dimanche 6 novembre 2022

Soupe à la grimace

Le dérèglement climatique a des effets qu'on ne soupçonnait pas. Il dérègle aussi les esprits de certains activistes qui veulent le défendre. La mode veut qu'ils projettent de la soupe sur des œuvres d'art pour dénoncer l'inaction des gouvernements dans la lutte pour sauver le climat. Cherchez le lien. Il n'y en a pas. Sauf qu'ils clament que nous devons aujourd'hui choisir entre la vie l'art et qu'ils préfèrent la première. Mais l'art, c'est la vie. Comme l'écrit Caroline Fourest (1), "depuis quand, à gauche, oppose-t-on l'art à la vie ? Comme jadis l'Eglise ou l'Empire (qui voulait décrocher les toiles de Manet), la génération offensée peut donc brûler des livres ou attaquer des œuvres d'art si la cause leur paraît juste. A force de se rendre au musée pour jeter de la purée, elle semble ignorer qu'une tradition millénaire sépare le happening du vandalisme. Qu'il existe une différence philosophique de taille entre blasphémer et briser des idoles."

Que les activistes s'en prennent aux industries polluantes, celles de l'automobile, de l'aviation, de la chimie, de l'agro-industrie, est logique, simplement logique. Mais à l'art ? Les attaques contre l'art sont le fait des régimes autoritaires. "En démocratie, écrit encore Caroline Fourest, dégrader des œuvres d'art, décrocher des portraits de présidents élus, relève d'une subversion d'opérette, douteuse et capricieuse."

Des activistes britanniques ont été jusqu'à expliquer que s'ils avaient choisi de jeter de la soupe sur un tableau c'était pour faire comprendre que quantité de ménages britanniques n'auraient cet hiver pas les moyens de se réchauffer une brique de soupe vu l'augmentation des coûts de l'énergie. Le dérèglement climatique crée décidément une grande confusion.

(1) "L'écologie pour les nuls", Franc-Tireur, 2.11.2022.

2 commentaires:

Philippe Dutilleul a dit…

Cher Michel, je ne partage pas ton enthousiasme concernant Caroline Fourest ; elle peut être aussi sectaire dans ses postures que les actions coups de poing qu'elle dénonce aujourd'hui. Je te conseille ainsi qu'à tes fidèles lecteurs de lire l'éditorial de ce jour 7 novembre du meilleur éditorialiste du "Monde" à mon humble avis, Stéphane FOUCART qui a un avis plus nuancé, plus incisif et argumenté que cette Madame j'ai un avis sur tout concernant les actions des écologistes comparées à celles des multinationales de la pétrochimie notamment... Amitiés. Ph. Dut.

Michel GUILBERT a dit…

Cher Philippe, j’avais parcouru cet édito du Monde ce matin, mais sans m’y arrêter. Stéphane Foucart a beau être un bon éditorialiste, je ne partage pas cette fois son analyse (que je trouve d’ailleurs assez confuse).
Non, contrairement à ce qu’il dit, ces actions ne 'nous' « inquiètent pas plus que les bombes à retardement climatiques enclenchées par les multinationales ». Evidemment (ce blog en témoigne depuis ses débuts en 2007) que 'nous' sommes conscients de tous les projets écocides qui continent à se multiplier, mais en quoi s’attaquer à des œuvres d’art les dénonce-t-il et les empêchera-t-il ? Désolé, mais ces actions me paraissent idiotes et contre-productives. Encore une fois, je ne comprends pas leur sens. S.F. dit que la question des activistes est « Pourquoi pensez-vous qu’un tableau est plus important que la préservation de la vie sur Terre ? ». Mais y a-t-il une seule personne qui pense cela ?
Oui, je pense qu’il faut être radical. Ce qui ne veut pas dire se tromper de cible.
Ce matin, je discutais par téléphone avec un ami qui vit en Creuse. Je riais d’avoir appris que des activistes y avaient totalement perturbé une course de motos dans les bois. Mon ami m’a appris que la situation était plus complexe qu’on ne pouvait le croire. Cette course est une aberration, mais les activistes en question occupent des lieux classés en Zone Natura 2000, y ont créé des retenues d’eau artificielles, incendient des tracteurs et engins forestiers… La radicalité peut être idiote et… polluante.