lundi 8 juillet 2024

Et la tendresse, bordel ?

Ceux qui n'aiment pas les autres (sauf Poutine) ne vont pas gouverner la France. Le danger est passé. "Le premier tour a été anti-Macron, le deuxième anti-RN", explique Jérôme Jaffré. L’opération dédiabolisation n’a pas fonctionné. Le genre idéal s’avère méphistophélique. Le RN continue à faire peur. Le danger est passé donc. Pour l'instant. Bien sûr et heureusement, le jeune coq aux dents longues ne sera pas, comme il le croyait déjà, premier ministre, mais il ne faut pas se leurrer : le vrai vainqueur de ces élections législatives est bien le RN. Il n'a heureusement pas atteint le score que lui laissait espérer les élections européennes et le premier tour des législatives et est très loin de la majorité absolue, mais le parti de la famille Le Pen passe de 89 députés à 143 et sera le premier groupe à l'Assemblée nationale (1). Il sort renforcé de cette élection. "La marée ne cesse de monter", se réjouit la fille à papa. Comment l'endiguer ? Ce sera tout l'enjeu des années à venir. La gauche sera-t-elle capable de faire revenir à elle cette énorme masse d'électeurs qui l'a quittée pour écouter les sirènes populistes et leurs solutions simplistes et brutales ?

Or la gauche plurielle, si elle parvient à rester unie (ce qui n'est pas gagné), ne pourra que décevoir : elle a présenté un programme aux relents également populistes avec des promesses qui exigeront des dépenses immenses, parfois inconsidérées. De toute façon, cette gauche est, elle aussi, bien loin de la majorité absolue et - quoi qu'affirment haut et fort certains de ses ténors, qui ne veulent appliquer que leur programme - devra apprendre à composer, à former des coalitions, à trouver des compromis. C'est un nouveau parlementarisme, une nouvelle culture politique qu'il faudra inventer. et dont la France n'est pas coutumière. Un fonctionnement identique à celui de quantité d'autres pays : l'Allemagne, la Belgique, les Pays-Bas, l'Italie, l'Autriche et bien d'autres (2). Hier soir, Raphaël Glucksmann appelait à se conduire en adultes, à apaiser le climat politique, à chercher des majorités par projets. François Ruffin, lui, affirmait que "les électeurs nous laissent une dernière chance. (…) Nous devons unir la France des bourgs et la France des tours. Nous devons apaiser, nous devons gouverner avec respect, avec tendresse pour les Français… » (3).
En tout cas, pas de triomphalisme. Chacune des formations politiques "démocrates" devra faire preuve d'humilité parce que d'une part personne n'a gagné, même si la coalition de gauche a le plus grand nombre d'élus, et que d'autre part la plupart de leurs sièges a été acquis grâce au Front républicain, aux voix d'adversaires donc qui ont mis de côté leurs luttes pour faire barrage à l'extrême droite. Cette première "entente" pourrait-elle être l'amorce d'autres accords ? Il faudra des femmes et des hommes d'Etat et non de partis pour y parvenir. 

(2) https://www.liberation.fr/politique/comme-chez-nos-voisins-europeens-apprendre-avec-le-parlementarisme-20240707_D6SB7SUOPJDVJOIH6MMLHVQPVQ/
(3) https://www.lemonde.fr/politique/article/2024/07/08/l-avertissement-de-francois-ruffin-reelu-depute-dans-la-somme-a-l-issue-d-une-semaine-d-angoisse-les-electeurs-nous-laissent-une-derniere-chance_6247719_823448.html


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