mardi 27 octobre 2009

Les outils de communication tuent

Il est temps de faire la balance entre PIB et PEB, entre Produit Intérieur Brut et Produit Extérieur Brutal.

Un reportage GEO des journalistes Mesouda et Le Gléau, diffusé sur Arte le 24 octobre, nous emmène au Ghana, "notre" poubelle électronique. De très jeunes enfants, des ados, des jeunes et des moins jeunes y retraitent les écrans, les ordinateurs, les télévisions abandonnés par l'Occident. Des bateaux entiers y déversent chaque semaine des montagnes de poubelles, hypocritement baptisées dons caritatifs! Ce qui permet de contourner l'interdiction édictée par la Convention de Bâle. Ces dons ont officiellement pour objectif de réduire la facture numérique et de créer de l'emploi. Les traficants de déchets (et tous ceux qui les soutiennent en fermant les yeux sur le devenir de leur propres déchets... nous, par exemple) jouent les mécènes! En réalité, les fabricants de tous ces appareils considèrent que le recyclage leur coûte trop cher. Et n'est bon que pour les Africains.
Au Ghana, seuls 22% de ces déchets qui ne disent pas leur nom sont réparés, le reste, 78%, part en décharge pour y être retraité.
En fait de retraitement, les ghanéens brûlent les ordinateurs pour en récupérer le cuivre, le laiton, l'aluminium, le zinc. Qui leur sont payés trois à quatre fois moins chers qu'ils ne sont revendus ensuite. Cette incinération de dons caritatifs provoquent des fumées noires, extrêmement toxiques qui survolent ce quartier d'Accra sept jours sur sept, vingt-quatre heures sur vingt-quatre. L'air, l'eau, les sols sont pollués. De récents prélèvements de Greenpeace ont indiqué d'inquiétants taux de plomb, de mercure, de cadmium, de PVC... Les enfants et tous les "retraiteurs", outre qu'ils se blessent en cassant les écrans, souffrent de cancers, de troubles du système nerveux, de problèmes respiratoires. Les poissons meurent. Un journaliste ghanéen qualifie de "criminelle" cette attitude des pays du nord.
Le passage à la télé numérique et aux écrans plats annoncent des montagnes de nouveaux dons caritatifs au Ghana. La fracture numérique, tout le monde s'en tape, la fracture humaine est béante.

Et quand ce ne sont pas les hommes que nous tuons, ce sont les grands singes. Dans "C'est vert et ça marche!"*, le biologiste Jean-Marie Pelt explique qu'au Congo les quelque six cent gorilles de montagne restants sont menacés par l'exploitation forestière et minière, à cause des ressources du pays en tantale, métal nécessaire à la fabrication des téléphones portables. La forêt disparaît et avec elle les gorilles. Leurs cousins du Rwanda et d'Ouganda vivent les mêmes situations. Les mineurs, on s'en doute, sont mal payés et travaillent dans des conditions misérables et dangereuses.

Et si on appliquait - réellement - le coût vérité des déchets? A quoi ressemblerait notre sacro-saint Produit Intérieur de Brutes...?

* Fayard, 2007

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