mardi 31 octobre 2017

Noires écoles

A quoi sert l'école? Bien sûr à apprendre à lire et à écrire et à acquérir des connaissances scientifiques, mais aussi à apprendre à être critique, à cultiver le doute, à être autonome.
On est dès lors en droit se poser cette question: les écoles islamiques sont-elles des écoles? Le sont-elles encore les écoles, publiques ou privées, qui cèdent aux revendications islamiques, qui acceptent de ne pas enseigner (ou en tout cas de juste évoquer) la théorie de l'évolution, qui acceptent que filles et garçons soient séparés, que les filles soient cachées?
"Il faut être plus vigilant avec tout ce qui se fait en Europe, affirme la physicienne tunisienne Faouzia Farida Charfi (1), tous ces cours qui se donnent en parallèle de l'école en France, où l'on prétend enseigner l'islam. Je m'interroge. Quel islam est enseigné? Est-ce que ce sont des principes de solidarité, du vivre-ensemble? Ou bien attaque-t-on dans ces cours des théories scientifiques qui seraient contraires à la religion?". La physicienne s'effraie des islamistes "qui n'acceptent de savoir que le savoir islamique". Elle s'intéresse à la question de la science et de la religion depuis les années '70, depuis qu'elle a vu certains de ses étudiants refuser la théorie de la relativité restreinte: "ils n'acceptaient pas que la lumière puisse avoir une vitesse finie. La lumière ne pouvait être qu'infinie puisqu'elle relève de Dieu, c'est l'absolu." Aujourd'hui, elle voit des étudiants qui ne veulent "pas admettre d'autres vérités que la vérité de la Révélation", qui n'acceptent pas "qu'il puisse y avoir des  vérités scientifiques qui s'imposeraient indépendamment du fait religieux".

Dans les villes et les régions qu'il a dominées, le pseudo Etat islamique réduisait l'éducation des filles à l'école à l'étude du Coran et de la charia et à la couture et au tricot. Dans les livres scolaires du "Ministère de l'Education" de l'E.I., "les exercices d'anglais font tous référence au djihad et à la guerre. Les enfants apprennent apple comme gun, bazooka et mujahidin" et "le sens du mot woman se comprend par l'image d'une silhouette toute de noir vêtue" (2).
Mais il n'y a pas qu'à Raqqa ou à Mossoul que l'éducation s'est transformée en outil de régression et d'enfermement: "nos collégiennes se transforment en authentiques Belphégor", constate catastrophé un ancien principal de trois collèges des quartiers nord de Marseille. "Les garçons ainsi que les filles se mettent tous à pratiquer le ramadan et à réclamer de la nourriture halal. Sous peine d'être ostracisés, parfois battus par les plus violents du collège..." (3) Les responsables: des assocations d'aide aux devoirs, "financées par les collectivités locales dans le cadre du DSU (dotation de solidarité urbaine). Très proches parfois des imams les plus radicaux, notamment des salafistes, elles sont composées de jeunes gens qui, sous prétexte de charité, en profitent pour faire du prosélytisme exacerbé. C'est discret, assez sournois, mais terriblement efficace." Reste aux responsables des écoles concernées à tenter d'éviter le pire, à refuser le niqab à l'école, à déconstruire les propos haineux vis-à-vis des catholiques et des juifs, à respecter le programme des cours malgré les moqueries ou les insultes. Pas simple quand on constate que les "barbus" pratiquent l'infiltration: le même principal s'est ainsi rendu compte qu'un de ses meilleurs surveillants (un gars génial, sympa, cultivé, drôle) diffusait au sein du collège un livre, édité en Arabie saoudite et interdit en France, qui conseille de "lapider les femmes adultères et de couper les mains des voleurs". Le surveillant si sympa fréquentait la mosquée la plus radicale et la plus haineuse de Marseille.
Pauvreté sociale et pauvreté culturelle vont de pair. "C'est la misère qui fait le lit de l'islam radical", constate une prof de langue, musulmane peu pratiquante, qui pointe du doigts les imams manipulateurs qui prêchent la haine de la France. Moins les élèves seront instruits et critiques, plus ils seront sous la coupe des mosquées radicales. Quelle est donc cette éducation qui ne vise pas la lumière mais l'obscurité?

Heureusement, il existe des écoles en pays musulmans qui se donnent pour objectif de combattre l'obscurantisme religieux. Ainsi dans le plus grand d'entre eux, l'Indonésie. Là, des écoles enseignent l'égalité des genres en s'appuyant sur le Coran. D'après la directrice de l'école Diniyyah Puteri, créée il y a près de cent ans, "la parité entre les hommes et les femmes, aussi bien dans le domaine spirituel que dans la vie publique, est consignée dans le verset 97 de la sourate An-Nahl" (4). Une autre de ces écoles interdit à ses élèves de se marier à un âge précoce. "Chaque musulman et musulmane a le devoir d'étudier le plus longtemps possible", estime son directeur. L'éducation dans ces établissements enseigne aussi à ses élèves "à ne pas différencier les gens en fonction de leur ethnie, de leur religion ou de leur sexe." Une directrice explique que son école "invite ses élèves à étudier des courants de pensée différents de celui auquel ils adhèrent. De cette manière, ils peuvent approcher d'autres interprétations et apprendre à ne pas clamer que la leur est la seule valide."

