vendredi 19 avril 2013

Islamofolies

Les religions ne sont pas critiquables. Il faut respecter les vérités qu'elles représentent. Les critiquer, c'est s'exposer à de graves ennuis. On évitera donc de le faire.

En Russie, la Douma vient d'adopter un projet de loi anti-blasphème (1). On ne pourra outrager ou insulter les sentiments ou les convictions religieuses du citoyen. Comme on ne sait quels sentiments sont ceux du citoyen, on est prié de se taire et de ravaler toute critique à l'égard de toute religion. Sinon, on risque l'équivalent de sept mille euros d'amende ou deux cents heures de travail d'utilité publique ou encore trois ans de prison. En revanche, en Russie, on a parfaitement le droit de répandre de force  "la parole de Dieu".  Les activistes orthodoxes ne s'en privent pas, usant de la terreur et de la violence pour imposer leurs vues. C'est normal, la vérité a tous les droits.

Au Maroc, le Conseil supérieur des oulémas a décrété une fatwa qui menace de mort tout musulman qui aurait abjuré sa religion. Le musulman serait donc prisonnier à jamais de celle-ci. Le code pénal marocain interdit "d'ébranler la foi d'un musulman ou de le convertir à une autre religion". L'ébranleur risque de six mois à trois ans de prison (2).

En Arabie saoudite, l'écrivain Turki Al-Hamad est en prison. Il a eu le grand tort de s'en être pris à ceux qui donnent une lecture extrémiste du "message d'amour" du prophète Mahomet. Il s'est insurgé contre "un nouveau nazisme qui se profile dans le monde arabe et qui est l'islamisme extrême" (3). Des propos jugés offensants envers l'islam. On comprend donc qu'appeler à respecter la religion, c'est l'insulter.

En Belgique, des sénateurs, socialistes et écologistes, francophones et Flamands, veulent faire condamner l'islamophobie. Ils ont rédigé un projet de résolution qui définit celle-ci. Elle liste huit critères qui, s'ils sont rencontrés en nombre, témoigneraient d'une attitude liberticide. Ainsi, on ne peut "considérer l'islam comme violent, menaçant, partisan, du terrorisme, impliqué de manière active et combative dans un choc des civilisations". On ne peut non plus "considérer l'islam comme une idéologie politique, utilisée à des fins politiques et militaires visant à instaurer son hégémonie" (4). On devrait donc considérer à partir de ces deux seuls critères que les islamistes - ces obscurantistes dont le grand projet est de créer, par tous les moyens, y compris les plus violents, des Etats islamiques et d'y instaurer la charia - sont des islamophobes. Le ridicule n'a jamais tué personne, dit-on.
Autre critère: on ne peut "rejeter radicalement les critiques que l'islam formule à l'égard de l'Occident". C'est Jésus-Christ qu'il faut écouter, nous disent les élus socialistes et écologistes: il faut tendre la joue gauche. Les critiques ne seraient donc admises qu'à sens unique.

En Turquie (5), le pianiste Fazil Say vient d'être condamné à dix mois de prison avec sursis. Il est coupable "d'insultes aux valeurs religieuses d'une partie de la population". Son crime: avoir déclaré "je ne sais pas si vous vous en êtes aperçus, mais s'il y a un pou, un médiocre, un magasinier, un voleur, un bouffon, c'est toujours un islamiste". Une affirmation insultante pour les magasiniers, on en convient, mais pas pour les musulmans qui ne peuvent être confondus avec des islamistes, ces "gangsters de la foi" (6), qui ont transformé leur religion en "idéologie politique, utilisée à des fins politiques et militaires visant à instaurer son hégémonie".

Le terme "christianophobie" n'existe pas plus que celui de "judéophobie", de "bouddhistophobie", de "mandaromophobie" ou de "religiophobie". Seul existerait celui d'islamophobie. On voit par là que l'islam serait une religion d'exception, trop faible sans doute pour supporter la critique et qu'il convient dès lors de protéger de toute raillerie.
Les religions sont des idées. Toute idée est critiquable. Une société qui interdit la critique des idées est-elle démocratique?

Moralité: ébranlons, ébranlons!

La tournure d'esprit du musulman overdosé est de se croire indispensable et, de plus, comptable agréé par le Créateur de ce qui vit et périt ici-bas. C'est une vie énigmatique, et dangereuse pour le passant qui ne fait que passer dans la vie. A ces gens, il manque un boulon et c'est dans les ossements qu'ils le cherchent. Ils regardent la vie comme un dû à la mort et en Dieu ils voient un liquidateur de comptes. "Ina lillah oua ina illih radjihoun", répètent-ils en peaufinant la musicalité de la sentence. C'est tout ce qu'ils ont retenu du Livre. Le pacte est calcul comme la vie est une ruse biologique; Allah donne et reprend; l'homme prend et redonne; ça n'enrichit pas mais ça tient éveillé. Mentalement, ils dressent la liste des partants et aimeraient les voir emprunter la voie express. Pour ces commerciaux de l'épouvante, il n'y a  pas assez de cendres dans le cimetière pour se couvrir la tête et atteindre au nirvana des califes. Une planète morte ferait leur affaire.
                                                                                                Boualem Sansal, Le serment des barbares

(1) "La laïcité en danger", LLB, 19 avril 2013.
(2) "L'apostasie mérite la mort...", LLB, 19 avril 2013.
(3) "Le "nazisme" du monde arabe, LLB, 3 janvier 2013.
(4) "Miller recadré par Charles Michel", LLB, 17 avril 2013.
(5)
http://www.huffingtonpost.fr/dionysios-dervisbournias/condamnation-fazil-say_b_3084558.html
(6) B. Sansal.

(re)lire sur ce blog
- Les corbeaux croassent, 16 avril 2013.
- Modérons-nous, 3 novembre 2011.
- Vive le blasphème, 10 octobre 2010.
- Blasphème?, 13 mars 2007.


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