vendredi 8 avril 2016

Ces textes glaçants

Les textes religieux ont ceci d'avantageux: on y trouve ce qu'on a envie d'y lire. C'est-à-dire tout et son contraire. C'est évidemment dans les textes bibliques que les croisés et les inquisiteurs ont trouvé une légitimité à leurs actes violents et guerriers. Quand les mêmes textes appelaient à l'amour du prochain.
Aujourd'hui, avec l'arrivée au pouvoir du P.I.S., la religion catholique s'impose à travers toute la Pologne et une loi oblige les médias à "observer les valeurs chrétiennes" (1). Mais que sont-elles et comment s'expriment-elles? Entre un pape François qui affirme que "si un grand ami parle mal de ma mère, il peut s'attendre à un coup de poing et c'est normal" (2) et J.C. qui nous appellait à tendre la joue gauche si on est frappé sur la joue droite, qui suivre?
Interrogé sur les liens entre islam et terrorisme, le philosophe libanais Ali Harb (3) estime qu'une religion ne peut jamais être réduite à un livre fondateur. "Il faut aborder l'islam sous un autre angle, dit-il: en tant que doctrine du salut, c'est-à-dire comme un système de pensée qui, à l'instar du christianisme et du judaïsme, mais également des religions du XXe siècle, telles que le communisme et le fascisme, prétend détenir la vérité absolue." Il voit le terrorisme comme une attitude intellectuelle et comme une manière d'agir. Une attitude de l'homme qui se croit seul détenteur de la vérité absolue, qu'elle soit religieuse, politique, sociale ou morale, et qui agit en excluant, en excommuniant ou en tuant celui qui ne pense pas comme lui. "Les promoteurs des nouveaux projets religieux, dit-il, ont sans doute été influencés par les exemples de Franco, de Hitler et de Mussolini, par leurs moyens de gouverner et leurs techniques pour contrôler les hommes en les mobilisant et en les remodelant pour en faire un troupeau scandant inlassablement un même slogan."
Le philosophe voit ""toute religion comme un réservoir inépuisable de pratiques violentes. (...) Tant que la religion est fondée sur l'exclusion de l'autre, sur le dualisme du croyant et de l'impie, du fidèle et de l'apostat, il est impossible de la comprendre autrement. Dans l'islam, la violence est encore accrue par un dualisme supplémentaire, celui de la pureté et de la souillure". Ce qui l'amène à affimer "qu'il n'y a pas de musulman fidèle aux dogmes et aux pratiques de sa religion qui soit modéré ou tolérant, sauf s'il est hypocrite, ignorant de sa doctrine ou en a honte".
Ali Harb se dit convaincu que l'islam ne peut être réformé, constatant que toutes les tentatives en ce sens ont échoué. "La seule issue est la défaite du projet religieux tel que l'incarnent les institutions et les pouvoirs islamiques, avec leurs idées momifiées et leurs méthodes stériles." Il estime que le projet de l'islam, même reformulé, se réduit à une réaction motivée par un désir de vengeance contre l'Occident et qu'il n'y a "pas de réconciliation possible entre l'islam et la modernité ou l'Occident".
Certains entrevoient cependant des espoirs chez des penseurs musulmans modérés et "modernistes", tel un Tariq Ramadan. Qui apparaît pourtant, à ceux qui décodent ses discours, comme un praticien du double langage. L'homme moderne qu'il est n'hésite pas à demander un "moratoire" sur la lapidation des femmes (quel courage!) et à déclarer (à un congrès de l'UOIF) que la lapidation des femmes est une sentence juste, qui garantit la sécurité familiale (4). Il a écrit un livre faisant l'apologie des Frères musulmans dont il se présente comme un des membres et, sur les plateaux de télévision, se défend d'en être. (5) Quand on lit le programme totalitaire des Frères musulmans, on ne peut être qu'effrayé par l'écoute que peuvent avoir de tels agents doubles. Et on ne peut que se dire qu'il est loin encore le temps où sera "défait" le projet religieux, seule issue selon Ali Harb.

(1) "Nina Sankari: Etre athée en Pologne, c'est être traître à la patrie", Charlie Hebdo, 6 avril 2016.
(2) http://www.lalibre.be/actu/international/pape-francois-si-un-grand-ami-parle-mal-de-ma-mere-il-peut-s-attendre-a-un-coup-de-poing-54b7b0c63570c2c48ad4f54d
(3) "L'islam ne peut pas être réformé", L'Orient littéraire (Beyrouth), 1er mars 2016, in Le Courrier international, 7 avril 2016.
(4) Arte - Thema consacré aux menaces sur la laïcité en France et en Europe, 9 décembre 2008 (voir sur ce blog "Ces religions conquérantes", 7 janvier 2009).
(5) https://carolinefourest.wordpress.com: "Le double discours de Tariq Ramadan jamais prouvé?", 1er avril 2016.

2 commentaires:

Grégoire a dit…

Martine Gozlan, rédactrice en chef du magazine Marianne y est écrit, cette semaine, une réponse à Michel Onfray (qui n'en demandait peut-être pas tant) suite à une interview dans laquelle il expliquait que tant que les musulmans n'auront pas accepté que le Coran soit aussi le résultat d'un contexte socio-historique, donc écrit par des hommes à une époque définie, etc. Il ne pourra y avoir de lecture critique de ce texte. Et la rédactrice en chef d'égrener des "spinoza" musulmans, pour reprendre la terminologie de M. Onfray, depuis le IXième siècle pour démontrer que, oui, il y a des penseurs et théologiens rebelles de l'Islam. Certes, elle n'a qu'une page à sa disposition, mais il faut quand même constater qu'ils ne sont pas nombreux, et qu'au vu de l'actualité, leurs influences ont été pour le moins limitées. Reste que le Catholicisme a fourni assez peu de terroristes (et encore... Les terroristes catholiques de l'IRA s'en prenaient aux protestants, non parce qu'ils était protestants, mais parce qu'ils étaient les descendants des colons anglais... protestants). Quant à la religion juive, elle a ceci de particulier, que l'on est juif dans la très grande majorité des cas, parce que la maman est juive. On peu se convertir, pour épouser une juive (cfr. Dany Boon). La religion juive a certes beaucoup de contraintes, mais n'a pas l'ambition de convertir qui que ce soit, pas de prosélytes en vue, ce qui n'empêche pas, hélas, l'existence d'extrémistes en son sein.

Bernard De Backer a dit…

Pour s'y retrouver dans les différentes composantes de l'islamisme (Frères musulmans, Tabligh, salifisme piétiste et salafisme djihadiste...), ainsi que l'histoire de leur implantation en Europe et la stratégie déployée, le chapitre "La bataille d'Europe" dans Fitna de Gilles Kepel (Folio actuel 126) est extrêmement instructif. Le livre a été publié en 2004, mais n'a rien perdu de son actualité (que l'on peut compléter par son récent "Terreur dans l'Hexagone, Genèse du djihad français") A ma connaissance, Gilles Kepel est certainement le meilleur connaisseur francophone de l'islamisme, qu'il a commencé à étudier avec son livre consacré aux Frères musulmans, "Le prophète et le pharaon" (1984). Il parle en outre parfaitement l'arabe, ce qui le différencie d'Olivier Roy ou de Raphaël Liogier, et a publié autant sur l'islamisme européen que arabo-musulman. Mais tout comme Roy, il a été un peu optimiste au sujet du "déclin" pou de "l'échec" de l'islamisme (annoncé en 1992 par Roy et 2000 par Kepel). Comme disait Mark Twain, "la prédiction est un art bien difficile, surtout en ce qui concerne l'avenir".