Pendant ce temps, en Turquie, "les enseignants peuvent être incarcérés sans raison", tandis que le nombre d'élèves des écoles de formation d'imams et d'enseignement religieux explose: on en comptait 63.000 en 2000, ils sont plus d'un million aujourd'hui (5). 
Pendant ce temps, en France, en Belgique, en Grande-Bretagne et dans bien d'autres pays occidentaux, de bonnes âmes plaident pour que l'enseignement dans nos pays prenne en compte les spécificités de l'islam. Ce qui reviendrait à dire que les étudiants et étudiantes de culture musulmane ne soient pas formés à certaines sciences et que les filles ne soient formées qu'à quelques très rares professions. 
Pendant ce temps, une famille comme la famille Merah vit repliée sur elle-même, ne suivant que la loi coranique plutôt que celle de la République que certains de ses membres veulent "mettre à genoux". Un enfermement qui a fabriqué les assassins que l'on sait.
Tout le monde, ou presque, s'accorde à le dire: on ne sortira de l'islamisme et de sa violence que grâce à l'éducation. 
On voit par là qu'il y a urgence à soutenir l'école dans sa mission de base: rendre intelligent. Et  à chasser les professeurs d'obscurité et de haine.

(1) "Faouzia Farida Charfi", propos recueillis par Nicolas Delessale, Télérama, 4 octobre 2017.
(2) "Mossoul - Les femmes outragées, martyrisées, mais enfin libérées", Laurène Daycard, Causette, juin 2017.
(3) "Dieu rackette dans les cours d'école", Claude Ardid et Nadège Hubert, Charlie Hebdo, 13 septembre 2017.
(4) "Indonésie. Pour des femmes éduquées", Prihandoko, Andri el Faruqi, Nofika Dian Nugroho, Ivansyah et Eko Widianto, Tempo (Djakarta), 26.6.2017, in le Courrier international, 5.10.2017.
(5) "La Turquie est devenue un pays paranoïaque", Elif Shafak, The New York Times Syndicate, in le Courrier international, 12.10.2017.

1 commentaire:

Grégoire a dit…

Le film "Le cercle des poètes disparus" illustre cette démarche de vouloir faire plus qu'apprendre à lire, à écrire... Avec pour principal résultat, un suicide... La société veut bien de citoyens intelligents, mais pas trop quand même.
"C'est la misère qui fait le lit de l'islam radical", constate une prof de langue. Faux, madame. L'Arabie Saoudite est très riche et ne passe pas pour être la plus souple dans la pratique de l'Islam au quotidien. Néanmoins, je pense que dans une société économiquement faible, devenir imam est probablement l'assurance d'un emploi fixe rémunéré. De même, je ne puis m'empêché de douter parfois, un peu, de l'engagement des prêtres d'origine africaine. Cette infiltration que vous évoquez est à l'origine recommandée par l'Islam sous sa forme défensive et est appelée "Taqiya". Il s'agit de dissimuler sa foi pour éviter les persécutions. Evidemment, ces dernières décennies, sa définition, suivant le côté où l'on se trouve (islamophobe, djihadiste, mécréant, etc.), a évolué. Quant à savoir pourquoi, vivant au milieu des mécrants, il y a de plus en plus de musulmans conservateurs qui semblent ne plus supporter cette promiscuité avec le mode de vie occidental mais qui préfèrent quand même cette situation à celle d'être dans un pays peuplé de leurs corelégionnaires... Saint-Ambroise a dit "Si tu vis à Rome, vis comme les Romains".
Je constate qu'autour de moi il y a de plus en plus d'agacement (au mieux) face aux multiples revendications, alimentaires, vestimentaires, sociétales, etc. qui se font au nom de l'Islam.
Ceci dit, en matière de Science, l'Eglise Catholique a longtemps été rétrograde. Un exemple, en passant, les illuminations, grâce à l'éclairage électrique, au Vatican lors de fêtes en 1885 furent dénoncées comme profanes. Il m'est arrivé de regarder l'émission juive sur France 2, le dimanche matin, par hasard, au gré de mes errances télévisuelles, et j'ai trouvé que les rabbins y faisaient preuves d'une capacité d'adaptation assez remarquable par rapport aux découvertes scientifiques. Ainsi, ils pouvaient concevoir la théorie de l'évolution comme valable car Yaveh a fait en sorte que l'homme apparaisse selon cette évolution et que son créateur se soit révélé à lui lorsque ce dernier fut complètement homme, c'est à dire en mesure d'assimiler cette révélation. C'est quand même plus sympa d'entendre ça que le crépitement d'un bûcher...