lundi 21 septembre 2015

Adieu, veaux, vaches, cochons

Les agriculteurs, belges, français, allemands et bien d'autres en Europe sans doute, sont désespérés. Ou plutôt des agriculteurs sont désespérés. Ceux ne peuvent vendre leurs produits à prix coûtant. Et ils sont nombreux. Ce sont ceux qui ne sont plus éleveurs ou agriculteurs, mais fabricants. Ceux qui fabriquent de la viande ou du lait comme ils fabriqueraient des voitures, des casseroles ou des boîtes en plastique. L'animal n'est qu'un produit industriel et pour le fabriquer toutes les méthodes sont bonnes, celles qui passent par l'empoisonnement de la terre, la pollution des cours d'eau et des nappes phréatiques, la mise en danger de la santé des agriculteurs. Allez savoir pourquoi, on n'arrive pas à éprouver la moindre compassion pour ceux qui font (sur)vivre des truies sur du béton, coincées entre des barreaux qui les empêchent de se retourner, pour ceux qui parquent des vaches dans des usines où elles tournent en rond reliées à des trayeuses, pour ceux qui arrosent de pesticides leurs terres. On n'arrive pas à se sentir solidaire d'agriculteurs qui jettent sur la route les produits de leurs confrères de pays voisins sous prétexte qu'il ne faudrait vendre dans leur pays que leurs propres productions et qui dans le même temps se plaignent que des marchés étrangers leur soient fermés.
Ceux-là poursuivent leur course folle et aveugle qui les mène dans une impasse qui donne sur un gouffre. L'agriculture productiviste est sans issue. Ils reprochent aux pouvoirs publics de ne pas les aider. Alors que c'est précisément ce type d'industrie mortifère qu'il faut cesser de soutenir. Certains agriculteurs ont récemment muré les entrées de l'adminstration de leur Région. Ils se trompent de cible. C'est à leur propre syndicat, la FNSEA, qu'ils devraient s'en prendre. Un syndicat qui les pousse à s'endetter toujours plus, à produire toujours plus de lait, de viande qu'ils ne pourront vendre, le tout sous la conduite d'un président à la tête d'un puissant empire agro-indsutriel et financier. (1)
Cette agriculture-là, loin de se remettre en question, poursuit dans la même voie suicidaire. Après la Ferme des 1000 Vaches, voici celle des Mille Veaux, sur le plateau de Millevaches (2): un atelier d'engraissement industriel de 1400 veaux (3).
Quel est le sens de l'agriculture? Certainement pas de vendre des produits industriels à l'autre bout de la planète. Mais de vendre au plus près de chez soi, à travers des circuits courts, des produits alimentaires respectueux de l'environnement, des animaux, des agriculteurs et des consommateurs. Quel sens y a-t-il à vendre des choux, des tomates, du lait ou de la viande à l'autre bout de l'Europe? Ce monde-là aussi a été rendu fou.

A lire: Lettre à un paysan sur le vaste merdier qu'est devenue l'agriculture, de Fabrice Nicolino, éditions Les Echappés, 2015.

(1) http://www.liberation.fr/economie/2015/09/03/xavier-beulin-le-cereale-killer-de-la-fnsea_1374527
(2) Ces vaches-ci ne sont pas des bovins: Millevaches signifie mille sources
(3) pétition sur http://stop-1000veaux.agirpourlenvironnement.org/



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