lundi 13 octobre 2014

De l'indignation

Un avis, encore un, en écho aux réflexions de toutes les âmes bien pensantes qui aiment croire que tout est simple, qu'il y a d'un côté ces méchants musulmans de Daech et les gentils partout ailleurs. L'avis donc de Hassan Jamali, auteur de Coran et déviations politiques (1). "Un grand malaise, écrit-il (2) s'installe parmi les musulmans, dans les pays musulmans et aussi dans les pays occidentaux où vivent des musulmans. Dans les pays musulmans, les groupes islamistes représentés par les Frères musulmans critiquent Daech sans avouer que ce dernier ne fait qu'appliquer, à sa façon, leur théorie de l'Etat islamique à construire." L'auteur exprime son malaise face à l'indignation du grand mufti de La Mecque qui condamne l'EIIL pour des pratiques "contraires à l'islam", mais pas l'Etat saoudien qui vient de condamner à dix ans de prison, mille coups de fouet et l'équivalent de 214.000 euros un jeune homme qui défendait la liberté religieuse. Il constate que le grand mufti ne dit pas en quoi l'idéologie des groupes djihadistes diffère de celle du pouvoir saoudien. Il rappelle que "le pouvoir des talibans et d'autres autorités islamiques n'ont pas provoqué beaucoup d'indignation, chez les musulmans, malgré les exécutions des penseurs ou la lapidation des femmes adultères, ou lorsque ces pouvoirs imposaient le port du voile à toutes les femmes de leur pays". Il rappelle que de trop nombreux musulmans, même dans des pays occidentaux, ont appelé à mettre à mort Salman Rushdie ou les dessinateurs de caricatures du prophète. C'est la domination de la doctrine intégriste wahhabite sur l'islam aujourd'hui qui explique, selon lui, le malaise provoqué par le succès de Daesh et la participation de milliers de jeunes Occidentaux au djihad.
Hassan Jamali termine son article par un appel: "Les conditions minimales d'un islam moderne (et non pas modéré) sont les suivantes: il suffit de croire en Dieu et en son prophète pour être musulman; rompre tout lien entre politique et religion; désacraliser le texte coranique; déclarer que les versets violents sont inopérants; et déclarer caduques les lois de la charia".
Dans le même temps (et le même Courrier international), un journaliste saoudien, Shagran Al-Rashidi (3), appelle à classer comme criminels les propos tenus sur Internet, et notamment sur Facebook, par des groupes athées et en particulier l'Association des athées saoudiens. Criminels justes parce qu'ils osent mettre en doute l'existence de Dieu.

A propos de la participation de jeunes Occidentales au djihad, le billet de Sophia Aram, sur France Inter ce matin: www.franceinter.fr/emission-le-billet-de-sophia-aram-malala-vs-les-dindes

(1) (Editas, édition de l'AS - co-auteur aussi de Religions et laïcité (Fides)
(2) L'Arabie saoudite au banc des accusés, publié par Le Devoir, Montréal, 15 septembre 2014, in Le Courrier international, 2 octobre 2014.
(3) Au secours, notre jeunesse se détourne de l'islam, publié par Sabq (site internet), Riyad, 18 août 2014, in Le Courrier international, 2 octobre 2014.

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