mardi 20 novembre 2018

Le désert gagne

La France rurale se désertifie. Entendez par là que les jeunes s'en vont là où ça brille, là où il y a de la lumière, des commerces, des écoles, un bon réseau téléphonique et peut-être du travail. Suite logique de cet exode, les maternités tournent au ralenti. Ce qui arrange visiblement assez bien les responsables publics de la santé qui s'empressent de fermer des institutions considérées comme non rentables. Que les mères aillent accoucher ailleurs. Plus loin. Et qu'elles possèdent une bonne voiture pour aller jusque là. Des associations de citoyens à raison fâchés se constituent au Blanc, à Vierzon, dans différentes villes qui voient fermer leur maternité. Elles dénoncent la spirale: sans maternité à proximité, les jeunes couples risquent de se rapprocher des villes, plus sécurisantes à certains égards. Les écoles rurales fermeront, faute d'enfants en nombre suffisant. Les commerces feront de même. Les gares aussi.

Reste que la fermeture de maternités est aussi (d'abord?) due à un manque de médecins. Ils font comme les jeunes, vont là où ça brille. Dans les grands centres hospitaliers ou dans le midi. Mieux vaut ne pas être malade en Moselle, dans le Finistère ou dans l'Indre. Certains médecins sont attirés en France depuis la Roumanie. Au détriment de la population roumaine. On lutte contre la désertification médicale en en créant une autre. Alors que jamais autant de médecins n'ont été diplômés en France.
Les enseignants et tant de fonctionnaires travaillent là où leur autorité de tutelle les désigne. Pourquoi n'en serait-il pas de même pour les médecins? Leurs longues et coûteuses études sont en bonne partie payées par la collectivité. Il ne serait que logique que les médecins, durant une période au moins égale à celle de leur formation, paie une part de leur dette à la société en se rendant utiles là où ils sont attendus.

Les gilets jaunes grognent et tempêtent contre le prix des carburants. Nous n'avons pas d'autre alternative que la voiture individuelle pour aller travailler, disent-ils. Ce qui est parfois vrai, parfois pas. Le confort qu'offre notre sacro-sainte bagnole nous a donné de mauvaises habitudes, polluantes à bien des égards. Le co-voiturage reste trop peu pratiqué. Des bus circulent parfois vides ou presque. Et le télétravail n'est pas assez développé. Il éviterait des déplacements que les moyens informatiques actuels rendent parfois inutiles.
Qu'on le veuille ou non, il va bien falloir admettre que pour des raisons tant écologiques qu'économiques le temps de l'usage immodéré de la voiture individuelle est terminé.

Il est urgent de monter de vrais projets de territoire, à partir d'une réflexion globale liant lutte contre la désertification, production alimentaire locale, mobilité, travail à la campagne (notamment via le télétravail dans des espaces de co-working), santé, formation, valorisation et préservation des ressources locales. Il est urgent de penser autrement. De vivre autrement.
Vivre et travailler au pays, réclamait-on en 1977. Quarante ans après, c'est le seul choix que nous pouvons faire. 


2 commentaires:

Bernard De Backer a dit…

Parfaitement d'accord sur le fond, mais je pense qu'il y a une autre dimension que la mobilité au phénomène des gilets jaunes.

J'ai beau lire le tsunami d'articles sur le sujet, je n'en vois pas un seul qui pointe le fait qu'il s'agit surtout de "petits et moyens blancs" exprimant leur colère. La France de la diversité semble absente de ces manifestations. Ce n'est pas un fait négligeable à l'heure du populisme occidental, qui est avant tout un phénomène de défense des vieux nationaux blancs contre les "nouveaux entrants" (ou entrés) colorés. Le jaune semble être un tenant-lieu du blanc. Les gilets jaunes sont des gilets blancs. Aurais-je mal vu ?

Michel GUILBERT a dit…

On voit quelques personnes noires ou visiblement d'origine maghrébine. Mais peu, c'est vrai. On les retrouve plutôt parmi les forces de l'ordre. Où chez ceux qui doivent nettoyer et réparer ensuite, après les saccages....