mercredi 11 mai 2022

Lever le pied

Il fait chaud, trop chaud pour la saison. Et beaucoup trop sec. Les nappes phréatiques sont insuffisamment rechargées. A ce jour, quinze départements français ont déjà franchi le seuil de vigilance. Ici, nous sommes en phase de vigilance et tous invités à économiser l'eau. Les agriculteurs sont très inquiets. Les récoltes s'annoncent déjà faibles. Les chenilles n'ont jamais été aussi nombreuses et dévorent les feuilles des fruitiers.
Ailleurs dans le monde, dans de nombreux pays d'Afrique notamment, la situation est totalement catastrophique. On ne se souvient pas y avoir vu tomber la pluie. Les récoltes sont réduites à néant. En Asie, les canicules risquent de tuer des millions de personnes, le seuil maximal de chaleur humide que l'homme peut supporter y est largement dépassé. " “Mourir de chaud” n’est plus seulement une expression en Inde et au Pakistan., écrit le HuffPost. Les deux pays de l’Asie du Sud subissent des vagues de chaleur sans précédent depuis deux mois. Les températures y sont infernales et atteignent un pic ce mercredi 11 à plus de 50°C. La chaleur, combinée à des niveaux élevés d’humidité, dépasse déjà le seuil limite de survie des personnes se trouvant à l’extérieur pendant une période prolongée"
La Sibérie est en feu, mais le président russe préfère, pour des raisons que lui seul comprend, faire la guerre à l'Ukraine, participant plus encore au réchauffement climatique et augmentant les risques de pénurie alimentaire.

Des mesures drastiques doivent être prises d'urgence pour, si pas inverser la tendance, au moins ralentir nos consommations d'énergie fossiles et donc notre production de CO2. Mais qui le veut vraiment ? Ni les gouvernements, ni la majorité des citoyens. Et pourtant... Si nous suivions les recommandations du GIEC et de l’AIE (l’Agence Internationale de l’Energie), "nous pourrions, à l’échelle européenne, réduire notre consommation de pétrole de 2.7 millions de barils par jour, ce qui équivaut à notre importation russe". C'est Bernard Keppenne, Chief Economist CBC Banque (qu'on imagine pas, a priori comme un écolo intégriste) qui le dit (1).
Nous pourrions, par exemple, dès demain, abaisser les limites de vitesse d’au moins 10 km/h sur les autoroutes. "Pourquoi donc ne pas imposer sur les autoroutes dans toute l’Europe une vitesse limitée à 110 km/h pour les voitures et à 90 km/h pour les camions, sans exception ? Et mettre en place, un maillage de radars pour éviter le moindre écart. Un système d’amendes progressives pourrait être imposé et les montants ainsi récoltés pourraient approvisionner un fonds d’aide aux plus précarisés et les plus touchés par la hausse des prix de l’énergie." Le gouvernement français avait, il y a quelques années, imposé une vitesse maximale sur les routes de 80 km/h. Mais devant la levée de boucliers du lobby automobile ardemment soutenu par les Gilets jaunes il avait battu en retraite et laissé la main aux départements qui, nombreux, ont courageusement décidé de rétablir la limite à 90 km/h. Des automobiles vivant en milieu rural affirmaient qu'ils n'avaient "pas le temps de rouler moins vite". Demain, auront-ils le temps de lutter contre les incendies qui menaceront leurs maisons ? Faire passer la limitation de vitesse sur autoroute de 130 à 100 km/h revient à diminuer de 15% nos consommations de carburant et dès lors notre pollution (et nos dépenses). Les Américains et les Canadiens qui circulent dans des espaces autrement plus vastes que les nôtres n'ont pas l'air particulièrement malheureux d'être limités à 100 km/h.

Selon l’AIE, "l’instauration d’un jour de télétravail par semaine permettrait de réduire la consommation de pétrole d’environ 170.000 barils par jour. À court terme, l’instauration de trois jours de télétravail par semaine permettrait de la réduire d’environ 500.000 b/j".
Autre mesure proposée : sortir la voiture des centres urbains. Si les voitures ne circulaient pas dans les grandes villes européennes les dimanches, ce sont 380.000 b/j qui seraient économisés à court terme. Ce qui ferait le plus grand bien aux inertes que nous sommes devenus en nous poussant à marcher et à rouler à vélo. Et à prendre des transports en commun qui doivent être rendus plus abordables.

Autres mesures à encourager :  le covoiturage et le choix du train à grande vitesse ou des trains de nuit plutôt que de l’avion chaque fois que c'est possible. "Selon l’AIE, ces mesures appliquées dans l’ensemble des pays avancés permettraient en quatre mois de réduire la consommation de pétrole de 2.7 millions b/j, ce qui représente ce que l’Europe importe comme pétrole de Russie. Et si ces mesures ne sont pas justes limitées à quatre mois, mais définitivement imposées, tout en étant évidemment accompagnées des mesures que le GIEC demande de prendre urgemment dans tous les autres secteurs, elles permettront d’accompagner la transition énergétique. Il s’agit en plus de mesures facilement adaptables pour nos sociétés et que les consommateurs peuvent intégrer dans leur quotidien sans que cela soit perçu comme brutal et ingérable. Cela demande juste à nos gouvernements d’adopter ces nouvelles normes de façon concertée. L’Europe a montré avec la guerre en Ukraine qu’elle est capable d’adopter une position commune et le défi climatique ne pourra se résoudre que tous ensemble."

On le sait, les gouvernements sont très réticents à prendre des mesures qui pourraient fâcher leur électorat Sauf si les citoyens agissent en citoyens responsables plutôt qu'en enfants gâtés qui veulent que soient prises des mesures de lutte contre le réchauffement climatique qui ne modifient en rien leurs habitudes assassines pour la planète et ses habitants. 

(1) https://www.lalibre.be/debats/opinions/2022/05/10/il-netait-pas-utopique-de-reduire-facilement-notre-consommation-de-petrole-de-27-millions-barilsjour-DQ3QFE6GMFCLTI6AU22LGTOJ44/ 

Aucun commentaire: