lundi 13 mars 2017

Les yeux au beurre noir de la démocratie

C'est compliqué la démocratie. Ça se fait bousculer. Ça pose plein de questions. Comme le peuple, ça a bon dos.
Erdogan le mégalomaniaque voudrait changer la constitution turque pour avoir tous les pouvoirs, être le chef, et le seul, de l'Etat, du gouvernement et de la justice. Et sans doute directeur de rédaction de tous les organes de presse de son pays. Pas sûr que son peuple l'entendra de cette oreille, il envoie ses ministres faire campagne dans les pays européens où les communautés turques sont importantes. Il compte ainsi sur les expatriés pour faire passer son projet. Il injurie les gouvernements européens qui s'opposent aux meetings de ses représentants sur leur sol. Ce ne sont pas des démocraties, dit-il. Il va jusqu'à leur reprocher des méthodes nazies. Et dans le même temps, il fait tout ce qu'il peut, dans son propre pays, "champion du monde des journalistes emprisonnés" (1), pour empêcher les meetings de l'opposition. Il veut donc pouvoir s'exprimer librement partout, sans laisser ceux qui ne sont pas d'accord avec lui en faire autant. Le vote des Turcs de l'étranger pose question quand les enjeux sont aussi importants. Est-il démocratique de donner à des gens qui ne vivent pas dans un pays le même droit de vote qu'à ceux qui y résident et vont devoir subir, au prix de leur liberté parfois, physique et d'expression, les conséquences du référendum? Le principe "un homme - une voix" doit-il être, en toutes circonstances appliqué? Est-il toujours démocratique?
En France, dans la droite ligne de la campagne du Brexit et de celle de Dingo Trump, certains candidats multiplient impunément les mensonges. François Fillon a fustigé les médias qui avaient annoncé le suicide de sa femme. Mais personne ne trouve trace d'une telle information. Voilà à présent qu'il évoque un faits divers dans le Vaucluse: des garçons s'amusaient, dit-il, à envoyer au lance-pierres des lames de rasoir dans les jambes de filles portant des jupes courtes. Ici encore, personne n'a entendu parler de tels agissements (2).
Marine Le Fiel, elle, monte d'un cran encore dans ses théories du complot. Si l'U.E., a-t-elle affirmé, veut créer une armée européenne, c'est pour "tenir le peuple par les armes". Elle parle de "sombre projet" qui illustre les "dérives totalitaires" de l'Europe. Peut-être faudrait-il alors supprimer l'armée française? Elle pourait tenir le peuple par les armes. Elle dénonce "le projet mondialiste", affirme que  ses adversaires sont soutenus par "les tireurs de ficelles à Wall Street ou à Bruxelles" (3). Bref, les vieux arguments populistes outranciers et mensongers. La démocratie consiste-t-elle à laisser des candidats dire n'importe quoi? Les campagnes électorales autorisent-elles tous les sketchs, même les plus stupides ? Pas sûr qu'on puisse se rassurer en se disant que les électeurs savent faire preuve de maturité.

(1) https://rsf.org/fr/actualites/la-turquie-pays-champion-du-monde-des-journalistes-emprisonnes
(2) http://www.huffingtonpost.fr/2017/03/11/lintrouvable-fait-divers-evoque-par-francois-fillon-en-meeting/?utm_hp_ref=fr-homepage
(3) http://www.huffingtonpost.fr/2017/03/11/chateauroux-marine-le-pen-discours-complotiste/?utm_hp_ref=fr-homepage

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Il faut clairement en finir avec les doubles nationalités. La stratégie d'Erdogan, c'est aussi d'empêcher les gens d'origine turque de s'assimiler là où ils sont. Au Canada, quand un cinglé a tué des musulmans canadiens dans une mosquée, ce sont les ambassades du Maroc, d'Algérie, etc. qui ont donné les noms des morts. Parce qu'ils n'étaient canadiens que de surface.
Didier