mercredi 22 février 2023

Vlad le petit

Quelle déception ! On croyait avoir affaire à un homme, un vrai, et voilà qu'on découvre que Vladimir Poutine n'est qu'un petit garçon qui ne sait pas assumer ses actes. C'est pas moi, dit-il, c'est pas moi qui ai voulu cette guerre. C'est les autres qui ont commencé et qui m'ont attaqué, m'sieur. I veulent me prendre mon pays et c'est qu'une bande de pédés. Son discours d'hier (1) était interminable, mais, si on le comprend bien, il se résume à cela. On rirait de ces propos à la fois violents et ridicules si la situation n'était pas aussi dramatique. Toujours les mêmes arguments qui ne convainquent que ceux qui ont envie d'y croire. Les Occidentaux sont méchants, alors que nous, on est gentils. Ils sont "hypocrites", "corrompus", "russophobes", alors que nous, on est des modèles d'honnêteté, que la corruption, on ne sait même pas à quoi ça peut ressembler et qu'on déborde d'amour pour les autres. 
Pour Poutine, les pays occidentaux sont en pleine « dégénérescence ». La preuve, c'est que "même la pédophilie (y) est devenue normale". Pour le père La Pudeur, il n'y a rien de pire que le mariage homosexuel. Le massacre d'enfants ne le dégoûte pas, deux hommes qui s'embrassent, oui. "Les textes sacrés sont remis en question, s'indigne-t-il. La famille est l’union d’un homme et d’une femme ». Les textes sacrés disent "tu ne tueras point", mais Poutine le marchand de mort exclut de ce précepte toutes celles et tous ceux qui contreviennent à sa morale et à ses ambitions dévorantes. Son respect des textes sacrés est à géométrie variable. La seule vie qui soit sacrée est la sienne.

Son discours était diffusé en direct dans tout le pays, notamment sur de nombreux écrans géants disposés dans l'espace public. On pense aux télécrans de 1984 qui diffusent en permanence la pensée du Parti. On pense aux slogans de la novlangue : « La guerre, c'est la paix »,  « La liberté, c'est l’esclavage », « L'ignorance, c'est la force ». Pour Poutine, cette "intervention militaire spéciale" en Ukraine est une entreprise de libération, l'assujettissement qu'il veut imposer aux Ukrainiens les rendra plus libres et les mensonges qu'il distille quotidiennement aux Russes les rendent plus forts. Pour lui, le mensonge, c'est la vérité ; la démocratie, c'est le nazisme et les erreurs sont de la justesse.

— Berezovsky fit une pause puis reprit. "Il ne s'arrêtera jamais, n'est-ce pas ? Les gens comme lui ne le peuvent pas. C'est la première règle. Persévérer. Ne pas corriger ce qui a déjà fonctionné, mais surtout ne jamais admettre les erreurs. (...)
— Peut-être, Boris, mais ce n'est pas de la barbarie : ce sont les règles du jeu. La première règle du pouvoir est de persévérer dans les erreurs, de ne pas montrer la plus petite fissure dans le mur de l'autorité."
Giuliano Da Empoli, "Le Mage du Kremlin", Gallimard, 2022.

Note : On ne sera pas surpris d'apprendre que Poutine a résilié son abonnement à Charlie Hebdo après avoir découvert la une de ce jour.

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