mardi 15 mars 2016

Plus d'Europe

L'Union européenne n'a pas bonne mine ces derniers temps. Face à l'afflux de réfugiés, elle se montre extrêmement frileuse et ferme sèchement ses portes. Certains de ses membres vont jusqu'à reprocher à la Grèce d'être située trop près de la Turquie et d'avoir trop de côtes.
Il en est une, heureusement, qui sauve l'Europe de la honte: c'est Angela Merkel qui n'a pas hésité à prendre ses responsabilités en ouvrant largement les portes de son pays aux candidats réfugiés. Si la présidente de la CDU a perdu les élections régionales dimanche dernier, la chancelière a cependant gagné, estime Daniel Cohn-Bendit (1). Ceux qui la soutiennent, en dehors de son parti, notamment les Verts, l'ont largement emporté dans certains lander. L'ancien eurodéputé relativise la montée de l'extrême droite: il y a toujours eu une Allemagne moisie, dit-il, comme il y a une France moisie, une Italie moisie. Il constate que la politique d'Angela Merkel est soutenue par 75 % des Allemands. Même si elle a peut-être été imprudente, mais dit-il, "je préfère une imprudence morale à une prudence immorale".
En attendant, la défiance envers l'Europe augmente. La Grande-Bretagne se prépare à un référendum sur sa place dans l'Europe. Les Britanniques installés en France, en Espagne et ailleurs en Europe s'inquiètent: quel sera leur sort demain si le Royaume-Uni quitte l'Union européenne? Auront-ils encore droit à la sécurité sociale, à des aides publiques? Devront-ils rentrer dans leur pays d'origine?
Les Français sont, paraît-il, nombreux à souhaiter que pareil référendum soit organisé chez eux: 54 % le voudraient, selon un récent sondage (2), même si seuls 45 % d'entre eux (ce qui est énorme) se déclarent favorables au retrait de la France de l'Union européenne. Imaginons un instant l'inimaginable, que l'aventure européenne s'arrête et que chacun ferme ses frontières. Que se passerait-il? En serait-il fini de la libre circulation et installation des citoyens de l'U.E. dans les (ex) composantes de celles-ci? Les zones rurales françaises, déjà désertifiées, se transformeraient en cimetières. Un observateur (3) relevait récemment que les Britanniques les plus enclins à la sortie de l'Europe sont ceux qui ne voyagent pas, ne sortent pas de chez eux. Mais les habitants des campagnes françaises le voient: ces Britanniques, ces Néerlandais, ces Belges qui vivent chez eux, font leurs courses dans les commerces du coin, paient leurs impôts, génèrent, même indirectement, des emplois et des ressources et font vivre des villages et des hameaux délaissés.  Auprès de qui se plaindront-ils, ces habitants qui se retrouveront seuls et abandonnés? "Bruxelles" ne pourra plus être évoqué comme responsable de tous leurs malheurs.
L'Union européenne doit se réformer, sortir de la technocratie, se rapprocher des ses populations, mieux se vendre (puisqu'aucun organe politique n'échappe aujourd'hui à la loi de la communication), mais elle n'est pas la première responsable du désamour dont elle est victime. "Le vrai problème de l'Europe, c'est l'égoïsme des nations", estime Daniel Cohn-Bendit. Et, est-on tenté d'ajouter, celui de nombre de ses habitants à la mémoire aussi courte que leurs réflexions.

(1) http://www.franceinter.fr/emission-le-79-daniel-cohn-bendit-la-politique-de-merkel-sur-les-migrants-est-soutenue-par-75-des-al
(3)


1 commentaire:

gabrielle a dit…

L'Europe a en effet triste mine. Elle est même presque moribonde. Le club des boutiquiers, incapable de gérer la situation des réfugiés et piétinant les valeurs de solidarité inscrites dans ses chartes ou traités, ferme ses portes, érige des murs de barbelés et, comble, arrose un pays, champion de la démocratie, afin qu'il gère "la problématique". Très soucieux de réagir promptement quand il s'agit de capitaux, le club - "le syndicat des co-propriétaires "comme l'appelle Le Canard enchaîné - s'assied désormais sur ce qui relève des droits humains.