mardi 9 novembre 2021

L'Europe du sexisme

"La liberté, c'est l'esclavage" proclame un des slogans du régime totalitaire de 1984, le terrifiant roman de George Orwell. Aujourd'hui, c'est le Conseil de l'Europe (1) qui affirme que la liberté, c'est la soumission. Des affiches présentent des jeunes femmes souriantes dont la moitié de la tête est voilée et l'autre pas. "Beauty is in diversity as freeedom is in hijab", nous dit-on, ajoutant que le monde serait sacrément ennuyeux si tout le monde se ressemblait et nous invitant à célébrer la diversité et à respecter le hijab. Oui, à respecter le hijab. Avec tout le mépris qu'on peut imaginer derrière ce slogan pour toutes les femmes qui, dans des pays islamiques, sont sommées de porter ce voile sous peine de prison, de violence ou même de mort. Pour elles, le hijab est l'exact contraire de la liberté. Vêtement politique (le dira-t-on jamais assez ?), il marque la soumission de la femme aux lois du Coran et à l'homme. Il indique une société patriarcale dans laquelle la femme doit tenir son rang qui ne sera jamais le premier. Il y a une bonne quinzaine d'années, j'avais reçu de l'imam de Ronse/Renaix un fascicule (que j'aurais dû conserver) de promotion du voile. Ce dernier était présenté comme un moyen de protéger, même contre son gré, cette perle qu'est la femme.
Le Conseil de l'Europe explique que ces visuels diffusés par tweets ont été réalisés par les participants d’un atelier "contre les discours de haine anti-musulmans" qui s’est tenu en ligne fin septembre, qu'ils ont fait "usage de leur liberté d’exprimer leur identité et leurs points de vue ", mais que leurs affiches ne représentent pas la position du Conseil de l’Europe ou de sa Secrétaire Générale". C'est pourquoi elles ont été retirées suite aux réactions indignées qu'elles ont suscitées principalement en France. 

"La campagne ne serait donc que le fruit de membres lambda de la société civile désireux de s’engager pour les droits humains ?, se demande l'hebdomadaire Marianne (2). Pas vraiment. Comme l’annonce d’ailleurs très ouvertement le site du Conseil de l’Europe, l’atelier en question a été organisé en collaboration avec le Forum of European Muslim Youth and Student Organisations (Femyso) », une association bien connue pour son lobbying pro-voile. « Le Femyso est la branche jeune d’une organisation réputée proche des Frères musulmans, l’Union des Organisations Islamiques en Europe (UOIE), qui représente le courant fondamentaliste de l’islam en Europe et dont l’objectif est de former une élite musulmane européenne », explique à Marianne Florence Bergeaud Blackler, anthropologue au CNRS et spécialiste des mouvements islamistes. D'autres participantes à l'atelier sont membres de l’European Forum of Muslim Women (EFMW), une émanation féminine de l’UOIE. Bref, des organisations fondamentalistes islamiques se sont bel et bien glissées dans les petits papiers du Conseil de l'Europe en parvenant ici à mener, sous couvert de lutte anti-raciste, une campagne sexiste.  

Naëm Bestandji, essayiste, auteur de Le linceul du féminisme, Caresser l'islamisme dans le sens du voile (Seramis) estime (3) que cette campagne cherche à "assigner toutes les musulmanes à la frange extrémiste de l'islam par la promotion de son étendard sexiste et patriarcal. L’objectif est l’avancée de cette idéologie totalitaire aux antipodes des valeurs défendues par les diverses instances européennes. Comment est-ce possible ? Depuis plusieurs décennies, les Frères musulmans considèrent l’Europe comme un territoire à conquérir. Cela passe d’abord par la réislamisation des musulmans et l’adaptation des pays européens aux demandes islamistes." L'essayiste considère qu'avec le voile, "outil politique de prédilection de l’islamisme," et la rhétorique d’inversion "les islamistes se présentent en défenseurs des droits humains, de la laïcité et de la liberté des femmes et en combattants de la lutte contre le racisme. Comme pour toutes les idéologies totalitaires, la jeunesse est une cible fondamentale." Et un de leurs outils est dès lors le Forum des organisations européennes de jeunes et d'étudiants musulmans (Femyso). "La jeunesse a toujours été une cible privilégiée de l’islamisme politique. Sa vision s’inscrit dans le temps long. Cette idéologie veut influer sur les futurs citoyens pour que, à moyen et long terme, l’islamisme soit mieux accepté. Obsédés sexuels et nostalgiques d’un patriarcat multimillénaire, le sexisme du voile est leur outil politique de prédilection." 

Les islamistes sont doués pour les tours de passe-passe. Ils sont parvenus à tétaniser une bonne partie de cette gauche qui se veut bien pensante et ne craint qu'une chose: passer pour raciste en étant critique par rapport à une injonction de l'islamisme. Résultat: en pensant lutter contre ce qu'elle appelle islamophobie, elle nourrit le sexisme et le machisme. "La femme est considérée comme un objet sexuel tentateur qui doit être caché sous un voile pour ne pas exciter la libido masculine, écrit encore Naëm Bestandji. Il n’existe aucun discours équivalent pour les hommes. Cette campagne s’enfonce dans l’abject lorsqu’elle partage un dessin animé de dix secondes qui met en scène des petites filles voilées avec le slogan unis dans la diversité. Le sexisme, le patriarcat et, ici, la sexualisation des fillettes sont présentés comme des formes de diversités à promouvoir… Le hijab est prescrit par les islamistes afin de cacher la femme pour des raisons sexuelles. Voiler une fillette est la considérer comme désirable (tout en la préparant au sort d'objet sexuel adulte qui l'attend). Cette campagne véhicule les idées les plus rétrogrades de l'islamisme. Elle banalise la pédophilie par la sexualisation des fillettes tentatrices."

Conclusion de l'essayiste: "nos sociétés, certaines plus que d’autres, ont mis des siècles à s’émanciper du poids patriarcal de l’Église catholique. Mais il semble que le patriarcat est comme la nature : il aurait horreur du vide. Ce que nous espérions être une histoire révolue est sur le point d’être remplacé par le patriarcat de l’intégrisme musulman. Le patriarcat a encore de beaux jours devant lui, grâce au soutien d’institutions européennes comme le Conseil de l’Europe, avec les deniers du contribuable, et pour la plus grande joie des islamistes."

(1) qui n'a rien à voir avec l'Union européenne.
(2) https://www.marianne.net/societe/laicite-et-religions/derriere-la-campagne-pro-voile-du-conseil-de-leurope-la-galaxie-des-freres-musulmans
(3) https://www.marianne.net/agora/tribunes-libres/pub-pro-voile-du-conseil-de-leurope-une-strategie-victimaire-centrale-pour-lislamisme

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