vendredi 24 mai 2019

L'embarras du choix

On se bouscule sur les bulletins de vote pour les élections européennes en France. Trente-quatre listes, soit une augmentation de plus de cinquante pour cent par rapport à 2014. Elles étaient alors vingt-deux.
Mais on ne se bousculera pas sans doute pas dans les bureaux de vote. Les sondages estiment que quarante-cinq pour cent seulement des électeurs feront entendre leur voix. Plus de la moitié des électeurs n'ont donc pas l'intention de se déplacer. Ce n'est certainement pas l'offre politique qui peut les freiner. Il y en a pour tous goûts. Et même pour tous les dégoûts.
On trouve bien sûr tous les partis représentés à l'Assemblée nationale et au Sénat. Mais aussi des Gilets jaunes d'extrême droite, des Gilets jaunes d'extrême jaune, des Gilets jaunes révoltés, des Gilets jaunes en évolution. Des communistes de toutes les chapelles. Un parti "neutre" mais "actif". Des écologistes verts pâles, verts sapin et verts bouteille. Des royalistes, un parti familial rassemblé autour de la famille Le Pen, un parti Pirate, un autre qui défend le droit des animaux, une liste des "Oubliés de l'Europe", une liste musulmane, une liste de jeunes. Et même une liste qui n'a pour programme que la promotion de l'espéranto.
On y trouve des partis pro-européens, des partis pro-européens mais pas trop, des partis anti-européens, des partis anti-européens mais pas trop. On sent bien que pour beaucoup de listes et leurs candidats, c'est surtout l'occasion (d'essayer) d'exister médiatiquement.

Il y a ceux qui vous promettent la lune, ceux qui se contentent de la terre pourvu qu'elle reste vivable.
Ceux qui n'osent pas être contre l'Europe, mais ne parlent que de la France.
Ceux dont la grande idée est de rétablir des frontières.
Ceux qui veulent "rétablir la démocratie", parce que seule l'extrême droite la garantit. Même si l'Histoire nous a appris le contraire.
Ceux qui ne voient qu'impact négatif dans l'installation de migrants dans "votre ville ou village".
Ceux dont le premier objectif est de battre le parti d'Emmanuel Macron.
Ceux qui, sur un tract A4, présentant leur projet européen, sont capables de citer vingt fois les mots "France" et "Français".
Ceux qui voient tout en noir, agitent des peurs irrationnelles et pestent sur l'Europe responsable même des maux dont nous ne souffrons pas.
Ceux qui veulent rendre à la France sa grandeur en l'arrimant à ses racines chrétiennes.
Ceux qui sont contre toutes les propositions des principaux partis concernant l'U.E.
Ceux qui essaient de vous faire croire que la France ira beaucoup mieux quand elle ne sera plus dans l'U.E., qui sont sûrs qu'ils pourront alors supprimer la TVA sur les carburants, rétablir des frontières et l'ISF et qu'ils pourront alors augmenter allègrement le SMIC et les retraites .

Il aurait pu y avoir douze listes de plus. Elles ne se sont pas présentées faute de financement et/ou de candidats. On aurait alors eu quarante-six listes. Manque à l'appel - et on le regrette - une liste "Rassemblement des contribuables français". Elle avait déjà trouvé son slogan, particulièrement fin et tout en nuances: "Arrêtez d'emmerder les Français". Sans doute les candidats ont-ils décidé de mettre en œuvre eux-mêmes leur slogan.

Voilà deux semaines, sur Arte, on nous disait que "la campagne bat son plein". Peut-être était-ce le cas à Paris et dans quelques grandes villes, mais en milieu rural, c'est le calme plat. A part quelques rares affiches sur les trente-quatre emplacements que les mairies ont dû mettre à la disposition des listes, on n'a pas l'impression d'être à deux jours d'élections pourtant si importantes, où le RN-ex-FN-mais-toujours-d'extrême-droite est donné en tête. La fille à papa a réussi à faire croire que son parti est banalisé. Reste à espérer que les électeurs, qui n'ont évidemment pas le droit de prétendre qu'ils ne trouvent aucune liste qui leur convienne, se mobiliseront quand même ce dimanche.

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