samedi 11 février 2012

Le noir manteau de l'hiver

L'hiver sert de révélateur. Qui savait qu'autant de Belges vivaient dans des conditions aussi précaires? L'opération "Hiver 2012", lancée par la RTBF (avec, hélas parfois, des sujets aussi misérabilistes que moralisateurs), aura permis de découvrir - si on l'ignorait - qu'ils sont de plus en plus nombreux celles et ceux qui n'arrivent plus à joindre les deux bouts. En particulier celui du mois qui n'en finit pas de se terminer et celui du suivant qu'on attend impatiemment. Il y a les "sans logis". Et il y a aussi les "avec logis", mais non chauffé ou inchauffable, ou les deux.
On est sidéré de constater qu'en 2012, presque quarante ans après la première crise pétrolière, tant de maisons, tant de logements sociaux, tant d'écoles ne sont pas isolés, sont équipés de simples vitrages, sont chauffés au mazout (parfois avec des chaudières du paléolithique) dont on sait depuis une éternité que les cours ne cessent et ne cesseront de s'envoler.
A qui la faute? Aux pouvoirs publics, d'une part, qui n'ont sans doute pas suffisamment investis et permis d'investir dans l'isolation et d'autres moyens de chauffage. Aux propriétaires, d'autre part. Il y a les propriétaires qui se contentent d'encaisser des loyers (parfois pour des logements qu'il serait plus indiqué de qualifier d'abris) sans investir un centime en confort et en économies d'énergie. Les conditions climatiques actuelles font apparaître les négriers du sommeil. Et il y a les propriétaires qui habitent leur propre maison. La société de consommation qui est la nôtre, et qui montre chaque jour un peu plus son absurdité, nous pousse à nous procurer toujours plus d'appareils informatiques, de téléphones portables, de home-cinémas, d'appareils électro-ménagers. Plutôt que de nous inciter à investir dans l'absence de pertes énergétiques. Et donc dans la lutte contre le gaspillage et dans l'économie.
En 1973, lors de la première crise du pétrole, les autorités nous avaient imposé les "dimanches sans voiture". On en garde un souvenir réjoui. Quel gouvernement oserait aujourd'hui, où le problème de l'énergie est plus criant que jamais, prendre la même mesure? Plutôt des dimanches sans voiture, des dimanches sans foot sur pelouse chauffée, des dimanches sans piscine tropicale surchauffée que des semaines sans chauffage. Il suffirait de cinq minutes de courage politique. Mais la croissance mène la danse. La croissance du gaspillage, la croissance de la consommation de tout et n'importe quoi, la croissance de l'absurdité, la croissance du mépris pour des situations sociales inacceptables. Mais bien réelles.

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