal que nous vivons pousse de nombreux Européens à prendre l'avion pour aller passer le week-end dans des régions chaudes et ensoleillées. La compagnie Ryanair vient d'augmenter ses bénéfices et s'attend à les améliorer encore. "Le témoignage de la force du modèle ultra-low cost de Ryanair", se réjouit son patron Michael O'Leary (3). Un modèle de l'ultra libéralisme, qui exploite son personnel et participe joyeusement au dérèglement de la planète avec la bénédiction des pouvoirs publics, et notamment de la Région wallonne.
"Poursuivre notre modèle de croissance carbonée est le plus sûr moyen de provoquer un désastre humanitaire dès la fin de ce siècle", estime Gaël Giraud. Il y a des prophètes qu'on n'a pas envie d'écouter.

(1) LLB du 13.02.2009.
(2) "Les banques en accusation", Télérama, 3 avril 2013. Gaël Giraud: "Illusion financière", éd. de l'Atelier.
(3) "Ryanair toujours plus haut", 21 mai 2013.

1 commentaire:

Grégoire a dit…

Est-ce vraiment une crise? J'aurais tendance à penser, puisque la situation s'éternise, qu'il s'agirait plutôt d'un système. Cependant, le changement progressif de mode vie occidental ne compensera le poids environnemental de l'augmentation de la population mondiale. Quand bien même devrions-nous tous végétariens, il sera difficile de persuader un milliard de chinois et un milliard d'indiens que contrairement à nous, occidentaux, il n'est pas souhaitable qu'ils aient chacun une voiture...