jeudi 26 février 2015

Comptoir national

Il y a un intellectuel au Front national. C'est le vice-président du parti, Florian Philippot. C'est donc lui qui est envoyé au (et par le) front pour rencontrer les journalistes et les auditeurs de cette radio intello qu'est France Inter (1). Patrick Cohen s'étonne qu'il y ait tant de "dingues" parmi les candidats du FN (2). Il y a des moutons noirs, mais allez voir dans les autres partis, il y en a autant, répond Philippot. Il faut sortir de l'euro pour créer de l'emploi; remettre des frontières un peu partout, politiques et économiques; supprimer le permis à points (les automobilistes sont les vaches à lait de l'Etat); supprimer la loi Evin (l'Europe veut la mort du vin français). L'Ukraine est aux mains de nazis et Bernard Guetta la voix des Etats-Unis. N'a-t-on pas le droit d'aimer la France qui est si belle et son peuple si intelligent? Hein? Bref, que nous dit l'intellectuel du parti de la famille Le Pen? Ce qu'on peut entendre au comptoir de n'importe quel bistrot à l'heure de l'apéro. Un ramassis de lieux communs populistes. La politique pour les simpl(ist)es. 

Il me semble que je commence à savoir ce que le mot national porte en lui de malheur. Il me semble que je commence à savoir que, chaque fois qu'il fut brandi par le passé, et quelle que fût la cause défendue (Rassemblement national, Ligue de la nation française, Révolution nationale, Rassemblement national populaire, Parti national fasciste...), il escorta inéluctablement un enchaînement de violences, en France comme ailleurs. L'Histoire, sur ce point, abonde en leçons déplorables.
Ce que je sais, c'est que Schopenhauer déclara en son temps que la vérole et le nationalisme étaient les deux maux de son siècle, et que si l'on avait depuis longtemps guéri du premier, le deuxième restait incurable. (...)
Bernanos se défiait lui aussi de l'usage abusif du mot nation dont ses anciens amis se gargarisaient. "Je ne suis pas national (disait-il) parce que j'aime à savoir exactement ce que je suis, et le mot national, à lui seul, est incapable de me l'apprendre. (...) Il n'y a déjà pas tant de mots dans le vocabulaire auxquels un homme puisse confier ce qu'il a de précieux, pour que vous fassiez de celui-ci une sorte de garni ou de comptoir ouvert à tout le monde.
Lydie Salvayre: Pas pleurer (Prix Goncourt 2014), Seuil, pp. 94-95

(1) Ce jeudi 26 février, 8h20-9h.
(2) Voir "Le parti du diable angélique", 24 février 2015.

Post-scriptum: à ceux qui doutent que le FN soit encore un parti d'extrême droite, cet article de Libé - attention au risque d'écœurement: www.liberation.fr/politiques/2015/02/27/islamophobie-homophobie-la-compilation-des-derapages-fn_1210335
Post-scriptum 2: si vous en voulez encore... A chaque jour suffit sa haine:
www.huffingtonpost.fr/2015/03/03/candidat-fn-elections-departementales-2015-propos-racistes-homophobes_n_6791716.html?utm_hp_ref=france
www.huffingtonpost.fr/2015/03/03/homosexualite-zoophilie-candidat-supendu-fn_n_6793898.html?utm_hp_ref=france


1 commentaire:

Didier L. a dit…

De chez Chevènement à chez MLP, un parcours souverainiste. Il faudrait voir l'espace politique comme à deux dimensions, comme sur un plan. Parce qu'avec une seule, une droite avec un point centrale, une droite et une gauche, on ne peut pas représenter ce type de parcours. Mettons en ordonnée le souverainisme et on aura une distribution plus parlante.